Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle( Télécharger le fichier original )par Dieudonné KALUBA DIBWA Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2010 |
§2. Propositions pour un juge constitutionnel efficace, efficient et effectifNous tentons d'articuler ces propositions autour des concepts d'efficacité, d'efficience et d'effectivité dont les approches définitionnelles sont de nature à en faciliter l'intelligence. Il procède en effet de la cohérence normative interne et externe que la justice doit être perçue comme un des mécanismes du système de règlement des conflits surgissant dans la société elle-même déjà saisie ici comme un système intégré. C'est ainsi que le dysfonctionnement de la justice est déjà le révélateur explicite d'un autre dysfonctionnement plus grand qui est celui de la société politique globale. En effet, la justice entendue comme une manifestation du pouvoir est toujours une des fonctions de celui-ci, de la sorte que son dysfonctionnement déteint inévitablement sur la totalité du pouvoir. Ainsi donc, avoir un juge constitutionnel efficace est une nécessité non seulement pour parachever l'édifice constitutionnel et assurer sa solidité mais aussi et surtout une exigence d'efficacité du pouvoir dans l'Etat. Voyons dès lors comment cette justice de qualité pourrait s'implanter sur le sol congolais au regard des vues de droit comparé exposées plus loin, en commençant par la composition du siège de cette justice. Etudier la proposition de la composition de la juridiction constitutionnelle est en effet une nécessité car la justice est finalement un « complexe psychotechnique » incluant à la fois un personnel humain et une formation scientifique. La constitution du 18 février 2006 en son article 158 dispose que « la Cour constitutionnelle comprend neuf membres nommés par le Président de la République dont trois sur sa propre initiative, trois désignés par le parlement réuni en Congrès et trois désignés par le Conseil supérieur de la magistrature. Les deux tiers des membres de la Cour constitutionnelle doivent être des juristes provenant de la magistrature, du barreau ou de l'enseignement universitaire ». 554(*) Cette disposition constitutionnelle est la base de la problématique même de la composition de cette haute juridiction. Il importe de souligner que si d'emblée le nombre de neuf membres, au-delà de son symbolisme ésotérique parfait, ne pose pas problème particulier, il y a néanmoins lieu de faire remarquer qu'au regard de la configuration politique des provinces et du nombre des matières attribuées à cette haute juridiction ce chiffre pourrait être dépassé. Mais les évolutions futures tirées de l'expérience de la Cour suprême de justice siégeant en matière électorale semblent se diriger vers l'accroissement du volume du travail pour neuf juges. 555(*) Ce travail juridictionnel serait d'autant plus accru qu'il serait en fin de compte confié aux deux tiers des juges qui seront juristes, les trois autres membres n'ayant pas a priori des compétences techniques pour régler les questions purement juridiques même si leur apport pour les questions politiques pourrait être visible. Cette critique devra être tempérée par l'option faite par le législateur organique en chantier en faveur des conseillers référendaires.556(*) La question de la composition continuera à se poser au regard non seulement du volume des affaires mais surtout eu égard aux qualifications des membres. Le texte constitutionnel se limite à parler de juristes ; ce terme est plus qu'imprécis. L'enseignement du droit en République démocratique du Congo est étalé sur trois années consacrées par un diplôme de gradué en droit, deux autres années couronnées par le diplôme de licencié en droit ; deux années de diplôme d'études supérieures en droit et trois années terminales couronnées par le diplôme d'Etat de docteur en droit.557(*) Ainsi qu'on vient de le remarquer, à chaque niveau de formation correspond un diplôme universitaire de droit. A quel niveau d'études correspond donc la qualification de juriste énoncée par le constituant ? Il nous semble difficile de dire qu'un gradué en droit est déjà juriste tant il n'a pas encore accompli le cursus universitaire de licence qui lui permet d'exercer les métiers de droit. Le terme juriste s'appliquerait donc aisément au détenteur du diplôme de licencié en droit.558(*) Mais là aussi les programmes universitaires montrent que le jeune licencié en droit frais émoulu de nos universités n'a que très peu de formation en matière de droit public et plus spécialement en droit constitutionnel qu'il n'aura appris qu'en premier graduat souvent dans l'euphorie quasi religieuse des élèves sortis des bancs de nos collèges et lycées. Pour l'efficacité du juge constitutionnel et pour rendre un tant soit peu opératoire le cycle d'études postuniversitaires, il serait souhaitable que ne soit considéré comme juriste au voeu du constituant que celui qui a achevé le cycle des études donnant lieu à un diplôme d'études supérieures en droit public car ces études sont réellement spécialisées et permettent au récipiendaire de développer des compétences spécialisées et approfondies dans le champ des attributions juridictionnelles de la Cour constitutionnelle.559(*) A preuve, la lecture des arrêts rendus en matière électorale- matière constitutionnelle- et en matière administrative a donné à voir que nos hauts magistrats n'avaient pas toujours une compétence affirmée en matière de droit public.560(*) Dès lors, énoncer comme le fait le constituant avec une naïveté quasi enfantine que ces juristes proviendraient de la magistrature nous parait véritablement une gageure. Il y a sans doute de juristes qualifiés dans le corps de notre magistrature au regard du critère académique avancé, cependant le seul diplôme ne permet pas de juger du niveau scientifique du candidat au poste de conseiller à la Cour constitutionnelle. Le critère de la qualité des publications serait un paramètre intéressant de ce point de vue. Il en est notamment ainsi dans les