II- LA PROBLÉMATIQUE
Depuis les attentats terroristes du 11 Septembre 2001 aux
EtatsUnis d'Amérique, aucune partie du monde ne semble être
à l'abri de la menace terroriste. Ceci sera confirmé plus tard
par les attentats de Madrid, de Londres, les attentats manqués en
France, avec pour prémices les attentats contre les
intérêts américains de Dar es Salam en Tanzanie et de
Nairobi au Kenya. Ces éléments caractérisant une crise
internationale, définissent une nouvelle géopolitique
internationale, entretenue par l'émergence des « réseaux
terroristes » en l'occurrence le réseau Al-Qaïda, le groupe
Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) devenu AlQaïda au
Maghreb Islamique (AQMI) en 2007, les Groupes Islamistes Armés (GIA)...
A côté de ces attentats, on observe également le
phénomène de la piraterie maritime, devenue une véritable
entreprise criminelle internationale doublée d'un commerce très
lucratif. L'on se souviendra longtemps du Lundi 17 Novembre 2008, ce jour
où la piraterie maritime a franchi un palier qu'on croyait
infranchissable en s'emparant
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
d'un superpétrolier le Sirius Star, un énorme
tanker Saoudien contenant deux millions de barils d'or noir d'une valeur de
cent millions de dollars, soit environ deux milliards de francs CFA. Selon le
Bureau Maritime International (BMI), quatre vingt quatorze bateaux ont
été attaqués par des pirates saoudiens sur deux cent
attaques répertoriés dans le monde. De toute évidence, la
côte d'alerte est atteinte avec la multiplication des actes de piraterie
dans le Golfe d'Aden plongeant la Communauté Internationale dans le
désarroi, surprise de la capacité de nuisance des
pirates2. Par ces faits, les Etats font désormais face
à une nouvelle réalité internationale porteuse de menaces
multiformes. Le noyau dur est constitué par le terrorisme (notamment
islamiste), la piraterie maritime, la criminalité
transfrontalière, les trafics illicites (L'IHEDN 2002 : 4-5).
Ces menaces, plus difficiles à prévoir, à
parer, à évaluer, peuvent avoir des conséquences graves
dans la vie des Etats. En réalité, le monde part d'une menace
principale, conventionnelle et identifiée à une
prolifération de menaces diffuses.
Dès lors, les conflits et les violences ne sont plus
seulement militaires. D'autres convulsions ont lieu à l'échelle
de la planète, fruits d'acteurs globaux élargissant le cercle
d'influence. Il s'agit des forces « transverses », «
asymétriques », « nouvelles » qui tirent profit de
l'évolution de la réalité internationale pour
prospérer et exploiter ses vulnérabilités. Chaque partie
du monde, chaque Etat vit sa cohorte de menaces. Tel est le cas de l'Afrique,
du Golfe d'Aden, du Golfe de Guinée et du Cameroun en particulier qui,
après près d'une décennie de conflit armé contre le
Nigéria, fait aujourd'hui face à un ennemi d'une identité
particulière : ce sont « des assaillants non identifiés
» d'après le communiqué de presse de la Présidence de
la République3.
2 Quotidien National Camerounais, Cameroun
Tribune N°9233/5432 2008 du 14 Novembre 2008, page 31.
