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Installations proliférantes, en deçà  et au delà  de la mise en situation d'une oeuvre

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par Etienne Laurent
Unviersité Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Master 2 2010
  

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4. Profusion: mobilités, lumières et sons 4.a. Les Ïuvres : comment les rendre mobiles?

Les éléments présentés ci-dessous sont des éléments mobiles passifs, ils incluent des charnières ou des rails permettant de les faire bouger. Ce type d'éléments n'est qu'une première approche concernant la mobilité des éléments. Par la suite, il sera question de créer des éléments motorisés. Les éléments motorisés seront d'abord autonomes, c'est-à-dire fonctionnant avec un interrupteur pour les mettre en marche ou les éteindre. L'étape suivante sera de les faire circuler sur des structures.

-Diptyque

Fig. 29. Diptyque mobile, 2010, images numériques, 25 x 30 cm chacune.

La photographie de gauche, qui montre un Noocactus détruit sur mars est inspirée des recherches de Sophie Ristelhueber qui photographie des constructions humaines détruites dans des paysages déserts. La partie droite du diptyque est une photographie intitulée Parisky et s'appuie sur le travail d'Alain Bublex. La photo montre une vue d'artiste d'un projet pour un métro aérien à Paris. Le support des photographies est en métal et en plastique, cohérent avec l'univers technologique présent dans les photos. Le diptyque est prévu pour être accroché au mur et devenir un des éléments de mes Installations proliférantes.

-L'Auteur de la hauteur de l'auteur

Fig. 30. Trois vues de L'Auteur de la hauteur de l'auteur, 2009, photographies à hauteur réglable, dimensions variables.

Cette installation est constituée de deux photos dans des cadres en profilé aluminium noir de dimensions 24 x 18 cm, de deux rails en aluminium de 75 cm de long, de deux boulons, écrous, papillons et mousquetons simplex en acier zingué. Les rails en aluminium sont fixés verticalement sur le mur par six vis à bois et séparés par une distance de 21 cm. Le bas des rails est à environ 115 cm du sol. Les photos ont été prises avec un appareil photo numérique EOS 400D posé sur un pied en aluminium. L'éclairage était fourni par une lampe halogène de puissance 300 watts, assisté par une lampe basse consommation de 18 watts et deux lampes krypton 40 watts. Les photographies ont été prises à mon domicile devant un rideau blanc. La séance de pose a duré environ une heure. Les deux photos sélectionnées ont été prises en couleur puis transformées en noir et blanc sur Photoshop, après une rectification par le réglage Çtons foncés/tons clairs È. Aucune autre opération n'a eu lieu, ni aucun recadrage. Les tirages ont été effectués avec une imprimante jet d'encre HP PSC 1510 Tout-en-un sur du papier photo Ilford Galerie brillant. Pour des raisons que je ne connais pas, tous les tons clairs des photos apparaissent en blanc sur les tirages. L'imprimante a effectué une simplification des photos pour n'imprimer que les parties sombres.24

24 Cet effet sérendipe, qui n'était pas une décision de départ mais le résultat de l'action, outre le fait qu'il introduit une référence aux jeux d'enfants du 18ème siècle (Au 18ème siècle, les membres de familles aisées

Ce travail rassemble deux approches. La première est une réflexion sur la question de l'auteur. Il était demandé de réaliser une production plastique qui prenne en compte la notion d'auteur comme point de départ. J'ai pensé aux autoportraits photographiques et peints que j'ai réalisé récemment et particulièrement à l'installation Paradigme Culturel, Rock que j'ai mis en place en 2008. Cette installation était une mise en scène de ma réaction (expressions du visage) face à des photos

de musiciens rock dans des costumes

et attitudes caricaturales et kitch.

Fig. 31. Paradigme culturel, rock, 2008, Photos noir et blanc trouvées et autoportraits couleurs, 25 x 157,5 cm.

En octobre 2009, j'ai pensé qu'il serait intéressant de réaliser une installation avec l'intention de mettre en scène ma réaction non pas face aux autres mais cette fois-ci face à moi-même. J'ai décidé de réaliser deux autoportraits photographiques de profil (profil droit et profil gauche) et de les juxtaposer de manière à ce que les deux profils se regardent. J'ai ensuite envisagé différentes expressions que pourrait prendre ces profils et le sens qui en résulterait. Au cours du mois de novembre 2009, j'ai réfléchi à ce que je pouvais faire de ce type d'approche. Les éléments accumulés et accrochés sur le mur doivent être des Ïuvres à part entière, au sens << objet d'art >>, ce qui exclut par exemple le <<Ready-made>> au profit d'une conception se rapprochant des galeries d'exposition du 19ème siècle. Les éléments ont donc l'aspect de toiles sur ch%ossis, de cadres, de dessinsÉ Cependant j'ai voulu détourner certains cadres ou toiles pour y ajouter un facteur sonore ou lumineux. J'ai ensuite considéré dans quelle mesure ces éléments pourraient se déplacer sur le mur, et j'ai pensé les faire circuler sur des rails. Avec L'Auteur de la hauteur de l'Auteur, j'avais l'intention de rassembler dans une même installation les deux

et en particulier les enfants dessinaient les contours de l'ombre de leur silhouette sur du papier noir qu'ils découpaient ensuite aux ciseaux.), permet de concentrer l'attention du spectateur sur l'expression du visage ainsi que sur les relations entre les éléments du visage et ceux liés à l'installation proprement dite (le système d'accrochage).

approches énoncées précédemment (double autoportrait et éléments déplacables sur des rails). Le travail proposé permet ainsi d'expérimenter ce qui se passe lorsque deux expressions fixes sont confrontées dans l'espace. L'auteur c'est-à-dire moi-même est en mesure de régler la hauteur (gr%oce aux rails) de l'auteur (il s'agit d'autoportraits).

J'ai choisi les expressions de mon visage en pensant à la situation décrite par

25

Victor Hugo en exil.Ayant perdu sa situation de député à Paris, Hugo retrouve paradoxalement une certaine liberté. Il décrit une situation sociale établie qui conduit à une certaine retenue et éventuellement frustration, car il n'est pas possible de faire lorsqu'on est député ce que l'on peut faire lorsqu'on est vagabond. J'ai essayé de figurer cette idée par la photo de gauche de l'installation dont il est ici question. Cette photo me montre de face (position établie), un Ïil plus ouvert que l'autre (endormissement), les lèvres serrées sans sourire (dédain, mépris, tristesse). La photo de droite me représente de face la tête penchée vers l'arrière, regardant vers le haut, la bouche ouverte. Cette attitude est celle d'un être étonné voir fasciné, peut-être pris dans une situation difficile, dangereuse ou même tragique mais qui ouvre par la même occasion de nouveaux horizons. C'est le sens du mot <<criseÈ en Chinois qui veut dire <<chance dangereuse È. C'est la situation sublime du jeune Rimbaud sur les routes. L'Auteur de la hauteur de l'Auteur est un lieu d'expérimentation de la confrontation de ces deux expressions/situations sociales. Que se passe-t-il si je place la photo de gauche au dessus de celle de droite? Au même niveau? Au dessous? La position relative des photos renforce certains traits expressifs et suggère ainsi des récits différents. Placée en position haute, la photo de gauche suggère davantage la notion de noblesse et de supériorité. En position basse, la tristesse ressort davantage. La photo de droite évoque la précarité lorsqu'elle est en bas et la peur face à l'inconnu lorsqu'elle est en haut. La mise au même niveau des deux photos crée un sentiment d'égalité temporelle, comme si l'auteur se demandait quelle attitude adopter face à une situation.

Lorsque j'ai présenté l'installation L'Auteur de la hauteur de l'Auteur, on m'a tout de suite demandé si la hauteur des photos était réglable. Dans ce dispositif, c'est l'auteur (moi-même) qui déplace les photos. Le système de réglage n'invite pas le visiteur à toucher l'installation (Qui irait dévisser des papillons ?). Si l'idée avait été de faire intervenir le visiteur, un autre dispositif aurait été utilisé rendant plus simple le déplacement des photos (par exemple un système de poulies et de contrepoids).

25 Victor Hugo, Ce que c'est que l'exil, 1875, Equateurs, Parallèles, 2008.

Concernant la longueur des rails, pourquoi font-ils 75 cm de long? Pourquoi pas des rails qui iraient du sol jusqu'au plafond? Je pense que de tels rails auraient plutôt tendance à diluer le propos de ce travail et à rendre la manipulation des photos difficile. Une autre suggestion apparut ensuite: Pourquoi deux rails? Pourquoi pas dix? Cette suggestion m'intéresse beaucoup et j'ai le projet de la mettre en pratique. L'ajout de trois rails supplémentaires me permettrait de réintégrer mon idée de départ mettant en rapport des autoportraits de profil. Une référence à Duchamp appara»trait alors, car Duchamp a utilisé le profil, pas seulement pour son Nu descendant l'escalier mais aussi pour un collage sur affiche intitulé Wanted, $2,000 Reward, oü il se met en scène de face et de profil sur une affiche de police.26 Lors de la présentation, le côté humoristique de L'Auteur de la hauteur de l'Auteur a été percu comme s'il s'agissait de l'équivalent en image d'une blague ou d'un mot d'esprit. Ce caractère dérisoire et humoristique faisait partie de l'intention de départ pour ce travail (l'auteur regardant l'auteur) et se trouvait renforcé par la décision d'accrocher les autoportraits sur des rails ce qui visuellement suggère une pendaison. L'accrochage sur des rails et la po sition frontale des visages crée le sentiment d'un auteur qui se Çregarde sans pouvoir se regarder È. En ce sens, L'Auteur de la hauteur de l'Auteur s'inscrit dans l'humour Duchampien mais aussi dans celui plus contemporain de Jacques Lizène.27

26 Marcel Duchamp, Wanted, $2,000 Reward, 1923, ready-made rectifié : collage sur affiche, 49,5 x 35,5 cm, Milan, collection Arturo Schwarz.

