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Les benzodiazépines chez les patients alcoolodépendants « état des lieux » analyse de 308 prescriptions de sortie au centre hospitalier spécialisé du Mans

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par Dr Wassim CHEHADE
Angers - Attestation de formation spécialisée en psychiatrie 2008
  

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6. LES BZD EN PSYCHIATRIE

6.1. Indications

En psychiatrie, les BZD sont essentiellement prescrites pour traiter

les troubles émotionnels, anxieux, phobiques, réactionnels en rapport avec le stress et les manifestations somatiques notamment cardiovasculaires ou gastro-intestinales d'origines psychiatriques25.

Elles peuvent être également prescrites comme traitement adjuvant aux antidépresseurs, au début du traitement des états dépressifs pour prévenir la levée précoce de l'inhibition psychomotrice par les antidépresseurs.

Les BZD sont très largement prescrites devant de troubles du sommeil, surtout quand ceux-ci sont en rapport avec un état d'anxiété général. Les BZD sont considérées comme des hypnotiques efficaces25.

6.2. La durée du traitement

D'après les recommandations de l'AFSSAPS27 et devant le potentiel addictif des BZD, quelques règles de bonnes pratiques sont préconisées :

· Débuter le traitement par la dose minimale efficace.

· Ne pas dépasser la dose maximale préconisée.

· La durée du traitement doit être bien limitée avec réévaluation à chaque renouvellement du traitement.

· Respecter la durée de prescription qui doit être aussi brève que possible, notamment :

-- de 8 à 12 semaines dans les troubles anxieux, réduction de posologie comprise (2 à 4 semaines pour certains auteurs26).

-- de 2 à 5 jours en cas d'insomnie occasionnelle et 2 à 3 semaines en cas d'insomnie durable 27,28.

6.3. Effets indésirab1es :

Les effets indésirables d'ordre psychiatrique sont parfois mal estimés par les prescripteurs. Ils peuvent se manifester de façon variable d'un patient à un autre et peuvent se confondre avec le tableau de la maladie psychiatrique initiale rendant l'adaptation du traitement difficile.

6.3.1. La t o1erance

La tolérance aux substances est un phénomène qui se développe avec l'usage chronique de beaucoup de SPA tel que l'alcool, l'héroïne, la morphine et le cannabis.

La tolérance aux multiples effets des BZD se développe lors de l'absorption régulière : la dose prescrite à l'origine produit progressivement moins d'effet et une plus forte dose est nécessaire pour obtenir à nouveau l'effet original.

Ce phénomène de tolérance, peut amener les médecins à augmenter la dose ou à ajouter une autre BZD, De nombreux patients peuvent ainsi avoir une prescription de plusieurs BZD'3 .

La tolérance aux effets anxiolytiques se développe lentement, mais il y a peu d'évidence montrant que les BZD maintiennent leur efficacité au bout de quelques mois. En fait, l'absorption à long terme d'une BZD peut

même aggraver les troubles de l'anxiété. De nombreux patients23 trouvent qu'au fil des années, les symptômes anxiolytiques augmentent graduellement malgré la prise régulière. D'autres rapportent l'apparition de crises de panique et/ou une forme d'agoraphobie pour la première fois après des années sous traitement23. Une telle aggravation des symptômes lors de l'usage sur une longue période d'une BZD est probablement due à la tolérance aux effets anxiolytiques, expliquant les symptômes de « sevrage » qui apparaissent même en cas d'utilisation continuelle du médicament. Cependant, la tolérance semble un phénomène variable, parfois très subjectif, car certains consommateurs chroniques déclarent une efficacité continue après des années de traitement23.

6.3.2. La dépendance :

Une dépendance psychologique et physique (cf. annexe 2) peut se développer à la suite d'une utilisation régulière et répétée soit en quelques semaines ou en quelques mois23.

Les personnes âgées, les gros « buveurs mondains » ou ceux qui ont des antécédents d'alcoolodépendance seraient particulièrement exposés au risque de dépendance physique pour les BZD25.

6.3.2.1. La dépendance a p os o1 ogie thérapeutique prescrite :

Les individus qui sont devenus dépendants à doses thérapeutiques de BZD ont habituellement plusieurs des caractéristiques suivantes29,23 :

1. Ils ont absorbé des BZD prescrites à doses « thérapeutiques » (généralement faibles) pendant des mois ou des années.

2. Ils ont éprouvé graduellement « le besoin » d'absorber des BZD afin de poursuivre des activités quotidiennes normales.

3. Ils ont continué à absorber des BZD bien que le but à l'origine de la prescription ait disparu (sevrage alcoolique, trouble anxieux...).