systèmes étrangers que nous avons analysés plus haut. Ainsi, il serait illusoire de s'attendre à une justice constitutionnelle efficace de la part d'un juriste privatiste ou pénaliste qui aurait par ailleurs passé trente ans de sa carrière à trancher des conflits parcellaires ou des accidents de circulation. The right man at the right place, dit un adage anglais dont le pragmatisme légendaire tranche avec le flou de la formule constitutionnelle congolaise. Par ailleurs, lorsque l'on sait que la juridiction constitutionnelle a pour fonction de juger les oeuvres législatives de la majorité, il est illusoire de laisser le choix libre à cette même majorité de désigner ses juges. C'est l'inefficacité toute désignée. S'il l'on ne peut contester au Président de la République la latitude éclairée de choisir trois juges parmi les personnalités indiquées à l'alinéa 1er de l'article 158 de la Constitution, l'on ne peut pas ne pas remarquer qu'il appartient à une famille politique et que l'absence de culture politique démocratique l'inclinerait à privilégier les juges qui ne jugeraient aucune de ses oeuvres. Le seul rempart contre cette inclinaison naturelle de tout homme politique réside naturellement dans la notion bien morale de l'intérêt supérieur de la Nation. Le Chef de l'Etat n'a-t-il pas déjà une haute intelligence de cette notion dans un Etat qui se veut de droit ? Le choix qu'opérerait le Conseil supérieur de la magistrature serait une option acceptable sauf à privilégier le critère de compétence technique que l'on ne voit pas beaucoup dans ce corps du seul point de vue du droit public. La désignation du Conseil supérieur de la magistrature s'impose-t-il au Président de la République, seule autorité publique investie du pouvoir de nomination ? Il nous parait qu'il s'agit d'une sorte de compétence liée. Il ne peut que nommer. S'agissant du barreau, la même critique persiste. Le barreau congolais est composé des avocats, pour la plus large part, généralistes et ne disposant pas des connaissances spécialisées561(*) en droit constitutionnel de sorte que là aussi il est illusoire de trouver des personnalités appropriées à la tâche562(*). Nous pensons, en revanche, que la présence des conseillers référendaires que l'on trouverait volontiers parmi les universitaires congolais spécialistes de droit public serait de nature à tempérer la vacuité des juges non spécialistes. Mais, il faut le dire sans ambages, lorsque l'on veut installer une justice crédible, il sied de commencer par recruter des excellentes personnalités qui seraient enfin des juges excellents. L'Etat de droit passe inéluctablement par là et nulle part ailleurs. Matadi Nenga Gamanda opine, dans le même sens, lorsqu'il affirme que « la garantie d'accès à un tribunal serait illusoire si siégeaient audit tribunal, comme juges, des truands, des ignares ou de corrompus de tout genre. Le droit à un bon juge est une garantie juridictionnelle d'après laquelle toute partie doit être garantie de l'intervention d'un juge doté d'un pouvoir de pleine juridiction et de connaissances nécessaires pour une justice de qualité. Ce savoir, renchérit-il, dans la plupart des cas, ne peut être assuré que par la spécialisation du juge dans la matière qu'il traite. Le juge doit être au parfum du progrès du droit, surtout dans le domaine qui le concerne. Etre formé et se former est une obligation : quelle que soit la valeur de magistrats et leur qualité, quelle que soit la rigueur de leur raisonnement, leurs décisions resteront imparfaites si le droit qu'ils doivent appliquer ne progresse pas constamment ».563(*) Nous accordons nos suffrages à l'alinéa 4 de l'article 158 de la Constitution déjà cité pour la simple raison que le Président de la Cour constitutionnelle élu par ses pairs pour une durée de trois ans une fois renouvelable serait à même de la bien diriger même si cela n'est pas exclusif de la critique qu'il y a risque que le président ainsi élu ne se constitue une sorte de clientèle pour son éventuelle réélection. L'expérience étrangère exposée plus loin indique que le risque ainsi décrit et qui est réel reste néanmoins marginal si les hommes et femmes qui composent la Cour sont d'une haute moralité, condition que malheureusement le constituant ne semble guère imposer. 564(*) Au-delà de cette composition purement technique, il reste à voir qu'il est également utile qu'à l'instar du constituant sud-africain d'instaurer une justice constitutionnelle qui serait spécifiquement congolaise. Nous proposons donc que soit ajouté aux trois catégories constitutionnelles déjà exposées, un type nouveau des juges qui seraient les chefs coutumiers des principales communautés chaque fois que les intérêts de ces entités seraient en jeu.565(*) En effet, dans le mental africain, la justice est toujours de compromis. Il n'y a pas a priori des raisons que la justice constitutionnelle soit rendue hors la présence des destinataires de ses décisions.566(*) C'est une question d'efficience et de rationalité systémique.567(*) En d'autres termes, les chefs coutumiers seraient consultés comme juges ad hoc comme cela se pratique devant la Cour internationale de justice.568(*) Cette pratique est de nature à rendre lisible le travail de la Cour au regard des communautés concernées par les produits législatifs en processus de censure devant elle. A supposer qu'une loi soit adoptée concernant une terre occupée par une communauté, il nous paraît convenable que cette communauté par son chef qui est du reste une autorité publique soit consultée pour connaître le point de vue de celle-ci. Le juge coutumier ainsi désigné ne serait pas permanent ; il participerait au vote en prenant la parole sans toutefois avoir voix délibérative pour éviter l'émotion qui serait la sienne. Au-delà, il reste une question technique qu'il échet de résoudre : la question de la récusation des membres de la Cour et surtout la possibilité d'une suspicion légitime. La question vaut son pesant d'or car le projet de loi organique porte que « la Cour constitutionnelle ne peut