III.3.2. L'évolution vers l'élevage en
stabulation
L'élevage périurbain reste
généralement fondé sur l'utilisation du pâturage
comme facteur principal dans le maintien du bétail. La diminution de la
surface agricole a exigé des agriculteurs de développer de plus
le système de plantation des plantes fourragères tout le long des
parcelles de leurs exploitations. Vu la surface disponible, plusieurs
ménages disposent d'un nombre élevé de cheptel qui
dépasse leur capacité d'entretien. Cela conduit à
l'utilisation des bordures des champs et des routes ainsi que des chemins comme
pâturage, ce qui conduit nécessairement à la
dégradation du sol.
La stabulation du cheptel, mesure prise par l'Etat pour
pouvoir développer le sous secteur de l'élevage en particulier et
le secteur primaire en général, se montre comme le seul
système qui peut conduire à l'accroissement de la production
animale tout en améliorant la fertilité du sol. Le mode
d'élevage extensif qui, du fait de la charge de bétail trop
importante, contribue à la dégradation des surfaces de
pâturage ne pouvant plus être utilisées à des fins
agricoles, doit être remplacé par un mode d'élevage en
stabulation, complété par des plantes fourragères. Ici
l'exploitant est appelé à construire des étables
appropriées permettant le maintien en stabulation du bétail et la
récupération de leurs déjections.
Photo 13 :L'étable d'un éleveur
pratiquant l'élevage en stabulation dans le secteur
Gikongoro.
Source : Photo prise en septembre 2006.
Les exploitations des agriculteurs qui ont adopté ce
système d'élevage sont identifiées par leur mise en place
des plantes fourragères autour des fossés antiérosifs.
Dans certaines exploitations, il y a même des parcelles destinées
à ces plantes fourragères surtout le pennisetum.
Photo 14 : Une parcelle de pennisetum
Source : Photo prise en septembre 2006.
Ces exploitants affirment qu'avec ce mode d'élevage,
la quantité de fumier a considérablement augmenté
jusqu'à permettre la fertilisation totale de la surface agricole, c'est
aussi le meilleur moyen d'accroître le revenu surtout pour ceux qui ont
choisi l'élevage des vaches de race améliorée ou
croisée. Les étables sont souvent vidangées au
début des saisons culturales pour une incorporation directe du fumier
lors de la préparation du sol et le fumier restant est
déposé dans la compostière pour être utilisé
ultérieurement.
Malgré son importance de production d'une grande
quantité de fumier et d'accroissement de revenue des exploitants, ce
mode d'élevage reste très peu pratiqué. Les explications
avancées par la population montrent qu'il faut encore une campagne de
sensibilisation plus profonde sur les avantages, les méthodes
d'application de ce mode d'élevage en stabulation et la contribution de
ce mode à l'amélioration du niveau de vie.
III.4 LES INFRASTRUCTURES
« Toutes tentatives de développement sont
vouées à l'échec si elles sont dissociées de
l'instauration préalable de structures permettant l'amélioration
des conditions de vie de la population » (MANIRAHO S, 1976). Divers
services doivent être mis en place pour permettre à la population
de vivre mieux, s'épanouir, tant sur le plan économique, social,
et sanitaire, que sur le plan moral et intellectuel. Toutefois, les zones
éloignées continuent à être
caractérisées par leur faible accès aux services de
qualité, aux infrastructures telles que l'eau, l'école, et
à la technologie de l'information et de la communication. Ces services
sont généralement concentrés dans le centre ville
III.4.1 Les infrastructures sanitaires
Les infrastructures sanitaires sont dominées par les
établissements privés. A part le centre de santé de
Gikongoro et l'hôpital de Kigeme, les autres sont des cabinets
médicaux des particuliers et ces derniers préfèrent
installer leurs établissements dans le centre ville pour des raisons non
seulement de clientèle mais aussi de manque d'infrastructures de base
dans des zones rurales. Cette mauvaise répartition exige à
beaucoup de malades de faire plus de 15 km avant d'arriver à un centre
de soin de santé. Cela est surtout le cas pour la population des
ex-secteurs de Kizi, Kamegeri, et Remera qui se plaint de longues distances
à parcourir.