3 Quotidien National Cameroun Tribune
N°8976/5175 du 14 Novembre 2007, page 3.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
En date du 12 novembre 2007, les Forces Armées
Camerounaises (FAC), assurant leur mission de souveraineté dans la
presqu'île de Bakassi, sont attaquées dans l'une de leur position
située au carrefour de navigation entre le Rio Del Rey et la crique
d'Issanguele, à l'arme collective par des groupes d'individus sans
attributs militaires apparents. Profitant des facilités de navigation
offertes aux opérateurs économiques et habitants de vaquer
librement à leurs occupations, des assaillants navigant à bord de
sept embarcations rapides ont pu approcher le poste baptisé C3, ouvert
le feu, faisant 21 morts et 10 blessés parmi les militaires
camerounais4. Alors que les résultats des enquêtes
étaient encore attendus, un autre drame est encore enregistré
à Bakassi. Le Sous-préfet de la localité de Kombo à
Bedimo, Fonya Félix Morfan, et la délégation qui
l'accompagnait pour une tournée d'inspection (01 officier
supérieur et 07 autres éléments des Forces de
Défense et de sécurité) sont attaqués et
enlevés par des personnes non identifiées le 09 Juin 2008. Leurs
corps seront retrouvés plus tard mutilés5. Plus que
jamais, le danger règne à la frontière Sud-Ouest du
Cameroun. Le Général des corps d'Armées, René
Claude MEKA, Chef d'Etat-Major des Armées en prendra acte à
travers son communiqué publié par la suite, dans lequel il parle
de l'insécurité présente à la côte,
entretenue par les pirates. Le Ministre camerounais
délégué à la Présidence chargé de la
Défense, interpellé par les députés du Social
Democratic Front (SDF) à l'Assemblée Nationale à ce sujet,
déclare que le Cameroun fait face à une nouvelle forme de menace
qui accentue les sillons de la criminalité.
Le 24 Juillet 2008, les matelots de première classe
Jules Mendoe Massa et Edgard Ufeingo tombent sous les coups de balles des
pirates au cours d'une attaque perpétrée contre les positions
camerounaises à Kombo à Jenea dans la péninsule de
Bakassi6. Dans la nuit du 27 au 28 Septembre
4 Quotidien National Cameroun Tribune op cit.
5 Quotidien Privé Camerounais Le Jour
N°215 2008 du 19 Juillet 2008, Page 4.
6 Quotidien National Cameroun Tribune
N°9158/5357 du 11 Aout 2008, Page 6.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
2008, des assaillants armés venant vraisemblablement du
coté des côtes de Limbé, ont pris d'assaut et ont investi
pendant deux heures un certain nombre d'établissements bancaires,
emportant d'importantes sommes d'argent liquide7. En outre, dans la
nuit du Jeudi 30 au vendredi 31 Octobre 2008, un groupe d'hommes armés,
attaque aux larges de la presqu'île de Bakassi, un remorqueur de la
société BOURBON, qui opérait sur la plate-forme TOTAL. Dix
membres de l'équipage seront pris en otage parmi lesquels des
Camerounais, des Français, des Tunisiens et des
Sénégalais8. De même, le 24 Janvier 2009 au
matin, 30 pirates à bord de 03 embarcations attaquent 02 chalutiers en
provenance de pays étrangers à Londji, petit village situé
à 15 Km de la cité balnéaire de Kribi9.
Dans la région du Nord Cameroun, les rebelles tchadiens
sèment la panique. Non loin de la frontière du Cameroun avec le
Tchad, près de 180 enlèvements avec demandes de rançon ont
été enregistrés de Janvier à Juin 2007. Par
ailleurs, la région de l'Est se retrouve être le territoire des
rebelles centrafricains avec le phénomène de coupeurs de route
à la frontière entre le Cameroun et la République
Centrafricaine10. C'est ainsi qu'au cours de la
cérémonie de présentation de voeux du nouvel an le 14
Janvier 2009 dans la cour d'honneur de la Brigade du Quartier
Général (QG) de Yaoundé, le Ministre
délégué à la Présidence chargé de la
Défense déclare : « Comme 2007 et 2008, 2009 ne sera pas
de tout repos pour nos Forces de Défense ». Et pour cause,
explique le Ministre : « La menace persiste, elle augmente
d'intensité, elle devient variée, diversifiée et
pernicieuse »11.
Toutes ces agressions spontanées, perpétrées
sur le territoire Camerounais par des individus non identifiés, «
sans visage », loin d'être
7 Op cit.
8 Idem.
9 Ibi dem ;
10 Quotidien Privé Camerounais Le Jour
N°215 2008 du 19 Juillet 2008, Page 4 à 5.
11 Quotidien National Cameroun Tribune
N°9267/5466 du 15 Janvier 2009, Page 3.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
exhaustives, démontrent à suffisance que le
Cameroun, comme le reste du monde, fait face à de nouvelles menaces.
De ce qui précède, la politique de
défense camerounaise est-elle à mesure de circonscrire avec
pertinence les nouvelles menaces à la sécurité et d'y
réagir efficacement ?
|