SECTION II. La procédure d'octroi des crédits et
de gestion du risque à la CBC
Paragraphe I. La procédure d'octroi de
crédit à la CBC
La procédure d'octroi de crédit est
initiée par le chargé d'affaires. En effet, le chargé
d'affaires a pour mission générale la gestion globale du
portefeuille client. Il doit donc assurer le développement de ce
portefeuille en recherchant de nouveaux clients, en analysant les besoins de
financement des clients en portefeuille, en montant les dossiers de
crédit de ceux-ci et en assurant la mise en place des concours
validés par le comité de crédit ainsi que le suivi desdits
concours. Ainsi, une demande de crédit fait l'objet d'un avis du
gestionnaire du compte, des analystes crédits, et de l'administrateur
provisoire.
Le circuit de décision est donc le suivant :
SCHEMA 1. Circuit de décision de crédit
AVIS DU DIRECTEUR JURIDIQUE ET DE CONFORMITE
AVIS DU DIRECTEUR RISQUES ET ENGAGEMENTS
AVIS DU DIRECTEUR CENTRAL DE L'EXPLOITATION
ANALYSE DU DOSSIER PAR LES ANALYSTES CREDITS
ENTRETIEN AVEC LE CLIENT
AVIS DU COMITE DE CREDIT DE LA DIRECTION GENERALE
AVIS FINAL DE L'ADMINISTRATEUR PROVISOIRE
NOTE A L'ADMINISTRATEUR PROVISOIRE
Source : Auteur
A. L'entretien avec le
client
C'est la première étape de l'analyse. Elle a
pour but de chiffrer les besoins réels du client en matière de
financement. De cette étape, l'analyste ressort sur la base d'un
questionnaire les informations concernant l'actionnariat de l'entreprise, la
qualité de l'équipe de direction, l'historique de la
société, les informations provenant de la centrale des risques,
et les informations sur les produits, les clients, la concurrence, les
fournisseurs, les réseaux de commercialisation et un
résumé de la relation que le client entretient avec la commercial
Bank Cameroon.
B. Le montage du dossier
de crédit
Le dossier de crédit est élaboré par
l'analyste crédit. Il fait la synthèse des points forts et
faibles relatifs au questionnaire élaboré par les gestionnaires
et de l'analyse de la situation financière du client.
Le dossier en lui-même comprend sept points :
· La présentation générale
du client : on y retrouve des informations sur l'agence dans
laquelle le client a son compte, la racine de son compte dans les livres de la
CBC, les noms des gestionnaires et analystes en charge du dossier, le nom ou
raison sociale de l'entreprise, sa forme juridique, sa date de création,
le régime fiscal auquel elle est assujettie, la composition de son
actionnariat, le numéro d'inscription de l'entreprise au RCCM, le
montant du capital social, la date d'entrée en relation avec le client,
le caractère actuel de son dossier juridique.
Un élément important que l'on retrouve dans
cette partie du dossier est le rating du client. Celui-ci est la
résultante de plusieurs analyses, débouchant chacune sur une
note :
o La situation financière du demandeur du crédit
provenant du dépouillement par l'analyste des états financiers
d'une part ;
o Les réponses aux questions fournies par le client
à un questionnaire administré par le gestionnaire du compte
(annexe) : ce questionnaire a pour but d'apprécier la
qualité du management de l'entreprise ;
o Les garanties apportées par le client en soutien du
financement accordé : en fonction des garanties accordées,
la note finale du client peut se trouver réduite.
o La synthèse de ces trois notes conduit au rating
final du client, qui fera l'objet d'une validation par la direction en charge
des risques et engagements, qui apprécie en dernier ressort la
cohérence entre tous ces éléments.
· Le tableau des concours actuels et
prévisionnels : ici, les concours sont regroupés
selon leur nature, leur montant, la durée de validité de ces
concours et les conditions de financement.
· La situation juridique et
commerciale : dans cette partie, on fera l'état
sur :
o Le risque juridique et humain de la
société : il s'agira dans cette partie de
s'intéresser à la conformité des statuts de la
société aux normes et exigences OHADA, aux grandes
décisions prises par l'assemblée générale et le
conseil d'administration ayant décidé d'une résolution qui
mérite d'être signalée, etc.
o Le risque humain fait référence à la
qualification des dirigeants, à la qualité de traitement du
personnel, aux tensions sociales existant au sein de la
société.
o Le risque technique : chaque entreprise, pour
fonctionner, a besoin de moyens qui doivent être en adéquation
avec les ressources disponibles. Ainsi, il s'agira pour l'analyste rendu
à ce niveau de s'assurer de la cohérence entre les moyens dont
dispose l'entreprise et la nature de l'activité que celle-ci exerce.
o Le risque commercial : il s'agira dans cette partie de
faire d'abord une présentation du marché de l'entreprise et de la
concurrence, ensuite de s'assurer de la cohérence entre les
délais fournisseurs et clients et le montant figurant dans les
états financiers.
