2.1.3.2. Pratique
L'hôpital, libre d'instaurer un service de
médiation propre ou commun à d'autres institutions,
désigne son médiateur par le directeur. Un rapport annuel, non
accessible au public, renseigne les autorités sur les activités
de médiation.
L'évaluation faite en 2006 par le Conseil national des
Etablissements hospitaliers met en exergue un résultat décevant
de l'exercice de la médiation hospitalière depuis son
instauration :
o une minorité d'institutions hospitalières ont
institué la fonction de médiation liée à la
relation soignant-soigné;
o une majorité d'entre-elles voient cette fonction
dévier vers une gestion de plaintes hétéroclites qui ne
relèvent pas des soins : notion «fourre-tout» qui affaiblit
l'autorité morale de la fonction de médiation;
o la notion d'indépendance n'est pas respectée
lorsque le directeur assume cette fonction de médiation;
o la notion du secret professionnel n'est pas respectée
dans des pratiques particulières, comme la transmission de la plainte
à l'égard d'un médecin à son chef
hiérarchique qui, lui-même, intervient dans le traitement. De ce
fait, la fonction de médiation est perçue comme dépendante
de la direction et perd son aspect de neutralité78.
Les associations de patients autant que le Conseil national de
l'Ordre des médecins expriment leurs insatisfactions face au
fonctionnement de ces services : flou législatif quant à
l'indépendance et aux compétences des médiateurs locaux et
aux champs d'activité de la médiation. Quant aux tiers
concernés, ils émettent le souhait d'améliorer leur
pratique. Dans le but de mener une réflexion de fond sur les enjeux et
la pratique de la médiation, les
78 Ibidem, p.13 : Conseil national
Fonction de médiation-loi du 22 août relative aux droits du
patient. Bulletin 113 (22.04.06) »
médiateurs francophones et néerlandophones ont
créé, en 2005, deux associations soeurs de médiateurs en
institution de soins (AMIS79.- WOVAZ)80. C'est dire que
la médiation hospitalière belge ne répond pas aux attentes
de départ.
La médiation hospitalière est pensée dans
sa logique instrumentale de gestion des conflits dans un but gestionnaire
d'améliorer les prestations de soins et d'éviter les
procédures de dommage et intérêts. L'absence de
définition de la médiation et du profil du tiers dans la loi
relative aux droits des patients est un terrain propice à la
diversité d'interprétation et de pratiques qui se rapprochent de
l'arbitrage : prise de position du tiers, recommandations. L'exemple belge
s'inscrit donc davantage dans une dimension de contrôle social que dans
une logique de défense des droits des patients et de restauration du
lien social. La révision successive des textes, ajoutée à
la réflexion des médiateurs sur leurs pratiques - et dans un pays
coutumier des rapports négociés dû à son contexte
multiculturel -, nous laissent en présager un développement
ultérieur favorable dans sa dimension normative, quand bien même
l'on perçoit des résistances au niveau gestionnaire et une
volonté politique mitigée d'en comprendre les enjeux sociaux.
Pourtant, il ne faut pas négliger le fait que la Belgique se dirige vers
un état confédéral de type suisse qui risque, par la
redistribution des pouvoirs centraux aux provinces, de provoquer une
fragmentation des législations sur la médiation.
Pour conclure, il est intéressant de relever que
l'environnement hospitalier belge est confronté à des
problèmes liés à l'interculturalité. Elisabeth
Volckrick81 évoque, sans autre précision, le besoin de
médiation culturelle liée aux difficultés de langue mais
également à la diversité des conceptions de la
santé qui s'est traduite par 65'000 interventions en dix-neuf langues
dans les hôpitaux belges durant l'année 2005. L'on peut supposer
l'existence de personnes-relais - idée développée depuis
plusieurs années en France - issues des communautés migrantes
représentatives qui font office de traducteurs au sein de la relation
soignant-soigné.
79 http://www.mediateurs-amis.be/
80 E. Volckrick, «Médiation
et santé», Actes du colloque CEMAJ-IDS, 1er juin 2007,
Ed. Weblaw Berne, Schultess Zürich- Bâle, 2008, p.24
81 Ibidem, p. 24-25
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