27 En 1971, dans un film intitulé Tentative d'échapper à la surveillance de la caméra, Jacques Lizène se met en scène dans une situation comique et dérisoire. Il est possible que Pierrick Sorin se soit inspiré de ce film.

-L'Auteur de la largeur de l'auteur

Fig. 32. Trois vues de L'auteur de la largeur de l'auteur, 2009, photographies à largeur réglable, dimensions variables.

L'Auteur de la Largeur de L'Auteur est constitué de deux photos noir et blanc dans des cadres noirs en profilé aluminium de dimensions 24 x 18 cm accrochées à une tringle à rideaux en métal de 120 cm de long avec des fils en nylon et des attaches en plastique blanc. Les photos sont mobiles sur la tringle et déplacables en actionnant les cordelettes à droite de la tringle. Les photos ont été prises avec le même appareil photo et le même système d'éclairage que pour L'Auteur de la hauteur de l'Auteur. Les photographies ont également été prises à mon domicile devant un tissu noir. Un ami a prit les photos et la séance de pose a duré environ une heure. Les deux photos sélectionnées ont été prises en couleur puis transformées en noir et blanc sur Photoshop, éclaircies par le réglage <<courbesÈ et recadrées. Les tirages ont été effectués avec une imprimante Epson Stylus Photo R1800 sur du papier photo Ilford Galerie brillant.

Mon intention pour ce travail était de mettre en place un dispositif permettant un déplacement horizontal des photos. Après une réflexion sur la hauteur que l'auteur se donne à lui-même, ce travail me donne l'occasion d'aborder celle de la << largeur de l'auteur È. Je me montre ici de profil et tendant les lèvres comme pour donner un baiser. Lorsque les deux photos sont rapprochées, il sem ble que je m'embrasse sur la bouche du bout des lèvres. Cette fois-ci le déplacement se dirige à distance des photos, gr%oce aux ficelles. Je pense par la suite créer des éléments motorisés et se déplacant de manière autonome c'est-à-dire réellement mobile (les éléments actuels sont seulement déplacables). La notion de largeur se distingue de celle de hauteur. L'Auteur de la hauteur de l'Auteur montrait deux attitudes de l'auteur, d'une part une attitude blasée et d'autre part une attitude émerveillée. Ces attitudes correspondent à des états psychologiques que l'on pourrait décrire comme <<haut È ou <<bas È. Dans ce premier travail, les visages ne se voient pas et donc finalement l'auteur est confronté au choix de son attitude par rapport à lui-même. L'Auteur de la Largeur de L'Auteur confronte l'auteur avec l'attitude sociale qu'il adopte, sa position sociale. Lorsque les photos sont écartées, nous voyons deux profils. L'autoportrait de profil donne de l'importance à celui qui se représente ainsi. Les << CésarsÈ étaient représentés de profil sur les pièces de monnaies de l'Empire. Souvent les peintres, lorsqu'ils ont voulu peindre leur autoportrait testamentaire, se sont représentés de profil. Ce fut le cas par exemple du vieux Titien comme du vieux Renoir. Le profil suggère la dignité et la puissance. Les deux profils de L'Auteur de la Largeur de L'Auteur, lorsqu'ils sont éloignés, donnent l'image d'un auteur important ou prétentieux, qui occupe une large place dans la société. Dans la

position opposée, celle oil les deux autoportraits se touchent et semblent sÕembrasser sur la bouche, la place que lÕauteur occupe est plus modeste. Le geste dérisoire dÕun auteur qui sÕembrasse lui-même prête à sourire, nÕest pas sérieux et peu t etre interprété comme un geste anecdotique. Ici, tourné face à lui-même, lÕauteur occupe donc une place sociale ridiculement petite, peut-être aussi étroite que lÕinterstice de ses lévres. Avec ce travail, je suis lÕauteur de la largeur de lÕauteur dans la mesure oil comme pour le travail précédent cÕest moi -même qui manipule lÕÏuvre. Même si le dispositif de déplacement est ici plus pratique, il nÕest pas encore adapté pour proposer aux visiteurs de lÕactionner. Ceci constitue une des limites de ce travail et je devrais réfl échir aux possibilités soit dÕautonomiser le mouvement des photos, soit de rendre possible leurs déplacements par les visiteurs. Une autre remarque concerne le cadre des photos qui empêche de voir les lévres se toucher. Je pense que cela nuit fortement à ce travail et je vais par consequent remplacer les cadres par un contre collage.

4.b. Mobilité : Au-delà du mouvement

Je projette de créer des éléments capables de tourner sur eux-mêmes et de se déplacer sur des rails dÕun endroit à un autre. Il serait aussi possible de mettre en mouvement les tableaux dÕun musée et de les faire réagir à la presence des visiteurs. Ce type dÕinstallations implique de lÕélectronique, de lÕinformatique et de la mécanique. Lorsque mes installations actuelles seront suffisamment affirmées, jÕessaierai de construire des éléments motorisés, et en premier lieu de faire tourner une toile avec un moteur. Aprés ces premières experiences réalisées, je monterai un projet incluant la participation dÕune ou de plusieurs personnes compétentes.

4.c. Lumières et sons: quelles synergies?

Je crée des tableaux qui renferment des petites lampes à diodes, des mini-radios et des lecteurs MP3. Dans le cas d'un tableau monochrome qui diffuse du son, la similitude avec une enceinte acoustique est frappante. En effet la plupart des haut-parleurs sont protégés par un tissu synthétique tendu sur une sorte de ch%ossis en métal ou en plastique. Je souhaite produire des installations vivantes, qui utilisent non seulement une grande variété de visuels, mais aussi une variété de sons, de musiques, d'enregistrements, et toutes sortes de lumières colorées. Cependant les diffuseurs de son et de lumières doivent être cachés.

II. RASSEMBLEMENT : LA MISE EN RELATION DESÎUVRES

ÇPour la première fois, semble-t-il, dans l'histoire, l'art au travers duquel une
époque s'identifie ne se caractérise pas par un style ou une combinaison de styles définis,
mais par un éclectisme total qui fait du monde des formes un domaine plus morcelé que la
maison de Picassiette. »28

28 Catherine Millet, L'art contemporain, Histoire et géographie, Flammarion, Champs arts, 2006, p. 12.

<< C'est le programme classique de la perspective, présenté dans son cadre Beaux - Arts, qui autorise l'accrochage des tableaux en alignement de sardines. Rien ne suggère que l'espace contenu par le tableau puisse se prolonger de part et d'autre de celui-ci. »29

<< Dès que vous comprenez qu'un fragment de paysage est produit par la décision d'exclure tout ce qui l'environne, vous commencez à prendre conscience de l'espace situé hors du tableau. Le cadre devient une parenthèse. La séparation des peintures le long du mur, comme une sorte de répulsion magnétique, devient inéluctable. Le phénomène fut accentué et à vrai dire largement suscité par la science nouvelle, l'art qui se dédia à extraire le sujet de son contexte : la photographie. »30

Ces deux citations de l'article de Brian O'Doherty sur l'espace d'exposition établissent nettement le contexte de la mise en relation des productions plastiques. Alors que 19 ème

jusqu'au siècle les tableaux sont vus indépendamment les unes des autres, par la

suite la question de l'interaction s'est posée et se pose aujourd'hui. Dans ce contexte, placer ensemble des tableaux sur un méme mur peut créer des tensions stylistiques et sémantiques. Les dada
·stes et les surréalistes ont éno rmément joué à mettre en relation des tableaux et à créer ainsi toutes sortes de poésies visuelles. En témoigne par exemple la

31

reconstitution d'un mur de l'atelier d'André Breton au Centre Pompidou.Aujourd'hui, les conservateurs apportent un soin de plus en plus sophistiqué pour accrocher les Ïuvres et les faire << dialoguerÈ entre elles. Les expositions au Grand Palais, oü tous les paramètres de l'exposition semblent ma»trisés, depuis la distance entre les Ïuvres, leur éclairage, jusqu'à la couleur des murs sur lesquels elles sont exposés, sont un exemple. Une des conséquences des Installations proliferantes est ainsi de permettre l'étude concrète des interactions entre les << Ïuvres È. La question est alors de considérer comment la mise en présence de plusieurs Ïuvres dans un méme lieu modifie l'appréciation de leurs qualités plastiques et leurs interprétations. Lorsque nous regardons plusieurs objets en méme temps, nous cherchons les points communs et les différences. Il y plusieurs manières d'analyser ce que l'on voit. Il est par exemple possible de compter les objets, de les nommer, de les décrire. Si les objets sont figuratifs, la mise en relation des choses

29 Brian O'Doherty, 1976, Inside the White Cube: The Ideology of the Gallery Space, Letzigraben, Jrp/Ringier, Lectures Maison Rouge, 2008, p. 40.

