II.3.UN NOUVEAU CANAL SPECIFIQUE : LA MICROFINANCE
II.3.1. Le contexte historique international
La microfinance est née dans les années 80, en
réponse aux interrogations et aux conclusions d'études concernant
l'offre publique de crédit subventionné destiné aux
pauvres paysans. Dans les années 70, les organismes gouvernementaux se
trouvaient à l'origine des principaux crédits à la
production octroyés aux personnes qui n'avaient au par avant aucun
accès aux institutions de crédits - et étaient
obligées de recourir à des usuriers ou de louer leur force du
travail.
Gouvernement et bailleurs des fonds internationaux ont reconnu
le besoin des pauvres à accéder à un crédit peu
coûteux et y ont perçu un moyen de promouvoir la production
agricole par les petits propriétaires terriens.
Les bailleurs des fonds ont proposé du crédit
agricole subventionné et crée en outre, des coopératives
d'épargne et de crédit inspirées par le modèle
RAIFFEISEN développé en Allemagne en 1864 ;ces
coopératives financières se sont
concentrées essentiellement sur la mobilisation de
l'épargne dans les zones rurales afin « d'apprendre aux paysans
pauvres à épargner ».
A partir du milieu des années 80, le modèle de
crédit ciblé subventionné préconisé par des
nombreux bailleurs des fonds a fait l'objet des critiques sérieuses. En
effet, la plupart de programmes accumulaient des pertes importantes et avaient
recours à la capitalisation pour continuer de fonctionner.
Il devenait de plus en plus évident que les solutions
fondées sur la loi du marché devraient être
envisagées, ce qui a conduit à une approche de microfinance
considérée dès lors comme partie intégrante du
système financier global. L'accent ne fut plus mis sur l'octroi rapide
des crédits subventionnés aux populations cibles, mais sur la
création d'institutions locales pérennes au service des
pauvres.
Parallèlement, des ONG locales ont commencé
à rechercher une approche du développement à plus long
terme que celle préconisant la généralisation de revenu
sans perspective de viabilité. En Asie, le docteur MOHAMMED
YUNUS aujourd'hui « Prix Nobel de la paix 2006 », au
Bangladesh a montré la voie au projet-pilote des crédits de
groupe destinés aux paysans non propriétaires. Cette institution
devenue par la suite la Gramen bank, compte aujourd'hui plus de 2,4 millions
des clients, dont 94% de femmes et, tient lieu de modèle dans des
nombreux pays.
En Amérique latine23,
ACCION international a soutenu le
développement du crédit solidaire destiné aux petits
commerçants en zones urbaines tandis que FUNDACION
CARVAJAL a développé avec succès un
système de crédit et de la formation pour les entrepreneurs
individuels.
Le secteur financier formel a également connu des
changements. La Bank Ra kyat Indonesia, une banque agricole détenue par
l'Etat, est passée d'une politique du crédit subventionné
à une approche institutionnelle se fondant sur les principes du
marché. Elle a également mis en place un système
transparent de mesures incitatives qui récompense ses emprunteurs (des
petits paysans) et son personnel lorsque les délais de remboursement
sont respectés. Ses ressources provenaient essentiellement de
l'épargne volontaire.
Depuis les années 1980, la microfinance connaît
un essor considérable. Les activités de microfinance sont
activement soutenues et encouragées par les bailleurs des fonds, ces
derniers ciblent particulièrement les IMF qui ont pour objectifs de
toucher le plus grand nombre et d'atteindre la pérennité
financière. Dans les années 70 et largement encore les
années 80, les IMF proposaient des services
23 JOANNA LEDGERWOOD ,Manuel de microfinance,
Perspective institutionnelle et financière, BM,Washington DC
1999,p.33
comprenant à la fois du crédit et de la formation,
pour lesquels elles avaient des subventions. Aujourd'hui l'accent est mis avant
tout sur les services financiers.
Récemment, des ONG de microfinance (notamment PRO
DEM/Banco sol en Bolivie ; K-REP au Kenya et ADEMI/Banco-ademi en
République Dominicaine), ont entamé leur conversion pour devenir
financières formelles, reconnaissant la nécessité de
proposer des services d'épargne à leurs clients et de recourir
aux sources des financement commerciales plutôt que de dépendre
des fonds octroyés par les bailleurs des fonds.
Cette reconnaissance de la nécessité d'atteindre
la pérennité financière a conduit à l'approche qui
prévaut actuellement en microfinance, celle des « système
financiers », elle se fonde sur les principes suivants :
Le crédit subventionné nuit au développement
;
Les pauvres sont en mesure de payer des taux
d'intérêts suffisamment élevés pour couvrir les
coûts des transactions et les coûts induits par le fait que les
prêteurs se trouvent dans un environnement de marché où
l'information est imparfaite ;
L'objectif de pérennité (qui consiste à
couvrir les coûts et à dégager enfin de compte un
bénéfice) est fondamental, non seulement pour la
continuité de l'activité de crédit, mais également
pour améliorer l'efficacité des IMF.
Les sommes accordées aux pauvres sont modestes ,aussi ;
pour devenir pérenne les IMF doivent opérer une échelle
suffisamment large ;
La croissance de l'activité du client ou l'impact du
crédit sur la pauvreté étant difficile à
évaluer, la portée et le taux de remboursement tiennent lieu
d'impact
Cette approche repose sur l'hypothèse essentielle que
des nombreux pauvres sont des demandeurs des crédits productifs et sont
en mesure de les absorber et les utiliser. Or, le développement de la
microfinance s'est accompagné de la découverte dans biens des cas
que les pauvres ont besoin d'actifs sûrs et des crédits à
la consommation au moins autant, voir davantage parfois, que les crédits
productifs. Les IMF ont commencé à répondre à ces
besoins en proposant de service d'épargne volontaire et d'autres types
des crédits.
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