valablement siéger et délibérer qu'en présence de tous ses membres, sauf empêchement temporaire de deux d'entre eux au plus, dument constaté par les autres membres ». En raison du caractère général de l'expression « empêchement temporaire », faut-il y inclure les cas de récusation et de suspicion légitime ? La disposition en lecture semble induire que deux juges seulement sont susceptibles d'être empêchés notamment par la récusation dans les conditions ordinaires de récusation. Est-il possible d'en récuser trois ou quatre sans bloquer la Cour et surtout violer la loi organique de cette institution ? En droit comparé, cette question vient de se poser avec acuité devant le juge constitutionnel burkinabé sous la Décision n° 2005- 004/CC/EPF du 14 octobre 2005 sur le recours du candidat Bénéwendé Stanislas Sankara tendant à récuser quatre (04) membres du Conseil constitutionnel.569(*)Sur les neuf membres du Conseil constitutionnel, quatre étant récusés, quatre autres ont du siéger et rejeter la requête en récusation sans vérifier la régularité de leur propre composition exposant de la sorte leur oeuvre à la critique. La suspicion légitime obéit à la même difficulté et oblige la Cour constitutionnelle à ne pas siéger. Et Dieu seul sait combien les politiciens seront tentés de l'empêcher à travailler à travers un tel mécanisme. Plus près de nous, le Conseil national de l'Ordre des Avocats qui siège aussi à neuf membres a été obligé d'interdire à travers son règlement intérieur-cadre la suspicion légitime et la récusation de plus de deux de ses membres.570(*) Le caractère illégal d'une telle disposition ressort du fait évident que la question de procédure devant un juge ne peut être réglée par voie des dispositions générales par le juge lui-même. Le législateur doit intervenir. Mais en attendant, la solution peut être imitée au profit de la Cour constitutionnelle pour éviter le désagrément burkinabé qui est loin d'être théorique. La récusation est le moyen de procédure par lequel le juge peut être remplacé pour certains motifs qui peuvent faire douter de son impartialité. Il s'agit là d'un principe aussi universel qu'ancien fondé sur l'impossibilité pour le justiciable de se conformer à une décision de justice s'il est prouvé que le juge a agi non selon la justice et le droit, mais par intérêt, faveur ou haine. Naturellement, ce moyen de procédure n'a pu véritablement se développer que lorsque les juges furent imposés aux justiciables. Et c'est le cas lorsque toute la juridiction est suspectée de partialité.571(*) L'exposé que nous venons de faire sur la composition de la Cour constitutionnelle ne serait pas complet si nous ne disons un mot sur le statut du juge qui va y siéger. Il s'agit d'étudier à la fois le statut financier et le statut fonctionnel des membres de la Cour. Il n'est pas possible, à notre avis, de parler de statut du juge qui doit dire le droit sans étudier au demeurant les conditions matérielles dans lesquelles il est situé pour ce faire. C'est ainsi que l'on parlera de son traitement avant d'analyser son statut juridique au regard des normes juridiques en notre possession. Le traitement du membre de la Cour constitutionnelle est, aux termes de l'article 10 du projet de loi organique sur la Cour constitutionnelle, fixé par une loi de même que les indemnités et autres avantages.572(*) Cette disposition, pour claire qu'elle soit, appelle néanmoins ce commentaire : d'abord, le législateur organique aurait fait économie des textes en fixant directement ce traitement au lieu de le renvoyer au législateur ordinaire, et, ensuite, il nous parait très utile que le traitement des membres de la Cour soit au moins celui d'un ministre pour la raison bien simple que le greffier en chef de cette juridiction revêt déjà le grade de secrétaire général de l'administration publique. Le Président de la Cour devrait recevoir le traitement d'un Premier ministre. Il va sans dire que pareil traitement est de nature à assurer une réelle indépendance matérielle aux conseillers et aux conseillers référendaires qui les secondent. En effet, les personnes investies de la mission essentielle de protéger la Constitution contre les excès de pouvoir législatif et exécutif doivent tout au moins être traités comme les personnes dont ils contrôlent les actes. Autrement, la Cour risque de rejoindre les autres institutions de décoration politique qui ornent le musée des constitutions africaines passées. L'efficacité de cette haute juridiction passe aussi en effet par là. S'agissant du statut soit de la nature juridique des fonctions confiées aux membres de la Cour, il sied de dire que les normes posent problème. Si la Constitution pose le principe simple que la Cour est composée de neuf membres, le projet de loi susmentionné leur attribue l'appellation de conseiller.573(*) Cette dénomination rappelle brusquement celle que le législateur congolais a toujours donnée aux juges des cours d'appel et de la Cour suprême de justice en début de carrière auprès de ces hautes juridictions. Nous pensons que le législateur organique peut faire preuve d'imagination en les appelant, par exemple, Haut Conseillers d'Etat qui seraient ainsi différents de conseillers d'Etat près le Conseil d'Etat. Conseiller tout court ne nous parait pas suffisant pour ce qui est de la différenciation des autres types des magistrats en République démocratique du Congo. Le statut du membre de la Cour est qu'il n'est pas magistrat de carrière comme l'affirme la loi organique n°06/020 du 10 octobre 2006 portant statut des magistrats.574(*) Dès lors, il aurait apparu comme une incongruité au regard de la cohérence systémique que le Président de la Cour constitutionnelle siège au Conseil supérieur de la magistrature, s'il n'était magistrat lui-même.575(*) Toutefois, il faut d'emblée soutenir le législateur dans cette voie qui consiste à introduire des éléments non issus de la magistrature dans le seul organe chargé de surveiller la moralité. Telle est du reste la tendance dans plusieurs autres pays à démocratie avancée