30 Ibid., p. 41.

31 L'atelier d'André Breton au Centre George Pompidou est la reconstitution d'un mur de l'atelier d'André Breton oü il travailla à partir de 1922. On y trouve entre autre LHOOQ, Ïuvre de 1919 de Francis Picabia qui se moque de la Joconde au milieu de tableaux de ses contemporains, de sculptures africaines, de cristaux, coquillages et autres curiosités. Ce mur est une véritable installation oü André Breton met en relation les formes, textures et couleurs des éléments hétéroclites exposés.

représentées peu t générer du sens. Nicolas Bourriaud, dans son Esthétique relationnelle, dira : << L'activité artistique, elle, s'efforce d'effectuer de modestes branchements, d'ouvrir quelques passages obstrués, de mettre en contact des niveaux de réalité tenus éloignés les uns des autres. È32Le regardeur prend toute sa place lorsqu'il s'agit de faire jouer des Ïuvres entre elles. Selon Marcel Duchamp, << la signification d'une Ïuvre réside non pas dans son origine, mais dans sa destination. Le spectateur doit na»tre aux dépens du peintre. È Décrire la position relative des Ïuvres dans un méme lieu est sensiblement différent de simplement les appréhender ensemble. Un objet placé en hauteur ne ressemble pas forcément au méme objet placé au ras du sol.

Les tableaux rentrent en relation entre eux mais aussi avec le mur et l'espace d'exposition. C'est cette relation entre les tableaux et le mur que Claude Rutault met en évidence de manière radicale en 1974. Ainsi lorsqu'il propose de <<peindre le tableau de la méme couleur que le mur sur lequel il est accroché È33, il met à égalité le mur et le tableau. Cet aspect du travail de Rutault est fondamental pour mes installations murales. En effet, je considère alors le mur dans sa totalité et à égalité avec les Ïuvres. Les part ies du mur qui restent visibles font partie de l'installation. Claude Rutault ne vend pas des tableaux, il vend des tableaux << installés È selon une << définition/méthode È. Mes Installations proliférantes sont des peintures et des sculptures <<installées È, mais les règles de leur installation ne sont pas aussi définies que celles de Rutault. Je me donne des consignes et une direction d'ensemble et dans une certaine mesure chaque Installation proliférante respecte une règle du jeu qui lui est propre. Dans le cas par exemple de l'Installation proliférante n°7, la consigne était: << Accrocher les Ïuvres en biais par rapport au mur È.

La peinture classique était attachée à la description du monde visible, à l'étude de la couleur, de la géométrie, de la perspective et des différents effets visuels (miroirs déformants, anamorphose). La peinture moderne fut un lieu d'expérimentation des différentes manières de peindre. Il était question d'avants gardes, de styles et d'investigation du médium pictural. La peinture moderne débouche sur une prise de conscience des caractéristiques fondamentales de la peinture : Surface, recouvrement, rapports au mur, rapports à l'espace. La peinture postmoderne admet la coexistence des

32 Nicolas Bourriaud, 1998, Esthétique relationnelle, Dijon, Les Presses du Réel, Documents sur l'art, 2001, p. 8.

33 Définition méthode n°1, juin 1974, << Une toile tendue sur ch%ossis peinte de la môme couleur que le mur sur lequel elle est accrochée. È

pratiques. Si l'on considère que les périodes classiques et modernes ont épuisés les possibilités de représentation et celles touchant à la nature de la peinture, réunir ces deux approches, projet des Installations proliférantes, n'est-ce pas ouvrir un nouveau champ d'études?

Trois conceptions historiques de la peinture:

Peinture classique

Peinture moderne

Peinture postmoderne

Analyse des différentes manières de représenter le réel

Analyse des différentes manières de peindre qui débouche sur une analyse des caractéristiques

fondamentales de la peinture

Toutes les pratiques sont possibles si elles sont assumées

 
 
 

Les tableaux sont percus de manière indépendante.

Les tableaux sont percus les uns par rapport aux autres et dans leurs rapports avec le mur et l'espace d'exposition.

Les tableaux sont percus en fonction de la scénographie de l'exposition.

Parce qu'elles regroupent des Ïuvres exposées d'une certaine manière, les Installations proliférantes s'inscrivent dans l'histoire de l'exposition. Il semble donc pertinent de donner ici quelques points de repères sur la manière dont les oeuvres ont été exposées dans le passé, ceci dans le but de mettre en perspective les Installations proliférantes ainsi que pour leur ouvrir d'éventuels nouveaux horizons.

Si l'histoire de l'exposition dans les musées tel qu'on les conna»t aujourd'hui est relativement à la fin 18 ème

récent e puisqu'elle appara»t seulement du siècle, les Ïuvres

d'arts étaient auparavant montrées dans des contextes variés. Dans l'antiquité et au Moyen-âge, les Ïuvres d'art servaient de faire valoir aux cultes religieux et guerriers et à ce titre se trouvaient principalement sur les lieux de cultes et de commémorations. Les Ïuvres étaient exposées sur les places publiques, dans les riches demeures (villas romaines, palais), dans les temples, les églises, les châteaux, et parfois cachées et sorties

lors des cérémonies. Certaines églises avaient amassé de véritables << trésors >>, des objets sculptés et incrustés de pierres, des reliques, des peintures, des sculptures, des retables. L'art était toujours <<au service de>> et par conséquent n'avait pas de lieu consacré. Les Ïuvres d'art étaient admirées entourées de toutes sortes d'objets, d'architectures, de revétements muraux et parfois portées lors des processions. La fin de la renaissance voit arriver en Italie puis dans le reste de l'Europe un phénomène précurseur de l'exposition, celui des cabinets de curiosité. Cette pratique désuète et longtemps presque oubliée fait l'objet d'un fort regain d'intérêt depuis une trentaine d'année, certainement parce qu'elle correspond à l'esprit du temps, celui d'un gout certain pour l'éclectisme et les associations de styles. Pour la première fois, les Ïuvres d'art sont rassemblées dans un lieu spécialement dédié et mises en rapports les unes avec les autres. La grande période des cabinets de curiosités se situe entre 1550 et 1650, cependant cette pratique à des antécédents et des échos 1 er

jusqu'à aujourd'hui. Jean de Berry, mécène du début du

15ème siècle rassemblera une riche collection de manuscrits et d'enluminures (il est le commanditaire des Très Riches Heures du Duc de Berry). Le château d'Oiron a reconstitué son cabinet de curiosité et invite des artistes contemporains à y créer des Ïuvres en rapport avec ce thème. Le Musée Chintreuil dans l'Ain propose une visite d'un cabinet de curiosités divisé en naturalia, artificialia, et complété par des antiquités et des exotica. Miquel Barcelo vit dans son atelier parisien entouré d'objets tels que des tétes et des crânes d'animaux ou des poissons séchés. Mark Dion a créé en 2001 avec l'artiste britannique Robert Williams une installation intitulée Theatrum mundi: armarium qui ressemble à un véritable cabinet de curiosités.

Le cabinet de curiosités est une collection d'objets rares, plus ou moins orienté vers tels ou tels types d'objets en fonction des préoccupations du collectionneur. Les médecins et les apothicaires, comme par exemple Ferrante Imperato à Naples sont parmi les premiers collectionneurs de spécimens zoologiques et botaniques qui leur servent pour leurs préparations médicales. D'autres collectionneurs sont des aristocrates, des bourgeois, des princes, des académiciens, des universitaires ou responsables d'institutions. A ce titre, les objets rassemblés sont hétéroclites et l'on peut trouver dans certaines demeures royales, de notables ou d'apothicaires, mélangés à des Ïuvres d'arts parfois antiques (bustes romains, statues), des objets de sciences naturelles (animaux empaillés, insectes séchés, herbiers, coquillages) des instruments scientifiques (mappemondes, lunettes astronomiques, horloges, compas), des monnaies, des bijoux et

des livres. Le projet du cabinet de curiosité est le reve utopique d'enfermer dans un meme lieu la totalité du savoir, des productions de la nature, de l'art et de la science et de les ordonnancer, les compartimenter et les classer. Cette volonté de concentration du savoir trouvera une forme cristallisée dans les « cabinets d'arts », des mondes en miniatures, sortes de meubles regorgeant de curiosités et incrustés de pierres peintes et de marqueteries. A Florence, Francois de Médicis agence dans un dialogue subtil les tableaux et les bronzes avec un décor de marbre et de bois peint autour du thème des quatre éléments. Panneaux, armoires, cabinets, tiroirs et étagères compartimentent, ordonnent et classent les objets, créent un réseau de sens et de correspondances. « L'histoire des cabinets de curiosités est celle d'une progressive fragmentation, puis éclatement de l'espace dont chaque parcelle, de la table centrale aux portes des placards, des appuis de fenetres aux plafonds, finit, dans un souci d'unité interprétative et esthétique, par etre codifiée, analogie et symétrie renforcant l'illusion. »34 La réflexion sur l'espace d'exposition, le cadre, les conditions d'encadrement et le socle trouve -t-elle ici une origine ?

La recherch e de continuité et de correspondances entre les arts au sens large et la nature est un des objectifs des cabinets de curiosités. La nature dans ses formes les plus originales rivalise avec l'art dans ses manifestations les plus audacieuses. Cette intrication du naturel et de l'artifice sera la source de création d'objets hybrides, notamment de gros coquillages sertis dans des gangues de métal sculpté. Des objets étranges seront fabriqués spécialement pour les cabinets de curiosités comme par exemple des polyèdres en ivoire imbriqués les uns dans les autres, formes probablement inspirées des découvertes de Kepler. L'empereur Rodolphe II est un important collectionneur qui fait travailler des artisans, des peintres (Le Caravage, Arcimboldo) et des scientifiques (Tycho Brahe, Johannes Kepler).

A partir du milieu du 17ème siècle, les progrès de la science font que les objets sont séparés et classés entre ceux issus de la nature, les naturalia que l'on trouvera dorénavant dans les musées d'histoire naturelle, et les produits de l'intelligence humaine, les artificialia visibles dans les musées des Beaux-arts, d'arts et métiers et les académies. Le Leverian Museum, musée zoologique créé par Sir Ashton Lever à Londres en 1775 est un des premiers véritables musées à entrée payante ouverts au grand public.

