L'agriculture est reconnue comme un facteur majeur de
modification des milieux. Cette modification est d'autant plus marquée
que la mise en culture est encore récente (Kièma S., 2007).
L'exploitation des terres à des fins agricoles donne lieu, en effet,
à des défrichements qui occasionnent la destruction parfois
totale de la couverture végétale. Souvent ne sont
préservés que les arbres et herbes utiles comme Vitellaria
paradoxa Gaertn.f, Parkia biglobosa (Jacq.) Bent ou
Andropogon gayanus Kunth (Devineau & Fournier, 1998).
Dans leur stratégie de gestion de la fertilité
des terres cultivées, les communautés rurales des zones de savane
de l'Afrique soudanienne ont de tout temps intégré dans leurs
systèmes de production, la pratique de la jachère dans l'objectif
de permettre la reconstitution du potentiel perdu (éléments
minéraux du sol, végétation, etc.). Le système
courant d'utilisation des terres consiste en une phase de culture à
laquelle succède une phase d'abandon dès que le rendement du
travail devient faible (Fournier et al. 2001). La durée de la
jachère est variable et liée au niveau de la pression
foncière. En contexte de faible pression sur les terres, cette
durée peut atteindre 30 ans ou plus alors que dans les contrées
où la demande en terre se fait forte, certaines parcelles sont
exploitées de façon permanente sans phase de repos. La
jachère permet le retour à la savane originelle dans un temps
plus ou moins long (de 20 à 40 ans selon ces auteurs). Dans le texte
« Écologie d'une savane africaine » consacré à
la région de Bondukuy en zone soudanienne du Burkina Faso, Devineau
& Fournier (1998) permettent de comprendre les mécanismes de retour
vers le stade originel et notent que trois à quatre phases sont à
considérer entre l'abandon du champ et la pleine reconstitution.
- Dans les jeunes jachères de moins de six ans la
végétation uniforme est caractérisée, à un
an d'abandon, par des espèces herbacées adventices ou messicoles
comme Eragrostis tremula Hochst, Digitaria horizontalis
Willd, Pennisetum pedicellatum Trin et Dactyloctenium
aegyptium (L.) P. de B. Ensuite et surtout entre deux et cinq ans on
commence à observer l'installation des graminées vivaces de
transition comme Andropogon gayanus et Cymbopogon
schoenanthus (L.) Spreng alors que les premières espèces
messicoles régressent et sont remplacées par d'autres comme
Eragrostis turgida (Schum.) De Wild, Brachiaria ramosa (L.)
Stapf., etc.
- Dans les jachères d'âge moyen (de six à
vingt ans), les milieux sont plus diversifiés que les
précédents, avec une strate ligneuse plus importante en taille et
en recouvrement. Deux situations y sont observées : la jachère
présente soit des formations à Cymbopogon schoenanthus
aux endroits fortement pâturés sur sol pauvres soit des formations
à Andropogon gayanus ailleurs. Les jachères d'âge
moyen à Andropogon gayanus sont généralement les
plus répandues. Ces observations sont confirmées par Le Mire
Pêcheux et al. (2000) qui notent que, lorsque la durée de
jachère se situe entre dix et vingt ans, le milieu réunit alors
les conditions biologiques les plus favorables Andropogon gayanus.
- Les vieilles jachères (plus de vingt ans) sont de
plus en plus rares et représentent les savanes reconstituées ou
proches de l'être dans lesquelles les herbacées vivaces comme
Andropogon gayanus, Andropogon ascinodis C.B. Cl ou Schizachyrium
sanguineum (Retz.) Alst sont dominantes ou déjà bien
présentes. La végétation ligneuse, qui peut comprendre en
son sein l'espèce Isoberlinia doka Craib et Stapf, est
très développée et diversifiée. Le Mire
Pêcheux et al. (2000) font observer cependant qu'à ce
stade, l'espèce Andropogon gayanus est absente ou très
faiblement représentée, elle est éliminée sous
l'effet de la concurrence avec d'autres herbacées pérennes.