comme la France dont le rapport Balladur ne propose pas autre chose que ce que le législateur congolais a fait.576(*) Nous approuvons que les membres de cette instance juridictionnelle soient rendus justiciables de la Cour de cassation et cela, au simple motif qu'ils ne sauraient être juge et partie en leur propre cause. Il importe de souligner que les membres du parquet près la Cour constitutionnelle, eux aussi, sont des magistrats même si le statut des magistrats les a complètement omis de sa liste annexée à la loi susmentionnée. En effet, même s'ils sont nommés pour un mandat non renouvelable de neuf ans au parquet près cette juridiction, les membres de ce parquet sont définis comme magistrats du ministère public, aux termes du projet de loi organique précité.577(*) Ainsi donc, le législateur organique du Conseil supérieur de la magistrature semble avoir pris en flagrant délit d'omission son collègue de la loi sur le statut des magistrats en complétant le siège dudit Conseil avec les magistrats issus de ce parquet général.578(*) Il semble plus correct de voir dans cette catégorie, des magistrats en détachement. Le terme mandat inclus à la disposition en chantier pose aussi problème dans la mesure où cette notion écarte, à notre sens, tout concept d'avancement qu'implique le signalement prévu par le projet. En effet, il nous semble correct de ne voir d'avancement que dans une carrière. Pour de raisons de cohérence légistique, il serait bon d'effacer tout simplement le terme mandat de la formulation de cette disposition légale. De même, il est inadmissible que le statut des conseillers référendaires chargés d'assister les membres de la Cour dans l'accomplissement de leur mission soit renvoyé à un règlement intérieur de la Cour elle-même.579(*) Il s'agit, à n'en pas douter, d'une paresse du législateur qui peut faire l'économie de temps et de textes en édictant des normes sur le statut de ces référendaires. Il n'est pas vain de proposer qu'ils aient le statut de magistrat revêtu du grade au moins égal à celui de conseiller de cour d'appel. Dans la pratique d'autres cours constitutionnelles dans le monde, les référendaires finissent souvent par être des membres titulaires à la haute Cour tout simplement parce qu'ils disposent d'un avantage certain sur tout autre juriste : l'avantage de l'expérience. Et en plus, participant à la confection des décisions de la haute Cour, ils doivent être magistrats pour pouvoir être astreints au devoir de réserve et de confidentialité. Quant au régime disciplinaire qui est le pendant naturel du statut avantageux reconnu au membre de la Cour constitutionnelle, le législateur a tôt mieux fait de le soumettre à la discipline du conseil supérieur de la magistrature.580(*) Par le biais de cette procédure disciplinaire, le juge constitutionnel, envisagé comme censeur suprême, se retrouve dans les liens du contrôle de tout juge. Ceci offre un avantage assez limité certes en répondant provisoirement à la question capitale : quis custodiat custodem ? La réponse est provisoire car l'on ne saurait compter définitivement sur le conseil supérieur de la magistrature, par ailleurs dirigé par le Président de la Cour constitutionnelle, lui-même élu par ses pairs, donc redevable électoralement à sa clientèle, pour punir les actes illégaux du juge constitutionnel. Là, le dernier rempart se trouve dans la moralité sans faille qu'est censé avoir chacun des membres de cette haute juridiction. Autrement, il faudra se fier à l'homme avec les risques de dérapages qui sont liés du reste à la nature faillible de ce dernier ! Il est dit que le droit est une configuration rationnelle du vécu de l'homme dans la société et comme tel, il doit exprimer des valeurs qui sont en vogue dans cette dernière ou celles vers lesquelles elle doit tendre. A cet égard, le juge issu de la société ne doit-il pas incarner, en fin de compte, la vision morale du peuple ? Est-ce suffisant ? C'est pour cela seul que la loi a toujours institué une procédure, garante du droit contre l'arbitraire qui s'accommode de l'absence des formes. La lecture attentive du projet de loi organique sur la Cour constitutionnelle donne à voir que le législateur congolais, à l'instar de ses collègues de l'espace juridique francophone, est demeuré dans le droit fil d'une normativité laconique en ce qui est de la procédure. Cent et trois articles, pour pareille juridiction censée gérer au moins dix attributions répertoriées par le projet, paraissent bien minces surtout lorsque l'on se rappelle que le constituant a ouvert la saisine, du moins en certaines matières, aux particuliers.581(*) Si les effets attachés aux arrêts d'inconstitutionnalité et de non-conformité sont détaillés dans le projet de loi organique sous étude, il faut en revanche noter que la procédure devant la Cour se déroule comme devant les juridictions de droit commun où les audiences sont publiques. A ce niveau, la procédure sera écrite et contradictoire. L'on peut déjà saluer l'institution de la chambre restreinte comme mécanisme de filtrage de recours. En effet, de nombreux recours mus par des soucis divers sont de nature à surcharger la Cour pour ce qui est de son travail juridictionnel ; cette chambre restreinte aura donc pour tâche de ne laisser passer que les seuls recours dignes d'être examinés in plenum.582(*) Sur ce registre, il nous semble techniquement difficile à expliquer que le législateur qui a fermé le prétoire aux parties en ce qui est de la postulation en matière de cassation, en exigeant la représentation obligatoire des avocats qualifiés, car il s'agit d'un procès fait à une décision judiciaire, ait omis de le faire en matière constitutionnelle dont la technicité est plus que légendaire.583(*) Il n'y a qu'à suivre des débats houleux et animés que nos chaînes de télévision nous déversent à longueur des journées sur la matière constitutionnelle avec les politiciens et constitutionnalistes de circonstance, pour nous rendre à l'évidence que le prétoire doit être réservé aussi à des spécialistes.584(*) De