II.2. Analyse de la motivation
La motivation première pour les cultures
maraîchères est économique pour la plupart des producteurs.
L'objectif est la quête de revenus pour satisfaire les besoins
socio-économiques. La première vocation du maraîchage vise
moins l'auto-consommation que les revenus maraîchers qui jouent un
rôle déterminant dans l'équilibre économique de
l'exploitation familiale. (ZALLE
D., 1999). Certains, expliquent cette
situation par l'évolution des jardins potagers en jardins
maraîchers. Le jardin potager avait pour objectif la satisfaction des
besoins alimentaires du ménage et était entretenu autour des
cases. Cependant, avec l'accroissement des populations notamment dans les
villes, conjugué au changement des habitudes alimentaires et la
pauvreté qui sévit avec plus d'acuité en milieu rural, la
vocation sociale du maraîchage est devenue économique. Elle
justifie de nos jours l'ampleur de cette activité autour des centres
urbains notamment en zone périurbaine.
Les cultures maraîchères ont évolué
à partir des potagers familiaux parce que des jardiniers y ont vu la
possibilité de gagner leur vie. Le désir de mieux manger pour les
maraîchers est donc secondaire. Cette option confirme peu l'idée
selon laquelle les produits maraîchers améliorent le régime
alimentaire des maraîchers.
La motivation économique a également une
influence sur les quantités et variétés consommées.
En fait, elle réduit considérablement les quantités
consommées par les maraîchers et limite leur consommation à
quelques variétés, dans le but de rentabiliser
l'activité.
II.3. L'analyse des habitudes alimentaires
Les produits maraîchers sont disponibles pour les
familles des maraîchers, mais, ils sont peu consommés. Cette
situation pourrait s'expliquer en plus du choix économique, par les
habitudes alimentaires. Ces produits sont peu intégrés dans les
habitudes alimentaires des ménages des maraîchers. Ils
accompagnent généralement les aliments de base et ceci,
uniquement pendant la saison sèche lorsque ces ménages ne
disposent pas de techniques de conservation. Certains auteurs comme
AZOULAY G., DILLON J.C (1999) qualifient cette situation
d'insécurité alimentaire saisonnière. D'autres auteurs se
sont basés sur les modes de consommation des produits maraîchers
susceptibles d'avoir une influence sur les éléments nutritifs
apportés par les légumes dans le régime alimentaire.
II.4. L'analyse du mode de consommation
La consommation des légumes a longtemps eu un
caractère local, les paysans consommant les produits adaptés aux
conditions économique et sociale locales. Les ménages ignorent la
présence de nutriments essentiels contenus dans les produits
maraîchers. Les pratiques alimentaires des ménages en milieu rural
ne suivent pratiquement pas les règles et les normes de bases admises
pour améliorer leur régime alimentaire.
L'apport nutritionnel des légumes cuits est
différent de celui des légumes crus. Il est important de
consommer des légumes crus, car leurs éléments nutritifs
ne sont pas altérés par la cuisson (DELISLE, H.,
1998). Malheureusement en milieu rural, le mode de
consommation sous forme de crudité est rare. Ce mode de consommation du
cru est plus fréquent en milieu urbain.
La cuisson des légumes doit être la plus
brève possible; la surcuisson les rend insipides et
détrempés, et leur fait perdre une certaine quantité de
vitamines et de minéraux (KANKONDE M, TOLLENS E.,
2001). Ainsi une cuisson à forte température et
de courte durée entraînera une perte limitée de vitamines B
et C. La cuisson occasionne une diminution importante de la saveur et de la
valeur nutritive, surtout lorsqu'on surcuit les légumes et qu'on jette
l'eau de cuisson par la suite. Il est nécessaire de cuire les
légumes à couvert, à l'exception des légumes verts.
