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Paysages et systèmes agraires

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par Jean Pierre MAHORO
Universite National du Rwanda  - Licence en Geographie  2007
  

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CHAPITRE I. PRESENTATION GENERALE

La Ville de Gikongoro était l'une des entités administratives de l'ancienne province de Gikongoro. Située au Sud-Ouest du pays, celle-ci était subdivisée en sept districts : Nshili, Kaduha, Karaba, Mudasomwa, Mushubi, Nyaruguru et la Ville de Gikongoro.

Selon les lois n° 4/2001 du 13 janvier 2001, n°5/2001 du 18 janvier 2001 n° 7/2001 du 19 janvier 2001 «portant respectivement sur l'organisation et le fonctionnement des districts, des circonscriptions urbaines et de la Ville de Kigali » chaque chef-lieu de province a été conçu comme une ville, C'est ainsi que la ville de Gikongoro fut l'une des unités administratives autonomes de l'ancienne Province de Gikongoro.

Figure 1. La localisation de la Ville de Gikongoro dans l'ancienne Province de Gikongoro.

La Ville de Gikongoro était composée de 6 secteurs à savoir Gasaka, Kamegeri, Ngiryi, Remera, Kizi et Gikongoro. Son centre ville qui était le chef-lieu administratif et économique de l'ancienne Province de Gikongoro qui abrite actuellement le bureau du district de Nyamagabe.

Avec la reforme administrative de janvier 2006 qui a divisé le Rwanda en quatre provinces et la ville de Kigali, la Ville de Gikongoro a été combinée avec les ex-districts de Kaduha, Mushubi, Mudasomwa, et une partie du district de Karaba pour former l'actuel district de Nyamagabe, l'un des huit district de la province du Sud.

Figure 2: Localisation de la ville de Gikongoro dans le District de Nyamagabe

Comme le montre la carte ci-haut, les quatre secteurs de la Ville de Gikongoro, Gasaka, Remera, Gikongoro et Ngiryi ont été combinés pour former l'actuel secteur de Gasaka. Les deux autres secteurs, Kamegeri et Kizi font actuellement partie du nouveau secteur de Kamegeri.

Située à 2028' de latitude sud et à 29034' de longitude Est, ce centre ville est à cheval sur la grande route asphaltée reliant les villes de Butare et de Cyangugu localisées respectivement dans les districts de Huye et Rusizi. Il est à 165 km de la ville de Kigali et à quelques dizaines de km du Parc National de Nyungwe. Ainsi les résultats présentés dans ce mémoire concernent les zones rurales environnant le centre urbain de Gikongoro suivant la circonscription de la Ville de Gikongoro. C'est ainsi que les données disponibles sont reparties suivant les 7 secteurs ci-haut mentionnés qui couvrent une superficie de 59,96 km2.

.I.1. LA DESCRIPTION DU MILIEU PHYSIQUE

« Les terres ne sont pas seulement considérées en tant que sols ou espace topographique, mais elles possèdent aussi des caractéristiques telles que des dépôts superficiels sous-jacents, un climat et des ressources en eau ainsi que des communautés végétales et animales qui s'y sont développées suite à l'interaction des conditions physiques ». (FAO, 2001). Les effets de l'action anthropique reflétée par des changements dans le couvert végétal ou par des structures, sont également considérés comme des caractéristiques des terres. Une modification de l'un des facteurs, l'affectation des terres par exemple, peut avoir un impact sur d'autres facteurs comme la flore et la faune, la qualité du sol, la distribution des eaux de surfaces et même le climat.

La pratique de l'agriculture en haute altitude sur les pentes raides non adaptées aux activités agricoles, à laquelle s'ajoutent les effets des aléas climatiques pour lesquels l'agriculteur n'a pas de solution, contribuent considérablement à accentuer les menaces sur l'espace agricole. « Même si les moyens de lutte contre les risques climatiques sont nombreux et diversifiés, aucun cependant, n'a jamais mis totalement les cultures à l'abri des violences climatiques » (DUPRIEZ, 1983).

I.1.1. Les formes topographiques du milieu

Les zones périurbaines de la Ville de Gikongoro se situent dans la région du plateau
central mais elles présentent un relief plus ou moins accidenté qui est une transition

vers la crête Congo Nil. Ce relief est formé par une multitude des collines dispersées dans toutes les zones avec l'altitude qui varie entre 1500 et 2300m.

