PARAGRAPHE 1 : LE DROIT D'ASSISTANCE HUMANITAIRE OU
DROIT
D'INGERENCE
Le droit d'assistance humanitaire est ce qui permet aux Etats
d'intervenir auprès des populations en détresse lorsqu'elles ne
peuvent être secourues par leur propre Etat. Ce droit devrait pouvoir
s'appliquer en toute circonstance, de ce fait, il doit être un droit
dissuasif (1) là où la sécurité (2) principale
préoccupation du droit international occupe une place non moins
importante car incontournable dans les relations internationales.
1- Le droit d'ingérence, un droit de
dissuasion
Le droit d'ingérence est ce droit qui va dans le sens
de la dissuasion des faiseurs de guerre. Par un processus dynamique, il oeuvre
à l'interruption des conflits et par conséquent à la
restauration de la paix. C'est pourquoi d'après P. Y. CHICOT, nous
pouvons affirmer que << (...) On est davantage proche de la
réalité en parlant d'une société internationale,
qui agit, tantôt de manière parfaitement conforme au droit, et
tantôt de manière illicite, sans toutefois renier l'existence de
la règle de droit124 ». En effet, le droit
d'ingérence doit permettre à la communauté internationale
d'intervenir lorsqu'une situation l'exige. Parce que face à une
situation de menace de la paix ou une situation de rupture de la paix, elle
doit être en mesure de riposter et mettre un frein aux massacres s'il y a
lieu et ainsi préserver la quiétude des citoyens mieux la
stabilité et la paix de cet Etat.
Si la société internationale est
considérée comme une << grande
société » par Jean Jacques ROUSSEAU ou comme
l'expression << de la volonté générale du genre
humain » par DIDEROT, elle doit être en mesure de réagir
à temps face une situation de menace ou de rupture de la paix. Le droit
d'ingérence doit être un droit de total subordination, impliquant
un élément d'autorité au-dessus des Etats et doté
d'une force coercitive. Il doit être un moyen efficace de
répression mais que ingérence ne signifie pas intervention dans
les affaires politiques intérieures de l'Etat. Il doit juste être
un secours à la population civile pour lui permettre de se
protéger contre d'éventuels sévices des
belligérants. C'est ainsi que nous avons plus ou moins comme exemple
l'intervention de la France en Libye à la suite de l'insurrection de la
population à Benghazi en demandant et en obtenant de la part du Conseil
de sécurité des N.U. une résolution mettant en place une
zone d'exclusion aérienne dans le ciel libyen et empêchant ainsi
l'armée libyenne de bombarder les insurgés. Ce qui lui a permis
de détruire l'armement libyen.
L'application du droit d'ingérence remet en cause le
principe de la souveraineté des Etats. Ce qui se traduit par le
développement de nouvelles normes et mécanismes
d'ingérence. Auparavant, le droit international humanitaire
s'exerçait avec le consentement de l'Etat hôte, il est acquis,
depuis 1991, qu'il puisse se transformer en droit d'ingérence
humanitaire. Cela doit se faire si toutefois l'O.N.U. juge qu'il y a menace
à la paix et à la sécurité internationale.
Toutefois, on peut être en présence du refus d'un
Etat de voir un autre venir intervenir dans la bonne marche de sa politique.
C'est ainsi que sous couvert de l'aide humanitaire les Etats occidentaux
avaient voulu intervenir de l'un des pays les plus fermés au monde en
2008 à la suite d'un cyclone : le Myanmar (Birmanie). L'ancien ministre
Français des affaires étrangères Bernard KOUCHNER
était même allé jusqu'à suggérer que l'O.N.U.
intervienne coûte que coûte afin d'acheminer l'aide humanitaire par
la force s'il le faut.
Le droit d'assistance humanitaire doit être dissuasif
afin de limiter les massacres de la population. Il doit être mis en
oeuvre pour venir au secours de la population indépendamment de ce que
pensent les autorités étatiques. Sa mise en oeuvre aussi doit
protéger les humanitaires sur place au risque de voir les
autorités employés la force. L'emploi de la force doit être
subordonné à l'application du droit pénal international ;
histoire de montrer à ceux qui risqueraient d'employer la force contre
les humanitaires qu'ils pourront répondre de leurs actes devant une cour
ou un tribunal international. Seulement, les humanitaires ne doivent pas
être au solde des occidentaux pour les renseigner sur les
différents points stratégiques des belligérants. Ils
doivent jouir d'une immunité mais ne doivent pas être des
espions.
