3.2.2.1 Conséquences psychologiques
Tout d'abord, le fait de prendre conscience qu'on a eu une
amputation d'un membre créé un choc psychologique pour un
patient, car cela a une connotation de gravité : « Il n'y avait
pas
eu d'autres solutions. ». La personne peut s'en
retrouvée bouleversée et ne pas bien réaliser au
début et cela peut prendre quelques jours avant de bien comprendre sa
situation. Dans cette partie nous allons cibler les conséquences
psychologiques observées auprès des patients amputés d'un
membre inférieur faisant objet de notre recherche.
a) Choc émotionnel
L'existence d'un choc psychologique en post opératoire
direct est très dominante au cas où le patient sort en
anesthésie et aperçoit son moignon d'amputation pour la
première fois. Il l est plus grave si le patient n'a pas
été mis au courant de se qui va se passer bien avant
l'opération où si celui-ci a été
opéré de façon urgente avant qu'il n'intègre dans
sa conscience les pertes qu'il va subir. Cela a pour conséquence
également le stress et l'anxiété. SMELTZER S. et BARE B.
(1998 : 2074) expliquent que « le fait de perdre un membre
représente toujours un choc pour le patient et sa famille même si
ceux-ci ont reçu une préparation psychologique avant
l'opération » Le fait de perdre son membre représente
un choc pour le patient parce que ce membre était un objet
préalablement investi, qui avait une valeur énorme pour son
estime de soi et son identité sociale. Dans ce cas pour rétablir
son équilibre psychologique, le patient doit passer par le processus de
deuil de son membre. Quant au choc pour sa famille, le fait d'être
amputé un membre est un élément nouveau dans la famille
à cela s'ajoute le rôle que l'amputé assumait dans la
structure familiale. De ce fait, la famille croit qu'elle ne va plus compte sur
le patient amputé au contraire le patient devient un fardeau pour la
famille.
Voici les propos de l'un des patients préparés et
ceux d'un patient non préparé.
« C » fut préparé avant l'amputation
de son membre inférieur et dit que « nkimara kuva mu kinya,
narebye akaguru baciye numva sinsi ukuntu merewe,nti ubu mbaye uwande, ariko
numva ko ariko byari kugenda nkuko nari nabibwiwe mbere n'abaganga batarambaga.
Ce qui signifie que : en se réveillant de
l'anesthésie, j'ai regardé le membre inférieur
amputé et je me suis senti je ne sais comment, je me suis dit, à
qui j'appartiendrai ? Mais je me suis dit que ca devrait être ainsi comme
j'étais prévenu par les soignants avant l'opération. Bien
que ce patient a eu le choc en post opératoire, ça n'était
pas de grande intensité parce qu'il avait déjà
anticipé ce qui allait se passer.
« A» cas non préparé avant
l'intervention dit que « rwose nkimara kubona ko banciriye akaguru
numvaga ibyange birangiye, nta mizero y'ejo hazaza,numvaga ntazi iyo ndi,
ubwege butakiri aha hafi, nti ibyange birarangiye. Ibyiringiro mbisigarana gusa
mu Mana mvuga nti nzajya mu ijuru. » Cela signifie : donc
après avoir remarqué que l'on a amputé ma jambe, je
pensais que c'est fini pour moi, sans espoir de demain, je ne pouvais pas me
localiser dans l'espace, la conscience est éloigné, et je me suis
dit que c'est ma fin. Mon dernier espoir était Dieu, et je me disais que
j'irai au ciel. Un état de choc psychologique est intense pour ce cas
pas. L'analyse de ses propos montre qu'il n'avait même pas l'espoir de
vivre malgré l'amputation qui vient d'être réalisée.
Le seul destin qui restait pour lui était la mort. Son équilibre
psychologue est agité. Cela est plus intense quand le patient n'a pas pu
être préparé au changement à venir comme suite
d'amputation d'un membre inférieur.
En comparant ces deux cas « C » et « A »
on remarque que « C » avait une information claire à propos de
ce qui allait survenir en post opératoire, ce qui a diminué son
stress ; ce qui est contraire pour le cas « A »
b) PHIe14211MMIP I142I1sM.
Même si l'intervention chirurgicale aboutissant à
une amputation d'un membre inférieur vise à réconforter le
patient en atténuant les manifestations négatives de la maladie
en cause, cela ne suffit pas. En effet elle crée un nouvel état
qui nécessite une adaptation pour le patient comme l'expliquent SMELTZER
S. et BARE B. (1998 : 2071), « on peut considérer l'amputation
comme une opération qui vise à améliorer la qualité
de vie du patient On y a recours pour soulager les symptômes et favoriser
la capacité fonctionnelle~..........une amputation exige une adaptation
majeure, en effet, le patient devra accepter l'altération permanente de
son image corporelle, tout en gardant un niveau d'estime de soi satisfaisant
»
Les trois patients amputés sans préparations
préopératoire avec qui nous nous sommes entretenus
témoignent qu'aprés l'amputation de leur membre ils ont
éprouvé les sentiments d'inutilité à l'égard
du monde extérieur, voici des propos de «A» « nyine
kubera ko nababaraga, numvaga nta byiringiro mfite byo kubaho.