La cuisson à couvert permet de réduire le temps de cuisson ainsi
que l'évaporation des substances volatiles; ce qui conserve la saveur,
préserve la couleur et la valeur nutritive des légumes. Dans le
cas des légumes verts, il est conseillé de les cuire à
découvert, car les acides qu'ils contiennent se concentrent (à
couvert), détruisent la chlorophylle et les décolorent. Il est
recommandé de plonger tous les types de légumes dans une eau
à pleine ébullition, ce qui permet de neutraliser rapidement les
enzymes qui détruisent les vitamines. Le temps de cuisson des
légumes doit être le plus bref possible. Des légumes encore
croquants ont plus de saveur et de valeur nutritive. La cuisson à la
vapeur consiste à cuire les légumes par la chaleur
dégagée par l'ébullition d'une petite quantité
d'eau. Ce mode de cuisson entraîne une perte d'éléments
nutritifs et de saveur moindre que la cuisson à l'eau. Le temps de
cuisson est légèrement plus long que pour la cuisson à
l'eau.
La cuisson des légumes au four à micro-ondes
donne de très bons résultats. Elle permet de conserver la
couleur et la saveur des légumes plus adéquatement que tout autre
mode de cuisson.
Toutes ces techniques de cuissons qui conservent la valeur
nutritive des légumes sont très peu utilisées par les
ménages pauvres en milieu rural.
II.5. Composition des légumes en
nitrates
Les légumes sont des éléments importants
d'un régime alimentaire sain et équilibré et leur
consommation quotidienne en quantité suffisante peut contribuer à
réduire le risque de certaines maladies. L'OMS recommande une
consommation journalière de 400 Grammes de fruits et de légumes.
Mais en raison du fait que les légumes et les fruits comportent 50%
à 70% de nitrates, le groupe scientifique sur les Contaminants de la
Chaine Alimentaire (CONTAM) de l'Autorité Européenne de la
Sécurité des Aliments (EFSA) a évalué les risques
et les bénéfices pour le consommateur de la présence de
nitrates dans les légumes en juillet 2008. Ce groupe scientifique a
estimé qu'un consommateur moyen qui ingère approximativement 400
g de légumes et de fruits mélangés par jour ne
dépasserait pas la Dose Journalière Admissible (DJA) pour les
nitrates1. Pour estimer l'exposition au risque, le
groupe s'est fondé sur léventualité que la totalité
des 400 g de fruits et de légumes ingérés par les
consommateurs puissent n'être constitués que de légumes
dont la teneur en nitrates est considérablement plus
élevée que celle des fruits.
Les principales sources de nitrates dans l'alimentation sont
les légumes, la viande en conserve et l'eau de boisson, mais les
légumes et les fruits peuvent représenter plus de la
moitié, voire les deux tiers, de l'ingestion totale de nitrates. La
plupart des légumes contiennent des nitrates, en quantité
variable, mais le facteur critique d'une exposition alimentaire
élevée aux nitrates n'est pas la quantité absolue de
légumes consommée mais le type de légumes (par exemple des
légumes feuilles) et la concentration respective de nitrates. Les taux
plus élevés de nitrate peuvent être décelés
dans les légumes-feuilles, tels les épinards, la laitue, etc.
(Autorité Européenne de Sécurité des
Aliments (EFSA), 2008). La teneur des légumes en nitrates varie
également en fonction d'autres facteurs, comme l'ampleur de
l'utilisation d'engrais à base de nitrates et l'exposition des
légumes à la lumière solaire (les légumes
cultivés dans les pays du
1 Une dose journalière admissible (DJA) pour les
nitrates de 3,7 mg/kg de poids corporel/jour a été établie
par l'ancien comité scientifique de l'alimentation humaine (CSAH) et a
été confirmée en 2002 par le Comité mixte FAO/OMS
d'experts des additifs alimentaires (JECFA). Le groupe CONTAM a noté que
l'on n'a identifié aucune nouvelle donnée susceptible de rendre
nécessaire la révision de la DJA. La DJA est la quantité
d'une substance spécifique dans les aliments qui peut être
ingérée par voie orale pendant la durée de la vie sans
risque notable pour la santé)
nord de l'Europe ont tendance à présenter une
teneur en nitrates plus forte). Cette teneur des légumes en nitrate
montre ici que la consommation en grande quantité des produits
maraîchers peut aller contre l'objectif de l'amélioration du
régime alimentaire.