4. Ils éprouvent de la difficulté à arrêter l'absorption Des BZD ou d'en réduire le dosage à cause des symptômes de sevrage.

5. S'ils utilisent une BZD à demi-vie courte, ils développent des symptômes d'anxiété entre les doses ou éprouvent une envie pressante pour la dose suivante.

6. Ils peuvent contacter leur médecin afin d'obtenir des ordonnances répétées.

7. Ils peuvent devenir anxieux si l'ordonnance renouvelée n'est pas préparée assez rapidement. Ils peuvent transporter leurs cachets sur eux tout le temps et prendre une dose supplémentaire, au besoin, avant un événement troublant anticipé ou une nuit passée dans un lit étranger.

8. Ils peuvent avoir augmenté leur dose depuis leur première ordonnance médicale.

9. Ils peuvent présenter des symptômes d'anxiété, de panique, d'agoraphobie, d'insomnie et une augmentation des symptômes

physiques malgré l'absorption continuelle de BZD.

6.3.2.2. La dépendance a p os o1 ogie é1evée :

Une minorité de patients, qui ont entamé un traitement à base de BZD, commence à réclamer des doses de plus en plus élevées. Au début, ils peuvent persuader leur médecin d'augmenter le nombre des ordonnances, mais ayant atteint les limites prescrites, ils peuvent contacter plusieurs médecins ou hôpitaux afin d'en obtenir une réserve. Parfois, ce groupe associe l'usage abusif ou la dépendance d'une BZD à la consommation excessive d'alcool. Les patients qui se rangent dans cette catégorie ont tendance à être très anxieux, déprimés 6,23,25. Ils peuvent avoir aussi un passé avec un usage abusif d'un autre sédatif ou d'alcool. Ils n'utilisent pas spécialement des drogues illégales, mais peuvent obtenir des BZD dites de 'rues ' si les autres ressources échouent 6,23,25.

6.3.3 Effets indésirab1es et c omp1icati ons psychiatriques

6.3.3.1. Les Effets stimu1ants parad oxaux

En 1960, Ingram et Timbury30 furent parmi les premiers à rapporter des réactions de violence chez des patients traités par Librium. Depuis, ces réactions ont été abondamment confirmées par de nombreuses publications6,23,28. Agressions physiques, viols et actes médicolégaux ont été fréquemment observés, ainsi que des comportements autoagressifs,

pouvant aller jusqu'au suicide. Selon la méta analyse de Dietsch et Jennings30, les BZD seraient plus fréquemment à l'origine d'une augmentation que d'une diminution de l'agressivité.

La survenue d'une réaction agressive sous BZD est par ailleurs potentialisée lors d'une association à une consommation importante d'alcool. L'alcool potentialiserait donc et prolongerait les impulsions agressives sous BZD. La majorité des études traitant l'agressivité associée à la prise de BZD font état de décompensation sous alprazolam (Xanax).

Selon Ashton, à l'approche du sommeil, les BZD seraient la cause d'une excitation paradoxale accompagnée d'un accroissement d'anxiété, d'insomnie, de cauchemars, d'hallucinations et d'une augmentation de crises chez les épileptiques23. Ces effets paradoxaux sont plus fréquents chez les individus anxieux et agressifs, les enfants et les personnes âgées. Ils sont peut-être dus à la libération ou à l'inhibition des tendances comportementales normalement supprimées par les normes sociales 6,23,28.

6.3.3.2. Les dépressi ons et 1es ém oti ons ém oussées :

L'usage à long terme d'une BZD chez les alcooliques et les patients dépendants des barbituriques est souvent déprimant ; cette dépression peut être inaugurale lors d'une absorption prolongée. Les BZD peuvent à la fois causer ou aggraver la dépression, possiblement en réduisant la production cérébrale des neurotransmetteurs tels que la Sérotonine et la

Norépinéphrine. Cependant, l'anxiété et la dépression sont souvent associées et les BZD sont fréquemment prescrites pour traiter l'anxiété et la dépression en même temps. Quelquefois, chez de tels patients, les drogues semblent précipiter leur tendance au suicide. En 1988, le Committee on Safety of Medicines de la Grande-Bretagne avertit que « les BZD ne doivent pas être absorbées seules pour traiter la dépression ou l'anxiété associée à la dépression. Chez de tels patients, cela pourrait précipiter leur tendance au suicide»6, 31.

« L'anesthésie émotionnelle » ou l'inhibition psychoaffective est l'incapacité de ressentir du plaisir ou de la peine. Elle représente une des plaintes les plus communes chez les consommateurs d'une BZD sur une longue période. De tels coups émotionnels sont liés probablement à l'effet inhibiteur des BZD sur l'activité des centres émotionnels au niveau du

,28,

système nerveux central 23 31.

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