§ La gestion curative du risque crédit commence
à partir du premier jour où une échéance du
crédit a été impayée, et/ou l'engagement pris par
un client non respecté (régularisation de découvert par
exemple). Les banques du secteur commencent à surveiller ces
crédits impayés de prêt et à prendre des
dispositions pour anticiper un recouvrement difficile. La durée du
déclenchement des procédures de recouvrement dépend de la
banque. Pour certaines, 3 mois après la première
échéance impayée, le dossier est confié au service
recouvrement qui, avec l'aide du département juridique et de la
Commission Nationale de Recouvrement, entame les procédures pour un
règlement à l'amiable ou judiciaire.
CHAPITRE TROISIEMECadre
empirique de l'étude
Dans ce chapitre, les résultats des différents
tests et études économétriques sont
présentés, analysés et discutés.
Section 1 :
Présentation et analyse des résultats
1.1 Présentation et
analyse des statistiques descriptives
Le tableau n°4 présente les statistiques
descriptives des variables de l'étude. Le ratio du risque de
crédit 1 (riscr1) est de 91%. Ce pourcentage
indique, toutes choses étant égales par ailleurs, que les banques
togolaises transforment plus de 91%, sur la période de 1996 à
2007, des dépôts de la clientèle en des crédits
à la clientèle. Ce fort coefficient de transformation des
dépôts confirme l'important rôle d'intermédiation
financière joué par les banques togolaises à l'instar de
toutes les autres banques de l'UEMOA (Igué, 2008).
Le deuxième ratio du risque de crédit
(riscr2) est de 61%. Ce deuxième pourcentage
montre que les crédits octroyés à la clientèle
représentent 61% des actifs bancaires du Togo.
La taille du conseil d'administration des banques togolaises
est environ de sept (7) membres. Cet effectif moyen est conforme aux
prédictions théoriques de Jensen (1993) qui préconise un
conseil d'administration composé de sept ou huit membres au plus
afin d'assurer l'efficacité du conseil. En effet selon Jensen (1993), un
conseil d'administration composé de plusieurs membres est
généralement source de conflits et de domination de dirigeants.
Il en résulte des difficultés pour aboutir à des
décisions consensuelles ce qui favorise les prises de risques excessives
par le dirigeant. De même, selon Lipton et Lorsch (1992), la taille
appropriée du conseil d'administration ne doit pas dépasser 8 ou
9 membres, pour que les administrateurs soient capables de contrôler la
direction efficacement et ainsi réduire la discrétion
managériale. De plus, Blanchard et Dionne (2004) ont
démontré empiriquement que plus le nombre des administrateurs
augmentent, plus l'utilisation des instruments améliorés pour la
couverture de risques bancaires augmentent, ce qui justifie la prise de risque
excessive par la manager.
Le pourcentage des administrateurs institutionnels
siégeant au conseil d'administration des banques togolaises tourne en
moyenne autour de 34% or ces derniers sont qualifiés par Jensen (1993)
comme des administrateurs possédant une grande expertise dans la gestion
des risques bancaires ce qui pourrait inciter les dirigeants à faire une
meilleure sélection des projets d'investissement. Ce pourcentage est
révélateur de la dépendance du secteur bancaire togolais
vis-à-vis des bailleurs de fonds bilatéraux et
multilatéraux comme le FMI, la Banque Mondiale et la BOAD.
Le pourcentage des administrateurs étrangers est en
moyenne de 19%. Ce pourcentage relativement bas peut s'expliquer par le fait
que l'Etat demeure actionnaire majoritaire de certaines banques togolaises en
dépit des vagues de privatisation à la faveur des réformes
financières. Ce constat est appuyé par le pourcentage des
administrateurs représentant l'Etat et les établissements publics
qui représentent, à eux deux, plus du double du
précédent (41%).