· L'objet et la justification des
concours : l'appréciation de ce point se fait par
l'analyse du fonctionnement des comptes. Pour une période allant de
trois à six ans, on appréciera les montants confiés par le
client à la banque, la moyenne mensuelle de ces montants, ainsi que la
rentabilité de l'entreprise. On fera ensuite l'étude de la
demande actuelle du client (nature, objet, perspectives d'utilisation et de
remboursement.)
· L'analyse de la situation financière et
de la rentabilité : celle-ci se fait sur la base d'un
tableau récapitulant les agrégats les plus importants du
bilan : Fonds propres, Dettes à Long Terme, Capitaux permanents,
Valeurs Immobilisées Nettes, Créances d'exploitation Nettes,
Total bilan, Fonds de roulement, Besoin en fonds de roulement,
Trésorerie Nette, Taux de couverture du fonds de roulement par le Besoin
en Fonds de roulement.
Cette analyse est suivie de celle des soldes significatifs de
gestion du compte de résultat : chiffres d'affaires, valeur
ajoutée, frais de personnel, frais financiers, résultat net,
dotation aux amortissements et aux provisions, cash flow, etc.
L'analyste s'intéressera à ce niveau au poste
« frais financiers » : l'enjeu ici est de s'assurer
que le montant d'affaires confié à notre banque par le client est
significatif.
· Analyse du compte d'exploitation
prévisionnel et du plan de financement : cette analyse se
fait sur trois à quatre ans. Il s'agira de s'assurer que les
perspectives d'évolution de la société sont
cohérentes avec l'évolution des entreprises opérant dans
le même secteur d'activité.
· Analyse du risque :
l'appréciation du risque que le client présente passe par
l'analyse des engagements avec les banques confrères, l'analyse des
engagements que le client a contracté avec d'autres banques à
travers la centrale des risques, et l'étude des garanties
proposées par lui.
La conclusion de cette étude se fait à travers
le récapitulatif des points forts et points faibles que le dossier du
client présente.
Paragraphe II. Outils
d'appréciation du risque à la CBC
A. La cartographie des
risques à la CBC
A la CBC, les risques ont été divisés en
treize familles regroupées en cinq catégories. Celles-ci seront
reprises dans les points ci-après :
1. Le risque de crédit
C'est le risque d'une défaillance totale ou partielle
de la contrepartie ou des contreparties considérées comme un
même bénéficiaire au sens du règlement COBAC
R-2001/03, avec laquelle des engagements de bilan ou hors bilan ont
été contractés.
2. Le risque de marché
Il correspond aux risques liés aux évolutions
des prix de marché et à la gestion de la trésorerie de la
banque pour tous types de supports (devises, actions...). Il comprend notamment
les risques de change et de taux, les risques sur actions, les risques de
liquidité et de transformation, ainsi que les risques de prise ferme. Il
est décomposé en plusieurs types de risques :
· Le risque de change : c'est le
risque encouru du fait de l'évolution du cours des devises sur les
opérations de bilan et hors bilan ;
· Le risque d'illiquidité :
il s'agit du risque pour l'établissement de ne pas pouvoir faire face
à ses engagements ou de ne pas pouvoir dénouer ou compenser une
position ;
· Le risque de taux
d'intérêt : c'est le risque encouru en cas de
variation de taux d'intérêt sur l'ensemble des opérations
au bilan et au hors bilan ;
· Le risque de règlement :
c'est le risque encouru, notamment dans les opérations de change, au
cours de la période qui sépare le moment où l'instruction
de paiement d'un instrument financier vendu ne peut plus être
annulée unilatéralement et la réception définitive
de l'instrument acheté.
3. Le risque opérationnel
C'est le risque résultant, notamment, d'insuffisances
de conception, d'organisation et de mise en oeuvre des procédures
d'enregistrement dans les systèmes d'information de l'ensemble des
évènements relatifs aux opérations de
l'établissement, et plus particulièrement dans le système
comptable. Il comprend les risques comptable, informatique, administratif et de
ressources humaines.
