2.2.2. Analyse des pratiques
Cette analyse de pratiques tentera de classifier les cinq
fonctions de médiation selon la définition de l'instance de
médiation, selon Jean-Pierre Bonafé Schmitt, qui repose sur le
statut du tiers et sur son mode d'action. Rappelons-en les
caractéristiques : indépendance, impartialité, absence de
pouvoir et mode d'action communicationnelle non instrumentale.
2.2.2.1. Vaud : Le bureau cantonal de médiation
santé
La médiatrice vaudoise, au bénéfice d'un
doctorat en sciences de gestion et d'une formation universitaire en
médiation, est liée par un contrat de travail au
département de la santé. Engagée à plein temps,
elle gère les dossiers de plaintes et promeut la culture de la
médiation et les droits des patients dans les institutions de soins et
les associations civiles. Responsable du Bureau cantonal de médiation
santé (BCMS), elle jouit d'une totale indépendance
environnementale, organisationnelle et fonctionnelle. Seul un rapport annuel
informe les pouvoirs publics de ses activités et met en exergue des
problématiques de santé publique sujettes à
réflexion. La loi ne prévoyant pas de suppléant en cas de
récusation, la médiatrice peut faire appel à un ancien
stagiaire fort de compétences reconnues en médiation et de
connaissances du domaine de la santé.
La pratique vaudoise s'apparente à la conception
normative de la médiation enseignée à l'IUKB : entretien
préalable, séance de médiation dans une logique
communicationnelle, évaluation de la mise en application des accords.
L'élaboration des accords repose sur des aspects d'amélioration
de comportements et de prestations de soins en lien avec les droits des
patients. Ceux-ci sont signés par chaque partie quelques jours
après la séance, leur laissant ainsi le loisir de se
récuser.
Depuis l'ouverture du Bureau de médiation en mai 2004,
plus de 600 dossiers de plaintes ont été traités par la
médiatrice, dont le tiers en médiation.
Les quatre notions qualifiant une instance de médiation
sont, à notre avis, présentes dans cet exemple, ce qui permet
d'expliquer le résultat de l'activité du Bureau depuis son
ouverture.
2.2.2.2. Genève : L'instance de médiation
Les trois médiatrices genevoises
désignées par le Conseil d'Etat répondent aux
critères de reconnaissance de la Fédération suisse de
médiation (FSM). Formées en médiation familiale, deux
d'entre-elles possèdent une formation initiale d'avocate, de laborantine
pour la troisième. L'approche en médiation prévoit un
entretien préalable et privilégie en séance la reprise du
dialogue pour tenter de concilier les parties dans la rationalité
gagnant-gagnant.
Alors que la loi mentionne clairement qu'un mandataire n'est
pas admis dans le processus, celui-ci est accepté tacitement, mais
plutôt déconseillé par le tiers saisi. Les plaintes
émanent principalement d'un défaut de communication. Depuis
l'instauration de la médiation sanitaire en 2007, la commission de
surveillance a transmis six dossiers au total, ce qui ne satisfait pas les
médiatrices attitrées qui souhaiteraient plus
d'indépendance et une procédure moins formelle afin de favoriser
l'essor de la médiation dans ce domaine. Fervent défenseur de la
médiation, le conseiller d'Etat en charge du
Département de la santé souhaitait traiter la
moitié des dossiers de plaintes par ce biais.
L'indépendance relative des médiatrices face
à la commission de surveillance peut expliquer en partie le nombre
restreint de plaintes traitées en médiation. Un deuxième
facteur défavorisant est lié au mode de saisine qui
définit sa gratuité : une procédure de médiation
enclenchée par une saisine directe est payante au tarif habituel. A
contrario, si le plaignant est orienté vers la médiatrice par la
commission, la procédure est gratuite. Considérant les propos
recueillis et la loi qui définit les notions d'indépendance et
d'absence de pouvoir, ajoutée à cela une formation ad hoc, nous
estimons que l'approche genevoise correspond à la qualification d'une
instance de médiation.
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