2.2. Les écosystèmes savaniens :
fonctionnement et perturbation
Les principaux déterminants des formations
végétales de savane sont le sol, la topographie et le climat
(Schnell, 1971 ; César, 1992). La diversité, la structure et le
fonctionnement des savanes sont affectés par la variation dans l'espace
et le temps de ces facteurs, auxquels s'ajoutent les effets de perturbations
comme le feu, la pâture animale, les prélèvements humains
et les défrichements agricoles (Bourlière & Hadley, 1983 ;
Cole, 1986 ; Scholes & Walker, 1993 ; César, 1994 ; Fournier et
al. 2001 ; Jentsch, 2001 ; Staver et al. 2009). Cependant,
lorsqu'un facteur intervient de façon régulière et
prévisible, comme la pâture animale (Gaucherand, 2005) ou les feux
de brousse (César, 1992), son statut de perturbation est discutable, il
peut être considéré comme faisant partie intégrante
du fonctionnement de l'écosystème, structurant alors les
communautés animales et végétales comme l'ont
théorisé Allen & Starr (1982). D'après ces auteurs, la
perturbation, lorsqu'elle est récurrente, finit par s'intégrer au
système qui, en retour, exerce sur lui un certain contrôle
permettant ainsi sa régulation et la stabilisation de l'ensemble. La
perturbation régulière s'incorpore ainsi au système et,
comme par exemple pour le feu en savane, devient nécessaire à son
fonctionnement (Fournier et al. 2001).
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Schnell (1971), White & Pickett (1985), White &
Jentsch (2001) ainsi que Turner et al. (2003), définissent les
perturbations, qui peuvent être d'origine naturelle ou
anthropogénique, comme étant généralement des
événements relativement discrets ou brusques qui modifient la
structure des écosystèmes, celle des communautés
végétales ou animales et modifient le stock des ressources, la
disponibilité de substrats et l'environnement physique. D'après
Huston (1994), ce sont des processus aléatoires pouvant se traduire par
une perte soudaine de la biomasse au sein d'une communauté sur un laps
de temps significativement plus court que celui nécessaire à
l'accumulation de cette biomasse. Cette perte de biomasse peut libérer
de l'espace et donc des ressources pour de nouveaux organismes (Roxburgh et
al. 2004).
Les effets des perturbations sont complexes et variables, ils
dépendent de l'état initial du milieu, mais aussi de leur
fréquence, de leur intensité, de l'échelle et de la
période (Frost et al. 1986). Les perturbations seraient «
régulatrices de diversité biologique à l'échelle du
court-temps et génératrices de cette même diversité
à l'échelle du long temps » (Blondel, 2003).
L'évolution des écosystèmes savaniens sous l'effet de ces
facteurs peut être progressive ou régressive (Boudet, 1978), elle
aboutit à un nouvel état d'équilibre à la suite
d'un remaniement du cortège floristique initial.
2.2.1. Les feux et leurs rôles dans le
fonctionnement des écosystèmes de savane
2.2.1.1. Importance socio- économique et types
de feux
Historiquement, le feu a toujours été le
compagnon de l'homme qui en faisait déjà usage (Bruzon, 1994 ;
Trabaud, 1995; Mazoyer & Roudart, 1998) initialement pour divers usages
comme la chasse, l'essartage et l'écobuage (Beani & Dessi, 1984 ;
Hoffmann, 1985 ; Bruzon, 1994 & 1995 ; Lavorel et al. 2007). Pour
beaucoup de peuples africains, en effet, le feu est un outil essentiel pour
chasser, éclaircir les paysages, contrôler les maladies et
détruire les résidus de culture (Frost et al. 1986 ;
Lecomte, 1995 ; Lavorel et al. 2007).
La classification des feux repose sur divers critères.
Ainsi, Hoffmann (1985), César (1992) et Bruzon (1994), se focalisant sur
les périodes de leur survenue, définissent des feux
précoces, des feux tardifs (ou de saison sèche ou encore de
contre-saison). Monnier (1981), s'intéressant à la localisation
spatiale du feu dans la végétation, distingue des feux de fauche
(les plus violents), des feux rampants, des feux d'humus et des feux de cime ou
de buissons. En se plaçant sous l'angle de la valorisation des milieux,
on peut distinguer à l'instar de Bruzon (1994), des «feux
pastoraux» et des «feux agricoles».
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