34 Patrick Mauriès, Cabinets de curiosites, Paris, Gallimard, 2002, p. 35.

Les surréalistes prendront le contre-pied de cette séparation des genres et rassembleront des collections hétéroclites dans un but poétique et artistique. Paul Eluard et André Breton collectionnent des objets d'arts africains et océaniens, des oeuvres surréalistes, des objets incongrus pour créer des rapports formels. L'atelier d'André Breton reconstitué au Centre George Pompidou est un entassement de petits meubles contre un mur sur lesquels sont posé s les objets. Cet accrochage avec son accumulation d'objets et les tableaux accrochés sur la partie supérieure de mur a particulierement inspiré l'Installation proliférante n°6. Passant du coq à l'%one, Breton met par exemple en rapport le graphisme en courbe du tableau « L-H-O-O-Q » de Francis Picabia et celui d'un bouclier tribal placé à cTMté.

En 1936 s'est tenue dans la galerie Charles Ratton à Paris une exposition surréaliste qui, reprenant la thématique importante de l'imbrication art/nature, mettait en relation des objets naturels, naturels interprétés, naturels incorporés, objets perturbés, objets trouvés, objets trouvés interprétés, objets américains et océaniens, ready-made, objets mathématiques et objets surréalistes. Le porte-bouteilles de Duchamp (l'egouttoir) ainsi que sa « cage à sucres » (Why Not Sneeze ?) étaient exposés au milieu d'une vitrine parmi des statuettes africaines et sud-américaines, des sculptures en tige de métal et fils et divers objets étranges. Ce dispositif de la vitrine amorce un processus au terme duquel la bo»te, l'environnement et l'installation ont définitivement pris le pas sur le cadre du tableau. La définition que donne André Breton du surréalisme en 1935 est proche du projet des cabinets de curiosités, proche de celui des Installations proliferantes et peutetre dans une certaine mesure commun au concept meme d'exposition : « la rencontre fortuite de deux réalités distantes sur un plan non convenant ».35

Lorsqu'on me propose un lieu d'exposition, je sélectionne dans mes divers ateliers les productions plastiques qui me semblent les plus appropriées. Une fois sur place, la première étape consiste à installer la palette, travail qui consiste à ranger les éléments sélectionnés par catégories, par styles et par formats. Ensuite, j'agis comme un peintre, à la différence pres que les peintures et les pinceaux sont remplacés par les productions plastiques et différents systemes d'accrochage.

35 André Breton, 1935, Situation surrealiste de l'objet, dans les Îuvres completes t.II, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1992, p. 492.

1. Juxtaposition, superposition : le regroupement des oeuvres 1.a. Installation proliferante n°1

Fig. 33. Installation proliferante n°1, 2009, peintures, photographies, dessins, lithographie, monotype, herbier, sculptures en argile, supports en bois, sable, environ 400 x 850 cm.

L'Installation proliférante n°1 est une installation murale constituée dÕun assemblage dÕimages et de sculptures posées sur des supports en bois. Les 80 images et les 5 sculptures sont réparties sur la totalité dÕun mur dÕenviron 4 metres de haut et 8,5 metres de long. Le plus petit element est un cadre dore de 15 x 15 cm et le plus grand element une huile sur toile de 101 x 101 cm. LÕinstallation existe aussi en épaisseur et lÕon peut considérer que cette installation occupe un volume dÕenviron 400 x 850 x 30 cm. En raison du grand nombre dÕéléments constituant cette installation murale, il serait fastidieux de donner les details sur chacun. Voici tout de même quelques précisions. Les elements en deux dimensions sont à ranger en deux categories. La premiere est constituée de 20 toiles qui lorsquÕelles sont regroupées dÕune certaine manière forment une peinture intitulée Peinture liquide n°1. La deuxieme catégorie est un rassemblement de travaux en deux dimensions, le plus ancien datant de 1991. Une grande diversité de techniques et

d'approches participe à la création de ces éléments. Toutefois, chacun a été choisi pour sa capacité à évoquer le concept de prolifération. Trois sculptures ont été concues spécialement pour cette installation, les deux autres proviennent d'un corpus accumulé lorsque j'étais étudiant à l'Ecole Supérieur d'Arts et Médias de Caen en 2002. Les socles en bois recouverts de sable sont à considérer comme des éléments structurant le mur.

L'intérêt de cette installation murale se trouve dans son identité plastique originale, à murs 18 ème

entre

mi-chemin les de peintures du siècle et la création

contemporaine. A la fois cabinet de curiosités -avec par exemple la présence d'un herbier- et travail conceptuel, cette installation murale est à examiner dans les rapports créés entre des éléments de natures très différentes. Ici la mise en situation d'une Ïuvre dans une autre est une occasion de révéler chaque élément en ses composants.

Le critère de sélection pour qu'un travail puisse faire partie de l'installation résidait dans la capacité de cet élément à évoquer le concept de prolifération. Qu'entend- j e par <<concept de prolifération>> ? Un concept incluant une idée de reproduction et d'accroissement. En physiologie, prolifération est un terme désignant la multiplication des cellules par leur division. Plusieurs mots sont synonymes ou incorporent un sens proche. C'est le cas de termes tels que <<envahissement >>, <<foisonnement >>, << fourmillement >>, << grouillement >>. D'autres mots, s'ils ne sont pas synonymes, sont porteurs de significations en lien avec le terme étudié. Relevons entre autre <<accumulation >>, << addition >>, multiplication >>, <<division >>, <<extension >>,

<<réplication >>, <<reproduction >>, <<germination >>, << saturation >>, << expansion >>, <<destruction >>, << regroupement >>, << entassement >>, << anéantissement >>, << étouffement >>, <<assemblage >>, <<clonage >>, << croissance >>, <<opulence >>, << truculence >>, <<foule >>, << groupe >>, et les verbes << abonder >> et << pulluler >>.

J'ai choisi des éléments contenant une idée de prolifération, en cherchant les différents critères pour définir une photo, un dessin, une peinture, une estampe comme étant <<proliférant >>. Le premier critère qui vient à l'esprit est une répétition d'un motif visuel qui envahit tout l'espace de l'image. Les aquarelles de Barry Mc Gee en sont un exemple, avec leurs imbrications de losanges et autres parallélogrammes colorés. Sa pièce intitulée Untitled 27 est une accumulation de cadres de taille moyenne et tous différents. A l'intérieur des cadres, Barry Mc Gee a placé ses dessins et aquarelles. Il y a deux sortes d'images: Une trame ou dallage coloré et des sortes de caricatures de têtes

humaines. Les installations murales d'Allan Mc Collum sont des assemblages d'éléments en deux dimensions qui sont tous uniques mais issus du méme processus de production. Au début des années 80, il fabrique des Surrogates Paintings, (peintures subrogées) qui sont des milliers de variations sur le theme d'un monochrome noir, d'une Marie Louise et d'un encadrement. Les Plaster Surrogates sont des répliques en plâtre des Surrogates Paintings.

Fig. 34. Allan McCollum, Plaster Surrogates,

1982/84, émail sur hydrostone, 40 panneaux de 12,8 x 10,2 à 51,3 x 41,1 cm. En tout 162,5 x 279,4 cm.

Fig. 35. Barry Mc Gee, Untitled 27, 2006, dessins et aquarelles sur papier, 193 x 170,2 cm.

Pour lÕInstallation proliférante n°1, jÕai utilise les 20 toiles de Peinture liquide n°1 qui sont toutes issues du même processus de fabrication, et sont des variantes du même motif visuel (les lignes verticales). JÕai également retenu une photo qui montre des modules identiques, semblables à une photo dÕatomes vus au microscope electronique.

Fig. 36. Cloches, 2009, photo numerique d'une photo argentique, multiple en plastre moule realise à partir d'un modele en argile tournée, 10 x 15 cm.

Un second critere dÕéléments proliferants correspond à des travaux Ç all over È, semblables à ceux decrits ci-dessus mais sans la regularite des motifs. CÕest le cas dÕune encre de chine sur carton de dimensions 82 x 58 cm, ou encore dÕun monotype realise avec des aiguilles de sapins de dimensions 31 x 25 cm. LÕherbier pourrait presque faire partie de cette catégorie, mais il presente une variete de plantes et fait plutTMt reference à la proliferation de la vegetation. Le dessin de Jean-Jacques Rullier, Peux-tu aider le termite ? 2005, est un exemple de ce type de travaux.

Fig. 37. Jean-Jacques Rullier, Peux-tu aider le termite? 2005, crayon sur papier.

Fig. 38. Fourmiière, 2008, monotype, 31 x 25 cm.

Un troisième critère regroupe les travaux oü l'on reconna»t une forme en étoile à partir d'un point central. C'est le cas des photos de Noocactus mais également d'une acrylique sur verre de dimension 70 x 50 cm réalisée spécialement pour cette installation.

C'est aussi le cas des encres qui se diffusent dans le papier humide. La photo ci-dessous d'un Cactus de Michel Francois est aussi un exemple de ce genre de travaux.

Fig. 39. Etoile, acrylique, verre et isorel, 2009, 70 x 50 cm.

Fig. 40. Michel François, Cactus, tirage

photographique 24 x 18 cm, 30 exemplaires numérotés et signés par l'artiste avec le livre En même temps, 1998.

Fig. 41. Hossein Zenderoudi, Vav+hwe, acrylique sur toile, 200 x 200 cm.

Un quatrième critère d'éléments proliférants fait appel au geste lâché qui évoque la prolifération parce qu'il indique un mouvement rapide dans une direction. Une acrylique sur toile de dimensions 81 x 54 est un exemple de ce type d'images. Les Informes sont un exemple du cinquième critère proliférant. En effet, ces peintures sur papier fourmillent de mélanges et de couches de matières colorées, et sont comme des éponges, des algues.

