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Problématique du régime politique en RDC: cas de la Constitution du 18 février 2006

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par Jacques Ndjoku wa Ndjoku
Université libre de Kinshasa - Licencié en droit 2011
  

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§3. Quelle est alors la nomenclature politique de ce régime ?

S'appuyant sur les affirmations tant des animateurs politiques que de la société civile et confrontant l'exercice des pouvoirs en République Démocratique du Congo, d'une part, nous observons que le régime politique de la Constitution du 18 février 2006 est consacré à une organisation fonctionnelle et indépendance organique, et que la vraisemblance de tel régime laisse conclure que la responsabilité du gouvernement devant le parlement est quasiment inexistante. D'autre part, l'analyse des théories chères de Montesquieu41, relative à la classification des régimes politiques et l'article 146 de la

41 Régime de confusion des pouvoirs au profit de l'exécutif et celui de séparation des pouvoirs (régime classique)

constitution en étude, font croire au régime

parlementaire, or, sous pareil régime, c'est au premier ministre, chef de gouvernement issu de la majorité qu'appartiendrait l'essentiel des pouvoirs.

En définitive, la quasi-inexistence de la responsabilité du gouvernement devant le parlement se justifie par le fait que le Président qui est élu au même titre que les députés nationaux, c'est-à-dire au suffrage universel direct et que d'importants pouvoirs lui sont consacrés par la constitution, qui en principe, dans les régimes parlementaires classiques sont le domaine du Premier Ministre issu de la majorité et responsable devant l'Assemblée Nationale pour défendre la conduite de la politique de la nation, laisse voir de quelle manière l'exécutif est quasiment irresponsable. Le Chef de l'Etat, qui est politiquement irresponsable emporte avec lui plusieurs pouvoirs que le pouvoir législatif ne peut pas contrôler, moins encore, entreprendre une action et cela met en péril le principe de liberté politique. La réalité en République Démocratique du Congo en est que le Président de la république est à la fois gouverneur et régulateur42.

Le régime de la Constitution du 18 février 2006 est un régime atypique que l'on qualifie de Mixte de par son caractère hybride, il n'est pas présidentiel et va à l'encontre du régime parlementaire. Cela à nos yeux reste insuffisant pour rejeter le régime de la Constitution du 18 février 2006 tout entier pour le

42 Articles 69, 79 à 83, 85 et 88 de la Constitution du 18 février 2006.

qualifier de non classique, conscient des imperfections liées toujours aux oeuvres humaines et par conséquent, nous retiendrons ce régime comme tel et l'approcherons des régimes classiques sous une appellation commode et améliorée pour des motifs détaillés dans les paragraphes qui suivent. Nous disons avec Marie-Anne Cohendet que ce régime est un régime parlementaire bireprésentatif43.

Mais tous les auteurs ne se contentent pas de la seule responsabilité. A ce propos, il y a divergence doctrinale44. Certains adjoignent a. la responsabilité politique du Gouvernement devant le Parlement le critère de la dissolution du Parlement par l'exécutif (donc une révocabilité mutuelle) pour appréhender le régime parlementaire, ainsi pensent Duguit et Hauriou. Yves Mény et Olivier Duhamel observent que le régime parlementaire est le régime « au sein duquel les pouvoirs publics collaborent et dépendent l'un de l'autre » et que « l'harmonie fonctionnelle peut cependant être rompue, de manière réciproque : le renvoi prématuré des députés devant les électeurs par le biais de la dissolution étant la contrepartie normale au retrait du gouvernement consécutif a. la mise en cause de sa responsabilité ». De même Philippe Lauvaux explique que dans le régime parlementaire « se trouvent consacrés le principe de la responsabilité ministérielle devant le Parlement et, en contrepartie, le droit dont dispose généralement l'Exécutif de prononcer la dissolution de celui-ci »45. Or

43 Marie-Anne Cohendet, « La cohabitation, leçons d'une expérience », Paris, L.G.D.J., 1979, p.74.

44Gwenaël le Brazidec, in René Capitant, Carl Schmitt : « crise et réforme du parlementarisme », de Weimar à la Cinquième république, op. cit.,page 62.