Ninabaho se bwo nzaba nimariye
iki ? cyane kumugara uri muto ni ibyago igihumbi birutwa no
gupfa bakaguhamba. » ce qui
signifie que : parce que je sentais de la douleur, je n'avais
aucun espoir de vivre. Même si je survis, que vais-je faire ? être
infirme en bas age c'est mille fatalités, mieux vaut mourir et
être enterré. En analysant les propos de « A » nous
pouvons dire qu'elle était dans une situation de perturbation de
l'estime de soi où son image positive qu'elle avait en elle-même
n'existe plus, au contraire elle éprouve des sentiments négatifs
face à elle-même. Tous ceux-ci en raison des circonstances
difficiles qu'elle vient d'expérimenter : amputation de son membre
inférieur (la perte).
c) Mauvaise perception de son image
corporelle.
L'image corporelle est affinée d'un individu à
l'autre c'est pour cela que les patients amputés d'un membre
inférieur réagirons différemment selon leur situation
à propos du changement corporel qu'ils ont subi aprés
l'opération comme l'explique WASNER, en 1982, cité par SALTER M.
(1996 :18) « les réactions des adultes face à des
opérations mutilantes sont liés au degré de
développement de leur image corporelle, mais certains facteurs
provoquent des réactions différentes : âge, sexe,
personnalité, cause du changement, valeurs, attentes, origine
socioculturelle, niveau de préparation au changement, relation avec
l'équipe soignante~ »
Les témoignages de trois patients sur cinq nous donnent
le profil, en voici les propos de « B» « maze kuzanzamuka
ibibazo byambanye byinshi nibaza icyo nsigaye maze ndakibura, nti ubu mbaye
ikimuga birarangiye » cela signifie que : En se réveillant, je
suis envahi par une multitude de questions, je me demandais quelle était
ma valeur ; je la manquais, et je me suis dit que je suis infirme c'est
fini.
Dans leur propos, les patients amputés d'un membre
inférieur manifestent un sentiment d'étrangéité et
d'inutilité dans leur corps. Ils se sentent incapable de faire quelque
chose. Cependant, Nous axons notre partie sur l'altération de l'image
corporelle, car c'est cette difficulté que verbalisent le plus souvent
les personnes qui viennent d'être amputées.
Le patient amputé d'un membre inférieur subi des
modifications considérables de son image corporelle ce qui l'affecte
dans son mode vie.
d) Le stress
En période post opératoire, le patient
amputé d'un membre inférieur est confronté à une
situation particuliére qui lui exige de ressembler toutes ses forces
pour s'adapter. Selye cité par DELAY J. et PICHOT P. (1990 :290) a
dénommé stress « un état de tension aigu de
l'organisme obligé de mobiliser ses défenses pour faire face
à une situation menaçante »
Lors de nos rencontres avec des patients amputés d'un
membre inférieur et en parlant avec eux des premiers jours qui ont suivi
l'amputation, ils nous ont témoigné d'une sensation anormale,
sous forme de serrement dans la poitrine accompagné de palpitation
cardiaque à l'approche des soins et au moment où ils devraient
faire des petits exercices. Nous avons constaté que le stress
était présent lors des situations bien particulières, et
non permanentes : lors des premiers changements des pansements avec la
constatation de son nouveau corps (moignon) et au moment où ils
essayaient de marcher et tombant par terre faute de maitrise de la marche
aprés l'amputation. Il est à mentionner ces moments de crises de
stress et la présence d'un fond d'anxiété.
e) / ipa iPli
BESANÇON G. (1993 :39) dit que « les
pensées de l'anxieux sont généralement orientées
vers l'avenir. Il craint facilement pour lui-même ou pour ses proches
L'activité cognitive et intellectuelle est consacrée à
forger des scénarii catastrophiques dont les thèmes sont des
échecs (professionnels, ou affectifsw)».
Lors de notre enquête, les patients nous ont fait part
de leurs expériences personnelles. Trois sur cinq enquêtés
(non préparés) nous ont parlé d'un état
d'anxiété en période post opératoire directe,
mélangé à l'apparition de situations de stress lors de
circonstance particulières. Cette anxiété nous a
été décrite comme une attention permanente sur le moignon
d'amputation, voici les propos de « D » « nibazaga uko ngiye
kuzabaho, ubu se nzafashwa nande ko ntacyo mbashije gukora. Igihe kinini
nakimaraga ndeba kwa kuguru baciye, ndeba buri kanya ko igipfuko gifasheho neza
» pour dire que : je me demandais comment je vais vivre, qui
va m'aider, je ne puis faire quelque chose. Je passais beaucoup de temps en
regardant ce membre amputé, vérifiant sans cesse si le pansement
était bien accroché.
Nous avons observé donc un fond d'anxiété
plus ou moins permanente pour une partie des patients récemment
amputés, ceux non préparés dans la période
préopératoire et non accompagnés. Leur état anxieux
est dominé par des pensées en rapport avec leur avenir et une
profonde douleur de la perte de leur membre.
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