4-2-1-2. Méthodes indirectes ou
séro-immunologiques
Les tests sérologiques utilisent la
réponse immunitaire des animaux infectés qui élaborent des
anticorps selon les mêmes modalités que dans les infections
bactériennes ou virales. Les immunoglobulines M (Ig M) sont
précoces et correspondent à la première
parasitémie. Par contre les immunoglobulines G (Ig G) sont plus tardives
et persistent plusieurs mois en l'absence de traitement, et leur recherche est
le but des méthodes de diagnostic sérologiques. Ces techniques,
en dépit de leur manque de sensibilité et de
spécificité, constituent néanmoins un bon outil
épidémiologique pour l'évaluation de la présence
des trypanosomes dans une zone donnée.
4-2-1-2-1. Test d'agglutination
Il consiste à mettre en présence dans un
tube capillaire, le sérum suspect et une suspension de parasites
lysés, puis à observer les micro agglutinations à l'oeil
nu ou au microscope. Le diagnostic est réalisable sur le terrain, mais
l'antigène est très instable (Desquesnes, 2003).
Cette méthode est utilisée pour les infections à
T. brucei, il a donné de mauvais résultats avec
T. congolense et T. vivax (Itard;
1981).
Le test d'agglutination sur carte (CATT= Card
Agglutination Trypanosomiasis Test) est une variante du test d'agglutination
utilisant des parasites entiers et colorés. Il est initialement mis au
point pour le diagnostic de la maladie du sommeil chez l'homme (à
T. brucei gambiense). Ce test a été
adapté par la suite à la détection de T.
evansi (chez les ruminants et le porc), avec une sensibilité
comparable au test de fixation du complément (Bajyana Songa et
al., 1987). L'hémagglutination indirecte est une méthode
décrite par Gill (1971), c'est un test pratique pour des diagnostics
individuels, mais elle présente quelques inconvénients dont la
conservation des hématies tannées, et l'existence
fréquente de faux positifs.
4-2-1-2-2. Réaction de fixation du
complément
Initialement mise au point pour le diagnostic de la
dourine et du surra (Itard, 1981), la réaction de
fixation du complément a été adaptée aux autres
trypanosomes animaux comme T. congolense, T. brucei
et T. vivax. La technique est lourde, peu spécifique
d'espèce et donne parfois des réponses interspécifiques
(ou hétérologues) plus fortes que les réponses
intraspécifiques (ou homologues), notamment en cas d'infections
successives par les diverses espèces présentes en Afrique
(Staack et Lohding, 1979). En plus, la réaction de
fixation de complément ne permet pas de distinguer les infections dues
à T. equiperdum et à T.
evansi (Gardiner et Mahmoud, 1990). Pour toutes ces
raisons, la réaction de fixation du complément est de moins en
moins pratiquée sur le terrain pour le diagnostic des trypanosomes
(Desquesnes et al., 2001).
4-2-1-2-3. Test d'Immunofluorescence Indirect
(IFI)
La réaction d'immunofluorescence indirecte
très employée pour le diagnostic de la trypanosomose humaine,
s'est ajoutée plus récemment aux méthodes de diagnostic
des trypanosomoses animales. Le test d'immunofluorescence indirecte est
très intéressant pour les enquêtes épizootiologiques
de masse (en raison de sa commodité et sa rapidité
d'exécution), et la détection des cas chroniques ou des porteurs
asymptomatiques. On reproche à cette méthode, outre les
difficultés de lecture, sa faible sensibilité. Il est difficile
avec ce test de faire la différence entre les espèces de
trypanosomes, les titres antigéniques homologues n'étant pas
toujours nettement plus élevés que les antigènes
hétérologues, on constate en plus des réactions
croisées entre les différents trypanosomes des mammifères.
4-2-1-2-4. Test ELISA (Enzyme Linked Immuno Sorbent
Assay)
La méthode immuno-enzymatique de dosage des
anticorps ou ELISA a été adaptée et employée au
diagnostic de nombreuses maladies infectieuses et parasitaires. Dans le cas des
trypanosomoses animales, l'ELISA indirecte a apporté une grande
amélioration pour la sensibilité du diagnostic. Cette technique
consiste en une reconnaissance et une liaison entre les Ig G et les
antigènes. L'ELISA indirecte pour la détection des anticorps
dirigés contre les trypanosomes constitue un bon outil pour les
surveillances séro-épidémiologiques (Desquesnes,
1997). Les tests ELISA par détection d'antigènes,
à travers le récent développement des anticorps
monoclonaux (au détriment d'anticorps polyclonaux), ouvraient une
nouvelle voie pour un diagnostic sensible et spécifique des trypanosomes
africains. Mais ils n'ont pas abouti à des tests fiables. Seule l'ELISA
indirecte est donc largement utilisée pour les enquêtes
épidémiologiques.
