Conclusion :
La défiscalisation Girardin a permis d'accroitre
l'offre locative de manière quantitative mais n'a pas su apporter des
réponses qualitatives réellement satisfaisantes. Ce dispositif a
nourri considérablement un seul segment du marché et à
l'excès ce qui est regrettable.
Nous l'avons vu en effet, les besoins en termes d'offre
locative sont bien plus diversifiés. D'un coté, l'offre en
véritables logements intermédiaires doit être
développée notamment au travers des PLS. D'un autre
coté, l'offre en logements locatifs sociaux doit
95 20% de ces locataires se trouvent dans le parc
traditionnel, et 40% logent dans des petits logements (T1 et T2). Ces deux
constats nous font supposer qu'une partie subit des conditions de logements
indignes, car c'est souvent le cas du parc traditionnel, ou alors de
surpeuplement.
impérativement être renforcée. La baisse
considérable de la production de logements sociaux de ces
dernières années a entrainé une situation de crise sans
précédent. En effet, la production de logements sociaux a
toujours été en deçà des besoins et la faible
production de ces dernières années a considérablement
creusé l'écart. Les difficultés des bailleurs à
produire de nouveaux logements dans le contexte que nous avons
présenté (augmentation des différents postes,
difficulté de trouver du foncier etc....) nécessitent de mettre
en place de véritables solutions permettant de relancer la production de
logements locatifs sociaux.
En 2009, alors que le succès du dispositif Girardin
prenait fin, il a été décidé de réorienter
la défiscalisation en faveur du logement social, comme le
préconisait alors de nombreux acteurs et de nombreux rapports. Toute la
question est donc de savoir si ce dispositif peut constituer un
véritable levier pour la production de logements locatifs sociaux.
PARTIE 3 :
LA DEFISCALISATION DU LOGEMENT LOCATIF SOCIAL.
Après les années fastes de la
défiscalisation Girardin et la construction massive de programmes
immobiliers destinés à de la location libre ou
intermédiaire, nombreuses sont les personnalités publiques,
élus ou acteurs du monde du logement à avoir proposé une
réorientation du dispositif en faveur du logement social.
Il est vrai que les besoins en logement sociaux sont
relativement importants et le succès du dispositif Girardin avait vu en
parallèle la crise de la production de logements locatif sociaux battre
son plein. Mais la défiscalisation Girardin a elle aussi connu son
revers en 2008 lorsqu'un retournement du marché a sonné le glas
du dispositif.
En mai 2009 est alors votée la « Loi pour le
Développement Economique de l'Outre Mer > dite LODEOM. Un de ses
volets consistait notamment { réaménager l'outil de
défiscalisation en faveur du logement social.
Aujourd'hui, près de deux années après
l'instauration du dispositif, s'il est difficile d'établir un bilan de
celui-ci nous pouvons en revanche déjà nous interroger sur sa
pertinence comme levier pour la production de logements locatifs sociaux.
Nous verrons pour cela comment fonctionne ce dispositif et
quels sont les logements qu'il a permis de financer. Nous verrons
également que de nombreux éléments nuisent au bon
fonctionnement de ce dispositif mais aussi qu'il provoque de nombreux
débats. Enfin, nous tenterons de mettre en perspective nos observations
avec des préconisations pour répondre aux enjeux en
matière de logement social dans les années.
I) REORIENTER LA DEFISCALISATION EN FAVEUR DU LOGEMENT
SOCIAL
La défiscalisation du logement social est un nouveau
mode de financement qui diffère des montages financiers basés
essentiellement sur l'aide { la pierre perçue pour chaque
opération de logements. Elle permet en effet de mobiliser des fonds
provenant d'investisseurs pour relancer la dynamique de construction de
logements locatifs sociaux, qui avait été considérablement
ralenti pendant les années précédentes, en apportant un
équivalent-subvention supplémentaire.
En dépit du manque de recul dont nous disposons, qui
s'explique par la mise en place récente de ce dispositif, il semble
d'ores et déj{ que la défiscalisation parvienne { faire un effet
de levier en relançant la production de nouvelles opérations
Nous allons dans un premier temps expliquer le principe
juridique du fonctionnement de ce nouveau dispositif de défiscalisation,
puis présenterons le principe du recours aux Ventes en L'Etat Futur
d'Achèvement (VEFA) qui a débuté { la même
période. Enfin, nous reviendrons sur les bénéfices
quantitatifs de ce dispositif et nous nous interrogerons sur la concordance
qualitative entre cette nouvelle production et les besoins de la population.
I1) PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT
Le recours à la défiscalisation pour
réaliser des opérations de logements locatifs sociaux est un
montage complexe { mettre en oeuvre. Il convient pour cela d'expliquer
clairement en quoi consiste le montage d'une telle opération de
logements issue de ce dispositif
Au même moment que la défiscalisation est apparu
le rachat des opérations en Vente en L'Etat Futur d'Achèvement
des promoteurs immobiliers par les bailleurs de l'ile. Nous présenterons
donc également cette nouvelle manière qu'ont les bailleurs
sociaux de la Réunion d'accroitre leur patrimoine.
I-1-A) POINT JURIDIQUE
Le principe du régime de défiscalisation du
logement social se base sur deux articles du code Général des
Impôts (CGI).
