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Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à  l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle

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par Dieudonné KALUBA DIBWA
Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2010
  

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§2. Les ordonnances présidentielles de l'article 145 de la Constitution

Les termes exprès de la disposition constitutionnelle font de la Cour constitutionnelle un mécanisme de contrôle inclus dans l'élaboration des ordonnances du Chef de l'Etat. La promulgation desdites ordonnances sans que la Cour constitutionnelle ne les ait préalablement contrôlées entraîne à la fois l'infraction de haute trahison dans le chef du Président de la République pour violation intentionnelle de la Constitution, mais aussi et surtout la non-validité de telles ordonnances du point de vue interne.

§3. Les règlements intérieurs des assemblées

L'exigence de conformité des règlements des assemblées parlementaires relève du souci du constituant à rationaliser le régime parlementaire. Il convient de noter que les règlements n'ont pas valeur constitutionnelle en eux-mêmes. Si une disposition réglementaire peut avoir valeur constitutionnelle, c'est au bénéfice de la disposition constitutionnelle qu'elle reproduit, ou dont elle assure le prolongement nécessaire, comme pour les lois organiques.

Le juge doit être, de ce point de vue, d'une extrême rigueur car, autrement, la suprématie de la Constitution serait un vain mot ou une lettre morte. Ce contrôle s'exerce à la fois sur le règlement intérieur de chaque chambre et même du Congrès.

La non-conformité, on s'en doute, débouche sur la non-mise en oeuvre, par la Chambre concernée, du règlement intérieur ainsi censuré. La question ainsi traitée présente de différences évidentes lorsqu'il s'agit des actes de droit international dont l'étude s'impose au paragraphe suivant.

§4. Les traités et accords internationaux

Marcel Wetsh'Okonda1074(*)a indiqué avec pertinence que « la République Démocratique du Congo a opté pour le système du monisme juridique avec primauté du droit international. Les différentes constitutions qui ont eu à régir cet Etat comporte une clause aux termes de laquelle une fois ratifiés conformément aux conditions d'autorisation parlementaire, de référendum ou de révision constitutionnelle, selon le cas et publiés au journal officiel, les traités internationaux font partie intégrante du droit national1075(*).

Ils occupent dans la hiérarchie des règles juridiques un rang intermédiaire entre la constitution et les lois nationales. Il en résulte que leurs règles devraient être préférées à toutes les lois nationales, peu importe que celles-ci soient antérieures ou postérieures sous réserve de leur caractère self executing1076(*).

En revanche, la réciprocité n'est pas de mise s'agissant des traités relatifs aux droits de l'homme1077(*). Il ne suffit donc pas que les traités internationaux soient ratifiés pour qu'ils puissent recevoir une application directe. Encore faut-il que les conditions susvisées soient réunies. Il n'est pas sans intérêt de le noter, les constitutions congolaises sont plutôt muettes sur le rang dans la hiérarchie des règles juridiques congolaises des coutumes internationales relatives aux droits de l'homme comme sur les conditions d'application desdites coutumes internationales. Ce qui ne rend pas facile l'application desdites coutumes internationales.

En tous cas, la République Démocratique du Congo ne s'est jamais prononcée en la matière et le jour où ils seront confrontés à ce problème, les juges congolais n'auront certainement pas la tâche facile.

Tel est également le cas en matière d'application des traités internationaux dans la mesure où pendant longtemps l'on a déploré sinon l'absence du moins l'indigence de la jurisprudence en la matière et que la première expérience soulève la question des juridictions compétentes pour procéder à l'examen des conditions d'application directe des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme, question qui n'a pas manqué de susciter une vive controverse.

Pour les uns, cette compétence est dévolue au juge du fond tandis que pour les autres, il s'agit là d'une compétence exclusive du juge constitutionnel »1078(*). Pour étayer cette thèse, il importe d'examiner chacune des possibilités institutionnelles qu'emporte la non-conformité du traité à la constitution.

A. Effet vis-à-vis du pouvoir constituant

Le pouvoir constituant étant souverain, il est de principe que l'arrêt d'une juridiction fût-elle la Cour constitutionnelle ne s'impose pas à lui. Dès lors que la Cour constitutionnelle est un pouvoir institué, il est juridiquement impossible qu'il contrôle le constituant.