Au-delà de l'image elle-méme, j'ai voulu jouer sur les rapports entre l'image et son cadre. Par exemple, j'ai mis une photo violette dans un cadre en imitation croco marron, et le contraste donne un effet ÇkitschÈ intéressant. J'ai posé ce cadre derrière une petite sculpture. Cette sculpture rappelle dans sa forme un chandelier ou un porte encens, si bien que l'ensemble du support avec du sable sur lequel était posé le cadre et la sculpture fait penser à l'hôtel d'un culte religieux.

Fig. 42. Detail de Installation proliférante n1, cadre en faux croco, photo violette, petite sculpture, sable, support en bois.

Certaines images de cette installation ont un c aractère autobiographique. Le Chien leopard est une lithographie réalisée à partir d'un croquis dans un carnet. Cette image est une sorte d'autoportrait, la représentation d'un trait de ma personnalité. Les pattes et le ventre de l'animal sont disproportionnés, illustrant une prépondérance de l'action et de l'instinct par rapport à la réflexion.

Fig. 43. Le Chien leopard, 2000, lithographie, 37 x 28 cm.

Au milieu du mur, j'ai accroché le portrait de ma grand-mère. J'ai dessiné ma grand-mère pendant sa sieste, et il était clair dans mon esprit que je réalisais une sorte de portrait mortuaire, tant à ce moment ma grand-mère était vieille et proche de la mort. Ce dessin constitue le centre de l'installation. J'ai vécu six mois chez ma grand -mère, et j'ai été frappé par sa manière de passer du coq à l'âne, de parler de tout en méme temps. Dans ce sens je pense que l'on peut dire que ma grand-mère avait un esprit proliférant.

Fig. 44. Ma Grand-Mere, 2006, crayon sur papier, 24 x 31 cm.

Fig. 45. Ma Grand-Mere en situation dans l'Installation proliférante n°1.

Cinq sculptures étaient incluses dans l'installation, parmi lesquelles trois ont été réalisées spécialement. Je me suis inspiré des Hallucinatory heads de Damien Hirst pour peindre des Noocactus de manière Ç proliférante È.

Fig. 46. Noocactus proliférant n°1, 2009, Fig. 47. Noocactus proliférant n°3, 2009,

argile, peintures acryliques liquides, vernis, argile, peintures acryliques liquides, vernis,

34 x 12 x 11 cm. 23 x 32 x 30 cm.

Fig. 48. Noocactus proliférant n°3, 2009, Fig. 49. Damien Hirst, Hallucinatory head, 2008,

argile, peintures acryliques liquides, vernis, peintures sur cr%one en plastique,

29 x 22 x 19 cm. 210 x 140 x 140 cm.

1.b. Installation proliférante n°4

Cette installation se situe dans la continuité de l'Installation proliférante n°1, mais est nouvelle par les aspects suivants: D'abord le choix de ne sélectionner que des éléments de petites tailles et pas de sculpture. Puis celui d'utiliser des peintures et des dessins que j'ai réalisés enfant, les plus anciens datant de 1990. Ensuite, j'ai voulu profiter de l'occasion pour inclure des éléments lumineux et sonores. Enfin, dans l'intention de donner une structure visuelle à l'ensemble, j'ai décidé de créer plusieurs sortes de monochromes noirs. Les deux éléments les plus grands sont les papiers peints en jaune de 29,7 x 21 cm. Les quatre éléments les plus petits font 2 x 2 cm et sont en bois peint en noir. Il y a trois sortes de monochromes noirs, certains sont des toiles sur ch%ossis, d'autres des plaques de verre et ceux qui sont plus petits et carrés sont en bois peint en noir.

Fig. 50. Installation proliférante n°4, 2009, dessins, peintures, mini-radio, lecteurs MP3, lampes à diodes, dimensions variables.

Trois lampes à diodes sont cachées dans les éléments. L'une forme l'Ïil d'une sorte d'autoportrait, une autre est dissimulée dans une petite peinture sur ch%ossis qui se trouve éclairée de l'intérieur. En regardant de près les monochromes noirs, on découvre

que l'un d'eux abrite la troisième lampe. Les éléments sonores sont également trois: Un petit monochrome blanc de dimensions 9 x 8 cm diffuse la station de radio France Inter. Deux autres monochromes de méme dimensions, l'un blanc et l'autre noir laissent échapper des airs d'opéras pour l'un et l'enregistrement de mon trajet en métro pour l'autre. Les airs d'opéra et les lieder sont ceux que je chante. J'ai voulu montrer la similitude visuelle entre une enceinte de haut parleur et une toile sur ch%ossis.

Cette installation est fortement autobiographique. Les peintures de mon enfance correspondent à des moments de découverte, par exemple au jour oü pour la première fois j'ai utilisé le pinceau comme un tampon à poils ébouriffés pour déposer de la gouache presque sèche sur le papier. L'arbre au bord de la rivière (détail n°1) est réalisé avec cette technique toute simple qui dans mon esprit enfantin était une vraie découverte. La photo du fÏtus (détail n°2) correspond au début de la chronologie et les miroirs à la fin c'est-à-dire à l'instant présent.

Fig. 51. Détail n°1 de l'Installation proliférante n°4. On y voit l'arbre au bord de la rivière mais aussi
les palmiers avec le soleil couchant et au milieu une nature morte de fruits plus récente. Le

ème

personnage de droite est mon professeur de théâtre encadré dans un cadre début 19 . En dessous la petite peinture est éclairée de l'intérieur. En haut à gauche se trouve le monochrome blanc qui diffuse les airs d'opéra et en haut à droite celui qui diffuse l'enregistrement du trajet en métro. Au dessus du soleil couchant se trouve un autoportrait photographique partiellement effacé.

Fig. 52. Détail n°2 de l'Installation proliférante n°4. On y voit la photo du fÏtus dont la forme arrondie est reprise par les deux éléments du dessous (la photo d'un Nooca ctus à gauche et un découpage à droite). L'arbre en haut à gauche est réalisé avec la même technique que l'arbre au bord de la rivière du détail n°1. A droite de l'arbre se trouve la photo d'une jeune fille et en dessous un miroir. A droite du papier jaune est accroché un dessin au feutre qui est décalqué avec de l'alcool à 90°.

L'accrochage About Nothing de John Armleder regroupe certains de ses dessins qu'il a conservés et encadrés dans toutes sortes de cadres et de sous verres.

Fig. 53. John Armleder, 2006, About Nothing, travail sur papier, 1962-2006.

Mladen Stilinovic met en évidence les clichés visuels du communisme. Il affirme que le sujet de son travail est le langage de la politique, ou plutôt son influence sur le langage la quotidienne. 36

de vie Entre 1984 et 2000, il rassemble environ quatre cents

peintures, photographies, objets, textes et collages et en extrait trente-six pièces pour une installation murale qu'il appelle The exploitation of the Dead. Des copies ou interprétations de peintures suprématistes, constructivistes ou du réalisme socialiste y côtoient des photographies de rituels collectifs, notamment des manifestations politiques ou sportives. Stilinovic expose un vocabulaire formel ayant perdu sa signification avec la fin du régime, il dénonce la récupération de certains signes (étoiles, croix, couleurs rouges, blanc, noir) par des idéologies politiques, religieuses ou artistiques. Placés entre une photo de Kasimir Malevitch sur son lit de mort et des plaques mortuaires vierges, des copies de tableaux suprématistes, abstraits et réalistes socialistes, des collages, des photos de réunions politiques, de cimetières et autre mémoriaux hésitent entre les sens qu'ils avaient auparavant et leur vacuité totale en tant que signes. Avec son installation pour la documenta de Kassel n°12, Stilinovic accroche ses éléments sur une sorte de maison en préfabriqué dans laquelle il est possible de rentrer. Il met réellement ses Ïuvres en situation dans et sur une autre Ïuvre, la cabane en préfabriqué qui leur sert de support. Les Ïuvres sont accrochées sur l'Ïuvre et y trouve leur contexte. En effet cette fragile maison rappelle que le communisme a surtout laissé des logements vides (comme c'est le cas en Allemagne de l'Est). Les Ïuvres accrochées sont comme des trophées d'une époque révolue, ayant perdu leur sens.

Fig. 54. Installation de Mladen Stilinovic à la documenta de kassel n°12.

36 Mladen Stilinovic, catalogue de 12 ème

la documenta de Cassel, Op. cit., p. 122. Ç The subject of my work

is the language of politics, or rather its reflection in the language of everyday life.È

1.c. Installation proliférante n°5

L'Installation proliférante n°5 regroupe des photos, tableaux et dessins de ma collection personnelle. C'est un écho à l'accrochage de Jean-Jacques Lebel à la Maison Rouge. L'accrochage de Jean-Jacques Lebel est comparable à une installation qui occupe tout l'espace du musée. Lebel considère que les Ïuvres perdent leurs significations si elles sont accrochées de manière neutre (si tant est que cela soit possible !). Il crée donc des agencements entre des Ïuvres très diverses de la collection commencée par son père et qu'il continue aujourd'hui. Ma collection personnelle est dérisoire en comparaison avec celle de Lebel (qui possède entre autre un magnifique Arcimboldo mais aussi un Saura, un Michaux, un Picasso et bien d'autres!). Avec Installation proliférante n°5, j'ai voulu jouer avec ce côté dérisoire. J'en ai aussi profité pour me faire prendre en photo en situation de montrer

les Ïuvres de ma collection. Reprenant le thème de la croix présent dans l'installation de Lebel j'ai disposé les Ïuvres de manière symétrique, de part et d'autre d'un saint en prière qui occupe la position centrale. Beaucoup d'Ïuvres de ma collection sont des photos. J'ai coincé les photos dans des trombones que j'ai accrochés sur des petits clous. Au cours d'une interview avec Peter Halley, Wolfgang Tillmans dit qu'il repère les différentes formes de matérialités possibles des photographies pour les mettre en relation les unes avec les autres. Il encadre certaines photographies, en accroche certaines directement sur le mur (les impressions jet d'encre par exemple) et pour d'autres il joue avec le critère d'édition limité inhérent aux photographies d'artistes en donnant à une page de magazine ou à une carte postale une présence équivalente sur le mur. Il affirme ne jamais épingler des photographies afin de ne pas percer leurs coins: Ç [É] when you pin it, you pierce the corner È 37. Il utilise donc un adhésif qui n'ab»me pas l'émulsion photographique. Par contre il utilise des épingles en acier pour les pages de magazines, car il est impossible d'enlever de l'adhésif sans déchirer le papier.