La population des zones périurbaines de la Ville de
Gikongoro connaît encore un problème d'accès à l'eau
potable, suite à la mauvaise répartition géographique des
sources aménagées.
Tableau 26: L'état des sources d'eau par
secteur
N
°
|
Secteurs
|
Sources aménagées
|
Sources endommagées
|
Sources non aménagées
|
km à parcourir afin d'accéder à
l'eau
|
1
|
Kamegeri
|
7
|
6
|
9
|
1 km
|
2
|
Gikongoro
|
11
|
12
|
21
|
1 km
|
3
|
Remera
|
4
|
1
|
7
|
1 km
|
4
|
Gasaka
|
9
|
13
|
17
|
1/2 km
|
5
|
Ngiryi
|
12
|
11
|
5
|
1 km
|
6
|
Kizi
|
5
|
26
|
16
|
1 km
|
|
Total
|
48
|
69
|
75
|
Moyenne=1 km
|
|
Source : Ville de Gikongoro, 2005.
En effet sur 48 sources aménagées, 23 sont
concentrées dans le centre ville. A l'opposé, 144 sources
endommagées ou non aménagées se trouvent majoritairement
dans les zones rurales. Ainsi, certains habitants utilisent l'eau insalubre des
ruisseaux ou des sources non aménagées. La population de la ville
de Gikongoro fait en moyenne une distance de 1km pour accéder à
l'eau potable alors que la norme ministérielle est de 250 m.
III.4.2. Les infrastructures scolaires
Dans la Ville de Gikongoro, chaque secteur dispose au mois
d'une école primaire. Pour les écoles maternelles, toute la zone
possède actuellement quatre écoles maternelles. A l'exception de
celle de Gasaka, les trois autres se trouvent dans le secteur semi- urbain de
Gikongoro. Pour les secteurs qualifiés de ruraux comme Kamegeri, Kizi,
Remera et une partie de Ngiryi, les enfants ne bénéficient pas de
l'éducation dans les écoles maternelles.
Tableau 27 : Les infrastructures scolaires dans la
Ville de Gikongoro
Secteur
|
Ecoles maternelles
|
Ecoles primaires
|
Ecoles secondaires
|
Kizi
|
|
2
|
|
Gasaka
|
1
|
2
|
1
|
Gikongoro
|
3
|
3
|
1
|
Kamegeli
|
|
1
|
|
Remera
|
|
1
|
|
Ngiryi
|
|
1
|
2
|
total
|
4
|
10
|
4
|
|
Source : Ville de Gikongoro, 2005.
Dans des zones périurbaines de la Ville de Gikongoro
il y a un grand nombre d'abandons scolaires sans oublier un grand nombre
d'élèves qui n'ont pas réussi le concours d'entrée
au secondaire et qui n'ont plus de possibilité de continuer les
études. Pour trois centres de formation des jeunes (CFJ) se trouvant
dans la ville de Gikongoro, seul celui de Mwogo a ouvert ses portes mais il
fonctionne avec très peu de moyens. La conséquence des abandons
scolaires est qu'un grand nombre de personnes possède un niveau
d'étude limité seulement à l'enseignement primaire.
Même si la proportion des filles dans les écoles primaires et
secondaires monte jusqu'à 53% en 2002, les femmes représentent
encore 59.4% de la population qui ne sait ni lire ni écrire.
III.4.3. Les infrastructures
routières
Les infrastructures routières sont parmi les facteurs
principaux déterminant la vie économique du monde agricole. Les
difficultés économiques des agriculteurs et des éleveurs
sont le manque d'accès au marché par l'insuffisance des routes de
desserte rurale, et les moyens de transport. Dans ces conditions
l'échange des produits agricoles devient difficile.
Le centre de la Ville de Gikongoro et ses zones environnantes
sont traversés par une grand-route bitumée. Ces zones disposent
aussi d'un réseau routier qui assure la liaison entre ses secteurs. Mais
la communication reste difficile au niveau des cellules à cause des
routes qui sont encore insuffisantes d'une part et, qui d'autre part sont
détériorées par l'érosion et le manque d'entretien.