sorte que des requêtes bien présentées, la Cour composée également des spécialistes n'ait à tirer que de la moelle du droit constitutionnel enfin réhabilité. N'oublions pas au demeurant, comme nous le rappelle la doctrine, que la décision constitutionnelle est le résultat du rapport de constitutionnalité que le juge constitutionnel établit entre la norme contestée et la norme constitutionnelle. Or, l'établissement du rapport de constitutionnalité n'est pas, pour le juge constitutionnel, aussi simple qu'on pourrait le croire à première vue. Comme l'a montré Jean-Jacques Pardini, il y a une contradiction apparente dans la mise en relation entre l'opération de qualification juridique des faits et le contrôle de constitutionnalité des lois. Alors, en effet, que la première a pour objet d'assurer une relation circulaire entre le droit et le fait - entre ce qui est et ce qui doit être - la seconde, à l'inverse, se limite « en principe» à l'examen des relations entre normes juridiques.585(*) Le « refrain » est connu : le juge constitutionnel ne connaît que le droit, le droit de la Constitution, le droit législatif. Cet auteur démontre que cette contradiction apparente n'est pas. Il propose un essai de systématisation du contrôle opéré par le juge constitutionnel sur la loi en s'efforçant de prouver, décisions à l'appui, que la qualification juridique des faits joue souvent comme une mesure à deux temps : on la trouve dans le contrôle des motifs de la loi et dans le contrôle du rapport moyen-fin tel que déterminé par le législateur. C'est peut-être aussi le lieu de noter que les décisions du juge constitutionnel répondent à une typologie que l'on doit à Thierry Di Manno.586(*) Aussi, il nous paraît utile d'anticiper ici cette catégorisation que nous préconisons par ailleurs. Il s'agit de la constitutionnalité précaire. Cette catégorie de décisions constitutionnelles est bien identifiée dans la jurisprudence constitutionnelle italienne, mais ne semblait pas, jusque-là, avoir été clairement repérée dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel français. Pourtant, ce type de décisions constitutionnelles est bien présent dans les deux contentieux constitutionnels. Les décisions de constitutionnalité précaire sont des décisions par lesquelles le juge constitutionnel délivre un brevet de constitutionnalité précaire à la loi contrôlée lorsqu'un intérêt général justifie, au moment du contrôle, qu'il soit porté une atteinte temporaire aux droits fondamentaux constitutionnellement garantis. En fait, il existe deux types de décisions de constitutionnalité précaire : les décisions de constitutionnalité provisoire qui n'admettent la constitutionnalité de la loi que dans la mesure où cette loi revêt un caractère temporaire et contingent ; et les décisions d'inconstitutionnalité non déclarée qui reconnaissent l'inconstitutionnalité de la loi contrôlée mais qui ne la déclarent pas en raison de la situation de plus grande inconstitutionnalité qui en résulterait. Ces dernières décisions se traduisent alors par une directive adressée au législateur de réparer lui-même cette inconstitutionnalité reconnue mais non déclarée. Cette technique est de nature à agrandir l'efficience du cours de contrôle de constitutionnalité au Congo. Nous opinons du reste que l'efficience de la procédure dépend aussi de la qualité de gens de justice en l'occurrence les greffiers et autres huissiers de justice. En effet, la haute Cour ne saurait être mieux outillée du point de vue procédural en l'absence des greffiers compétents. Le législateur organique en chantier semble avoir pris en compte ce souci de doter la Cour constitutionnelle d'un greffe d'une compétence tous azimuts. En effet, il exige du greffier d'être titulaire d'une licence en droit, d'avoir réussi à l'examen d'aptitude professionnelle à organiser par la Cour et avoir, entre autres critères, une expérience utile d'au moins deux ans.587(*) C'est raison pour laquelle les exigences de nomination d'autres membres de la Cour doivent être supérieures à celles posées pour être greffier ; sinon il y aura effectivement problème. En revanche, lorsqu'il s'agira du contentieux électoral désormais confié au juge constitutionnel, nous pensons que le caractère oral des débats apportera un avantage certain à la justice qui gagnera ainsi en crédibilité et en transparence. En effet, s'agissant d'un peuple issu tout droit de la civilisation de l'oralité, il est illusoire de ne prendre en compte que les écritures des plaideurs dont la sécheresse émotionnelle est de nature à contribuer à rendre la justice inaccessible à ses destinataires. Le caractère oral des débats emprunte ainsi à la palabre africaine dont les souvenirs ne sont pas encore totalement évanouis dans l'inconscient collectif des congolais et dont la résurrection du reste envisageable et possible du point de vue technique n'est pas pour déplaire le justiciable congolais.588(*) Le congolais dans son quotidien connaît et pratique la vertu de la parole qui est à la fois incantation et rite de désenchantement. Ainsi, une justice qui se ferait dans l'austérité de l'écrit serait techniquement appréciable mais elle serait privée du même coup de l'aura que confère la parole.589(*) Le constituant lui-même semble avoir compris cela lorsqu'il énonce imperturbablement que les jugements sont prononcés en audience publique.590(*) Par ailleurs, le caractère oral de la procédure ne serait encouragé qu'en matière électorale même si là aussi les écritures auraient toujours un impact sérieux dans le fonctionnement de la Cour. C'est le lieu de fustiger le comportement anarchique de la Cour suprême de justice qui s'est déclarée saisie sur pied des communiqués de presse faits à la radio ou à la télévision entraînant ainsi de façon anormale des recours en tierce opposition qu'elle aurait dû éviter en signifiant les recours à toutes les parties concernées par l'élection attaquée. Comme qui dirait, il y a eu excès d'oralité. De même, dire comme le fait le projet de loi organique sous revue que le délai de