Article 199 undécies C du CGI.
Il a été instauré par la LODEOM. Des
particuliers souhaitant bénéficier d'une réduction
d'impôt peuvent selon cet article investir dans une société
type Société Civile Immobilière(SCI) ou une
Société par Actions Simplifiée96 (SAS) pour la
réalisation d'un programme immobilier. Ce nouveau dispositif s'inspire
de l'article 199 undecies sur l'investissement productif qui fonctionne selon
le même schéma. Les logements sont considérés ici
comme de purs produits financiers et en aucun cas comme des investissements
patrimoniaux Chaque investisseur aura ainsi des parts dans la
société et sera rémunéré en fonction de ses
parts.
Le programme immobilier a pour obligation de posséder
un minimum de 30% de LLS mais il peut en avoir 100%. Le programme
réalisé n'est pas obligatoirement un même immeuble mais un
programme concerné par une même demande d'agrément. Il doit
nécessaire répondre à des critères de performances
énergétiques : équipement de production d'énergie
renouvelable, chauffe eau solaire et matériaux d'isolation permettant
l'économie d'énergie.
Les logements doivent obligatoirement être loués
à un bailleur social pendant 5 ans au terme desquels le logement sera
obligatoirement racheté par le bailleur. Pendant les cinq années
de location, le bailleur sous-loue les logements à des personnes
éligibles aux critères sociaux. Le changement de
propriété qui a lieu au bout des cinq années n'a aucune
conséquence pour les locataires du social.
Concernant le montant de la défiscalisation, il est
relativement faible pour les investisseurs au regard des dispositifs
précédents. En effet, la réduction d'impôt est de
96 Elles doivent pour cela recevoir l'agrément du
ministère.
50% du prix de revient mais l'investisseur doit
rétrocéder au minimum 65% de l'avantage fiscal { l'organisme de
logement social. Le bailleur obtient ainsi un montant d'environ
32.5%97 d'équivalente subvention
L'avantage fiscal est relativement faible pour l'investisseur
(de l'ordre de 20%) mais ce dispositif présente l'avantage d'être
sûr puisque le logement sera facilement loué et qu'il sera
obligatoirement revendu au terme des cinq années.
Article 217 undecies du CGI.
La défiscalisation du logement social repose
également sur cet autre article qui existait déjà depuis
la loi Girardin : il s'agit de la défiscalisation { l'impôt sur
les sociétés. Toutefois, il n'était pas réellement
utilisé comme tel. La mise en place de la LODEOM a donc permis a cet
article du CGI déjà existant d'être utilisé pour le
logement social.
Le principe est qu'une société peut déduire
de ses résultats imposables le montant d'un investissement qu'elle aura
réalisé dans le secteur du logement. Pour cela, elle doit
investir, comme pour les particuliers, dans une structure de portage type SCI
ou SAS. Contrairement { la défiscalisation { l'IR il n'est pas soumis {
un objectif de mixité et peut permettre de défiscaliser sur un
programme 100% intermédiaire. En revanche, c'est seulement sous
condition de respecter cette mixité et que les logements soient
financés par des prêts aidés qu'il est possible de
bénéficier d'une réduction de la Taxe sur la Valeur
Ajoutée.
Le montant de la défiscalisation dépend du taux
d'impôt sur les sociétés (de 34.33% en 2010).La
rétrocession au bailleur social s'élève { 75% de
l'avantage fiscal ce qui lui permet de récupérer
25.8%98 au minimum.99
Actuellement, les deux dispositifs sont utilisés sans
que l'on puisse aisément déterminer lequel prend le pas sur
l'autre.100 Toutefois, il semble que le dispositif basé sur
la défiscalisation { l'IR ait progressé car « les taux
de rétrocession aux locataires ont progresse grâce a l'efficience
des circuits de distribution et aux rendements attractifs
97 Soit 50% de 65
98 Soit 34.5% de 75
99 Ce montant peut être supérieur en fonction de la
concurrence entre différents produits.
100 Entretien avec M.Nodolon du cabinet INGEPAR.
réserves aux investisseurs. L'avantage pour le
locataire est que le taux de rétrocession est définitivement
fixe, ce qui n'est pas le cas de l'IS (risque de variation du taux d'IS)
». 101
La LODEOM a prévu trois modalités de financement
des opérations de logement social : -L'utilisation de la
défiscalisation uniquement
-L'utilisation de la Ligne Budgétaire Unique (comme
c'était le cas jusqu'{ présent) -Le cumul de la
défiscalisation et de la LBU.
L'agrément du ministre du budget ainsi que des services
de la DEAL est obligatoire même sans utilisation de la subvention de la
LBU puisque c'est une condition { l'obtention d'un prêt de la CDC.
Le schéma ci-dessous permet de mettre en
évidence le fonctionnement du montage des opérations en
défiscalisation que ce soit pour la défiscalisation { l'IR ou la
défiscalisation { l'IS.
101 Ibid
FIGURE 35: SCHEMA JURIDIQUE POUR L'UTILISATION DE LA
DEFISCALISATION
Source : d'après INFI
On constate avec ce graphique que le recours à un
cabinet de défiscalisation est nécessaire pour monter les
opérations ce qui constitue un intermédiaire
supplémentaire.
|