CHAPITRE 2 : CULTURES MARAICHERES ET ACCESSIBILITE
ECONOMIQUE AUX AUTRES ALIMENTS
Selon FAO (1995), la plupart des sous
alimentés du monde vivent dans 88 pays à faible revenu. Ainsi,
certains spécialistes ont affirmé que les grandes famines du XX
ème siècle n'ont pas été liées
à des baisses de la production alimentaire par habitant, mais
plutôt à celle de la capacité des individus
concernés à se procurer des denrées alimentaires avec
leurs revenus et leurs richesses (FMI et Banque Mondiale,
1990).
I. IMPORTANCE ECONOMIQUE DU MARAICHAGE
L'importance économique des cultures
maraîchères se retrouve dans les revenus qu'elles procurent aux
maraîchers. De nombreux écrits révèlent cette
importance économique.
L'introduction du PAS dans les années 1980 a eu pour
conséquences dans la plupart des pays africains, la dégradation
des finances publiques et le désengagement de l'Etat de certaines de ses
fonctions primaires. En milieu rural, la libéralisation s'est traduite
par un retrait de soutien de l'Etat aux activités de production
(encadrement des producteurs, crédits de campagne et une hausse des prix
des intrants,). La pauvreté en milieu rural s'est progressivement
installée du fait de la faible rémunération des
activités agricoles. Au nordCameroun, la crise économique a
révélé la fragilité de la filière coton,
fortement dépendante des marchés mondiaux (ESSANG T. et
al, 2003). La chute des cours mondiaux des années 90 a
entraîné la baisse du prix d'achat aux producteurs. Dans une
optique de diversification des sources de revenus monétaires, le
maraîchage se présente comme une voie prometteuse.
Ces mêmes auteurs ont montré que des
différentes cultures maraîchères, l'oignon est la
première spéculation légumière et la seconde
spéculation commerciale après le coton. Le niveau de production
national est estimé à environ 60 000 tonnes/an. Les provinces du
nord et de l'extrêmenord contribuent pour 85 % de la production
nationale. Cette culture couvre une superficie de plus de 3 400 ha avec 13 600
producteurs qui obtiennent annuellement plus de 6 milliards de F CFA.
DEGUENON. E (2000) montre l'importance de
l'activité maraîchère sur les plans
économique, social et environnemental à Cotonou au Benin. La
production maraîchère constitue
l'activité principale génératrice de
revenus monétaires pour la plupart des maraîchers membres de
l'UCP-Cotonou parce qu'elle rapporte plus de 300 millions de F CFA de marge
brute par an.
Selon BROUTIN C. P. G. et SOKONA K. C. (2005)
cette activité constitue la principale source de revenu de 900
maraîchers à Thiès au Sénégal (cf. tableau
N°3).
Tableau 3: Répartition du revenu annuel des
maraîchers selon l'activité en pourcentage
%
|
Maraîchage
|
Cultures hivernales
|
Autre
activité de
culture
|
Arboriculture
|
Elevage
|
Exploitation rônier
|
Activité
extra agricole
|
Maraîchers Périurbains
|
98
|
0,1
|
0,2
|
|
0,7
|
5,2
|
1,1
|
Maraîchers Ruraux
|
27
|
5,3
|
|
12,4
|
15,8
|
18,6
|
20,8
|
Source : BROUTIN C. P. G. et SOKONA
K. C. (2005)
Le revenu mensuel moyen pour les maraîchers
périurbains est d'environ 160 000 F CFA (soit plus de 4 fois le SMIG -
35 000 F CFA/mois). Chez les maraîchers ruraux qui produisent
essentiellement du piment en hivernage (soit pendant 4 mois), le revenu mensuel
moyen est d'environ 24 000 F CFA.