45Philippe Lauvaux, « Les grandes démocraties contemporaines », Paris, Puf, 1998, 2èmeédition, page 155.

la dissolution, présente dans la plupart des régimes parlementaires, n'y figure pas systématiquement. Elle participe certes à l'équilibre des pouvoirs, mais elle n'est pas un élément fondamental de définition du régime parlementaire. Le critère le plus important est bien celui de la responsabilité du gouvernement devant la chambre des représentants, de la confiance. La responsabilité et la confiance ne sont que les corollaires du principe majoritaire et du système représentatif qui sous-tend le régime parlementaire. Cela écarte les critères strictement techniques en faveur d'autres plus politiques, et ainsi le régime parlementaire peut fonctionner sans dissolution46. Cela peut dépendre selon que l'on se place dans une perspective moniste ou dualiste du régime parlementaire.

D'autres auteurs, qui retiennent pour le régime parlementaire la notion de responsabilité comme critère principal de définition, utilisent comme critère discriminant pour identifier le régime présidentiel, non seulement l'absence de responsabilité, mais aussi les modalités d'élection des organes. Le régime présidentiel se caractériserait par l'élection directe ou quasi directe du président. Pourtant ce n'est pas le seul régime dans lequel le président est élu directement ou quasi directement par le peuple. Dans certains régimes parlementaires aussi on trouve des présidents élus au suffrage universel direct ou quasi direct. Concernant l'élection quasi directe, on peut citer la Finlande jusqu'en 1994, et concernant l'élection directe tous les autres pays européens traités dans cette étude, cités par

46Boris Mirkine-Guetzévitch, « in Les Constitutions européennes », tome 1, Paris, Puf, 1951, pages 22, 24 et 25.

ordre chronologique des constitutions : l'Autriche, l'Irlande, l'Islande, la France, le Portugal, la Croatie, la Lituanie, la Bulgarie, la Macédoine, la Roumanie, la Slovénie, la Russie, l'Ukraine et la Pologne. Le critère de l'élection n'est donc pas adapté pour distinguer le régime présidentiel du régime parlementaire.

Maurice Duverger propose une nouvelle classe pour isoler ces régimes politiques: la catégorie des régimes «semi-présidentiels». Elle s'appuie sur l'élément décisif qui relève selon lui du régime présidentiel : l'élection directe ou quasi directe du président de la République et au régime parlementaire : la responsabilité du gouvernement devant le Parlement. Mais cette vision est contestable. Car on ne peut logiquement concevoir que deux classes qui sont habituellement présentées comme opposées, soient en théorie comme en réalité mêlées pour en fabriquer une troisième. On préférera qualifier ces régimes, parlementaires ou présidentiels, de « bireprésentatifs ». C'est-â-dire que ces deux régimes ont en commun les modalités d'élection du président de la République et des parlementaires, au suffrage universel direct ou quasi-direct. Les régimes « semi-présidentiels » emprunteraient au régime parlementaire et présidentiel.

En résumé, par opposition au régime

parlementaire, le régime présidentiel est celui dans lequel le gouvernement n'est pas responsable devant le parlement. Et pour cause, il n'existe même pas de gouvernement au sens parlementaire du terme puisque le président est entouré d'un cabinet de ministres qu'il désigne lui-même sans que la chambre ne soit consultée. Il

est admis qu'il s'agit d'un régime de séparation stricte des pouvoirs, ce qui n'est pas totalement satisfaisant puisque, ainsi comme l'a démontré Michel TROPER, une séparation stricte des pouvoirs ne peut qu'aboutir à un blocage des institutions en cas de litige, entraînant la mort du régime47. Elle n'existe pas au sens strict du terme car même en régime présidentiel, l'exécutif monocéphale bénéficie de certains moyens de pression sur le pouvoir législatif, et peut le neutraliser, ce qui atténue le préjugé de séparation stricte. A l'opposé, en régime parlementaire, le gouvernement est constitutionnellement responsable devant le Parlement (c'est pourquoi on parle de séparation souple des pouvoirs). Ces deux régimes figurent parmi les formes de gouvernement démocratique les plus répandues et peuvent être, l'un comme l'autre, bireprésentatifs.

47Michel Troper, « in La separation des pouvoirs et l'histoire constitutionnelle française », Paris, L.G.D.J., 1980, page 12.

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