37 Collectif, Wolfgang Tillmans, Phaidon, 2010, page 29.

Fig. 55. Installation proliférante n°5, vue d'ensemble.

Avec sa série Thrift Store Paintings, Jim Shaw fait croire qu'il expose des tableaux achetés dans des brocantes. En réalité, il a peint lui-même les tableaux, en s'inspirant toutefois du style de la peinture populaire américaine des <<peintres du dimanche È. Il regroupe ses tableaux par themes, comme par exemple celui des animaux. Bertrand Lavier collectionne les Ïuvres des personnes dont le nom de famille est << Martin È. Lors de l'exposition << Voilà È au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris en 2000, il a présenté une installation intitulée L'art des Martin (1900-2000), qui regroupait des oeuvres dont le point commun était d'avoir pour auteur des artistes nommés Martin.

Fig. 56. Jim Shaw, 2002, Paintings Found in an O-ist Thrift Store Ð Animals, 11 peintures, taille variable.

En 2007 à lÕoccasion dÕune exposition intitulée La peinture fait des vagues, Claude Rutault a investi l'ensemble des salles du Musée des Beaux-Arts de Brest. Il met en dialogue une selection dÕÏuvres anciennes du musée et ses propres tableaux. Son accrochage est comme toujours une réflexion sur la maniere dÕaccrocher un tableau. En face dÕune peinture de Poussin qui montre un peintre de face, il place un tableau cTMte ch%ossis, toile contre le mur. Dans une des grandes salles du musée, il place les peintures de part et dÕautre dÕune ligne dÕhorizon fictive.

Fig. 57. Claude Rutault, La peinture fait des vagues, Musée des beaux-arts de Brest, 2007.

LÕappropriation dÕun objet ou dÕune Ïuvre comme point de depart de la creation dÕune autre Ïuvre est plus quÕune simple citation, parce quÕelle constitue vraiment le motif de lÕÏuvre créée tandis que la citation nÕintervient quÕen temps quÕélément supplémentaire. Les formes dÕappropriations artistiques sont multiples. Il peut sÕagir de lÕappropriation dÕun theme comme par exemple le theme du déjeuner sur lÕherbe qui a été repris maintes et maintes fois depuis son apparition au 19ème siècle (repris entre autre par Edouard Manet, Claude Monet, Pablo Picasso et Alain Jacquet). LÕappropriation peut être liée au détournement dÕimage ou dÕobjet. Les artistes du Pop art utiliseront sans frein cette forme dÕappropriation. Ainsi Roy Lichenstein ou Claes Oldenburg agrandissent démesurément des objets du quotidien tels que bandes dessinées ou ustensiles de cuisine, Andy Warhol détourne des images de journaux pour les sérigraphier sur des fonds peints de couleurs acryliques vives. Il est possible de sÕapproprier une idée, une technique ou un principe de creation dÕune Ïuvre. Dans le cas de la reproduction dÕune oeuvre à lÕidentique, lÕappropriation peut devenir falsification. Une forme dÕappropriation se situe

entre l'appropriation totale et la réinterprétation, c'est celle permise par la photographie et mise en évidence par Sherrie Levine lorsqu'elle rephotographie des photographies de Walker Evans.

La forme d'appropriation qui nous intéresse ici est peut être la plus extrême, celle qui consiste à utiliser directement une Ïuvre ou un objet pour la mettre en situation dans la sienne. C'est ce que fait Braco Dimitrijevic lorsqu'il installe le tableau La mort de Marat dans une baignoire38. Bertrand Lavier adopte aussi ce type d'approche lorsque, dans la continuation du travail de Marcel Duchamp sur les ÇReady Made È, il désigne un objet comme Ïuvre d'art. Cette forme d'appropriation peut aller jusqu'à la destruction de l'Ïuvre utilisée.

Une troisième forme d'appropriation consiste à modifier voire à détruire l'Ïuvre que l'on s'approprie. C'est ce que fait Robert Rauschenberg lorsqu'il efface un dessin de De Kooning en 1953, ou Bertrand Lavier lorsqu'il repeint une peinture de Morellet.

38 Installation créée pour l'exposition «Vis-à-vis» au musée des Beaux-arts de Reims, 1987.

1.d. Installation proliférante n°7

Fig. 58. Installation proliférante n°7, 2010, Ïuvres d'art sur mur, environ 5 x 7 x 9 m. (photo: Ghislaine Périchet)

-Le projet et sa réalisation concrète

J'ai créé cette installation pour la Galerie Michel Journiac à Paris. Le mur que l'on m'a proposé d'investir faisait environ cinq mètres de haut et sept mètres de long. Le premier projet d'installation était de construire une structure en tasseaux de bois perpendiculaires décollés du mur d'environ 10 cm. Ce réseau permettait d'accrocher les Ïuvres sur deux niveaux, celui du mur et celui des tasseaux de bois. L'intérêt était que les Ïuvres puissent se recouvrir partiellement et sans se toucher. La structure aurait également servi de support aux sculptures. Ce projet d'installation relativement ambitieux nécessite un minimum de huit jours de travail sur le lieu d'installation. Du fait que je n'avais que trois jours à consacrer à l'installation pour la galerie Journiac mais aussi parce qu'une autre idée d'installation naissait dans mon esprit, j'ai décidé de remettre ce projet à une prochaine occasion. J'ai donc créé une installation en accrochant les Ïuvres en diagonale, c'est-à-dire penchées vers l'avant, le bas touchant le mur et le haut étant retenu par un fil de nylon transparent. J'ai inventé un système d'accrochage triangulaire, avec deux points d'attaches sur les Ïuvres et un point d'attache sur le mur. Ce système permet éventuellement de créer des supports muraux pour des sculptures, en ajoutant une Ïuvre rigide (photo sous verre par exemple) posée à l'horizontale sur la première. L'idée était d'accrocher les Ïuvres des plus grandes aux plus petites en dégradé du haut jusqu'en bas du mur et d'y intercaler des sculptures. La première étape de la réalisation consistait à choisir et à acheminer les Ïuvres depuis mon atelier jusqu'à la galerie. Les plus grands formats ne devaient pas dépasser 80 x 80 cm. J'ai privilégié la sélection d'Ïuvres en rapport avec l'idée de diagonale, de ciel, de falaise, de coulures, d'arbres. Une fois les Ïuvres posées dans la galerie, je les ai équipées de leur système d'accrochage en fil transparent et rangées par tailles. En raison d'un manque de temps, mais aussi afin de ne pas trop gêner l'Ïuvre d'une autre exposante sur le mur d'à côté, j'ai décidé d'abandonner le projet d'accrochage Çall overÈ et d'accrocher les Ïuvres en pyramide inversée, la base se trouvant au plafond et le sommet à environ un mètre cinquante du sol. J'ai commencé l'accrochage en haut du mur avec les plus grandes Ïuvres et en descendant au fur et à mesure. J'ai installé un support au niveau du sommet sur lequel j'ai posé une sculpture.

-Le choix des Ïuvres sélectionnées

Cette installation est constitué e de cinquante et une Ïuvres. J'ai créé toutes les Ïuvres à l'exception de trois, deux autoportraits d'un certain M. Renouart et un vieux dessin d'une jeune bergère. Trente et une Ïuvres sont des peintures, dont seize datent de 2010, trois de 2009, cinq de 2008, une de 2000 et deux de 1992. L'installation intègre dix photos, dont quatre datent de 2010, deux de 2009, une de 2008, trois de 2007. Une gravure et un monotype ont été créés en 2008, et deux éléments lumineux et sonores en 2009. Deux éléments sont des toiles rouges non peintes tendues sur ch%ossis, l'une en velours et l'autre en tissu synthétique. Un dessin au fil à coudre sur une toile tendue sur ch%ossis avait été créé pour l'Installation proliférante n°1.

-Quelques exemples d'Ïuvres constituant l'Installation proliférante n°7.

L'Ïuvre centrale de cette installation est un Noocactus en argile résiné marron d'environ trente centimètres de haut. Cette sculpture est posée sur un support constitué de deux autres Ïuvres, des photos encadrées de dimensions 24 x 18 cm, une accrochée à l'horizontale et l'autre à quarante cinq degrés. La photographie horizontale est un tirage jet d'encre d'une photo prise avec un téléphone portable du ciel bleu lors d'une visite à la Documenta de Kassel en 2007. Cette photo est encadrée dans un cadre bleu ciel en bois peint. Le Noocactus est donc posé sur une photo de ciel, elle- même posée sur un autoportrait en noir et blanc. Cette seconde photo me montre regardant vers le ciel, la tête penchée en arrière.