prononcé des arrêts est un délai d'ordre dépourvu ainsi de toute sanction en cas de violation, c'est, à notre sens, encourager la paresse des membres de la Cour qui doivent être à même de rendre des décisions dans les soixante jours sans que l'on doive attendre indéfiniment une justice qui donne ainsi l'impression d'être tirée en longueur et par les cheveux.591(*) Telles sont les conditions préalables à une justice constitutionnelle efficace, efficiente et effective. Pareille affirmation appelle sans conteste un tempérament car l'efficacité d'une institution s'inscrit dans une très complexe relation psychosociologique entre les hommes appelés à assumer les rapports de pouvoir et les destinataires des décisions de ces derniers. En effet, il n'y a pas de génération spontanée ni de juges Melchisédech dont la généalogie commencerait par eux-mêmes. Les juges sont déjà et toujours des congolais ; c'est donc toute la société politique qui doit connaître un saut qualitatif susceptible d'engendrer une véritable révolution des mentalités. Il faut une mue. Mais là aussi, l'exemple vient toujours d'en haut. Au risque d'élaborer un discours éthique qui, au demeurant, n'est pas très loin de finalités du droit, il convient de prendre conscience de l'existence d'une exigence morale profonde qui fait participer la justice de la divinité. En effet, avec Maurice Kamto, rappelons que Thémis, fille d'Ouranos le dieu du ciel, déesse grecque du Droit et de moeurs, créée pour mettre de l'ordre dans l'Univers et faire régner la justice parmi les hommes, protectrice de l'assemblée du peuple est identifiée chez les Romains avec Justitia reproduite avec un bandeau sur les yeux et une balance suspendue par ses doigts.592(*) Ce recours au discours mythologique occidental qui fonde l'indépendance et l'impartialité des juges ne doit pas occulter l'autre discours mythologique africain bantou qui fait participer les ancêtres à la justice comme une fonction sociale de continuité de la société. Au lieu de venir du Ciel comme la fille d'Ouranos, la justice nègre vient d'en bas. Elle est construite par les hommes pour les hommes mais sous la présence des ancêtres ici représentés par les chefs coutumiers. Voilà pourquoi la différence des fondements mythologiques et cosmogoniques entraîne une asynchronie mythologique, pour parler comme Jacques Djoli, mais surtout une inadaptation sociale dont le coût est exorbitant pour les populations qui ne se reconnaissent guère dans la justice qui est pourtant rendue, aux dires de la Constitution, au nom du peuple qu'elles constituent. Il est donc essentiel de prolonger la réflexion sur la possibilité de faire participer la population à l'exercice de la justice. Il n'y a qu'à observer les chants et proverbes du peuple qui rythment et accompagnent les palabres africaines pour comprendre l'incontestabilité des sentences rendues avec sa bénédiction. CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE Ces longs développements nous amènent ici à résumer que les modèles de justice constitutionnelle sont toujours des cadres idéaux de la conception du pouvoir dans une société donnée. Pour le montrer, cette étude s'est attelée à indiquer à travers les deux grands modèles de justice constitutionnelle connus dans le monde qu'il y a à la fois d'éléments de divergence au-delà de la convergence toute naturelle qui se trouve dans la volonté de modérer le pouvoir et de protéger ainsi les gouvernés. Les caractéristiques du contentieux constitutionnel étudiées dans chacun des modèles retenus ont indiqué finalement que les traits techniques du contentieux adopté dans chaque pays sont fonction du choix que ce dernier opère lors de son constitutionnalisme, c'est-à-dire lors de sa volonté constituante à limiter le pouvoir. Ce parcours d'un pays à un autre nous a permis de noter que les fondements théoriques de la justice constitutionnelle sont différents selon la place que le juge constitutionnel occupe dans l'architecture politique et constitutionnelle. Aussi, est-il important de noter que selon cet emplacement institutionnel, deux séries des conséquences ont été relevées tant à l'égard de l'ordre politique que vis-à-vis de l'ordre juridique. C'est ainsi que l'on n'a pu observer que du point de vue juridique qui est l'expression de l'ordre politique libéral, la primauté du droit constitutionnel est comme la traduction en termes juridiques de la séparation des pouvoirs qui induit la protection de la minorité et de droits fondamentaux de la personne humaine. Ainsi, dans cet ordre qui s'appréhende comme la matrice de la justice constitutionnelle, une sorte de sacralité est accordée au droit et au droit constitutionnel, en particulier et la figure du juge chargé de dire ce droit spécial apparaît comme transfigurée en une sorte de grand prêtre d'un culte moderne et laïc : le droit. Si toutes ces affirmations aux allures des propos liturgiques sont ressassées par la doctrine occidentale593(*), il reste que la société politique congolaise du fait de son appartenance au continent noir la prédispose à jeter un oeil chez le voisin. Là aussi, un mimétisme effarant et souvent des innovations audacieuses ont été relevés selon les quelques pays choisis comme symptomatiques d'une Afrique qui avance. L'étude a tout naturellement abouti à quelques propositions de réforme de la justice constitutionnelle en République démocratique du Congo. La proposition centrale est que l'architecture juridictionnelle actuelle devrait être maintenue avec quelques accommodements techniques notamment en introduisant la notion des juges ad hoc qui seraient des chefs coutumiers chaque fois que le juge constitutionnel serait amené à se prononcer sur un conflit touchant aux intérêts d'une communauté de base. Une démonstration a été fournie sur ce modèle que l'étude propose comme susceptible d'installer un juge constitutionnel efficace, efficient et effectif. L'on a discuté de conditions de son recrutement et celles de son travail qui constituent son statut juridique et financier, seul garant de son