ANNEXE 7 - INTERVIEWS
A. Les types de prise en charge de l'AM
à l'hôpital psychiatrique et le rôle de
l'éducateur
Entretien avec le docteur André
Passelecq, psychiatre à la clinique La Ramée,
réalisé le 9 octobre 2008.
André Passelecq est psychiatre, de formation
psychanalytique et systémique. Il dirige depuis plus de 30 ans, à
la Clinique La Ramée de Bruxelles, un service
spécialisé dans les TCA des adolescents.
1. Quelle est la différence de la prise en charge
de l'AM dans un cadre hospitalier à références
comportementalistes et analytiques ?
Un traitement hospitalier comportementaliste se base, comme
le nom l'indique, sur le comportement alimentaire, uniquement sur lui,
c'est-à-dire concrètement sur le poids et la prise d'aliments.
L'hospitalisation est prévue avec des exigences de prises de poids
fixées d'emblée. Par exemple, il faut que les patients prennent x
centaines de grammes par semaine, et s'ils n'y parviennent pas, toute une
série de mesures sont prévues pour imposer l'avancée
pondérale. Au départ, les patientes sont privées de
contact avec l'extérieur, doivent rester dans leur chambre, et ce n'est
que progressivement, en fonction de leur avancée pondérale, que
leurs sont octroyés des contacts avec l'extérieur
(téléphone, visites, sorties...). Le rythme de la progression est
donc imposé par le programme hospitalier, la dimension psychodynamique
est remise à plus tard, en tout cas absente. Autrement dit, les raisons
pour lesquelles tel patient présente tel ou tel type de symptôme
ne sont pas explorées autrement que par l'angle de vue du comportement
alimentaire, éventuellement approchées par l'angle de l'image du
corps ou de certaines croyances erronées concernant tel ou tel aliment.
Dans un service à références
analytiques, bien sûr la dimension pondérale est aussi prise en
compte, il est par exemple certain que laisser un jeune patient pendant de
longues périodes à un poids extrêmement faible, participe
à la chronification de celui-ci. Dès lors, nous avons à
organiser les choses, en partie un peu de manière comportementale, pour
que ces jeunes patients reprennent du poids, mais beaucoup plus à leur
rythme, nous n'acceptons cependant pas de stagnation à des poids trop
bas.
Par contre, inlassablement sont questionnées avec
elles et avec leurs familles les raisons pour lesquelles leur symptôme
est apparu : difficultés d'adolescence, difficultés
familiales ?, etc. Les dimensions psychanalytiques et familiales sont
donc à l'avant-plan, mais aussi tout le service est
organisé de façon à tenter d'agir sur une autre dimension
des problématiques anorexiques, à savoir un doute constant qu'ont
ces patientes vis-à-vis d'elles-mêmes.
2. Quel est le rôle des ESP travaillant dans le
service spécialisé dans les TCA des adolescents de la clinique
La Ramée ?
Le rôle des éducateurs dans un service tel que
le nôtre. Comme indiqué juste avant, en plus des causes
éventuellement ponctuelles de ce qui déclenche une anorexie
mentale, existe toujours en arrière-fond un type de personnalité
toute dans le doute : ces jeunes filles n'ont aucune confiance en elles,
ont une crainte énorme de rater, et donc se concentrent sur ce qu'elles
savent bien réussir, à savoir souvent l'école, mais aussi
perdre du poids... Cercle vicieux absolu.
Le rôle des éducateurs et
éducatrices dans notre service est donc, par le biais de l'organisation
journalière des activités, le rythme de vie de la journée,
le rapport avec les pairs, de les aider à petit à petit prendre
confiance en elles, oser exprimer leur avis, oser dire non. Et à ce
titre, sur une journée existent des dizaines d'occasions de les aider
à oser prendre leur place : par rapport à cela, les
éducatrices (comme les infirmières), ont un matériel
extraordinaire pour aider ces jeunes à n'avoir plus besoin de leurs
symptômes pour exister.
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