Au dessus de la sculpture se trouve une autre photographie du ciel de la Documenta de Kassel, encadrée dans un cadre doré ancien de dimensions 30 x 42 cm. Cette photo est une référence à Yves Klein, à la fois monochrome bleu et

fragment de ciel prélevé et signé. Le doréest une des trois couleurs auquel Yves

Klein accordait une valeur spirituelle. Placée au dessus du petit autel formé par la sculpture posée sur son support photographique, cette photo placée à la hauteur des yeux renforce, esthétise l'installation et lui donne un caractère plus solennel.

A côté du ciel bleu se trouve dans la logique de Klein un ciel rose. La dominante rose de cette photo est l'effet d'un tirage sur une imprimante jet d'encre défectueuse. Ce ciel nous ramène sur terre par l'intermédiaire d'un geste consistant à empiler des galets. Ce geste est repris par une minuscule silhouette qui se détache sur la mer. Ici le thème de la sculpture est associé à celui du corps humain, car il semble que le geste de la personne qui dépose un galet sur un autre influence la posture de la silhouette de droite. Cette photo est encadrée dans un cadre en métal doré de dimension 24 x 18. Ce cadre fabriqué au Danemark il y a environ cinquante ans a la particularité de contenir

un verre bombé, courbure qui rappelle celle des galets du premier plan.

Parmi les autres Ïuvres constitutives de l'installation, signalons une peinture de chevalet réalisée sur motif et en plein air en 2008. Il s'agit d'une branche de pommier peinte à l'acrylique. L'année suivante, j'ai posé cette peinture dans la branche du même pommier et je l'ai photographiée. La peinture figurative est une manière de prélever des fragments de réalité pour les extraire de leur contexte spatio-temporel. Ce travail était une manière de remettre la pei nture dans son contexte.

L'idée de la mimésis, du vrai et du faux est présente à travers la juxtaposition de deux autres Ïuvres, une photo et une peinture. La photo de dimensions 30 x 40 cm montre un fragment de ce que je considère être des Peintures liquides naturelles. Il s'agit de coulures de terre argileuse et ferreuse sur la paroi des grandes falaises de la côte d'albâtre en Normandie. En juxtaposant une peinture qui présente des coulures du côté de la photo, je souhaite établir un

rapprochement entre les coulures naturelles de la falaise et celles de mes peintures.

Plusieurs peintures récentes

présentent dans l'installation furent créées
par un procédé singulier, sur des toiles à

motifs achetées sur le marché et montées sur des ch%ossis en bois. J'ai en effet joué sur la répulsion entre l'eau et l'huile. J'ai versé de la peinture à l'huile liquide sur la toile, puis je l'ai aspergée avec un tuyau d'arrosage muni d'une pomme de douche.

Deux éléments de l'installation sont lumineux pour l'un et sonore pour l'autre. Ces éléments ont l'aspect de minuscules peintures (10 x 10 cm). L'une est éclairée de l'intérieur par une lampe à diode, l'autre renferme une radio miniaturisée. Dans les deux cas, la faible intensité de la lumière et du son émis a pour but de créer une ambigu
·té. Il ne s'agit pas d'attirer trop l'attention mais seulement de suggérer la possibilité d'une installation Ç son et lumière È.

Parmi les grandes peintures du haut de l'installation, signalons celle qui fait écho au travail de Jackson Pollock sans toutefois reproduire à l'identique sa manière de procéder. Ici en plus des Peintures liquides, des pigments en poudre sont utilisés pour saupoudrer la surface de la toile. De plus, à la différence de Pollock, cette toile est tendue sur son ch%ossis avant d'être peinte. Cette peinture a été réalisée en plain air et à l'horizontal. Lors d'une séance de travail, ce que je cherche c'est d'atteindre le sentiment esthétique. J'incline ma toile pour y verser des nappes de couleurs, puis je la pose par

terre et envisageant sa surface comme une totalité, je trace des lignes et des effets de projections avec un pot de peinture percé dans ma main droite. Mes gestes sont rapides. Ainsi j'établis une structure vibrante sur la totalité de la surface de la toile. Ensuite je pince du pigment en poudre que je fais glisser entre mes doigts pour former des voies lactées et des étoiles célestes. Mon action est semblable à un rite chamanique de spiritualisation de la surface, au cours duquel j'essaie d'établir une harmonie la plus complète possible. C'est une quête qui se termine lorsque la toile prend son autonomie. Dans les années 50, le critique d'art Clément Greenberg défend l'idée, à propos de l'action painting, que la toile est une << arène È, que ce qui compte est l'action qui a lieu le temps de son exécution plus que l'image qui en résulte, et qu'il voit dans cette action l'occasion pour le peintre d'une <<création de soi È. Nicolas Bourriaud décrit cette manière de peindre: << Ainsi chaque toile de Jackson Pollock lie-t-elle si étroitement la coulée de peinture à un comportement d'artiste, que celle-ci appara»t comme l'image de celui- là È.39

39 Nicolas Bourriaud, Esthétique relationnelle, Op. cit., p. 43.

 

En haut du mur, une structure métallique accrochée au plafond venait perturber l'accrochage. Accrocher les Ïuvres en dessous sans en tenir compte ne faisait que mettre en valeur cette structure. Il a donc fallu jouer de cette contrainte en faisant en sorte d'intégrer la structure dans l'installation. Un exemple est donné par la dernière illustration de la série oü l'on voit comment la structure et les prises électriques qu'elle supporte sont intégrées dans l'installation, notamment en placant les toiles derrière et en utilisant une toile qui reprenne le mouvement des prises électriques.

Fig. 59. Douze photos de details de

l'Installation proliférante n°7 et de la creation d'une Ïuvre.

J'ai intitulé l'Installation proliférante n°7, Ç La Réalité en Face È, dans le but d'ouvrir cette installation à d'éventuelles interprétations et questionnements. Existe-t-il des rappor ts entre la frontalité d'une image et sa mission d'objectivité de la représentation du monde ? Que dire de l'image horizontale, est -elle plus subjective? La peinture classique est-elle en ce sens une peinture verticale ? Quels liens établir entre l'image frontale et la représentation, l'image horizontale et l'abstraction ? Les peintures abstraites et/ou mystiques sont -elles horizontales (Jackson Pollock, Olivier Debré, Pierre Soulage), parce qu'elles se donnent pour but d'exprimer l'intériorité de l'artiste ou en raison de leurs techniques de création? Que dire alors de l'image accrochée en diagonale?

2. Grouillement, saturation : l'entassement des oeuvres 2.a. Installation proliferante n°2

Installation proliférante n2 est une sorte de cabane résult ant de l'assemblage de cinq Peintures fonds de dimensions identiques, c'est-à-dire 130 x 97 cm chacune. Les Peintures fonds sont des peintures sur toile que j'ai créées au cours des deux derniéres années. L'installation prend la forme d'un parallélépipéde rectangle de dimensions 132,5 x 130 x 97 cm. Cette installation est à la fois un travail minimal par la simplicité de l'assemblage et un travail proliférant par l'aspect des peintures. Cette installation, regroupement de peintures présentées dans une piece blanche, rectangulaire et éclairée par une verriére à 4,5 metres de haut est une réponse possible au probléme de l'accrochage dans un « White Cube ».40 Au lieu d'être accrochées sur le mur, les toiles lui font face dans une sorte de retournement de l'accrochage habituel. Ainsi, lorsqu'un visiteur regarde une des peintures, il tourne le dos au mur sur lequel elle aurait pu être installée.

Un des autres aspects importants au sujet de cette installation concerne le jeu entre stabilité et instabilité. Bien que ce travail ne s'inscrive pas dans la même démarche que les travaux de Richard Serra, il partage avec ceux-ci cette problématique de l'objet posé en équilibre, de l'oeuvre qui se dresse. Le visiteur est confronté à une surface posée sur sa tranche, ce qui crée un sentiment de tension et d'arrêt du temps.

Cette installation joue aussi avec certaines des problématiques soulevées par Daniel Buren avec ses cabanes éclatées. Buren construit des « cabanes » à l'intérieur d'un espace d'exposition. Normalement l'on construit des murs pour y accrocher des oeuvres, mais les murs construits par Buren pour ses cabanes puis à grande échelle en 2002 dans l'exposition Le musée qui nÕexistait pas au Centre George Pompidou sont en eux -mêmes des oeuvres. L'Installation proliférante n°2 joue avec cette idée puisque ici les murs sont fabriqués avec des oeuvres. Ce ne sont donc pas les murs qui acquiérent le statut d'oeuvre, mais les oeuvres qui acquiérent le statut de mur. Cette position des oeuvres lui conféran t un statut d'objet en trois dimensions est renforcée par le fait que les tranches des

40 En 1976, la revue Artforum publie un article de Brian O'Doherty intitulé Inside the White Cube: The Ideology of the Gallery Space. L'expression « White Cube » est restée pour désigner l'espace d'exposition contemporain.

peintures, exception faite de celle qui est posée horizontalement sont peintes. Au cours d'une interview avec Claude Rutault, Patrick Guillon lui pose la question suivante :

_ Ç Comment ça marche par rapport à la surface le fait que la tranche de tes ch%ossis soit peinte? È

_ Ç Ca souligne, situ veux, le fait qu'une toile, c'est toujours un volume. Effectivement, c'est le problème que des gens comme Johns se sont posés. C'est prendre en compte la totalité de la surface, tranche comprise, sans privilégier l'une ou l'autre »41

41 Interview de Claude Rutault par Jean-Claude Bouix et Patrick Guillon à Paris en avril 1978 transcrite dans le mémoire de ma»trise de Patrick Guillon intitulé Le travail de Claude Rutault et le contexte artistique, écrit pour l'U.E.R d'arts plastiques de l'Université Paris 1 er en 1978 -1979, sous la direction de Bernard Teyssèdre.