ZALLE D. (1999) fait une comparaison des
revenus du maraîchage à ceux d'autres secteurs en 1994 à
Bamako. Les maraîchers ont été classés par
catégorie en fonction de la superficie exploitée.
Les revenus dans les plus petites exploitations (5 592 F CFA)
sont comparables aux salaires du personnel de maison (2 500 à 25 000 F
CFA). Les producteurs de la seconde catégorie (23 727 F CFA) arrivent
à obtenir un revenu mensuel supérieur au SMIG (Salaire Minimum
Interprofessionnel Garanti) et assimilable aux salaires des agents subalternes
(catégorie « C ») de la Fonction publique malienne (27 053
à 60 028 F CFA). Ce sont des ouvriers, des gardiens en quête de
complément de solde face aux difficiles conditions de vie en ville. Les
revenus déclarés dans les exploitations de la catégorie 3
(68 864 F CFA) correspondent à ceux des fonctionnaires de la
catégorie « B » et de classe exceptionnelle (34 566 à
88 121 F CFA). Tous les travailleurs maliens de ce groupe n'atteignent pas
facilement cette classe, car il leur faut beaucoup de temps et d'efforts. Les
maraîchers des exploitations de la catégorie 4 (153 100 F CFA)
n'ont rien à
envier à leurs homologues de la fonction publique du
point de vue des salaires, leurs gains se situant dans l'échelle des
salaires de la catégorie « A », de classe exceptionnelle (54
177 à 166 780 F CFA). Rares sont les salariés qui en
bénéficient. Quant aux propriétaires des plus grandes
exploitations (245 565 F CFA), leurs revenus dépassent largement les
salaires des fonctionnaires de la catégorie « A ». Ils sont
peu nombreux et disposent de gros moyens. Ce sont surtout des grands
fonctionnaires nationaux ou internationaux et des gros commerçants.
Le maraîchage est capable de procurer des revenus
réguliers tout au long de l'année. KOUVONOU
F.M., HONFOGA B.G. et DEBRAH S.K.
(2003) estime les revenus brut et net du maraîchage
à Lomé. La production est étalée sur toute
l'année. Les résultats sont consignés dans le tableau
suivant :
Tableau 4: Revenu net (en milliers de FCFA) et
rentabilité du maraîchage sur une exploitation moyenne
Rubriques
|
Femmes (0,24 ha)
|
Hommes ( 0,35 ha )
|
Ensemble ( 0,34 ha)
|
Montant
|
Revenu brut
|
2450
|
3 355
|
3 096
|
Charges totales
|
705
|
965
|
872
|
Revenu net/an
|
1745
|
2 390
|
2 224
|
Revenu net/ha/an
|
7271
|
6 829
|
6 541
|
Revenu mensuel
|
145
|
199
|
185
|
Ratio revenu net/charges
|
25
|
25
|
25
|
Source : KOUVONOU
F.M., HONFOGA B.G. et DEBRAH S.K. (2003)
Le maraîchage à Lomé est une
activité hautement rentable. Le revenu net moyen sur un domaine moyen
(0,34 ha) est de l'ordre de 2,2 millions de F CFA par an, soit 6,4 millions F
CFA/ha/an. Le revenu mensuel (net) du maraîcher est en moyenne de 185 000
F CFA, soit de 10 fois le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti)
actuel et voisin de celui d'un haut cadre dans l'administration publique mais
les hommes gagnent 37 % plus que les femmes. L'importance de cette
activité est également prouvée par NGUEGANG P., et
al,. 2005 à Yaoundé où le revenu est compris
entre 45-100.000 FCFA/ mois et ceci pour 43 % des maraîcher. 25% de ces
maraîchers ont un revenu compris entre 25- 40.000 FCFA alors que 16 % ont
un revenu moyen inférieur au SMIG (moins de 29.000 FCFA).