indépendance. Quelques suggestions ont été formulées pour rendre la justice elle-même accessible et transparente à ses destinataires que sont les populations congolaises. Cette tentative d'analyse des fondements de la justice constitutionnelle est inscrite tout logiquement dans les données heuristiques d'une solution au problème fondamental d'installer un Etat de droit en République démocratique du Congo. En effet, sans Etat de droit comme arrière-fond épistémologique, le juge constitutionnel n'apparaîtrait que comme un visage défiguré et pâle dans une caricature institutionnelle propre à un pays à forte tradition autocratique.594(*) Le juge constitutionnel n'est en effet respecté que dans la mesure où il incarne la bouche de la Constitution qui contient in se la proclamation et la garantie des droits fondamentaux des citoyens. En d'autres termes, la Constitution doit, pour être respectée, contenir un compromis social entre le pouvoir et le peuple sur lequel il s'exerce. C'est dire en conclusion que cette étude se situe aux confins de la problématique de l'Etat de droit constitutionnel dans un pays à forte tradition autocratique.595(*) Mais comment l'organiser ? La réponse à cette question tout aussi capitale que celle des fondements est l'objet de développements que nous exposons dans la seconde partie de cette étude. * 554 Constitution, article 158, alinéa 2, Journal Officiel de la République démocratique du Congo, JORDC, 47ème année, numéro spécial, Kinshasa, 18 février 2006, p.55. * 555 L'on se souvient que le contentieux électoral lors des élections générales de 2006 a pris plus de temps que prévu entraînant même une contestation parlementaire des arrêts rendus hors délai, lesquels arrêts n'ont eu la vie sauve que grâce à la bonne disposition d'esprit du Président de l'Assemblée nationale. * 556 Lire article 11 du projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p.5. * 557 Lire l'article 1er de l'Ordonnance-loi n°81-026 du 3 octobre 1981 relative à la collation des grades académiques aux universités, JOZ, n°20, 15 octobre 1981, P.13. * 558 En effet, tant le statut des magistrats que l'ordonnance-loi organique du Barreau, les deux textes ont toujours exigé la détention d'une licence en droit comme condition minimale pour exercer la profession d'avocat ou la carrière de magistrat. Dès lors, l'on peut convenir que l'on devient juriste lorsque l'on possède ce parchemin encore qu'il ne s'agisse là que d'une simple présomption juris tantum des connaissances en matière de droit. * 559 Les études de troisième cycle en droit sont organisées par l'arrêté départemental n°ESR/BCE /141/79 du 15 octobre 1979 fixant les programmes du diplôme d'études supérieures en droit. Lire MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET UNIVERSITAIRE, Programmes des études de troisième cycle, Kinshasa, Le Bureau des études postuniversitaires du Zaïre (BEPUZA), 1991, pp.12-14. * 560 Lire MATADI NENGA GAMANDA, La question du pouvoir judiciaire en République démocratique du Congo. Contribution à une théorie de réforme, Kinshasa, DIN, 2001. Cet auteur considère en effet et à raison que la mauvaise formation de nos magistrats est un obstacle majeur immédiat à la réforme de la justice ; KALUBA DIBWA (D.), La saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême en droit public congolais. Lecture critique de certaines décisions de la Cour suprême de justice d'avant la Constitution du 18 février 2006, Kinshasa, éditions Eucalyptus, 2007. * 561 C'est peut-être le lieu de proposer une école de formation du barreau, à l'instar de l'EFB de Paris qui fonctionne en synergie avec la Faculté de Droit de Paris et qui assure ainsi une formation professionnelle spécialisée à ses membres. * 562 L'article 7 point 2 de l'Ordonnance-loi n°79/028 du 28 septembre 1979 portant organisation du Barreau, du corps des défenseurs judiciaires et du corps des mandataires de l'Etat dispose tout simplement la licence en droit, JOZ, n°19, 1er octobre 1979, p.4. Cette disposition exige tout simplement d'être titulaire d'une licence pour accéder à la profession d'avocat sans que le barreau lui-même comme ailleurs n'organise une quelconque spécialisation professionnelle qui tiendrait lieu de diplôme de spécialiste. * 563 Voy MATADI NENGA GAMANDA, Le droit à un procès équitable, Kinshasa, Louvain-la-Neuve, éditions Droit et idées nouvelles, Academia Bruylant, 2002, p.33, n°33. * 564 Lire MUKADI BONYI, Projet de constitution de la République démocratique du Congo. Plaidoyer pour une relecture, Kinshasa, C.R.D.S., 2005. L'auteur formule des observations fort pertinentes sur l'absence quasi miraculeuse de cette condition de moralité comme si le constituant l'avait écartée. * 565La conception occidentale du pouvoir est généralement présentée comme étant un cercle, Jacques DJOLI dans sa belle thèse nous dit plutôt que chez-nous le pouvoir est concentrique. Les petits cercles qui s'entrelacent font naturellement le lit du pouvoir. Dès lors, la logique de cette observation sociologique devra se traduire institutionnellement par la responsabilisation et la prise en charge de communautés de base enfin réhabilitées par le pouvoir d'Etat. * 566 Lire les développements fort utiles de MAPPA (S.), Pouvoirs traditionnels et pouvoir d'Etat en Afrique. L'illusion universaliste, Paris, Karthala, 1998 ; MABIKA KALANDA, La remise en question. Base de la décolonisation mentale, Bruxelles, Remarques Africaines, 1969. * 567 Il est rationnel en effet que la loi comme expression de la souveraineté nationale tout comme la justice, expression de cette souveraineté, concernent le plus grand nombre au lieu de rester cloisonnées dans les alcôves de quelques résidences cossues de Kinshasa ou de Lubumbashi. * 568 La pratique de juges ad hoc désignés par les Etats parties au procès devant la Cour internationale de justice a donné des bons résultats parce qu'elle achève de faire participer les Etats à la fois comme juges et comme parties au procès de sorte qu'il est exclu qu'un Etat jugé à ce niveau puisse arguer de n'avoir pas eu