Fig. 60. Installation proliferante n°2, 2009, technique mixte sur toile, 132,5 x 130 x 97 cm.

3. Déplacement, autonomie : la circulation des oeuvres 3.a. Contexte

Page 214 de son essai sur l'art contextuel, Paul Ardenne explique: Ç L'%oge médiéval, hanté par le salut, engendra une création plastique de nature métaphysique; la Renaissance, habitée par la question de la place de l'ho mme dans l'univers, un art de la perspective; la modernité, obsédée par la liberté, un art porté à s'affranchir de toutes les règles. L'ère libérale, plus que toute autre, inaugure un temps esthétique durant lequel l'art se fait mise en scène, ou répétition formelle de l'économie réelle.>>

Mes Installations proliferantes peuvent être considérées comme Çun système parmi d'autres de compréhension et de reproduction symbolique du monde >>42. Les éléments qui circulent sur les structures sont une éventuelle métaphore de la circulation et du mélange des différentes cultures mais aussi de la libre circulation des biens et des services.

42 Hans Belting, L'histoire de l'art est-elle finie? Op. cit., p. 13.

3.b. Installation proliférante n°6

Fig. 61. Installation proliférante n°6, premier état.

Cet accrochage est une première tentative d'utilisation de structures servant de support aux éléments accrochés. J'ai concu cinq structures en tasseaux de bois peint en noir. Ces constructions démontables ont un double objectif: le premier intérét consiste à étendre l'accrochage des éléments et des sculptures dans des volumes en trois dimensions. L'autre but poursuivi réside dans la forme des structures, leur position (accrochage) sur le mur, et leur couleur (noire), c'est-à-dire une fonction structurante de l'espace mural. A plus long terme, l'expérience de la mise en place de structures est fondamentale pour mon travail car j'envisage de créer des installations oü les éléments seraient mobiles, et de telles structures sont donc le premier pas vers la mise en Ïuvre de mes futures installations.

L'accrochage réside en deux étapes. Dans un premier temps, il s'agit de répartir les structures sur le mur. Ensuite, les éléments sont posés et accrochés sur les structures. Il est question d'expérimenter plusieurs solutions. La plus simple consistait à poser les

structures par terre le long du mur. Cette solution a été réalisée et un accrochage sur cette configuration a partiellement été mené. D'autres étudiants m'ont aidé à disposer les éléments sur les structures et sur le mur. J'ai pu constater que ce type d'installation est propice à une participation relativement facile consistant à choisir un élément et à le mettre en place parmi les autres. Cette première solution n'a pas été menée à son terme car rapidement des limites insurmontables sont apparues: Comment obtenir l'effet Ç peinture all overÈ recherché, c'est -à-dire une prise en compte équivalente de tout le mur d'accrochage alors que les structures restaient clouées au sol? Il fallait donc trouver un autre positionnement des structures.

Fig. 62. Installation proliférante n°6, deuxième état.

La seconde solution est une tentative de déconstruction et d'introduction de l'oblique parmi les structures. La totalité du mur est mieux prise en compte. Cependant, le problème d'une trop grande lourdeur dans la partie basse du mur demeure. Appara»t aussi une seconde question, celle de la place du renfoncement dans la partie supérieure du mur. Comment intégrer ce renfoncement à l'installation? Mettre une Ïuvre en situation, n'est-ce pas la relier au site de son exposition ? L'oblique n'appara»t pas comme une

configuration favorable aux structures. Le but de départ de celles-ci était d'apporter des horizontales et des verticales dans une référence à Piet Mondrian. (Rappelons que Mondrian accordait beaucoup d'importance à l'accrochage de ses peintures sur le mur, comme en témoigne les photographies de son dernier atelier à New York.)

A ce stade, il est apparu que le premier défi consistait à intégrer le renfoncement du mur (porte d'acces aux machineries de l'ascenseur). Nous avons donc disposé une structure à l'intérieur du renfoncement de maniere à ce qu'elle dépasse d'environ 35 cm. De cette maniere, le renfoncement trouvait une fonction de support et devenait par conséquent partie intégrante de l'installation finale. Il s'agissait ensuite de faire contrepoint à cette action. L'adjonction d'un second module dont la ligne basse serait à la hauteur du bas du renfoncement permettait d'établir des relations cette fois entre le renfoncement et le reste du mur. L'expérience n'a pas été mené e plus loin mais doit constituer le schéma de départ .

L'installation Structure-Peinture peut être perçue comme une métaphore de la vie conçue comme un équilibre instable entre un élan créateur proliférant et une structure plus ou moins permanente et réguliere. Cette installation inclu t également le theme du cabinet de curiosité, car les structures font penser à des meubles ou à des étagères. Enfin le theme de la structure est une lointaine référence à Tatline et au constructivisme. Mettre en coexistence et effectuer la synthese entre deux grande tendances du 20eme siècle : la quête de la simplification, de la pureté géométrique abstraite avec le suprématisme, Mondrian et le Corbusier en architecture, tendances finales de la rigueur classique et du rationalisme et d'autre part l'expressionnisme, la peinture gestuelle, l'art brut, le relativisme culturel et l'ere postmoderne.

En 1963, Joseph Beuys expose 282 oeuvres dans une étable d'environ 115 m2. Dans son article sur cette exposition, Hans van der Grinten écrit : « L'intégration du grand nombre de pieces à exposer dans le volume existant resta problématique aussi longtemps que l'on chercha à préserver des regroupements et des agencements traditionnels. Beuys transgressa ce principe en accrochant impulsivement des cadres et des boites aux clous qui se présentaient, de même qu'il plaça certains travaux dans des niches existantes, sur des saillies du mur ou des planches disponibles. »43

43 Collectif, 1991, L'art de l'exposition, une documentation sur trente expositions exemplaires du 20eme siècle, Paris, Regard, 1998, p. 307.

Fig. 63. Installation proliférante n°6, troisième état.

Pierre Soulage utilise le terme outrenoir pour désigner une couleur ayant des conséquences particulières sur l'appréciation de la peinture. L'idée d'une telle couleur est qu'elle reflète la lumière différemment suivant le point d'observation. Cela est du au fait que Soulage utilise une peinture très épaisse (pâte) et que, finalement, sa peinture intègre la troisième dimension. Notons au passage qu'à la méme époque cet artiste concoit des polyptiques Outrenoir et qu'il les installe dans l'espace non plus contre le mur, mais suspendus à des câbles, accrochés au plafond et vissés au sol. J'appellerais ces Ïuvres de Soulage des Peintures installées . De plus, en raison des reflets changeant suivant le point d'observation, Soulage considère que dans ses Ïuvres l'espace pictural ne se situe plus à la surface du tableau, mais tout autour. La peinture se crée au fur et à mesure et selon le point d'observation.

Walter Benjamin a établi une relation entre le lieu de l'Ïuvre et ce qu'il appelle son aura. Selon lui, à l'heure de la reproductibilité technique de l'image, l'Ïuvre devient accessible en toute heure et en tout lieu. L'installation d'Ïuvres établit une rupture avec cette situation. Ainsi, une installation d'Ïuvre s n'est pas reproductible en deux dimensions. L'installation d'Ïuvres n'existe qu'au moment oü le visiteur la regarde. De

plus, mes installations ne restent pour l'instant en place que le temps de leur exposition. Elles ne sont pas reproductibles à l'identique dans un autre lieu, puisque je travaille sur place. Ç Un travail prenant en considération le lieu dans lequel il se montre/ s'expose ne pourra être transporté autre part et devra fin de l'exposition.È 44

dispara»tr e à la Ces

raisons me poussent à affirmer que mes Installations proliferantes peuvent être percues comme une tentative de restauration de l'aura telle que décrite par Benjamin.

Accrocher des images sur un mur pour les mettre en relation amène à se poser la question des différents types d'images que l'on peut utiliser. Je réfléchis à établir des catégories en vue d'une future installation. De plus, en sus de la nature des images, la question de leur action sur le regardeur se pose. -Quels sont les différents types d'action des images 45

images sur les spectateurs? Le livre La performance des paru en 2010 établit

quatre types d'actions: l'efficacité (remplir la fonction prévue), l'agentivité (image comme agent social, pseudo être vivant), la performativité (comment agit une image) et la puissance (résultat optimal pouvant être attendu). Outre sa potentialité sémantique, l'image peut être source d'un plaisir désintéressé, peut témoigner de la puissance créatrice de l'artiste, peut transmettre des énoncés, émouvoir, faire acheter, faire croire, faire rire, faire peur, faire pleurer, faire chanter, faire donner, tromper, choquer, plaire, convaincre, divertir, susciter l'adoration, le fétichisme, la commémoration, être un noeud social. A un type d'image correspond une fonction spécifique. L'image publicitaire fait acheter, l'image religieuse fait prier, l'image scientifique donne à penser, l'image drôle fait rire, l'image esthétique sensualise la vision et stimule l'inconscient.

Il est donc possible de répertorier des productions visuelles et de les accrocher ensemble. Quel est l'intérêt spécifique de les accrocher sur une structure? Quels sont les rapports plastiques et formels entre les images et la structure sur laquelle elles sont accrochées ? Comment interpréter l'installation structure/peinture dans le cadre d'une analyse métaphorique d'ordre naturelle, sociologique, politique, chrétienne? Comme système de Ç compréhension et de reproduction symbolique du mondeÈ?

44 Daniel Buren, Les Ecrits (1965-1990), Bordeaux, capcMusée d'art contemporain, 1991, t.1, p. 428.

45 Collectif, La performance des images, Bruxelles, Ed. Alain Dierkens, Gil Bartholeyns, Thomas Golsenne, Coll. Problèmes d'histoire des religions, 2010.

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