Tableau n° 4: Analyse des
statistiques descriptives des variables
Variable | Obs Mean Std. Dev. Min
Max
-------------+--------------------------------------------------------
riscr1 | 60 .9119199 .3521465 .3488854
1.856353
riscr2 | 60 .6125846 .1524224 .2717985
.8652195
tailca | 60 7.4 1.993209 4
11
adinst | 60 .3422697 .242447 0
.875
adetr | 60 .1933748 .1961442 0
.6
-------------+--------------------------------------------------------
adetat | 60 .3138438 .2291255 0
.75
adetp | 60 .1092021 .1526177 0
.5
dual | 60 .0666667 .2515489 0
1
cap | 60 .0932755 .1129694 -.2636113
.3240028
taille | 60 10.86249 .3876808 9.994699
11.62354
-------------+--------------------------------------------------------
age | 60 25.3 10.38627 8
42
Globalement on note une nette disparité des valeurs
moyennes des variables de notre étude et de leur écart-type. Ces
deux grandeurs (moyenne et écart-type) semblent indiquées que la
structure de l'échantillon de l'étude n'est pas homogène
et que des tests de spécification complémentaires sont
indispensables afin de choisir l'estimateur approprié. C'est pourquoi
avant toute estimation économétrique, nous avons effectué
le test de Fisher qui confirme que la structure de notre panel n'est pas
parfaitement homogène. Par conséquent notre modèle est
soit à effet individuels fixes, soit à effet individuels
aléatoires. Ce constat nous a conduit à procéder au test
de spécification de Hausman (1978) qui indique que le modèle qui
s'adapte à l'échantillon de panel de banques de notre
étude est à effet fixe. Les résultats de ce test sont
joints en annexe N°2 tandis que la matrice de corrélation entre les
variables est jointe en annexe n°4. Nous pouvons donc appliquer la
méthode des moindres carrés ordinaires pour l'estimation des
différents modèles économétriques dont les
résultats sont présentés et analysés dans les
paragraphes suivants.
1.2 Présentation
et analyse des résultats de l'estimation économétrique du
risque de crédit 1 en fonction des variables caractéristiques du
conseil d'administration.
Les résultats de cette estimation sont
présentés dans le tableau ci-dessous.
Tableau n° 5 : Présentation des
résultats de l'estimation du risque de crédit 1
|
Variables dépendantes : risque de
crédit 1 (modèle 1)
|
Variables indépendantes
|
Signes attendus
|
Résultats des estimations
|
TAILCA
|
-
|
-.0512*
(-1.76)
|
ADINST
|
-
|
-1.279***
(-2.93)
|
ADETR
|
-
|
-1.100**
(-2.36)
|
ADETAT
|
+
|
-1.289***
(-2.95)
|
ADETP
|
+
|
-.5749
(-1.27)
|
DUAL
|
+
|
.0208
(0.15)
|
CAP
|
-
|
1.569***
(4.18)
|
TAILLE
|
-
|
-.5590***
(-5.17)
|
AGE
|
-
|
.0078
(1.55)
|
constance
|
|
8.136***
(5.45)
|
Observations
|
|
60
|
Prob > chi2
|
|
0.0000
|
Source : estimations de
l'auteur avec logiciel STATA 9.0
Les astérisques indiquent une
significativité au seuil de (1%)***, (5%)**, et (10%)*. Les statistiques
(z) sont présentées entre parenthèses.
La probabilité associée au modèle
(0.0000) montre que ce dernier est globalement significatif. Il convient
d'analyser le signe et la significativité des coefficients de chaque
variable indépendante.
§ Les résultats des estimations montrent que la
taille du conseil d'administration a un impact négatif et significatif
sur le risque de crédit dans le secteur bancaire togolais. Ce
résultat est contraire aux prédictions théoriques de
Jensen (1993) qui stipulent qu'un conseil d'administration opérant avec
un nombre réduit d'administrateurs produit un mécanisme de
contrôle plus efficace. Ainsi, plus la taille du conseil d'administration
des banques du Togo est élevée plus le risque de crédit
bancaire baisse.