à exprimer littéralement ses vues. Chaque Etat a le droit de se choisir un juge qui porte en fait son point de vue. Dans un cas récent, cette pratique a donné naissance à une belle littérature qui deviendra certainement un classique, aux dires de son préfacier, lire SAYEMAN BULA-BULA, Les immunités pénales et l'inviolabilité du ministre des Affaires étrangères en droit international. Principe. Caractères. Portée. Exceptions. Limites. Sanctions., (Affaire du mandat du 11 avril 2000. RdCongo c. Royaume de Belgique, CIJ, arrêt du 14 février 2002), Kinshasa, PUK, 2004. * 569 Décision du 14 octobre 2005, Journal Officiel du Burkina Faso, n°50, du 15 décembre 2005. * 570 Lire article 90 du Règlement intérieur-cadre révisé en 2009. * 571 Dans ce sens, lire la belle thèse de BERNABE (B.), La récusation des juges. Etude médiévale, moderne et contemporaine, Paris, LGDJ, 2009, 440 pp. * 572 Projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, article 10, p.5. * 573 Ibidem, p.4, article 1er alinéa 2. * 574 JORDC, Numéro spécial, 47ème année, Première partie, Kinshasa, 25 octobre 2006, p.21, article 90. * 575 Loi organique n°08/013 du 5 août 2008 portant organisation et fonctionnement du conseil supérieur de la magistrature, JORDC, numéro spécial, 49ème année, première partie, Kinshasa, 11 août 2008, p.3, article 4. * 576 Lire pour des détails fort intéressants, COMITE DE REFLEXION ET DE PROPOSITION SUR LA MODERNISATION ET LE REEQUILIBRAGE DES INSTITUTIONS DE LA Vème REPUBLIQUE, Une Vè République plus démocratique, Bibliothèque d'études doctorales de la Sorbonne, Paris, 2007, p.149, v° Projet d'article 65. * 577 Article 12, alinéa 3 in fine. * 578 Lire les articles 4, 14 et 19 de la loi organique sur le conseil supérieur de la magistrature, op.cit, pp.3-6. * 579 Voy article 11 alinéa 2 du projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p.5. * 580 Voy 24 alinéa 4 du projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p. 8. * 581 Voy article 162 alinéas 2 et 3 de la Constitution. * 582 Voy article 54 alinéa 3 du projet de loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p. 13. * 583 Lire avec intérêt MATADIWAMBA KAMBA MUTU, « L'originalité du procès en cassation », Revue juridique Justice, Science et Paix, n° spécial, Kinshasa, juin 2004, pp.61-67. * 584 Ce serait une occasion pour instituer un barreau spécifique devant cette haute juridiction susceptible de regrouper les avocats spécialisés en droit public. Ici, comme condition d'accès, le législateur exigerait de l'impétrant une ancienneté de dix ans d'inscription au tableau d'un barreau près la Cour d'appel pour éviter tout amateurisme et une publication en matière de droit public interne notamment en matière de droit constitutionnel pour justifier de la compétence en ce domaine. Une troisième condition essentielle serait la détention d'un diplôme d'études supérieures en droit public et ceci, pour stimuler les avocats congolais à faire des études spécialisées. * 585 Lire PARDINI (J.-J.), « La qualification constitutionnelle des faits », Mélanges dédiés à la mémoire du Doyen Favoreu, La justice constitutionnelle, Paris, Dalloz, 2007. * 586 Lire l'étude de Thierry Di MANNO, « Les décisions de constitutionnalité précaire en Italie et en France », Liber Amicorum Jean-Claude Escarras, La communicabilité entre les systèmes juridiques, op.cit, pp. 203-234. * 587 Lire article 20 du projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p.7. * 588 Lire pour une théorie systématisée de la notion de justice de palabre africaine, KABONGO-KANUNDOWI (Mgr E.) et BILOLO MUBABINGE, Conception Bantu de l'autorité, Munich, Kinshasa, Publications Universitaires Africaines, 1994 ; BUAKASA TULU KIA MPANSU, L'impensé du discours. « Kindoki » et « Nkisi » en pays kongo du Zaïre, 2ème édition revue et corrigée, Thèse de doctorat en sociologie, Université de Paris, 1971, (publiée), Kinshasa, Faculté de théologie catholique, 1980; BOSHAB (E.) , Pouvoir et droit coutumiers à l'épreuve du temps, Louvain-la-neuve, Academia-Bruylant, 2007 ; MARCOU (J.), Justice constitutionnelle et systèmes politiques, coll. Politique en plus, Grenoble, PUG, 1997 ; LOKADI LONGANDJO (R.), Les enjeux et les défis de la transition démocratique en République démocratique du Congo, tome 1, Eléments pour une morphologie de la démocratie congolaise, Kinshasa, éditions COREP, 2005 ; MAPPA (S.), Pouvoirs traditionnels et pouvoir d'Etat en Afrique. L'illusion universaliste, Paris, Karthala, 1998. * 589 Lire van COMPERNOLLE (J.), « A propos d'une garantie constitutionnelle du procès équitable : la publicité de la justice » ; LAVAL (G.) et Alii (sous la direction de), L'humanisme dans la résolution des conflits, Bruxelles, Larcier, 2007, pp.511-520. * 590 Constitution de la République démocratique du Congo, article 21. * 591 Lire exposé des motifs du projet de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, p.3. * 592 Lire KAMTO (M.) « La fonction administrative contentieuse de la Cour suprême du Cameroun » in CONAC (G.) et du bois de GAUDUSSON (J.) (sous la direction de), Les cours suprêmes en Afrique, Tome III, La jurisprudence administrative, Paris, Economica, 1988, pp.34 et 52. * 593 FAVOREU (L.) et Alii, Droit constitutionnel, op.cit, pp.456-459. * 594 L'expression ici employée est empruntée à NGONDANKOY NKOY ea LOONGYA (P.G.), Le contrôle de constitutionnalité en République démocratique du Congo. Etude critique d'un système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte tradition autocratique, Thèse de doctorat en droit public, Université catholique de Louvain, 2008. * 595 Il n'est pas vain, en outre, de montrer que le caractère autocratique appelle presque partout une justice constitutionnelle propre à endiguer les dérives dictatoriales du régime une fois que ce dernier s'est démocratisé. En tous cas, c'est le premier mécanisme auquel pensent les techniciens du droit lorsqu'il faut installer un Etat de droit. Pour schématiser, l'Etat de droit est fils de la dictature. |
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