En effet les routes ne sont pas suffisamment protégées des eaux
qui dévalent les pentes abruptes des collines. Les communications
routières étant très difficiles, les produits sont
collectés et convoyés à
travers la région par de rares commerçants qui
payent le prix le plus bas possible au producteur.
III.5. LE CENTRE VILLE FACE A L'AGRICULTURE
PERIURBAINE
Il existe de fortes interactions entre les zones
périurbaines et les centres ville, qui requièrent des concepts
conjoints de développement régional. L'agriculture
périurbaine contribue de différentes façons à la
sécurité alimentaire de la population habitant le centre ville.
Elle permet d'accroître la quantité d'aliments disponibles sur le
marché central de Kabacuzi.
III.5.1. L'approvisionnement du centre urbain en
produits agricoles
La production agricole est généralement
orientée vers la satisfaction des besoins alimentaires de la famille. Le
surplus représente encore un pourcentage très faible. Toutefois
les produits vivriers vendus sur le marché ne correspondent pas toujours
à des surplus réels de la production agricole. Ainsi la raison
principale de la vente des produits vivriers sur le marché n'est pas
généralement le souci de faire des transactions commerciales. Les
agriculteurs vendent une partie de leur production vivrière surtout pour
pouvoir acheter d'autres produits ou biens ménagers dont ils ont
besoin.
Le centre de la ville de Gikongoro dispose d'un grand
marché qui assure la coordination de tous autres petits marchés
se trouvant surtout dans des centres de négoce. Les produits vivriers
disponibles sur le marché sont en grande partie fournis par les
agriculteurs individuels. Même si les zones agricoles de la Ville de
Gikongoro englobent 132 associations oeuvrant dans l'agriculture, leur
participation dans l'approvisionnement du marché central reste faible
surtout parce qu'elles sont encore nouvelles.
Les produits agricoles acheminés vers le marché
sont surtout transportés sur la tête dans des sacs ou des paniers.
Dans le cas où les quantités des marchandises sont importantes la
bicyclette est aussi utilisée. Aux petits marchés locaux, les
agriculteurs peuvent vendre leurs produits vivriers soit aux consommateurs
directs ou aux commerçants intermédiaires qui les collectent pour
les vendre à leur tour sur le marché central. Les produits
commercialisés les plus importants provenant des zones
périurbaines sont les patates douces, le manioc, le sorgho, le haricot,
le mais, la banane, et la pomme de terre. A part les cultures vivrières,
l'agriculture périurbaine
approvisionne le centre ville de Gikongoro en légumes.
Dans plus de 32% des exploitations visitées la production de
légumes a pris de l'ampleur surtout qu'elle est réalisée
sur des lopins de terre, en utilisant efficacement les ressources
limitées en eau et en terre. Plusieurs espèces de légumes
sont récoltées entre 60 et 90 jours après les semis et ce
cycle végétatif court représente une solution rapide pour
satisfaire les besoins alimentaires d'urgence. Selon les exploitants, les
légumes permettent de gagner rapidement de l'argent et d'acheter de quoi
nourrir le ménage. Comme elle sont particulièrement
périssables, elles sont transportées vers le marché juste
après la récolte pour réduire les pertes
éventuelles.
Même si la production agricole périurbaine se
montre considérable sur le marché du centre ville, elle reste
encore insuffisante pour satisfaire d'une part aux besoins alimentaire de ceux
qui vivent de revenus tirés dans des activités non agricoles et
d'autre part en produits nécessaire pour l'échange entre les
agriculteurs eux même. Certains produits proviennent des régions
éloignées du centre ville. C'est le cas des pommes de terre qui
proviennent en grande partie de l'ancien district de Mudasomwa. Cela est aussi
le cas pour l'approvisionnement de certains ménages collectifs comme les
écoles secondaires où les commerçants sont obligés
d'avoir recours à d'autres grands marchés du pays. C'est à
travers un réseau de commerçants disposant des moyens de
transport appropriés que se réalise l'échange des produits
agricoles de région à région grâce aux revenus
substantiels qu'ils tirent de leurs transactions. Cela permet aussi la
valorisation de la production agricole.
