La forêt du site offre des possibilités
d'exploitation variées qui sont loin d'être marginales. Ces
activités sont la chasse, la cueillette et la pêche.
1.4.3.2.1. La chasse
Les animaux de la forêt constituent non seulement une
source de nourriture mais aussi une source de revenus. Les produits de la
chasse constituent la première source de protéine, la viande de
boeuf issue de l'élevage ne parvenant dans les ménages ici que de
façon très irrégulière du fait du niveau des prix
pratiqués sur le marché et du faible pouvoir d'achat des
populations. Les produits de la chasse qui jadis étaient destinés
à la subsistance des ménages, sont désormais
orientés vers les marchés, spécialement lorsque les prises
sont considérées comme des espèces rares ou nobles
(chimpanzé, vipère, porc-épic...)
Les chasseurs utilisent généralement deux
techniques : le piégeage et le fusil. Les pièges répandus
sont ceux qui consistent en la pose de câbles d'acier munis d'un noeud
coulant sur les pistes de parcours des animaux. Ils sont plus efficaces en
saison de pluies. Les animaux, en évitant la rosée, empruntent
des pistes balisées et sont souvent facilement pris aux pièges
que les chasseurs posent sur des itinéraires presque connus à
l'avance. Les pièges sont aussi posés près des champs
vivriers et visent les petits rongeurs et autres animaux fruigivores comme les
singes.
La chasse au fusil est réservée à
quelques privilégiés qui possèdent une arme ou sont en
mesure de la louer. Les chasseurs l'utilisent quasiment sans autorisation. La
chasse est nocturne et à l'occasion, les chasseurs munis de lampes
torches à lumière vive, éblouissent les animaux surpris
avant de les abattre. La cible ici c'est les grands mammifères.
Certaines espèces interdites de chasse comme le chimpanzé tombent
régulièrement sous les feux des chasseurs. Ils entrent alors dans
un circuit de transport et de distribution au noir et sont acheminés
dans la plus grande discrétion, généralement à la
faveur de la nuit, vers des acheteurs initiés, tenanciers de restaurant
dans la ville de Mbalmayo.
1.4.3.2.2. La cueillette et le ramassage
La cueillette ou ramassage concerne aussi les produits de la
forêt. Elle est fondée sur la grande connaissance que les
populations ont de leur milieu, sur la maîtrise des usages des produits
forestiers. Cette activité à l'origine est destinée
à la satisfaction des besoins des populations des zones de forêt.
Aujourd'hui, la cueillette est une activité beaucoup plus extractiviste
c'est-à-dire une activité fondée sur l'exploitation des
produits forestiers généralement non ligneux à des fins
commerciales. La cueillette est orientée vers le ramassage du bois de
chauffe, le prélèvement des écorces et de certaines
plantes médicinales. Il faut aussi noter la place primordiale de
certaines plantes de la famille des Marantacées. C'est par exemple le
cas des Maranthochloa spp. Ces plantes ont des feuilles qui sont
largement utilisées dans toute la zone forestière du Cameroun
comme « papier » d'emballage. Elles permettent d'emballer les
pâtes de manioc lors de la cuisson des « batons » de manioc,
elles sont utilisées dans la cuisson des mets, dans la vente des
beignets, du gibier... Elles remplacent les sachets plastiques qui
représentent l'une des principales sources de pollution dans les
villes13.
Les noisettes, criquets et fruits sauvages comme ceux
d'Irvingia gabunenis ou mangue sauvage ne sont pas en reste.
Ils sont très juteux et leur graine est un ingrédient
important dans la cuisson d'une sauce très appréciée.
Gnetum africanum (Okok) est utilisé comme légume dans
une sauce très consommée au sud Cameroun. Cette espèce est
une liane que l'on rencontre dans les jachères et les forêts
secondaires jeunes où elle se ramifie abondamment. Son exploitation
désormais très intense pour le marché national et
même international en fait une denrée très
recherchée.
Si certains produits collectés en forêt sont
utilisés comme compléments dans l'alimentation ou comme
médicaments, d'autres servent de support à l'activité
économique. Les rotins sont par exemple coupés en forêt
pour être vendus à Yaoundé clandestinement (ce sont des
produits forestiers non ligneux dont l'exploitation est interdite par les
agents de contrôle des eaux et forêts).
