3.3.2. L'expérimentation du bambara52 au Mali.53
Dans la région de Ségou, une expérience
menée au Mali consistait à utiliser le bambara dans les deux
premières années du primaire pour passer ensuite au
français. Avec cette expérience, les enfants apprenaient à
lire, à écrire et à compter dans une langue qu'ils
connaissaient déjà, puis passaient au français, le bambara
demeurant comme matière et non plus comme véhicule
d'enseignement.
Une évaluation à grande échelle de cette
expérience a été menée par Calvet, comparant le
niveau d'élèves ayant suivi ce cycle à celui
d'élèves n'ayant été enseignés qu'en
français. Le résultat est assez intéressant.
Lorsqu'on demande par exemple (en français) à un
élève de deuxième année de primaire
(scolarisé uniquement en français) de résoudre un petit
problème comme "Mamadou a quinze billes, il en donne huit a Seydou,
combien lui en reste-t-il ?", il ne sait comment répondre. Par
contre, si l'on écrit au tableau "1 5 -- 8 - ?", il trouve
immédiatement la solution.
Enseignement 1 : La difficulte ne reside pas pour
l'enfant dans la soustraction mais dans son nonce en une langue qu'il ne
comprend pas.
A l'inverse, si l'on pose le même problème en
bambara, l'enfant répond sans difficulté. Enseignement 2
: L'enfant a plus de facilite a mieux comprendre les
problemes
52 Le bambara est une des langues nationales du
Mali.
53 cf. CALVET, L.-J., 1992, "Les langues nationales
à l'école : un débat passionné, un serpent de mer",
in Diagonales n° 21, p. 23.
quand il est enseigne dans une langue qu'il
connaissait dej1.
Conclusion 1 : L'utilisation pour la scolarisation
des enfants d'une langue qu'ils connaissaient déjà semble
ameliorer les resultats de cette scolarisation tandis qu'd l'inverse on
multiplie les difficult~s en introduisant a la fois l'ecriture, le calcul et un
code inconnu, la langue officielle.
Dans le cadre de l'évaluation de cette
expérience, le niveau en français en fin de cycle primaire des
élèves ayant suivi cette formation bilingue a été
comparé à celui de ceux ayant étudié
entièrement en français. De façon un peu inattendue, le
niveau était le même dans les deux cas (certes très bas
pour les deux, mais le même).
Enseignement 3 : Les enfants ayant fait deux ans
de moins de frangais avaient les mWmes performances que ceux qui en avaient
fait deux de plus.
Cela a été confirmé par les
résultats à l'examen d'entrée dans le second cycle : les
élèves issus du cycle expérimental ont plutôt des
résultats supérieurs à ceux des élèves venus
du cycle classique.
Conclusion 2 : L'utilisation d'une langue
africaine dans les premieres annees du primaire ameliore les resultats et
n'oblitere pas l'apprentissage ulterieur du frangais.
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