Une commercialisation de faible volume de produits agricoles
est marquée par d'importantes fluctuations ainsi que par la forte
dispersion spatiale des exploitations et le faible degré d'organisation
des producteurs. Ce sont autant de facteurs faisant obstacle à la
création des réseaux groupés de ramassage des produits et
renforçant ainsi la position influente des commerçants qui n'ont
pas pour leur part à faire face à une très forte
concurrence.
Les prix des produits vivriers sont sujets à
d'importantes fluctuations en relation avec la période de
végétation. Ceci concerne en particulier les produits
saisonniers, les prix les plus élevés étant
pratiqués dans la période précédent la
récolte et les prix les plus bas dans la période suivant
immédiatement la récolte. Par contre les prix de certaines
cultures restent toujours élevés. Cela est en grande partie la
conséquence de la perturbation des temps climatiques menant à une
mauvaise récoltée saisonnière.
III.5.2. L'agriculture et le revenu de la population
périurbaine
Comme l'agriculture est l'activité principale pour
plus de 71% de la population périurbaine, la plus grande partie de leur
revenu monétaire provient généralement de la vente des
produits agricoles. Ces produits vendus contribuent efficacement à
l'approvisionnement du centre urbain parce qu'ils sont principalement
transportés vers le marché central de la Ville de Gikongoro.
Selon la population locale, le café et la banane sont
les principales cultures génératrices de revenu monétaire.
Le caféier est l'un des cultures les plus pratiquées dans cette
zone. Cela est dû à l'importance économique de ce dernier.
Sur des stations de lavage, le café est vendu à l'état de
cerises. Ainsi l'agriculteur n'a pas beaucoup de peine et le traitement
à la station de lavage donne la bonne qualité du café.
La banane a également une importance économique
considérable. Parmi les variétés de bananiers
cultivées, plus de 90% servent à la fabrication de bière.
La bière de banane est en grande partie vendue et permet de
réaliser une marge brute dépassant de loin celle de toutes les
autres cultures vivrières. Toutefois la vente occasionnelle du
bétail représente également un revenu non
négligeable. L'augmentation du nombre d'exploitations qui ne sont plus
en mesure d'assurer la subsistance de la famille et la variation des prix des
produits agricoles incite la population à vouloir recourir aux autres
travaux que l'agriculture. Même si ces travaux se font
généralement à titre d'activités accessoires, leur
contribution au revenu de la famille est considérable. La
majorité des exploitants interrogés affirment que la production
agricole est souvent complétée par un certain revenu provenant de
l'extérieur.
Dans ce domaine, les activités réalisées
sont d'une part des activités salariées et d'autre part le petit
commerce. Pour la majorité des exploitants disposant de petites surfaces
agricoles, la principale activité salariée a lieu sur de grandes
exploitations appartenant à d'autres personnes. Dans ce processus
d'obtention de revenu supplémentaire, les zones périurbaines
profitent de leur cohabitation avec le centre ville parce que la
majorité de ces activités se font dans le centre ville, c'est le
cas des activités de construction, de commerce, de gardiennage, de
propreté, de travaux domestiques.
III.5.3. Les investissements agricoles
Le centre de la Ville de Gikongoro regroupe un certain nombre
d'exploitants qui pratiquent l'agriculture à temps partiel. Ces
exploitants disposent d'autres sources de revenu (travail salarié, le
commerce) dont une partie est investie dans l'agriculture. Ce capital investi
rend leurs exploitations plus efficaces et la productivité est de loin
supérieure à celle des autres exploitations de toute la zone dont
le rendement souffre souvent d'une quantité inférieure ou
insuffisante d'intrants, d'une utilisation de variétés mal
adaptées, d'une mauvaise gestion de l'eau ainsi que du manque de
connaissances dans le domaine de l'agriculture améliorée. Les
gens du centre ville font souvent recours à des techniques de
transformation et de stockage permettant la valorisation de leur production sur
le marché. C'est surtout dans ces exploitations que se rencontre le
petit nombre des vaches améliorées.
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