2.2.2 Les commerçants
Le négoce du gibier est, dans la pratique,
contrôlé par les femmes. Dans le cas d'une filière longue,
les revendeuses sur les marchés sont fréquemment de jeunes femmes
qui sont unies par des liens de famille ou d'amitié avec les
courtières (intermédiaires) et qui se chargent d'un
écoulement aussi rapide que possible des cargaisons (Kofimaya et
al., 1988).
Cette activité ne nécessite pas de capitaux
importants et leur permet d'assurer leur survie et celle de leur famille. Elle
peut permettre à ces jeunes femmes, souvent en situation de
précarité, d'amorcer une ascension sociale. Dès qu'elles
peuvent disposer d'un crédit, elles sont d'abord vendeuses au
détail et pour de faibles volumes sur les marchés urbains, puis,
lorsqu'elles ont pu rassembler un petit capital, elles assurent la collecte du
produit. En cas de réussite financière, elles abandonnent ensuite
cette activité pénible et contraignante pour se
spécialiser dans le négoce d'autres articles assurant de
meilleures marges et des volumes d'affaires supérieurs (Bahuchet et
Ioveva, 1999).
2.2.3 Les acteurs cachés
D'autres acteurs, difficiles à identifier,
interviennent également dans le fonctionnement de la filière.
Comme dans beaucoup d'activités informelles, en limite permanente de
l'illégalité, des prélèvements cachés sont
effectuées par divers agents économiques disposant d'une parcelle
de l'autorité publique. Les différentes formes de ces
prélèvements, qui vont de la simple corruption au
rançonnage ou à l'organisation effective de la filière, et
leur niveau financier sont très difficiles à apprécier
(Bahuchet et Iovéva, 1999; Diéval, 2000).
Des acteurs « non identifiés » opèrent
également dans l'approvisionnement urbain. On estime en effet que 30
à 50 % du ravitaillement urbain en gibier ne transite pas par les places
de marché. Une hypothèse souvent avancée s'appuie sur les
liens étroits entre les élites installées en ville et les
parents du village. Des flux importants de viande seraient organisés en
fonction de commandes des élites qui en assureraient directement le
transport, puis la vente en ville, selon des circuits hors marché
(Steel, 1994).
Les consommateurs « rurbains »
Le terme « rurbain » désigne, certains
acteurs domiciliés en zone rurale, mais qui travaillent dans un
environnement économique fortement monétarisé de type
urbain et présentent des modes de consommation proches des citadins. Il
s'agit essentiellement des salariés des entreprises forestières
ou des travailleurs dans les mines officielles (industrie du pétrole,
par exemple) ou non (orpaillage) (Delvingt, 2001).
La consommation de la viande de brousse par les
employés des exploitations forestières est actuellement un sujet
de polémique. Il semble qu'il faille considérer le
phénomène sur la longue durée. À l'installation
d'un chantier forestier, les ouvriers travaillant en brousse profitent d'une
densité de faune souvent importante pour exercer des
prélèvements élevés, en piégeant à
proximité des lieux de travail. Ce phénomène est
concentré dans l'espace, sur les places d'exploitation, et dans le
temps. Il est en fait de courte durée sur un même site pour des
raisons biologiques (d'une part, la faune se raréfie et, d'autre part,
elle change ses comportements et devient plus difficile à capturer) et
sociales (Projet Minkebe, 2000).
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