13 Zapfack Louis, Ngobo Nkongo Martine,
Inventaire participatif des produits forestiers non ligneux et ligneux de
la region de Djoum: Sud du cameroun, RAPPORT DE
IR1/CARPE, PP 42-43.
La cueillette du vin de palme a une double fonction sociale
et économique. Le vin, extrait le matin et le soir est consommé
sur le lieu d'extraction ou au village le plus souvent entre hommes. A cette
occasion, des discussions et causeries nourries apparaissent comme des
passe-temps et des distractions avant ou après les travaux quotidiens.
Mais le vin de palme est de plus en plus cueilli pour être par la suite
fermenté au sucre et distillé de façon traditionnelle pour
obtenir un alcool dur très prisé qui est pour l'essentiel vendu
soit en détail, soit au litre.
1.4.3.2.3. La pêche
artisanale
La pêche est une activité complémentaire
de la chasse, de la cueillette et de l'agriculture. C'est une activité
relativement marginale qui est pratiquée de temps à autre dans
les nombreuses rivières tributaires du Nyong (photo 2). La pêche
dans ces rivières est faite à la nasse, au filet et au barrage
spécialement au coeur de la saison sèche. La baisse du niveau des
eaux limite les efforts à fournir pour la vidange à l'occasion de
la pêche au barrage. Les produits halieutiques servent prioritairement
à la consommation. Ils constituent la deuxième source de
protéine après la viande de brousse.
Photo Youta Happi, novembre 2009
1.4.3.2.4 L'exploitation du bois d'oeuvre et de
chauffage
A côté de ces activités de subsistance et
génératrices de revenus, il faut noter une autre qui est purement
spéculative: l'expérience de la gestion d'une forêt
communautaire. En effet, Faekelé et quatre autres villages voisins ont
initié depuis 1996 une expérience de gestion d'une forêt
communautaire de 5 000 ha, la forêt de COVIMOF (Communauté
Villageoise de Melombo, Okekat et Faekelé).
De cette façon, ces populations pensent pouvoir
satisfaire leurs besoins essentiels en matière d'adduction d'eau
potable, d'accès à l'électricité,
d'éducation... Cette exploitation connaît à l'heure
actuelle de nombreuses pesanteurs qui font qu'elle ne remplit pas encore les
attentes des populations. Les difficultés renvoient par exemple au
manque d'expertise en matière d'exploitation forestière de la
part des populations de cette communauté. C'est la raison pour laquelle
les gestionnaires de cette forêt ont par deux fois fait appel à
des exploitants de métier dans le cadre de contrats de partenariat
d'abord avec les établissements de Transformation du bois camerounais
(Ets TBC), puis avec la structure Akoa Nicolas et Abega Jean Baptiste. Ceuxci
se sont toujours achevés aux dépens de la communauté qui
était souvent écartée des activités d'abattage, de
sciage et de transport et par conséquent ne pouvait maîtriser les
retombées de l'exploitation ainsi que la quote-part à attendre
des exploitants14.
Depuis 2005, la COVIMOF se charge elle-même des
activités d'exploitation forestière de façon à
devenir autonome. Des formations aux techniques d'inventaire et de gestion,
à l'abattage et au sciage ont été organisées avec
l'aide du CED (Centre pour l'Environnement et le Développement). La
collaboration s'est aussi étendue à la fourniture du
matériel de production, à l'appui à la production et
à la commercialisation à travers la recherche des marchés
porteurs.
14 Révélations du Chef de
Faekelé II
Photo Kemadjou, août 2009
Photo 3 : Traces d'une ancienne piste de
débardage dans la parcelle exploitée
Photo Kemadjou, août 2009
Conclusion
Dans ce chapitre, nous nous sommes attaché à
l'identification des caractéristiques écologiques du milieu
c'est-à-dire le relief, le climat, les sols, l'hydrographie et les
activités humaines. Ainsi on retient que l'environnement du village
Faekelé partage les caractéristiques essentielles de tous les
autres villages du sud-Cameroun forestier. La proximité de ce village
avec Mbalmayo, haut lieu d'exploitation et de transformation de bois, l'aura
desservi du fait du passage régulier des exploitants forestiers qui y
ont intensément prélevé des essences conduisant à
une certaine évolution de sa couverture forestière (photos 3 et
4).