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Potentiel et dynamique des stocks de carbone des savanes soudaniennes et soudano- guinéennes du Sénégal

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par Cheikh Mbow
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Doctorat d'état en sciences 2009
  

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I.6. Potentiel de séquestration de carbone des forêts

Le potentiel de séquestration des forêts dépend en grande partie des efforts de conservation qui nécessitent des formes d'aménagement approprié permettant un renouvellement perpétuel des écosystèmes. Les principaux objectifs de l'aménagement forestier incluent généralement: la production de bois industriel, la production de bois de feu, la production de produits forestiers non ligneux, la protection des ressources naturelles (diversité biologique, eau et sol), l'aménagement de la faune sauvage, les loisirs, la remise en état des terres dégradées, etc. La séquestration et la conservation du carbone résultant de l'aménagement en vue des objectifs susmentionnés seront un avantage supplémentaire car il y aura une réduction de la concentration atmosphérique en CO2 et par conséquent une atténuation du changement climatique.

L'objectif de l'aménagement aux fins de conservation est avant tout d'éviter les émissions de carbone à travers la conservation des réservoirs de carbone existant dans les forêts par des méthodes comme la lutte contre le déboisement, la protection des forêts dans des réserves, la modification des systèmes d'exploitation et la lutte contre les autres perturbations comme les incendies et les ravageurs. La plus grande amélioration des pratiques de conservation du carbone sous les tropiques, pourrait provenir de la réduction du déboisement et de la dégradation des terres. On sait toutefois que ces pratiques sont surtout le résultat de l'expansion de la demande en terres de culture et de pâturage ainsi que d'exploitation de bois à des fins de subsistance et commerciales. Ces différents besoins sont de plus en plus pressants avec les pressions inhérentes à la croissance démographique, au développement socio-économique et aux forces politiques. Par conséquent, les programmes de conservation du carbone par le biais de la réduction du déboisement doivent s'accompagner de mesures qui accroissent la productivité et la durabilité agricoles tout en mettant appliquant des stratégies de réduction de la pauvreté.

Avec la mise en ~uvre des autres conventions des Nations Unies (sur la biodiversité et sur la désertification), il y a eu pendant ces deux dernières décennies un regain d'intéret pour la conservation des «zones protégées». La Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques compte sur une extension des réserves forestières, une multiplication des efforts d'aménagement, une limitation de la pression sur les formations forestières, et une utilisation plus efficace du bois (par exemple, en limitant les pertes après récolte lors de l'exploitation, augmentation de l'efficacité de la combustion), pour contribuer ainsi à fixer une part plus importante de leur carbone total.

Les approches consistant à créer des plantations sur des terres non boisées permettent de promouvoir la régénération naturelle ou assistée dans les forêts non protégées (forêts communautaires), en utilisant des techniques sylvicoles ou agroforestières. Il faut toutefois noter que la séquestration du carbone par l'aménagement forestier n'est qu'une solution temporaire. Il permet de produire de la biomasse pendant un temps limité au-delà duquel peu de carbone supplémentaire peut être accumulé. Ce processus peut prendre plusieurs dizaines d'années, selon l'âge des formations ciblées, la densité maximale de carbone qui peut être obtenue, le type de forêt et les espèces choisies.

Pour réduire le carbone atmosphérique, on peut aussi procéder à la substitution de certaines énergies non renouvelables par la biomasse forestière. Il s'agit d'accroître l'utilisation des forêts pour satisfaire les besoins combustibles, soit en créant de nouvelles forêts et des plantations, soit en augmentant la croissance et par conséquent la production potentielle de bois. Dans le cas des forêts plantées sur des terres non boisées pour la production de sources d'énergie comme le bois de feu, il est possible à la fois d'augmenter la quantité de carbone stocké au sol et, si le bois est brûlé comme combustible, de réduire les émissions de CO2 issu des combustibles fossiles.

Un total estimé à 700 millions d'hectares de terre pourrait être globalement disponibles pour les programmes de conservation et de séquestration du carbone (Brown, 2002). Cette étendue de terre permettrait de conserver et de piéger de 60 à 87 Pg C d'ici l'an 2050. A l'échelle mondiale, le boisement et l'agroforesterie représentent la moitié du total (38 Pg C), dont 20 % à peu près s'accumulent dans les sols, la litière des forêts et la biomasse souterraine (Brown, 2002). Le volume de carbone qui pourrait être conservé et piégé par ces pratiques forestières d'ici 2050 par rapport à la situation de référence est équivalent à environ 11 % à 15 % des émissions totales de combustible fossile pendant la même période.

Potentiellement, les tropiques peuvent conserver et piéger la quantité de carbone de loin la plus importante (80 %), puis viennent la zone tempérée (17 %) et la zone boréale (3 % seulement). Plus de la moitié du volume dans les tropiques proviendrait de la régénération naturelle et assistée, suivie par la protection et le `déboisement ralenti' ou évité. Le boisement et l'agroforesterie représenteraient moins de la moitié du volume sous les tropiques. Les taux annuels de conservation et de séquestration du carbone avec toutes ces pratiques augmenteraient avec le temps pour atteindre environ 2,2 Pg/an d'ici 2045 (figure 6a), l'accumulation étant plus forte dans la zone tropicale que boréale. Le potentiel de chaque option d'aménagement est montré aux figures 6a et 6b.

Article VI. A) Volumes de carbone conservés ou piégés en fonction des options

d'aménagement (Pg/an) ; B) Taux annuels moyens de conservation et de séquestration du carbone par région géographique (Pg/an) (Source : Brown, 1996)

A B

Les auteurs de ces estimations précisent que les scénarios ci-dessus reposent sur le calcul de ce qui est physiquement possible pour accroître le stockage et la séquestration du carbone; ces calculs ne prennent pas en compte la faisabilité sociale et économique de telles modifications de l'utilisation des terres et de l'aménagement des forêts. Ils ne tiennent pas compte non plus des effets des changements de l'accroissement de la concentration de CO2 et d'autres polluants atmosphériques, n'intègre pas la hausse des températures ni les modifications futures de l'utilisation des terres dues à l'accroissement démographique. Chaque option prometteuse d'aménagement forestier pour une atténuation des émissions de carbone serait différente selon l'évolution du climat et de l'atmosphère et les modifications de l'utilisation des terres. Ces options devraient tenir compte de la demande d'une population accrue pour plus de terre agricole et de bois ou de produits forestiers non ligneux.

Ces projections montrent que les forêts ont un réel potentiel dans le processus de séquestration de carbone à l'échelle globale. Il faut toutefois noter que ce potentiel varie significativement en fonction des zones géographiques considérées ou en fonction des activités d'aménagement envisagées. Il apparaît d'après ces estimations que l'agroforesterie et le boisement sont des options attractives pour les activités MDP foresterie. Au Sénégal, la pratique agroforestière est déjà largement répandue dans le bassin arachidier notamment avec une association de plus en plus pratiquée entre les cultures et des espèces comme Faidherbia albida et Cordyla pinnata. Quant au boisement, les activités de foresterie communautaire (bois de village), les plantations en régie, et la mise en ~uvre de la Grande

Muraille Verte, sont autant d'activités qu'il faudrait désormais comptabiliser parmi les initiatives de séquestration de carbone à l'échelle nationale.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld