1-2 Situation des finances publiques dans l'UEMOA
Musgrave (1959) affirme que les politiques budgétaires
assument trois fonctions : la fonction d'affectation qui est celle de
production de biens collectifs du fait de l'incapacité du marché
a assuré la production de ceux-ci ; la fonction de redistribution qui
permet de réduire les inégalités entre individus ou groupe
d'individus en corrigeant les effets des mécanismes de marché sur
la répartition des revenus et de réduire les
inégalités entre individus ou groupes sociaux et la fonction de
stabilisation qui est celle d'intervention macroéconomiques. Il existe
de nombreuses interactions et complémentarités entre ces trois
fonctions.
L'état utilise les stabilisateurs automatiques et les
politiques budgétaires
discrétionnaires pour accomplir la fonction de
stabilisation. Le principe de stabilisation automatique est la tendance qu'ont
les recettes fiscales à fluctuer avec le niveau de l'activité
économique. L'efficacité de la stabilisation budgétaire
automatique dépend alors de la taille des finances publiques, de la
progressivité de la fiscalité et de l'intensité des
redistributions. Ces mécanismes peuvent être compléter par
des mesures contra cycliques. Les politiques budgétaires
discrétionnaires de types keynésiennes sont depuis les
années 1970 soumises à de nombreuses contraintes qui limitent
leur liberté d'action.
En effet, dans les pays de l'UEMOA, la politique
budgétaire se heurte entre autre aux contraintes de déficit
public, au poids de la dette publique et au risque d'érosion de la base
imposable :
> La contrainte du déficit public: Dans les pays de
l'UEMOA dont les taux de croissance sont faibles par rapport aux taux
d'intérêt, le financement des déficits budgétaires
devient problématique. A cet effet, toute dépense non
financée par
les recettes courantes entraînent une augmentation de
l'endettement publique qui vient a son tour grever les finances publiques ;
> Le poids de la dette publique : La progression de la
dette publique peut entraîner une hausse de l'endettement induite par
l'élévation de la charge de la dette qui conduit aux
déficits publics peu compressibles. Ainsi, l'effet d'éviction
peut léser l'investissement, ce qui entraînera à son tour
un affaiblissement des perspectives de croissance ;
> Le risque de l'érosion de la base imposable :
Malgré l'intégration monétaire, on peut observer une
faible mobilité du travail dans l'union. Ce qui permet de
préserver l'efficacité de la politique budgétaire
nationale comme instrument d'ajustement. Ce pendant, l'approfondissement de
l'intégration entraîne de plus en plus la mobilité des
facteurs qui a pour conséquence l'augmentation des impôts et
taxes. Cette dernière peut engendrer la fuite de la base imposable vers
les Etats voisins où la pression fiscale est moins forte. Ainsi, la
concurrence fiscale peut donc limiter les marges de manoeuvres des
décideurs publics ce qui nécessite donc une harmonisation
fiscale.
Du fait de l'existence de ces contraintes qui pèsent
sur les finances publiques nationales et le défaut de coordination des
politiques publiques nationales dans l'UEMOA , les autorités ont
privilégié une hiérarchie des objectifs
macroéconomiques par la primauté au monétaire. Dans ce
conteste, « la lutte contre les différentiels d'inflation au nom de
la stabilisation de la monnaie devient prioritaire. Les autres objectifs de la
politique économique, croissance et emploi, acquirent un statu de second
ordre voir dépendant de la réussite de la politique contre
l'inflation » (Echinard ; 1999).
Face aux limites de la politique budgétaire nationale,
on peut alors se poser la question de savoir si les finances publiques
communautaires seraient capables d'assurer la stabilisation de l'union face
à un choc économique. Les partisans du fédéralisme
budgétaire estiment qu'il faut « centraliser » les finances
publiques pour assurer la soutenabilité de l'union monétaire.
Toutefois, ils recommandent l'autonomie des finances publiques nationales afin
de leur permettre d'exercer un rôle de stabilisation. A cet effet, cette
théorie démontre que l'autonomie budgétaire peut limiter
les externalités négatives des politiques budgétaires
nationales.
Supposons que deux pays de l'UEMOA, par exemple la Cote
d'Ivoire et le Bénin, connaissent un choc de demande asymétrique
qui se traduit par une augmentation de la demande des consommateurs de l'union
pour les produits ivoiriens et une baisse de la demande pour les produits
béninois. Supposons également, que les budgets
dédiés aux dépenses sociales ne soient pas
centralisés au niveau de l'union. Ainsi, si la demande pour les produits
béninois baisse, la production diminue et le déficit
budgétaire se creuse du fait de la baisse des recettes fiscales et de
l'accroissement des dépenses sociales. Il se produit un
phénomène exactement contraire en Cote d'Ivoire. Toute chose
égale par ailleurs, la Cote d'ivoire va réaliser un surplus
budgétaire alors que le Bénin financera son déficit par
l'emprunt. Dans cette optique, le besoin de financement du Bénin va
être alimenté par l'excès d'épargne de la Cote
d'Ivoire, si les marchés fonctionnent correctement. Ainsi, la politique
budgétaire nationale peut permettre d'amortir de façon partielle
une partie des chocs asymétriques négatifs de la demande.
Supposons qu'il existe maintenant une caisse communautaire dans
l'union
constituée de la cotisation de chacun des pays membres
pour financer les dépenses sociales afin de permettre d'atténuer
les mêmes chocs de départ dans la zone. Dans ce contexte, il
existera un mécanisme de redistribution automatique entre le
Bénin et la Cote d'Ivoire qui compensera la baisse de la demande du
produit béninois. Le budget communautaire jouera alors un rôle
d'amortisseur des chocs dans l'union. Ce pendant, un tel système
même s`il n'est pas incompatible avec la mise en place d'une politique
budgétaire nationale serait très difficile à mettre en
oeuvre parce qu'il suppose une harmonisation des dépenses sociales sur
l'union monétaire. En conséquence, le niveau atteint par les
finances publiques leurs permet de compenser les pertes de l'instrument
monétaire. Ainsi, un diagnostic sur l'évolution des finances
publiques de l'union (« centraliser ») est donc nécessaire. Le
tableau ci-dessous donne l'état des finances publiques dans l'UEMOA.
Tableau n° 1: Etat des finances publiques dans l'UEMOA
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2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
Recettes totales
|
4297,7
|
4633,3
|
4979,4
|
5839,6
|
Dépenses totales
|
4844,4
|
5279,7
|
5731,7
|
6393,5
|
Solde
budgétaire de
base
|
-1,2
|
-1,7
|
-1,8
|
-1,3
|
Source : BCEAO
Les recettes totales ont connu une croissance de 2004 à
2005 en passant de 4297,7 millions à 5839,6 millions dans l'UEMOA. Soit
un accroissement de 35,86 % entre 2004 et 2005 contre 7,24% au cours de la
période 2004-2005. De même, les dépenses totales ont connu
un accroissement de 31,98 % au cours de la période 2004-2007 .Quant au
solde budgétaire, il est resté négatif sur toute la
période. Cette situation pose donc la problématique du coût
de l'autonomie de la politique budgétaire.
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