BOGNINI S. (2006), a montré que des
revenus non négligeables sont tirés de l'activité
maraîchère à Réo et à Goundi au Burkina Faso.
Les revenus nets annuels du maraîchage sont compris entre 3 775FCFA et
674 250 FCFA pour 76 % des ménages ayant réalisé un
bénéfice à Goundi. Le revenu net moyen pour le village de
Goundi est de 119 731 FCFA/ménage. Parmi ces ménages 28% sont
au-dessus de la moyenne et le revenu le plus élevé est
estimé à 674 250 FCFA. A Réo, le revenu net moyen est
évalué à 94 993 FCFA/ménage ; 17 % des
ménages sont au-dessus de cette moyenne avec comme revenu le plus
élevé 668 500FCFA. Pour l'ensemble des ménages à
Réo et à Goundi, le revenu net moyen annuel pour le
maraîchage est de 107 362 FCFA.
Les cultures maraîchères rapportent à
elles seules 61% des revenus monétaires comparativement à la
moyenne nationale estimée à 8,5% en 2003 (INSD,
2003). Elle reste de ce fait la principale source de revenu de ces
localités.
II. REVENUS MARAICHERS ET ACCESSIBILITE ECONOMIQUE AUX
AUTRES DENREES ALIMENTAIRES
Les revenus générés par le
maraîchage ont pour objectif la satisfaction des besoins
socioéconomiques du ménage. Parmi ceux-ci figurent les besoins
alimentaires. Ainsi, d'importantes sommes y sont consacrées chez les
ménages pratiquant le maraîchage.
La vente des produits du maraîchage peut
améliorer de façon sensible les revenus du ménage, surtout
à certaines périodes de l'année quand d'autres sources
d'emploi ou de revenus sont limitées, ou bien quand les récoltes
sont mauvaises à cause d'une catastrophe naturelle (inondation,
infestation par les ravageurs, maladie chez les animaux ou dans la famille)
(VERHEIJ E. et HENK W., 2008). En ce moment, le revenu du
jardin potager peut être utilisé pour acheter des aliments que la
famille ne peut pas produire. KANKONDE M. et TOLLENS E. F.
(2001), ont fait la répartition des dépenses
après la vente des produits maraîchers dans quatre centres
maraîchers proches de Kinshasa à savoir Kimbanseke, Funa, Cecomaf
et Bandal. Les résultats sont consignés dans le tableau suivant
:
Tableau 5: répartition de l'utilisation des
revenus maraîchers par zone de culture
Affectation
|
Kimbanseke
|
Funa
|
Cecomaf
|
Bandal
|
Total
|
Fréquence
|
%
|
Fréquence
|
%
|
Fréquence
|
%
|
Fréquence
|
%
|
Fréquence
|
%
|
Alimentation ménage
|
50
|
43,5
|
50
|
38,8
|
49
|
34
|
46
|
37
|
195
|
39
|
Soins de santé
|
27
|
23,5
|
38
|
29,5
|
50
|
34
|
36
|
29
|
141
|
28
|
Epargne
|
15
|
13
|
6
|
4,7
|
4
|
3
|
8
|
6
|
33
|
7
|
Scolarité
|
21
|
18,3
|
31
|
24
|
37
|
25
|
25
|
20
|
114
|
23
|
Paiement loyer
|
2
|
1,7
|
4
|
3,1
|
4
|
3
|
6
|
5
|
16
|
3
|
Autres
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
1
|
3
|
2
|
5
|
1
|
Total
|
129
|
100
|
129
|
100
|
146
|
10 0
|
124
|
100
|
504
|
100
|
Source : KANKONDE M, TOLLENS E
(2001)
Une grande partie des revenus maraîchers est
consacrée à l'alimentation du ménage.
