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La gestion des conflits entre agriculteurs et éleveurs dans la commune de Navaka en République Centrafricaine

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par Alain Guy Ghislain GOTHARD
ESD Bangui -  2012
  

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CHAPITRE III : DIAGNOCTIC DES GRANDS PHENOMENES DE CONFLITS ENTRE AGRICULTEURS ET ELEVEURS

Ce chapitre comprend deux sections. La première concerne les dégâts aux cultures et la deuxième prend en compte le diagnostic des modes de règlement en vigueur.

Section I. Dégâts aux cultures

Les conflits entre agriculteurs et éleveurs en RCA prennent de nombreuses formes. Du point de vue méthodologique, nous nous focalisons sur un diagnostic des « symptômes » de conflits tels que décrits dans notre sujet de mémoire a savoir :

1. Conflits liés : d'une part à des destructions soit accidentelles, soit délibérés des champs et d'autre part, à des dégâts provoqués à travers les "champs pièges"

2. Conflits liés à des actes plutôt criminels d'appropriation des biens d'autrui, qui se manifestent d'une part (i) à travers les tueries de bétail et d'autre part, (ii) à travers des attaques collectives des agriculteurs.

En dehors donc de ces deux grands types de conflits, nous avons recensé d'autres conflits d'ordre plutôt mineur, qu'on peut également classifier soit dans l'une soit dans l'autre grande catégorie des conflits, mais que nous avons jugés moins importants. Il s'agit plus notamment (i) des vols du bétail, (ii) des vols de récolte, (iii) des cas d'empoisonnement de l'eau, et (v) des conflits fonciers.

I. Destruction accidentelle/involontaire ou délibérée des champs

Les destructions de cultures sont à l'origine de nombreux contentieux entre agriculteurs et éleveurs. Il s'agit des dégâts occasionnés par le bétail des éleveurs autochtones ou transhumants. Ils vont de l'arrachage de quelques boutures de manioc ou de pieds de maïs à la dévastation des plantations entières. Les destructions de cultures représentent une des situations les plus énergiquement dénoncées par les populations autochtones de toutes les régions visitées, et sont de loin les principales causes de conflits entre agriculteurs et éleveurs. Les agriculteurs de la RCA parlent d'une centaine de cas de destructions de culture pour l'année 2011.

D'après les agriculteurs, la plupart des destructions de cultures surviennent accidentellement. Elles sont les conséquences du manque de vigilance des bergers, ou d'éleveurs débordés par le grand nombre d'animaux. Les dégâts les plus importants surviennent au moment des départs et des retours des éleveurs de transhumance, soit entre mi-septembre et mi-novembre, et de la fin du mois de mars à la mi-mai. Les éleveurs nationaux interrogés à ce propos affirment que les destructions ont généralement lieu lors des escales de ravitaillement. En effet, bien que stationnés en pleine brousse, les éleveurs sont obligés de temps en temps de se rendre dans les villages situés sur leur trajectoire, pour acheter aux paysans les vivres nécessaires à leur survie. Souvent aussi, c'est la méconnaissance de la région qui est à l'origine de dégâts : la plupart des dévastations de champs imputées aux transhumants entrent dans cette catégorie.

Les dégâts volontaires ont été cités par quelques agriculteurs de la localité. Considérés comme insignifiant par les éleveurs, ces derniers expliquent cette pratique par l'esprit de vengeance qui anime parfois certains parmi eux, à la suite de cas d'abattages successifs de bétail. Il semble également (d'après bon nombre

d'éleveurs) que le manque de pâturage pendant la saison sèche pousse certains éleveurs à orienter leur bétail dans les champs de quelques localités qui constituent les seules verdures en cette période de feux de brousse. Il y a des éleveurs qui précisent que ce sont les éleveurs transhumants qui sont généralement à l'origine de ces problèmes.

Quelles que soient leurs causes, ces situations sont souvent sources de conflits. Elles sont inductrices de catastrophes : pertes financières, pénurie alimentaire, famine, incapacité à rembourser des dettes contractées et à subvenir aux besoins familiaux. Parfois, elles aboutissent à des conséquences dramatiques ; des cas de violence comme des tirs au fusil et ou à la sagaie.

I.1. Dégâts provoqués à travers des « champs pièges »

Par champs pièges, nous désignons ici des champs installés par les agriculteurs dans les zones affectées aux activités d'élevage. Cette pratique est présente partout et elle nous a été signalée par toutes les autorités administratives et les techniciens rencontrés sur le terrain. En RCA, la pratique de cultures en zone pastorale semble presque normale, au mépris du zonage existant. Certaines personnes vont jusqu'à installer leurs parcelles de cultures au-delà de 20 km des villages.

Pour justifier leurs actes, certains agriculteurs évoquent la baisse de fertilité des sols dans les zones agricoles et la recherche de terres fertiles, d'autres parlent du manque de terres à cause du temps de jachère et le développement de la culture attelée. Mais en plus de ces raisons principales évoquées, d'autres raisons sousjacentes ressortent de nos entretiens avec les deux parties, à savoir : les mésententes entre agriculteurs, l'amitié entre un agriculteur et un ardo, l'envie de certains agriculteurs pauvres de se rapprocher des campements d'éleveurs afin de leur servir de main d'oeuvre et de profiter des carcasses de bétail mort, ou tout simplement la

provocation intentionnelle afin d'obtenir des rentes financières en cas d'éventuels dégâts.

Quoi qu'il en soit, la présence des champs dans des zones à intérêt pastoral constitue un handicap pour le mouvement des troupeaux. De toutes les manières, ces champs finissent irrémédiablement par être détruits par le bétail. Face à cette situation, il semble évident que l'installation des champs proches des couloirs de passage, des campements, etc. révèle clairement soit une stratégie de rente de la part des agriculteurs autochtones, soit une stratégie foncière pour chasser les éleveurs de certains terroirs villageois.

I.1.1. Actes d'appropriation des biens des éleveurs

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery