La Guerre étant le langage des armes, il est tout
naturel qu'on s'attende à un bilan en terme de pertes de vies humaines
et des dégâts matériels. Mais la guerre de Bakassi a
été une guerre qui n'a pas dit son nom, voire une guerre
inavouée par les gouvernements belligérants. Les deux
gouvernements n'ont pas partagé avec leurs peuples respectifs la
situation de guerre qu'ils vivaient de peur de l'étendre aux civils. Le
gouvernement camerounais a géré cette guerre en toute
intimité, certainement pour la sécurité de la forte
communauté nigériane vivant sur son territoire. Le gouvernement
nigérian quant à lui n'a avoué l'état de guerre
qu'au cours de l'échange de prisonniers de guerre à
Yaoundé d'après le Général d'armée Pierre
SEMENGUE.
N'ayant pas fait de déclaration de guerre, aucun des
deux gouvernements n'a dressé un bilan officiel. Mais d'après des
hauts officiers camerounais, le Cameroun a subi des pertes minimes
comparativement au Nigeria qui en a subi lourdement.
~ Sur le plan humain, le Cameroun a perdu environ 200
à 300 hommes sans compter les disparus à l'instar du
médecin porté disparu à la suite d'un accident
d'hélicoptère. Le Nigeria quant à lui a perdu environ 2000
à 3000 hommes dans cette guerre. Le bilan nigérian le plus lourd
a été enregistré lors de la riposte camerounaise en mars
1996 à Kombo A Janea (2000 morts environ). A coté de ces pertes
en vie humaine, on peut ajouter les
prisonniers de guerre qui ont été
libérés à la suite de l'échange organisé
à Yaoundé en juin 2006 par les deux gouvernements sous
l'égide de la Croix Rouge Internationale. Le Cameroun a
libéré environ 150 prisonniers nigérians parmi lesquels le
corps du Capitaine FOUTOUMBE, mort en captivité à Yaoundé.
Le Nigeria à son tour en a libéré environ 120 parmi
lesquels deux corps des sous officiers rapatriés.
~ Sur le plan matériel, le Cameroun a perdu trois (03)
hélicoptères (deux sont tombés en mer, un a
été emporté par un tourbillon marin et est allé
tomber à 500 mètres de la côte et à 300
mètres de profondeur de la mer) ; un sweep Ship ; beaucoup d'armes et de
munitions lors de la prise d'Idabato I et II par les forces nigérianes
en février 1996. le Nigeria quant à lui a perdu trois
bâtiments de guerre parmi lesquels le « JONATHAN »
détruit par les fusiliers marins commandos camerounais encore
appelés « hommes grenouilles » ; beaucoup d'armes et de
munitions abandonnées lors de la riposte camerounaise de mars 1996.
D'après des sources militaires nigérianes
officieuses, le Nigeria a perdu environ 1 millier d'hommes ; quelques disparus
; une centaine de prisonniers de guerre. Le Cameroun en a perdu des centaines
d'hommes ; une centaine de prisonniers également. Sur le plan
matériel, quelques frégates, beaucoup d'armes et de munitions ont
été perdues par le Nigeria contre des hélicoptères,
des corvettes, des embarcations légères, des armes et des
munitions en grand nombre du coté camerounais.
En faisant la moyenne de ces deux versions de bilan, il
apparaît que le Nigeria paye le tribut le plus lourd dans cette guerre.
Non seulement il n'a pas pu s'approprier la presqu'île par la force des
armes, mais aussi il a connu des pertes insoupçonnées devant le
Cameroun. Une telle situation ne correspond pas aux prévisions d'avant
la guerre, lorsqu'on se réfère au potentiel militaire du Nigeria
considéré comme première puissance de la sous
région et deuxième puissance africaine après l'Afrique du
Sud.
A la question de savoir qu'est ce qui a fait le mérite
des forces camerounaises dans cette guerre, le Général
d'armée Pierre SEMENGUE évoque la qualité des hommes et la
spécificité de l'armement.
· Le Nigeria a mobilisé pour cette guerre environ
10000 hommes de formation au rabais (45 jours environ de formation) et beaucoup
de moyens mal organisés. Le Cameroun de son coté a
présenté 2000 hommes environ, nantis d'une formation de haute
facture (deux ans) et des moyens limités, mais spécifiques,
c'est-à-dire adaptés pour le combat dans la mangrove. Le Nigeria
était assez équipé pour la parade, mais manquait
d'équipement de combat dans la mangrove au début de la guerre.
· La qualité de l'organisation des forces
camerounaises a primé également, c'est-à-dire leur sens de
la discipline et leur cohésion devant une armée nigériane
indisciplinée et politisée par des hommes d'affaires.
D'après le Général SEMENGUE, l'armée
nigériane n'est pas comme l'armée camerounaise le creuset de
l'unité nationale.