§ Le pourcentage d'administrateurs institutionnels est
négativement et très significativement corrélé au
risque de crédit bancaire conformément à notre attente au
niveau des banques de notre étude. Ce résultat corrobore celui
issu des travaux de Jensen (1993) selon lequel les administrateurs
institutionnels sont pourvus d'une expertise considérable dans la
maîtrise du risque de crédit bancaire. Leur présence
effective dans le conseil d'administration améliore la performance de ce
dernier dans la gestion des risques de crédit bancaire. En effet, leur
expertise permet des études plus approfondies des dossiers de
financement des projets d'investissements afin d'orienter les dirigeants vers
ceux qui sont les mieux rentables permettant ainsi une amélioration de
la rentabilité des activités bancaires à travers la
maîtrise du risque bancaire. Cette catégorie d'administrateurs
possèdent aussi des capacités techniques et financières de
recherche et d'analyse des informations officielles ou non recueillies sur les
destinateurs des fonds dans le cadre de l'étude des dossiers de
crédit. Ceci leur permet donc de réduire les risques liés
à l'asymétrie de l'information mais aussi les coûts de
l'agence à travers une économie d'échelle provenant du
nombre d'années d'expérience et de la capacité
financière de l'institution qu'ils représentent. Cette
corrélation significativement négative entre le pourcentage des
administrateurs institutionnels et le risque de crédit dans le secteur
bancaire togolais, prouve que plus leur nombre est élevé plus le
risque de crédit diminue permettant ainsi aux banques d'avoir des
portefeuilles de crédits sains dans un secteur bancaire moins
risqué globalement, toutes choses étant égales par
ailleurs.
§ Il en est de même pour le pourcentage du nombre
d'administrateurs étrangers au sein du conseil d'administration des
banques togolaises qui ont un impact négatif significatif sur le risque
de crédit bancaire. A la faveur des réformes financières
du secteur bancaire, les banques étrangères sont rentrées
dans le capital de celles domestiques plaçant ainsi leurs
représentants au sein des conseils d'administration. Ces
représentants ont également des expertises nécessaires
dans le cadre de leur rôle au sein du conseil d'administration. De plus
dans les pays en voie de développement, les banques
étrangères provenant des pays développés et
présentes dans le capital des banques domestiques permettent à
ces dernières d'avoir accès à des technologies nouvelles
surtout en matière de traitement de l'information. Elles facilitent
également l'accès des capitaux pouvant permettre aux banques
locales d'améliorer les ratios prudentiels et d'avoir les
réserves nécessaires à l'absorption des risques de
crédit bancaire. De nouvelles politiques et procédures de
gestion de risque de crédit sont ainsi mises à la disposition de
la filiale locale afin d'améliorer la maîtrise des risques de
crédit. Enfin, il y a l'image de marque de qualité que
véhicule l'entrée d'un administrateur étranger dans le
conseil d'administration d'une banque comme le prouve l'étude de
Oxelheim et Randoy (2003) réalisée sur plus de 200 firmes dont
les sièges sont en Suède et en Norvège et qui
décrit l'impact des administrateurs étrangers sur la performance
des firmes. Ces phénomènes sont également présents
au Togo et ont été perceptibles lorsque la Banque Populaire a
pris la gestion de la Caisse d'Epargne du Togo. Ceci a donné une image
de marque à la nouvelle banque. Nos résultats suggèrent
donc que plus le nombre d'administrateurs étrangers est
élevé plus le risque de crédit baisse dans le secteur
bancaire togolais bien que leur nombre semble croître timidement. Mais
avec la présence de nouvelles banques étrangères (BOA,
Diamond Bank) qui s'apprêtent à rentrer dans le paysage bancaire
togolais, la nature de la concurrence va être modifiée
forçant les banques à revoir les stratégies pour conserver
et chercher à accroître leur part de marché. Le rôle
du CA sera donc encore plus important.