Cependant, les tests immuno enzymatiques ne permettent
pas de faire la différence entre une infection parasitaire active et une
infection passée, à cause de la persistance des anticorps
plusieurs mois après le traitement (Geysen et al.,
2002). Ces tests sont aussi peu spécifiques et donnent parfois
des réactions faussement positives, en raison de très fortes
réactions croisées qui sont notées par exemple entre
antigènes de Trypanozoon et les anticorps dirigés contre
T. congolense et T. vivax (Desquesnes et
al., 1999).
4-2-2. Diagnostic chez le vecteur
4-2-2-1. Chez les insectes hématophages
vecteurs mécaniques
Le diagnostic de la présence de trypanosomes
chez les insectes hématophages peut être réalisé par
examen parasitologique. Cet examen s'est révélé
très peu spécifique et sensible (Hoare, 1972).
Un diagnostic plus spécifique et sensible peut être
réalisé par PCR sur les pièces buccales ou l'intestin des
taons (Solano et al., 1996).
L'étude de la transmission mécanique par
les insectes hématophages montre qu'ils transmettent les trypanosomes
immédiatement après leur contamination. Alors, seule la mise en
évidence de trypanosomes (ou d'ADN de trypanosomes) dans les
pièces buccales d'un insecte capturé au moment du changement
d'hôte indiquerait « insecte infectant » et
aurait une signification épidémiologique. En définitive,
le diagnostic de la présence de trypanosomes chez les insectes vecteurs
mécaniques présente un intérêt limité en
raison de la difficulté de capture des insectes et également du
coût élevé.
4-2-2-2. Chez les glossines
Le diagnostic parasitologique chez les glossines a
longtemps été réalisé par examen microscopique
(Desquesnes, 2003). La technique de salivation sur lame permet
d'identifier rapidement les mouches porteuses de trypanosomes salivaires. Elle
est facile à mettre en oeuvre, mais ne permet pas d'identifier
précisément l'espèce de trypanosomes en cause
(Itard, 2000). La dissection des organes où
s'effectuent la multiplication et la transformation des trypanosomes (intestin
moyen, glandes salivaires, proboscis) permet d'identifier les mouches
infestées et avec une bonne précision les espèces de
trypanosomes. La diagnose des trypanosomes sera effectuée en se basant
sur leur présence dans l'un ou l'autre des organes
disséqués. Ainsi les trypanosomes découverts uniquement au
niveau du proboscis sont du sous genre Duttonella (T.
vivax) ; s'ils sont trouvés dans l'intestin moyen et le
proboscis, ils appartiennent au sous genre Nannomonas (T.
congolense) et s'ils sont trouvés en plus dans les glandes
salivaires, ils sont du sous genre Trypanozoon (T.
brucei). Des trypanosomes trouvés uniquement dans l'intestin
moyen sont dits immatures, mais il peut aussi s'agir de
T.grayi ou T.varani respectivement parasite
du crocodile et du varan (Itard, 1981). On note cependant de
nombreuses exceptions telles que les infestations mixtes, les infestations
anciennes avec disparition des formes intestinales, les infestations
très récentes avec seulement des trypomastigotes intestinaux.
Le diagnostic parasitologique chez les glossines s'est
révélé peu spécifique d'espèce
(Lefrançois et al., 1998), il est alors
préférable de réaliser ces examens par PCR avec des
amorces spécifiques (Majiwa et al., 1994 ;
Solano et al. , 1996). En effet, les outils de la biologie
moléculaire ont apporté une caractérisation
spécifique et une sensibilité inégalables (Solano
et al., 1999). La dissection des mouches et leur analyse par PCR
permettent d'évaluer la situation épidémiologique dans
les régions où elles sont capturées
(Lefrançois et al., 1998). Des études
menées par Solano et al. (1995) en Côte d'ivoire
ont permis de caractériser par PCR les différentes espèces
et sous espèces de Nannomonas chez le vecteur Glossina
longipalpis ainsi que les infestations mixtes et immatures dont
l'identification était difficile, voire impossible avec les
méthodes parasitologiques.
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