Cependant, il faut ajouter que le constituant lui-même s'étant lié lorsqu'il s'agit d'un traité international en posant qu'il ne peut être ratifié ni approuvé lorsqu'un arrêt l'a déclaré au préalable non conforme, il lui reste la possibilité souveraine de réviser la Constitution s'il entend ne pas engager sa responsabilité internationale. En effet du point de vue des relations internationales, le droit interne est considéré comme du pur fait non susceptible d'être invoqué pour s'exonérer de sa responsabilité internationale. Si telle est la position à l'égard du pouvoir des pouvoirs dans l'Etat, la situation est différente vis-à-vis du pouvoir exécutif.

B. Conséquence à l'endroit du pouvoir exécutif

La non-conformité prononcée par le juge constitutionnel est un désaveu de la conduite des relations internationales par le juge constitutionnel qui joue ici le rôle de la troisième chambre. En effet, le pouvoir exécutif en l'occurrence le chef de l`Etat qui détient le treaty making power a dès lors l'obligation de renégocier le traité avant de le ratifier. La conséquence est donc hautement politique. Si l'attitude à ce niveau est politique, elle n'appelle guère de réponse divergente lorsqu'il s'agit du pouvoir législatif.

C. Attitude du pouvoir législatif

Le parlement étant l'instance politique par excellence, son fonctionnement n'est pas indifférent aux fluctuations de la politique lorsqu'un arrêt de non-conformité est prononcé par la Cour constitutionnelle. Il demeure alors que le législateur qui approuve le traité irrégulier est obligé par l'arrêt de la Cour constitutionnelle à réviser sa position. Pareille loi d'approbation reste parfaitement attaquable en inconstitutionnalité même si le traité, lui, ne peut être l'objet d'un contrôle de constitutionnalité.

Une conséquence politique non négligeable est qu'en réalité, dans le système parlementaire majoritaire qui est le nôtre, il est difficile de concevoir une attitude revêche à la ratification d'un traité par le Président de la République qui est le chef de la majorité. L'assemblée aura donc une propension forte à soutenir le Président de la République dans le duel qui s'engagerait ainsi avec le juge constitutionnel.

En revanche, la ratification de certains traités internationaux non self executing exige des lois de mise en application qui restent soumises au régime juridique déjà souligné. Si le traité dans ce cas est déclaré non conforme, sa loi d'approbation ou celle de mise en oeuvre connaissent une non promulgation par le chef de l'Etat dans les conditions indiquées plus haut.

Dans le modèle de justice constitutionnelle congolaise, le contrôle a priori reste une affaire des autorités politiques. La raison en est bien simple : la non promulgation et la non publication de la norme contestée empêchent sa connaissance par le commun des mortels. En outre, n'existant pas encore juridiquement, telle norme n'est pas susceptible de causer un préjudice aux particuliers car elle n'est pas encore opposable.

C'est ainsi que le particulier, dans tous les cas, garde la possibilité majeure d'attaquer la loi après sa promulgation comme une arme fatale qui vient parfaire le système de justice constitutionnelle qui cesse ainsi d'être fortement autocratique1079(*) pour devenir démocratique.1080(*)

* 1074 Nous le citons in extenso avec les références qu'il a exploitées.

* 1075 Lire notamment les articles 214 à 216 de la Constitution du 18 février 2006, La Constitution de la République Démocratique du Congo, Kinshasa, Commission électorale indépendante, 2006, p 9

* 1076 WETSH'OKONDA KOSO (M.), op.cit, pp 139-169

* 1077 WASCHSMANN (P.), op.cit, pp 121-123 et 125; Article 60 par. 5 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, in S.A, La Commission du droit international et son oeuvre, 3ème Edition, New York, Nations Unies, 1982, p 232

* 1078KAMBALE KALUME (P.), op.cit (cote 11), pp 161-163 cité par WETSH'OKONDA KOSO (M.), «La compétence des juridictions congolaises en matière d'examen des conditions d'application des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme », Revue du Barreau de Kinshasa/Gombe, n°3/2009, pp.102 et s.

* 1079Lire NGONDANKOY NKOY ea LOONGYA (P.G.), Le contrôle de constitutionnalité en République démocratique du Congo. Etude critique d'un système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte tradition autocratique, Thèse de doctorat en droit public, Université catholique de Louvain, 2008, 603 pp.

* 1080 Il s'agit d'un voeu et d'une praxis qui doit suivre.

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