· Le risque comptable : il s'agit
de l'ensemble des facteurs susceptibles d'entraver la réalisation des
objectifs de régularité et de sincérité des
informations comptables ;
· Le risque administratif : c'est
l'ensemble des facteurs susceptibles d'altérer les objectifs de bon
fonctionnement interne de la banque dans la réalisation et
l'optimisation du traitement de ses opérations. Il concerne tant le
respect des procédures internes que la recherche de productivité
et d'efficacité de l'organisation. Il comprend la procédure
budgétaire ainsi que le contrôle de gestion.
· Le risque informatique : il
correspond aux facteurs susceptibles d'altérer les objectifs de
sécurité et de performance de la fonction informatique de la
banque.
· Le risque de ressources
humaines : il s'agit de facteurs liés à la gestion
des ressources humaines et susceptibles de se traduire par l'insatisfaction
individuelle ou collective d'une part, l'inadéquation quantitative ou
qualitative des collaborateurs d'autre part. Il inclut les risques de pratiques
frauduleuses ou illégales ainsi que les risques de nature
déontologique.
4. Le risque commercial et de
réputation
Il s'agit du risque de sous-performance commerciale entrainant
une érosion, un non-renouvellement ou un développement non
rentable du fonds de commerce. Il s'agit également du risque d'image qui
survient lorsque la qualité de l'opinion des tiers est susceptible de se
dégrader consécutivement à une opération, un
comportement ou une mesure prise par la banque.
5. Le risque juridique et fiscal
Le risque juridique est le risque de tout litige avec une
contrepartie résultant, notamment, de toute imprécision, lacune
ou insuffisance de nature quelconque susceptible d'être imputé
à l'établissement au titre de ses opérations :
légal (irrespect de la loi), contractuel (insuffisante capacité
de la banque à défendre ses intérêts dans les
contrats qu'elle négocie) ou reglementaire.
Le risque fiscal quant à lui trouve son origine soit
dans l'irrespect de la réglementation, soit dans l'absence
d'optimisation des opérations.
B. La gestion proprement dite
du risque
Comme nous l'avons montré dans le point
précédent, l'analyste crédit, après avoir
monté le dossier de crédit du client, présente les points
forts et les points faibles dont ce dernier dispose. Dans cette partie, il
s'agira de faire un état succinct d'une analyse type
élaborée par le gestionnaire.
1. Le dépouillement des états financiers
et le résumé financier
A partir des informations renseignées relativement
à la DSF du client, il ressort une fiche de dépouillement qui
récapitule, pour les trois dernières années, les
éléments du bilan et du compte de résultat, et la
variation relative et absolue de ces différents agrégats sur
toutes ces années.
L'analyse a pour objectif de s'assurer de la qualité de
la structure financière de l'entreprise. Qu'est ce qui peut expliquer la
variation du chiffre d'affaires de l'entreprise ? Sur quels produits
l'entreprise fait-elle le plus de marge ? Quel est le poids des produits
accessoires et autres produits dans la valeur ajoutée de
l'entreprise ? Quelle est l'importance des charges de personnel et ont
t-elles connu une évolution ?
Dans l'appréciation de la partie financière du
compte de résultat, l'analyste s'intéressera aux comptes 631
« Commissions bancaires » et 67
« Intérêts des emprunts », l'objectif
étant de déterminer le poids de ces charges-là, et quelle
est la part de ces frais qui revient à la CBC.
Les postes qui attireront l'attention dans l'analyse du bilan
sont :
· Les immobilisations : il s'agira de savoir si
l'acquisition ou la cession éventuelle d'une immobilisation est
justifiée ;
· Les stocks : leur importance permettra
d'apprécier la qualité de la politique d'approvisionnement de
l'entreprise ;
· Les engagements à court ou long terme : il
s'agira ici d'apprécier leur importance et la propension de l'entreprise
à rembourser ses dettes.
L'analyste étudiera par la suite l'évolution de
certains agrégats :
· Le fonds de roulement : le fonds
de roulement est défini comme l'excédent de capitaux stables, par
rapport aux emplois durables, utilisé pour financer une partie des
actifs circulants. Le principe est que les ressources stables d'une entreprise
doivent couvrir au moins les emplois de même durée. La formule de
sa détermination est la suivante :
FR= Capitaux permanents - Actifs Immobilisés
ou par le bas du bilan
FR= Actifs circulants- Dettes à Court
Terme
· Le besoin en fonds de roulement :
le besoin en fonds de roulement représente le décalage de
trésorerie provenant de l'activité courante de l'entreprise
(exploitation). Son expression simplifiée est la suivante :
BFR= Stocks+Créances Clients+Dettes
fournisseurs
On a FR = BFR + TN,
où TN représente la Trésorerie Nette.
