I.4. Physiopathologie du neuropaludisme
Différentes hypothèses ont été
formulées pour expliquer la physiopathogénie du neuropaludisme :
trouble de la perméabilité vasculaire, mécanisme
immunopathologique, coagulation intra-vasculaire disséminée
(CIVD) et obstruction mécanique des micro-vaisseaux, effets
métaboliques. Chacune de ces hypothèses a eu son heure de gloire,
ses défenseurs et ses implications thérapeutiques plus ou moins
justifiées.
L'hypothèse actuellement considérée la
plus probable envisage un rôle central pour la séquestration
intra-capillaire des érythrocytes infectés par
cytoadhérence à différentes molécules
endothéliales. Quelques éléments de pathogénie
peuvent être distingués8 :
9
> L'augmentation de perméabilité des capillaires
cérébraux à l'origine de l'oedème ;
> L'obstruction de la microcirculation locale, par
conséquence à la fois d'une moindre
déformabilité, d'une forte adhésion des hématies
parasitées à l'endothélium vasculaire (mediée par
des protéines parasitaires) rendant compte d'un déficit d'apport
de substrats métaboliques et peut-être des lésions
ischémiques ;
> L'importance, enfin, des facteurs
génétiques et immunitaires liés à l'hôte.
C'est ainsi qu'une réponse lymphocytaire de types TH2 peu être
associée à une évolution clinique péjorative, ou
que de fortes concentrations en interleukines IL-6 et IL-10 ou en TNF-á
ont été mises en évidence chez des enfants maliens ou
ghanéens présentant une forme cérébrale du
paludisme. Il a aussi été montré que le phénotype
HLA B53 était corrélé à une moindre
sensibilité aux formes sévères.
La physiopathologie du neuropaludisme, très complexe,
n'est pas entièrement élucidée et certains
phénomènes, comme l'absence de relation évidente entre
taux de parasitémie et risque cérébral, n'admettent pas
encore d'explication complètement satisfaisante.
I.5. Diagnostic clinique
I.5.1. Chez l'enfant
Chez un enfant présentant anorexie, vomissements,
fièvre et parfois toux depuis 1 à 3 jours, constitue la triade
caractéristique : coma, convulsions, signes de souffrance du tronc
cérébral. Le coma n'a rien de caractéristique, sa
profondeur est un élément pronostique majeur. Les convulsions
(plus de 60% des cas) s'accompagnent souvent d'hypoxie et d'hypercapnie
(hypoventilation) et peuvent se compliquer de pneumopathies, de
déglutition. Elles sont souvent prolongées,
répétées voire subintrantes aboutissant dans près
de 30% des cas à un état de mal épileptique.
Elles constituent en soi une cause de décès,
surtout bien sur lorsque l'enfant est soigné dans un dispensaire de
brousse.
10
De physiopathologie mal connue, multifactorielle, il est
néanmoins reconnu qu'elles ne sont pas d'origine hyper pyrétique,
ni métabolique.
Il existe sans doute une part vasculaire, les régions
temporo-pariétales de systématisation artérielle et
très probablement une relation directe avec la séquestration des
hématies parasitées. Les signes de souffrance du tronc
cérébral sont souvent en rapport avec une hypertension
intracrânienne.
On retrouve fréquemment une anisocorie avec disparition
en reflexe photo-moteur ; l'abolition des reflexes cornéen et
oculo-encéphalique est de très mauvais pronostic. Peuvent
être également constatés des troubles vésicatoires,
une rigidité de décérébration et des anomalies du
tonus et des reflexes ostéotendineux.
A cette triade, peut s'ajouter une rétinopathie
palustre (60% des cas au fond d'oeil) : macula blanche (épargnant la
fovéa), oedème papillaire et hémorragies
rétiniennes multiples.
Chez un tiers des patients existent une hypoglycémie,
une acidose métabolique constante et une insuffisance rénale. La
moitié des enfants ont une hyponatrémie de cause inconnue. La
surinfection bactérienne survient dans 5 à 8% des
cas9.
|