Dans la partie ouest, les collines sont alignées avec des sommets qui dépassent parfois 2000 m d'altitude le point culminant de la Ville de Gikongoro étant la colline de Remera qui culmine à 2.265 m d'altitude. Les versants sont généralement taillés dans les altérites mais dans certaines zones, il y a des versants à affleurement rocheux. Les pentes qui ont des valeurs supérieures à 15% sont fréquentes. C'est là une des contraintes de l'occupation du sol sur l'ensemble de la zone.

I.1.2. Hydrographie

Les cours d'eau entourant la Ville de Gikongoro se divisent en deux bassins : d'une part le bassin de la rivière RUKARARA où se trouvent les rivières Kato et Gisayo et d'autres part le bassin de la rivière MWOGO avec les rivières Kabanda, Nkungu et Kavure.

Figure 3 : Le réseau hydrographique de la Ville de Gikongoro

Source : MINITRACO/CGIS-NUR, 2001.

Les débits de ces cours d'eau sont fonction des précipitations. L'hydrographie de la Ville de Gikongoro est également caractérisée par plusieurs cours d'eau temporaires. Lors des précipitations très fortes, certaines rivières sont menacées par des phénomènes de débordement des eaux.

I.1.3. Les conditions climatiques

« Malgré la continentalité et la position latitudinale équatoriale, le Rwanda se trouve sous l'influence des courants d'air frais et la vitesse du vent relativement rapide » (BIZIMUNGU T. 1977, cité par NDAMYIMANA E.1996).

I.1.3.1 Les précipitations

La Ville de Gikongoro est placée dans une zone des précipitations moyennes supérieures à 1.100mm conformément à son altitude. Elle est entourée par des isohyètes méridiennes de 1200mm à 1400mm des précipitations respectivement de l'Est à l'Ouest.

A part une influence orographique qui est due à la continuité de la Crête Congo Nil, les précipitations ne sont pas vraiment particulières de façon à créer une zone écologiquement différente des autres régions environnantes. La Ville de Gikongoro se caractérise par deux saisons de pluies alternant avec deux saisons sèches.

Tableau 1. Le régime pluviométrique à Gikongoro (de 1985-2003, alt.1910m ; 2028'S ; 29034'E)

Mois

J

F

M

A

M

J

J

A

S

O

N

D

année

Pmn

163,0

103,3

163,8

198,4

118,0

16,2

3,1

75,3

69,7

141,4

126,6

153,3

1332.1

%

12,2

8.0

12,3

14,9

8,8

1,2

0,2

5,6

5,2

10,6

9,5

11,5

100

 

Source : Service météo Province de Gikongoro, 1985-2003.

Figure 5. Le diagramme pluviométrique de la ville de Gikongoro (de 1985- 2003 ; alt.1910m ; 2028'S ; 29034'E)

Pmn

250 200 150 100 50

0

 
 

J F M A M J J A S O N D Mois

Source: Service météo Province de Gikongoro, 1985-2003.

Le tableau de la page précédente et le diagramme ci-dessus présentent les moyennes des précipitations calculées sur une période de 19 ans (de 1985 à 2003) à la station météorologique de Gikongoro où la moyenne annuelle des précipitations est de 1332.1mm. Les précipitations se repartissent sur toute l'année mais l'intensité est différente suivant les saisons. Durant la grande saison des pluies, c'est à dire de mars à mai, les précipitations sont très fortes : un total de 480mm est enregistré, c'est à dire 36% des précipitations totales durant ces trois mois.

De mai à juin les précipitations diminuent considérablement annonçant le début de la grande saison sèche qui continue jusqu' au mois d'août avec 7% des précipitations totales. Cette saison dure entre 80 et 100 jours suivant les zones ce qui explique la faiblesse des précipitations durant cette saison.

La Ville de Gikongoro connaît aussi deux petites saisons : la petite saison des pluies et la petite saison sèche. Durant la petite saison des pluies les précipitations restent faibles. Cette période de trois mois totalise seulement 25.3% des précipitations annuelles. Le mois de septembre est caractérisé par la faiblesse de précipitations qui est due au prolongement de la saison sèche. La moyenne mensuelle est de 75.3mm. Une augmentation remarquable commence avec le mois d'octobre où les précipitations qui étaient 5,2% en septembre deviennent 10,6%. La petite saison sèche qui s'étend de décembre à février enregistre 31.7% des précipitations totales.

En général les précipitations fortes s'observent dans les mois de janvier, mars, avril, et décembre qui totalisent eux seuls presque 51% des précipitations annuelles. Le mois le plus pluvieux, avril, enregistre 14.9%de toutes les précipitations alors qu'en juillet, les précipitations enregistrées sont de 3,1 mm, ce qui représente un pourcentage de 0,2% de la moyenne annuelle.