BOGNINI.S, (2006) montre que, 96,8% des
maraîchers à Réo et 92,30% de ceux de Goundi font recours
à l'achat de vivres. Ces achats concernent les céréales
notamment le mil et le sorgho. L'agriculture pluviale y étant
pratiquée sur des terres appauvries et dégradées qui
procurent en effet des récoltes insuffisantes. En moyenne, 46 885 FCFA
issus du revenu du maraîchage à Goundi et 27 315 FCFA à
Réo sont utilisés à des fins alimentaires.
Ces revenus assurent un épargne pour l'achat d'aliments
en période difficile compte tenu de la faiblesse de la production
agricole liée aux aléas climatiques et souvent les contraintes
foncières. Dans ces conditions, les cultures maraîchères
garantissent l'accessibilité économique des ménages aux
denrées alimentaires qui est une des préoccupations de la FAO en
vue de l'éradication de l'insécurité alimentaire. Mais,
l'accroissement des revenus à lui seul ne garantit pas la
sécurité alimentaire.
III. L'ACCESSIBILITE ECONOMIQUE ET LA DISPONIBILITE
ALIMENTAIRE
L'approche économique selon laquelle une
amélioration des revenus réduit la vulnérabilité
des maraîchers a occulté certains paramètres de la
sécurité alimentaire. Cette approche n'a pas pris en compte le
lien existant entre l'accessibilité économique,
l'accessibilité physique ou géographique et la composante
disponibilité. En établissant le lien entre ces composantes de la
sécurité alimentaire, les revenus ne mettent pas à l'abri
les maraîchers après la vente des récoltes. En effet, les
produits peuvent être souvent inaccessibles par manque de moyen de
transport ou l'état défectueux des voies de communication. Ainsi,
une zone peut être excédentaire en produits
agricoles (céréales) et ne pas pouvoir les
écouler. Dans ces conditions, l'augmentation de la production
maraîchère dans les zones déficitaires en
céréales ne resoud pas le problème de
l'insécurité alimentaire.
Selon AZOULAY G., DILLON J.C (1999), la
disponibilité de denrées alimentaires en quantités
adéquates au niveau national et régional n'est pas une condition
suffisante pour garantir la satisfaction des besoins nutritionnels des
ménages, car ceux-ci n'accèdent pas nécessairement aux
biens disponibles. L'exemple des disponibilités alimentaires en Afrique
confirme ce point de vue. Globalement, les disponibilités alimentaires
de ce continent étaient suffisantes pour répondre au besoin
énergétique de la population en 1986. Les bilans de cette
période indiquaient, une disponibilité de 2 158
calories/habitant/jour alors que les besoins étaient estimés
à 2 112 calories/habitant/jour. Mais l'accès économique ou
physique n'est pas assuré. Ainsi, l'état nutritionnel ne peut
s'améliorer par la seule croissance des revenus. Le niveau de revenus
peut être également influencé par:
les systèmes de commercialisation;
des comportements sociaux spécifiques des
ménages.
III.1. L'accessibilité économique et
variation des prix des denrées alimentaires
L'augmentation des prix des denrées alimentaires peut
limiter l'accès économique des ménages même si les
revenus sont disponibles pour des raisons structurelles et conjoncturelles.
Les raisons conjoncturelles peuvent tenir par exemple d'une
crise climatique comme les années de sécheresse dans les pays
sahéliens en Afrique, de la dégradation des terres arables ou de
la hausse des prix des intrants. En effet, les surfaces arables du globe sont
en réduction depuis plusieurs dizaines d'années sous l'effet de
plusieurs facteurs : urbanisation des meilleures terres (notamment en Asie),
processus de désertification, impact du réchauffement climatique
et érosion des terres arables fragiles causée par la
déforestation ou l'abus des techniques d'intensification.
