B. Littérature empirique
Elle est dominée par les travaux en coupe transversale,
les études en coupe longitudinale sont plus récentes. Du point de
vue empirique, Goldsmith (1969) est l'un des premiers économistes
à montrer l'interrelation entre le développement financier et la
croissance économique en utilisant des données de 35 pays
(développés et en développement) pour la période de
1860/1963. En mesurant le développement financier par le ratio Actif
financier total / PIB, il a montré que ce ratio est positivement
corrélé avec la croissance économique. Cependant,
l'étude n'a pas tenu compte des autres facteurs pouvant affecter la
croissance économique. Plus tard, l'étude de King et Levine
(1993) portant sur un échantillon de 80 pays (développés
et en développement) pour la période 1960/1989 a montré
d'une part que l'analyse bivariée révèle une forte
corrélation positive entre le développement financier et la
croissance. D'autre part, dans l'analyse multivariée, les
résultats demeurent significatifs même après avoir inclus
les différentes variables qui influencent la croissance
économique. Entre autres, de nombreux autres chercheurs comme Gertler et
Rose (1994), Roubini et Sala-i-Martin (1992) ont fait des études en
coupe transversale et ont montré que le développement financier a
un effet positif sur le taux de croissance du PIB après avoir
contrôlé l'influence des différents facteurs pouvant
affecter la croissance comme l'éducation, l'inflation ou la
stabilité politique. Cependant cette corrélation entre le
développement financier et la croissance économique dépend
des pays considérés. En effet, dans cette même optique,
l'étude de Fernandez et Galetovic (1994) basée sur les
données de King et Levine (1993), a montré que la
corrélation n'est pas significative quand on considère uniquement
les pays de l'OCDE. En outre, De Gregorio et Guidotti (1995) ont montré
qu'en divisant l'échantillon en trois groupes selon le revenu per capita
au début de la période d'échantillonnage, les
corrélations augmentent et deviennent significatives quand
le revenu initial diminue. Ces résultats suggèrent
que l'intermédiation financière puisse avoir un effet plus
important dans les pays en développement.
Une étude ultérieure menée en
données de panel et en coupe par Beck, Levine et Loayza (1999) cherche
à évaluer les relations empiriques de manière dynamique
entre le niveau de développement financier et la croissance
économique, la productivité des facteurs, l'accumulation du
capital et le taux d'épargne. Cet article se distingue par l'utilisation
des dynamic panel data, qui permettent d'estimer les relations de croissance en
utilisant une variable endogène décalée, en l'occurrence
le niveau de PIB/hab en t-1. L'estimateur recherché fait alors appel aux
variables instrumentales via l'estimateur des moments
généralisés. En plus de cette avancée
méthodologique certaine, cette étude complète le nombre de
variables explicatives en y adjoignant des variables sur les systèmes de
réglementation, sous la forme de dummies financières
spécifiques à chaque pays (système anglo-saxon,
scandinave, banque universelle...)
De Gregorio & Guidotti (1995) et Odedokun (1998), en
utilisant une méthode similaire obtiennent des résultats qui
confortent l'étude de King et Levine (1993). Le travail de Arestis &
Demetriades (1997) s'intéresse plus spécifiquement aux
conséquences de la libéralisation financière. Ils
utilisent à cette fin une approche dynamique et négligent les
régressions en coupe transversale. Ils procèdent donc à la
régression d'un VAR et utilisent le test de coïntégration de
Johansen pour 3 pays : les Etats-Unis, l'Allemagne et la Corée.
L'apport principal de Berthélémy et Varoudakis
est de proposer de manière empirique que le développement de la
sphère réelle et de la sphère financière est
intimement lié et que la causalité joue dans les deux sens. Le
travail de Laroche et al (1995) est à ce titre exemplaire, mais il se
limite malheureusement aux pays de l'OCDE. Les résultats obtenus
montrent que la causalité passe du réel au financier, et du
financier au réel, en fonction des différents indicateurs
utilisés. Il n'est pas possible de déterminer un sens de
causalité univoque. La deuxième force de cette
étude est de déterminer différents clubs de pays qui sont
classés en fonction de leur système financier (pays anglosaxons
où la finance de marché domine, modèle scandinave).
Une autre voie de recherche pour montrer que la relation entre
développement financier et croissance est ambivalente est de
déterminer différents clubs de convergence. Le travail de
Berthélémy et Varoudakis (1998) en données de panel
constitue une référence. Les résultats obtenus mettent en
évidence la non linéarité entre un indicateur de
développement financier (le taux de liquidité) et la croissance.
Au-delà d'un certain seuil, les pays passent d'un club de convergence
à un autre, ce qui influe très positivement sur le taux de
croissance. Mais l'estimation en données de panel semble souffrir d'une
mauvaise spécification.
Une étude plus récente, sur laquelle notre
travail puise assez d'éléments concernant le choix des variables,
est celle de Marc Hay (2000). Elle s'inspire quant à elle
fondamentalement des travaux de Berthélemy et Varoudakis (1998), sauf
qu'elle rajoute à la seule variable de leur modèle faisant
référence à l'activité bancaire, à savoir la
monnaie et quasi monnaie (M2), d'autres variables que sont :
Le logarithme de la part des actifs assimilables au moyens de
paiement dans le PIB (M2/PIB) ; le logarithme du rapport du crédit
intérieur sur le PIB ; le logarithme du rapport du crédit
intérieur sur les dépôts ; le logarithme du ratio (total
des dépôts à vue et à terme détenus par les
Banques/ PIB). Dans notre étude certaines de ces variables sont
maintenues en ajoutant la part des activités hors bilan des Banques pour
capter le redéploiement de l'activité bancaire dans une
intermédiation de marché et le développement
considérable de l'activité hors bilan.
En outre, l'étude de Marc Hay retient un
échantillon de 12 pays dont 6 pays développés (France,
Japon, Royaume Uni, Etats Unis, Canada et Allemagne) et 6 pays en
développement (Corée, Singapour, Malaisie, Thaïlande,
Brésil et Mexique) et elle s'étend sur la période
1970-1996.
Le principal résultat émanant de cette étude
révèle une relation négative entre crédit et
croissance économique.
Pour finir ce paragraphe, une synthèse des principaux
travaux est répertoriée dans le tableau suivant :
Tableau 1 : Résumé des principaux travaux
réalisés
Auteurs (Année)
|
Méthode
|
Conclusion
|
Goldsmith (1969)
|
Coupe transversale
|
Le ration actif financier / PIB est
positivement corrélé avec la croissance du PIB.
|
King et Levine (1993)
|
Coupe transversale
|
Les variables M2 et Crédit secteur privé
influencent significativement la croissance économique
|
Arestis et Demetriades
(1997)
|
VAR
|
La libéralisation financière favorise la
croissance
|
Berthélemy et Varoudakis (1998)
|
Panel
|
Non linéarité entre un indicateur de
développement financier et la Croissance
|
Marc HAY (2000)
|
Panel
|
Relation négative entre crédit et croissance
économique
|
Source : inspiré de la revue de littérature
empirique
|