I.1.3.2 Les températures

Le climat de la Ville de Gikongoro est toujours chaud à cause des températures qui sont toujours élevées. « Suite à la proximité par rapport à l'équateur, l'amplitude thermique est faible » (NDUWAYEZU, J 1982).

Tableau 2. La variation mensuelle des températures à Gikongoro (de 1985- 2003)

Mois

J

F

M

A

M

J

J

A

S

O

N

D

Total annuel

Moyenne annuelle

17,7

20

19,75

19,2

18,7

18,9

19,3

18,7

18,8

20,1

16,9

19,9

228

19° C

 

Source : Service météorologique, 1985-2003.

D'après ce tableau des températures calculées sur une période de 19 ans (de 1985 à 2003) à la station météorologique de Gikongoro, les moyennes mensuelles sont modérées. Le mois le plus chaud a la température moyenne de 19.50 C, alors que le plus froid enregistre 18,00 C.

A partir des données de ladite station météorologique, on a établi un diagramme ombrothermique permettant de spécifier les périodes sèches et celles qui sont humides. En établissant ce diagramme, on a utilisé la formule de P=2T, c'est-à-dire une échelle des précipitions quatre fois plus grande que l'échelle des températures, ce qui permet de déterminer les caractéristiques atmosphériques du milieu.

Figure 6. Le diagramme ombrothermique de Gikongoro (de 1985-2003)

P = 2T

Source : Service météorologique de Gikongoro, 1985-2003.

De ce diagramme, qui met en évidence les données climatiques de la station météorologique de Gikongoro à partir de 1985 jusqu'en 2003, les deux saisons de pluies qui sont séparées par une grande saison sèche, attestent comment les conditions météorologiques permettent deux récoltes par an. Avec les précipitations qui commencent au mois de septembre, les exploitants procèdent au semis des plantes qui seront récoltées à partir du moi de novembre tandis que ceux qui sont plantées au début du moi de février sont récoltés à partir du moi de mai.

Même si les exploitants ne maîtrisent pas la variabilité des rythmes saisonniers, le climat reste l'un des facteurs déterminant la production agricole. Souvent le hasard du climat rend l'agriculture risquée. Si! ne p!eut pas suffisamment ou ne p!eut pas au bon moment, !es p!antes se dégradent et par !a suite, !a production est compromise. (DUPRIEZ H, 1983).

Les pluies abondantes enregistrées durant ces deux grandes saisons sont favorables aux activités agricoles. La saison sèche qui dure normalement trois mois se situe de la mi-mai à mi-septembre. Une telle prolongation de la saison sèche provoque un retard de la période dans la saison suivante, ce qui a un impact sur la production agricole attendue. Cela a été le cas au cours de l'année 2005, où la diminution exagérée des précipitations a anéanti la production agricole de la petite saison des pluies.

I.1.5. Les sols très acides

L'extrême sud de la Province du même nom dans la quelle se trouve la ville de Gikongoro, est caractérisée par des sols très acides avec un PH compris entre 4.2 et 5, et sont sérieusement appauvris et dégradés par l'érosion. Il s'agit principalement des schistes rouges ou micacés, des roches gneissiques, ou granitiques et de quelques crêtes quartzitiques. « Ces roches acides qui sont pauvre en base et en minéraux ferromagnésiens sont à l'origine de l'appauvrissement du sol parce qu'elles empêchent la décomposition complète de la matière organique » (RUTUNGA V., 1979). Leur dessaturation en cations et l'acidité aluminique font que les rendements agricoles soient médiocres, si des amendements organiques, calciques et minéraux ne sont pas effectués.

La miniaturisation toujours plus grande des exploitations agricoles, liée à la réduction des jachères et à des pratiques agricoles entraîne une surexploitation des sols. Les exploitations étant très petites, le maximum de superficie est consacré à la production vivrière. Cela ne permet pas à l'agriculteur de laisser en jachère ses terres épuisées et d'investir pour la protection et l'amélioration de son capital naturel (sol et forêt). Pire encore, il lui faut, pour survivre, prélever sur ce capital, amorçant ainsi une dégradation lente et grave de conséquences de son appareil de production. La fertilité des sols loin d'être conservée et rehaussée par les apports réguliers en fertilisants organiques et minéraux, est lentement abaissée par une agriculture minière, prélevant plus qu'elle ne restitue. Quant aux sols eux-mêmes, ne bénéficiant pas de mesures adéquates de protection et de conservation, ils disparaissent en grande quantité sous le coup de l'érosion.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo