2. LES PRINCIPES FONDATEURS DES INSTITUTIONS
DEMOCRATIQUES
La democratie se caracterise par un certain nombre de
principes fondateurs qui rendent harmonieux le fonctionnement des institutions
et qui rapprochent au mieux les gouvernants des gouvernes. Parmi ces principes,
nous retenons essentiellement trois. Il s'agit de la souverainete du peuple, du
suffrage universel et de la separation des pouvoirs.
2.1 De la souverainete du peuple
La democratie selon Spinoza est "l'union de tous les hommes
qui detiennent collegialement, comme un tout organise, un droit souverain sur
tout ce qui est effectivement en leur pouvoir"2 8. Il apparait ainsi
que la democratie trouve son essence dans la reconnaissance prealable de la
souverainete comme pouvoir absolu du peuple et seule source de la legitimite du
pouvoir. La souverainete est "invisible et inalienable" affirme Rousseau en
tant qu'elle est l'exercice de la volonte generale et cette volonte generale
est celle du peuple.
La souverainete ne demeure pas seulement un concept, car comme
pouvoir absolu, le peuple l'exerce effectivement par le biais des consultations
electorales et referendaires notamment. La democratie athenienne bien
qu'elitiste et discriminatoire en ecartant les femmes, les metèques et
les esclaves, n'en est pas moins une reference historique en ce qui concerne
l'exercice reel de la souverainete par le peuple lui-meme. En effet, la
souverainete dans la democratie athenienne fut devolue a une assemblee ou
ecclesia qui comprenait tous les citoyens libres sans distinction de richesse,
d'honneur et de profession.
2 8 Spinoza, Traite de l'autorite politique,
Gallimard 197 8, p 36.
Les citoyens libres dans la Grece antique étaient
ceux-la qui ne faisaient pas du travail manuel, qui ne dépendaient pas
socialement et statutairement d'autres personnes. Cette assemblée
souveraine lors de ses assises (au moins quarante fois par an) présidait
a l'installation de tous les organes politiques, administratifs et juridiques
nécessaires a la gestion de la cité.
Dans l'esprit des athéniens, la souveraineté
comme pouvoir absolu ne saurait être confiée a un seul homme, ni a
un groupe particulier d'individus, mais a une multitude de personnes avec une
multitude de mains, une multitude de pieds, avec beaucoup d'organes et
présentant de nombreuses qualités morales et intellectuelles.
A la différence de la démocratie
athénienne, la démocratie moderne se présente comme une
sorte d'exercice par procuration de la souveraineté, en ce sens que le
peuple confere ses pouvoirs a un parlement. Celui-ci au nom du peuple qui l'a
mandaté, légifere et controle l'action gouvernementale.
Cependant, cette délégation de la souveraineté ne signifie
ni l'aliénation de celle-ci, ni la subordination du peuple au pouvoir
politique, car la souveraineté appartient au peuple.
A ce titre, tout doit partir de lui, et tout doit lui revenir,
car les institutions et les hommes qui les animent sont des serviteurs. Tout
régime politique est passager, mais le peuple dans sa puissance
souveraine est perpétuel. Comme tel, il peut être
considéré comme une autorité morale, car les gouvernants
sont tenus de prendre en compte ses opinions, ses jugements, ses attentes au
risque de subir sa sanction. Le peuple n'est pas cette masse anonyme
d'individus, mais il est une conscience, celle contenant les buts et les
intérêts de tous les citoyens. C'est donc, en tant que conscience
unifiée de l'ensemble du corps social, que le peuple exerce sa
souveraineté et exprime sa volonté par le biais du suffrage
universel.
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