Ainsi donc, le droit d'ingérence doit tout faire pour
être dissuasif et permettre l'interruption des conflits quitte à
employer la force contre des cibles stratégiques. C'est pourquoi avec
P.Y. CHICOT, on peut affirmer sans risque de nous tromper qu' << on
dénombre néanmoins des signes encourageants ». Alors,
pour préserver la paix, le droit international a mis au centre de ses
intérêts non seulement la paix, la justice mais aussi la
sécurité pour le bon fonctionnement de la communauté.
2- La sécurité, notion clé du
droit international
Pour B. WARUSFEL, l'aspect à considérer dans la
notion de sécurité << est celui de l'harmonisation de
notre terminologie juridique avec le contexte international, et plus
particulièrement européen. Il est frappant de constater que, tant
en droit international public que dans le droit communautaire et
européen, la notion de « défense » est quasi-absente
alors que la référence à la notion de «
sécurité » (sous différentes appellations :
sécurité publique, sécurité nationale) est
systématique125 ». Cela s'explique par le fait la
sécurité est l'une des principales préoccupations de nos
gouvernants et pour la réaliser, ils emploient tous les moyens à
leur disposition tout en oubliant la défense qui pourtant semble aller
de pair avec la sécurité. Si la sécurité semble
être une préoccupation majeure de nos dirigeants, il ne faudrait
pas oublier que la défense doit en faire aussi partie d'autant plus
qu'on parle souvent de la défense nationale du territoire.
Mais, le droit international n'a presque pas pris en
considération cette notion de défense et cela se retrouve dans la
Charte des N.U. où on entend parler de << Conseil de
sécurité », de << sécurité
internationale » là où le terme de défense
n'apparaît qu'une seule fois dans l'art. 51 de ladite Charte <<
... de légitime défense... ». En cela, nous pouvons
affirmer que le droit international assimile la notion de défense en des
règles générales du droit de la sécurité
internationale.
B. WARUSFEL affirmait que << la défense
demeure la préparation des forces à répondre à des
agressions armées directes ou indirectes. Et si sa mise en oeuvre
nécessite la réalisation d'importantes mesures non militaires
parallèles ou préalables (...), toutes ces mesures demeurent
gouvernées par l'ultima ratio militaire126 ».
Il citait d'ailleurs en cela un des discours du Général de
GAULLE en 1959 lorsqu'il affirmait que << l'action militaire,
l'action sur les champs de bataille, est l'aboutissement de la défense.
Mais il est aussi un
125 B. WARUSFEL, op cit
126 Ibidem
55
aboutissement dont, à son tour, tout dépend
». Il ajoutait en prenant position sur la sécurité en
affirmant que << la sécurité est, dans le monde
moderne, l'une des principales missions régaliennes des Etats et son
champ d'intervention dépasse largement celui de la seule
défense127 ». Ce phénomène trouve sa
justification dans le fait que les Etats sont plus préoccupés par
la sécurité de leurs ressortissants et mieux par la
sécurité de son territoire au vu du contexte actuel dans lequel
vit le monde à savoir le terrorisme, les guerres ethniques, etc.
Toutefois, cela ne peut pas se réaliser tout seul car la
sécurité va de pair avec la défense. Pour que l'une se
réalise, il faut nécessairement la présence de l'autre
c'est-à-dire la sécurité suppose une situation
d'insécurité et trouve son répondant dans la
défense, qui, elle, est mise en oeuvre pour défendre les citoyens
et mieux le territoire. Ainsi pour plagier B. WARUSFEL, nous dirons que la
<< distinction formelle entre défense et
sécurité aurait été là - plus qu'un scrupule
de juriste - un instrument efficace pour faire jouer la subsidiarité
entre les différents niveaux du système institutionnel
» mondial. C'est pourquoi face aux dangers qui menacent le monde, il urge
de tout mettre en oeuvre pour consolider la paix et la sécurité
internationales.
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