§ Contrairement à notre hypothèse, le
pourcentage d'administrateurs représentant l'Etat au conseil
d'administration a un impact très significativement négatif sur
le risque de crédit bancaire pour les banques de notre
échantillon. Ce résultat serait dû à la prise de
conscience de la part de l'Etat suite aux recommandations des bailleurs de
fonds internationaux relatives à la nécessité de
désengagement de l'Etat de l'actionnariat des banques publiques. En
effet, au début de la réforme financière, l'Etat togolais
est resté un peu réticent et continue d'être présent
dans ces banques mais se voit obliger d'être beaucoup plus regardant sur
la façon dont ces dernières sont gérées. Au final
l'Etat s'apprête à privatiser ces banques et a donc changé
de stratégie de gestion afin de remonter la valeur de ces
dernières et d'éviter ainsi de les liquider sans oublier les
coûts sociaux et économiques que cela pourrait engendrer. Pour
cette raison et au vu du résultat de l'estimation, on constate que plus
le pourcentage des représentants de l'Etat est élevé plus
le risque de crédit bancaire diminue significativement sur la
période de notre étude. Bien entendu, il existe une autre
interprétation de ce résultat. En effet, les bailleurs de fonds
internationaux conditionnent désormais leurs aides au respect des
principes de bonne gestion de la part de l'Etat. Il se pourrait donc que cette
exigence favorise l'amélioration des interventions des administrateurs
représentant l'Etat dans les banques où ce dernier demeure dans
l'actionnariat. Ce résultat est conforme à celui obtenu
précédemment par Dannon (2009) sur un échantillon de
cinquante banques de la zone UEMOA.
§ Par ailleurs, la capitalisation bancaire a un impact
positif et très significatif sur le risque de crédit des banques
togolaises. Ce résultat est contraire à nos prédictions
théoriques. Toutefois, il met l'accent sur l'efficacité de la
réglementation du capital mise en oeuvre dans la zone UEMOA par la BCEAO
(2007). Ce résultat supporte les conclusions d'autres études
antérieures qui indiquent que les banques qui ont un ratio de
capitalisation plus important présentent un risque plus fort (Camara,
2006 ; Besanko et Kanatas, 1996). En revanche, ce résultat ne corrobore
pas celui obtenu récemment sur le secteur bancaire tunisien qui
révèle que plus les fonds propres augmentent, plus le risque
bancaire diminue (Mamoghli et Dhouibi, 2009).
§ En revanche et conformément à nos
attentes, la taille des banques a un effet négatif et significatif sur
le risque de crédit. Ce résultat semble indiquer que plus la
taille augmente plus le risque de crédit bancaire diminue. Ainsi, les
banques de grande taille bénéficieraient de l'effet positif
induit par la diversification de leurs portefeuilles de crédits,
diversification favorable à la minimisation du risque. Par
conséquent, dans le secteur bancaire togolais, les banques de grande
taille s'avère moins risquées que leurs homologues de petite
taille.
§ Il en est de même pour le pourcentage des
représentants des établissements publics au sein des banques du
Togo qui a aussi un impact négatif mais non significatif sur le risque
de crédit bancaire contrairement à nos anticipations. Ces
établissements appartenant à l'Etat sont devenus plus regardant
en ce qui concerne l'efficacité du CA comme le font les
représentants directs de l'Etat dans les conseils d'administration des
banques et pour les mêmes raisons que ci-dessus. Avec cette tendance,
plus leur pourcentage augmente plus le risque de crédit bancaire
baissera, toutes choses étant égales par ailleurs.
§ La dualité du style de leadership a un effet
positif mais non significatif sur le risque de crédit bancaire. Sans
pour autant être très affirmatif, ce résultat qui
mérite d'être approfondi, semble indiqué que le cumul du
poste de président du conseil d'administration et de directeur
général n'est pas favorable à une meilleure gestion du
risque. En effet, selon Jensen (1993), le cumul de ces deux fonctions favorise
les stratégies de domination du directeur général et une
centralisation excessive du pouvoir décisionnel qui ne favorise pas une
meilleure sélection des investissements. La double fonction de dirigeant
et de président du conseil d'administration contribue à renforcer
les conflits d'intérêt entre actionnaires et leur agent.
§ Enfin, l'âge de la banque n'a pas d'impact
significatif sur le risque de crédit bancaire. Or, des études
empiriques tendent à prouver que l'ancienneté favorise,
grâce au processus d'apprentissage, une grande expertise dans la gestion
et la maîtrise du risque de crédit bancaire.
|