L'usage des notions de fonds de roulement et de besoin en
fonds de roulement apporte des précisions utiles sur l'analyse de la
trésorerie des entreprises, en raison de la relation fondamentale de la
trésorerie qu'il établit.
· La rentabilité
commerciale : elle est déterminée par le ratio
Excédent Brut d'exploitation/ Chiffres d'Affaires. C'est un indicateur
qui permet de déterminer la marge obtenue sur le coût de revient
de la production. Dans l'analyse de la demande de crédit, ce ratio est
un élément d'appréciation de la santé
financière de l'entreprise.
Le résumé financier quant à lui est un
état qui récapitule, sur les trois dernières
années, les chiffres clés de l'entreprise, leur variation en
pourcentage, l'évolution de l'activité et de la
trésorerie, de la rentabilité et de la structure
financière.
En fonction des résultats de l'analyse, l'analyste
crédit exigera du client un certain nombre de garanties visant à
réduire l'exposition de la banque au risque qu'elle prend.
2. Les garanties du crédit
L'exposition de l'entreprise au risque de contrepartie
présenté par le client sera réduite par les garanties que
celui-ci lui présentera. La CBC exige à cet effet à ses
clients un certain nombre de garanties dont les principales sont :
· Le cautionnement personnel et solidaire
(personnes physiques) : dans un cautionnement solidaire, la
caution, lorsqu'elle est sollicitée, est considérée
véritablement comme étant "emprunteur à la place de
l'emprunteur". Du fait même qu'elle soit solidaire, la caution renonce au
bénéfice de discussion et de division. Le caractère
personnel de la caution signifie que son engagement porte sur tous ses biens :
logement, revenus, autres biens personnels, etc.
· Le cautionnement solidaire (personnes
morales) : le cautionnement solidaire suppose la renonciation de
la caution au bénéfice de discussion et, si elles sont plusieurs,
au bénéfice de division. Le créancier poursuivra alors
directement tant le débiteur principal que la caution, ou même
seulement celle-ci. S'il y a plusieurs cautions solidaires, le créancier
choisira, soit de les poursuivre toutes, soit l'une seulement ou quelques-unes
d'entre elles et réclamera à chacune paiement intégral de
la dette. La mise en demeure à l'une seulement de ces personnes produit
ses effets et fait courir les intérêts à l'égard de
toutes.
· L'hypothèque :
l'hypothèque est un droit grevant un immeuble et constitué au
profit d'un créancier en garantie du paiement d'une dette. Une
hypothèque est un droit réel sur un bien immobilier qui est
constitué en garantie d'une obligation déterminée,
généralement pour garantir un crédit. Si une
hypothèque est constituée, le créancier (la banque)
reçoit le droit de vendre le bien immobilier si le débiteur ne
respecte pas ses obligations comme convenu. Dans ce cas, le créancier
peut soustraire le montant qu'il a encore en crédit du débiteur
du produit de la vente avec privilège sur d'autres créanciers
éventuels.
· Le gage de bon de caisse : le
débiteur peut donner en gage au créancier toute une série
de valeurs mobilières en garantie de son engagement. Le gage peut
être constitué par un acte sous seing privé ordinaire. Dans
cet acte, les biens donnés en gage seront décrits minutieusement.
Pour être valable, la loi exige une dépossession des choses
données en gage, ce qui s'opère généralement par la
remise en conservation des biens au détenteur du gage ou à un
tiers.
· Le nantissement : le nantissement
est une sureté conventionnelle. Les nantissements les plus
utilisés à la CBC sont les nantissements de compte
d'épargne sur livret, les nantissements de DAT, les nantissements des
stocks, matériels et autres équipements...
· La lettre de confort : la lettre
de confort, appelée aussi lettre d'intention est un acte écrit
par lequel une personne prend vis à vis du bénéficiaire de
la lettre des engagements de faire ou ne pas faire afin d'apporter son soutien
à une autre dans l'exécution de ses obligations envers ce
bénéficiaire.
· A côté de celles-ci, on peut avoir
l'assurance invalidité décès (AID), l'assurance incendie
et risques divers, la lettre d'intention forte, l'attestation de virement
irrévocable...
Au final, la gestion du risque de contrepartie est un
processus qui débute lors de la demande de crédit par le client
et conduit à la notation de ce dernier en fonction des garanties qu'il
proposera à son banquier.
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