2.2 Fiscalité foncière
Les réformes introduites en matiére d'impots
fonciers tout comme celles relatives aux revenus, participent de
l'élargissement de l'assiette fiscale, de la réduction de la
fraude fiscale par une bonne mobilisation des recettes fiscales. Aux lendemains
des indépendances, le régime foncier en vigueur était
fondé sur l'immatriculation au livre foncier sans cadastre, car ce n'est
qu'en 1983 que le cadastre fut créé au sein de la Direction
Générale des Impots. Il fut alors mis en place un systeme qui
comprenait une multitude d'impOts qui se résumaient a la Taxe
Fonciére sur les Propriétés Bfities (TFPB), a la Taxe
Fonciére sur les Propriétés non Bfities (TFPNB), a la Taxe
sur la Valeur Locative (TVL), a la Taxe sur les Biens de Mains Mortes(TBMM), a
la Taxe d'Insuffisance de Mise en Valeur (TIMV) et a la Contribution
Fonciére sur les Propriétés Bfities ( CFPB). L'ensemble de
ces impOts était au départ recouvert par le trésor
national et posait beaucoup de difficultés dans son recouvrement.
C'est en 1997 par ordonnance n°97-22 du 29 septembre que
ces six impOts ont été fusionnés pour en faire deux
seulement, a savoir la Taxe fonciére sur les Propriétés
Bfities (TFPB) qui s'appliquent exclusivement aux personnes physiques et la
Taxe Immobiliére qui concerne les personnes morales et leur gestion fut
entiérement dévolue aux services de la DGI. Perçue au
profit du budget de l'Etat et des collectivités territoriales, la TFPB
s'applique aux propriétaires d'immeubles ainsi que sur la valeur
locative des biens qui y sont assujettis. Le prix de bail sert alors de base
imposable avec des taux variant entre 7% et 12% pour respectivement les locaux
servant d'habitation principale ou secondaire et pour les locaux non
occupés ou occupés a titre gratuit ou tout simplement
affecté a d'autres usages et 20% pour les propriétés mises
en location.
117 Gérard CHAMBAS, Afrique au sud du Sahara....,,
op.cit., p.9
En ce qui concerne la taxe immobiliére frappant les
personnes morales, s'est également le même mode d'imposition que
celle de la taxe sur les propriétés bfities. Toutefois, la base
d'imposition est fondée sur la valeur des investissements ou le cas
échéant, le prix de revient de l'immeuble. Il est alors
appliqué dans l'un ou l'autre cas, un taux de 2,5% sur la valeur de
l'immeuble. Tout comme la taxe sur les propriétés bfities, celle
relative aux propriétés immobiliéres
bénéficie d'un mode de recouvrement souple, c'est-à-dire
que les contribuables peuvent s'en acquitter en tranches de quart a compter du
25 mars au 25 décembre de l'année budgétaire. Toutefois,
il reste que le taux de recouvrement en la matiére reste trts faible.
Il ressort qu'en 1998, seulement 27% des émissions au
titre de l'imp,t foncier ont été effectivement
réalisées, principalement sur Niamey, qui reste un gisement
fiscal important en la matiére. Les difficultés inhérentes
au recouvrement des impots fonciers sont essentiellement dues au fait que les
principales propriétés susceptibles de rapporter des recettes
appartiennent tout simplement a des personnalités devenues
ointouchables» a cause de leur appartenance a des réseaux
clientélistes et politiques qui leur assurent une certaine protection.
En outre, les moyens légaux de contrainte dont dispose l'administration
fiscale se sont révélés assez inefficaces pour amener les
contribuables a s'acquitter de leur impot et aussi, de l'incompréhension
par certains contribuables de la base même d'imposition.
Les collectivités territoriales,
particuliérement les grandes villes, disposent d'un potentiel fiscal
assez important en matiére fonciére. Beaucoup de
nigériens, dont le revenu a sources multiples échappe a toute
imposition, investissent dans le domaine foncier. L'impot foncier, sommes-nous
tenté de le reconnaitre, est certainement celui par lequel peuvent
être appréhendés les revenus réels des citoyens. A
cet effet, nous admettons sans réserve que "les actifs fonciers
constituent certainement le meilleur indicateur tangible des revenus
passés des contribuables..."118. Cela est
d'autant plus vrai, que lorsqu'on regarde par exemple les déclarations
des biens des membres du gouvernement ou de toutes les personnalités
astreintes a cet exercice, l'essentiel des biens est constitué des biens
immobiliers.
Il s'avére qu'au regard de l'urbanisation croissante
des villes africaines, la fiscalité fonciére urbaine est une
source de revenus assez importante pour les collectivités locales
africaines et nigériennes en particulier. Il est absolument
nécessaire pour les pouvoirs publics de mettre l'accent sur cet impot,
car une urbanisation exponentielle et non maitrisée engendre
118Direction Générale de la
Coopération Internationale et du ,Développement,
La mobilisation des ressources locales au niveau des municipalités
d'Afrique subsaharienne, Etude réalisée
par: Gérard CHAMBAS, chargé de recherches CNRS- CERDI,
Elsa Duret, chargée d'études CERDI, Avril 2000, p.52
des besoins nouveaux en infrastructures d'assainissement,
d'électrification et de conduite d'eau, sans oublier les infrastructures
sociales (centres de santé, écoles, etc.) ainsi que des services
de sécurité comme la police. Cependant, pour que l'imp,t foncier
soit bien accueilli et respecté par les contribuables, les bases de son
imposition doivent être clairement définies et
compréhensibles pour tous. En outre, le réalisme doit entourer la
détermination de ses différents barémes afin qu'il soit
moins onéreux pour les contribuables pour ne pas constituer un
prétexte de surenchére sur l'offre immobiliére et partant,
mettre en mal les revenus des classes moyennes ou les couches les moins
nanties. C'est pour cela que certains pensent que cet impot doit rester
forfaitaire, c'est-à-dire neutre, en ce sens que s'il doit influer sur
l'offre et la demande en logement a cause d'importants
prélévements, il peut y avoir "des reactions de rejet,
notamment pour des raisons d'équité"119.
La gestion fonciére ou immobiliére au Niger
n'est pas sans grandes difficultés a cause notamment de la trop grande
mobilité en matiére de cession, d'achat, d'héritage ou de
la simple jouissance d'un bien immobilier. L'essentiel des transactions et
d'opérations fonciéres se base souvent sur le droit coutumier et
en l'absence de toute procédure administrative devant permettre un suivi
régulier des contribuables en la matiére. Il se pose alors a
l'administration fiscale des problémes d'identification des
propriétaires fonciers légitimes et légaux assujettis au
paiement des taxes fonciéres. Il s'agit d'un domaine qui requiert des
moyens techniques importants du point de vue cadastral et des dispositions
juridiques claires pour un meilleur suivi des différentes transactions
fonciéres en termes de changement de titre de propriété ou
tout simplement d'adressage.
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