A l'échelle du globe, les pertes de surfaces arables
sont estimées entre 70 000 et 140 000 km2 par an (soit
-à titre de comparaison entre 12 et 25% du territoire français).
Ce chiffre est estimé à plus de 100 000 km2
(SUNDQUIST. B, 2000). Les aléas climatiques peuvent
réduire de façon
brusque l'offre de produits alimentaires et entrainer
l'augmentation de leur demande sur le marché mondial et faisant ainsi
exploser leurs prix. A la crise climatique, peuvent enfin s'ajouter les
fluctuations du prix de pétrole. Le quasi quadruplement du prix du
pétrole depuis 2003 (30$ à 146$ le baril) par exemple a
augmenté considérablement le coût des fertilisants et des
machines agricoles et leur transport.
Les causes conjoncturelles sont pour l'essentiel la baisse des
stocks céréaliers qui gonfle leur prix sur le marché. A
titre indicatif, selon de la FAO, les stocks céréaliers sont
tombés à leurs plus bas niveaux depuis plus de vingt ans compte
tenu du renforcement de la demande et du déficit de la production
céréalière mondiale en 2007(FAO, 2008). Par rapport aux
besoins d'utilisation, les stocks mondiaux de céréales au moment
de la clôture des campagnes se terminant en 2008 devraient
s'établir à tout juste 405 millions de tonnes, ce qui
représente une perte de 22 millions de tonnes (5%) par rapport à
leurs niveaux d'ouverture déjà réduits, et le volume le
plus faible enregistré depuis 1982. Cette prévision est
également inférieure de quelques 15 millions de tonnes au chiffre
publié en décembre. Ainsi, le rapport entre les stocks
céréaliers mondiaux et l'utilisation recule lui aussi de 1% par
rapport au faible niveau de la campagne précédente, pour se
chiffrer à 19,2% seulement.
Au niveau des pays, la chute du prix des matières
premières exportées, ou une dévaluation importante, peut
réduire brusquement la capacité d'importer ; ou encore d'un
incident politique, si le pays se trouve soumis par les grandes puissances (qui
sont aussi les grandes nations exportatrices de produits alimentaires) à
un blocus ou à d'autres restrictions aux échanges. En outre, La
libéralisation totale des prix des denrées alimentaires, faisant
suite à une longue période de contrôle strict et de
politiques de soutien, aboutit inévitablement à une
flambée des prix. Selon la FAO, la crise alimentaire mondiale de
2007-2008 a pour origine une forte hausse du prix des denrées
alimentaires de base, plongeant dans un état de crise quelques unes des
régions les plus pauvres du monde et causant une instabilité
politique et des émeutes dans plusieurs pays notamment en Afrique.
Depuis le début de l'année 2007, les prix de bon nombre de
matières premières agricoles et denrées alimentaires de
base ont augmenté de façon significative sur les marchés
internationaux. L'indice FAO des prix des produits alimentaires est
passé de 139 à 219 entre février 2007 et février
2008, les plus fortes augmentations concernant les céréales
(indice 152 à 281) et les produits laitiers (indice 176 à 278).
Cette augmentation des prix rend de plus en
plus vulnérable les ménages en milieu rural qui ont
pour principal recours aux aliments, l'achat sur les marchés.
Selon le PAM (2008), les dépenses
alimentaires, qui représentaient près de 50 à 60 % du
budget des ménages en juin 2007 à Ouagadougou et à Bobo
Dioulasso, sont maintenant estimées à 75 % de leur budget. Pour
faire face à la flambée des prix, les ménages pauvres
réduisent la quantité et la qualité de leurs repas
quotidiens.
III.2. L'accessibilité économique et autres
paramètres
Des comportements socio-culturels peuvent limités les
possibilités économiques offertes par les revenus
maraîchers en matière de sécurité alimentaire. La
priorité peut en effet être accordée aux dépenses
liées aux cérémonies (funérailles) au
détriment de celles liées à l'alimentation.
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