Du régime juridique de la liberté de prix en droit rwandaispar Cédric MUYOBOKE -M. Université National du Rwanda - LLM en Business law 2010 |
§1. Renforcement des mécanismes institutionnels de droit public existantComme nous l'avons déjà dit plus haut, l'effectivité du principe de la liberté des prix nécessite des moyens d'ordre juridique, qu'il en va de soi que sa mise en oeuvre requiert un cadre institutionnel approprié. Pour ce faire, le législateur rwandais pourrait d'abord renforcer le rôle des institutions publiques qui ont pour mission, la régulation des circuits commerciaux particulièrement en matière de la liberté des prix. Il s'agit du Ministère ayant le commerce dans ses attributions, l'Agence de Régulation de Services d'Utilité Publique ainsi que l'Office Rwandais des Recettes.A. MINICOMLe principe de la liberté des prix joue un rôle prépondérant dans le développement économique du pays. Pour lutter efficacement contre les abus en la matière, il est indispensable de mettre sur pied un service administratif de contrôle au sein du MINICOM en matière de contrôle de prix, afin de lutter contre les abus en la matière. Nous épousons l'idée de I. BENALCAZARD qui a affirme qu'il est incontestable que le contrat de la consommation, si fortement imprégné des clauses abusives, doivent être contrôlés aux fin de rééquilibrer ou tout au moins tenter de la faire, les rapports contractuels entre les parties129(*). C'est dire en d'autres mots que le marché des biens et services doit être contrôlé, malgré le libéralisme économique. Certes, le contrôle judiciaire existe déjà en droit rwandais et continue à jouer son importance dans le cadre de la protection des victimes d'abus, en l'occurrence en matière de liberté de prix, étant entendu que tout consommateur lésé dans ses rapports avec les professionnels a les droits de saisir le juge, afin de faire valoir ses droits. C'est ainsi que le contrôle judiciaire devrait être appuyé par le contrôle administratif. Il serait indispensable d'intensifier la présence des organismes publics au semi publics130(*), et plus précisément un service au sein du Ministère de commerce chargé de veiller à l'équilibre contractuel dans les rapports des consommateurs et les professionnels en général, en particulier en matière de la liberté des prix. A travers ce service, le gouvernement pourra interdire, limiter ou anéantir les abus en matière de la liberté de prix. Au regard de ce qui vient d'être dit, c'est en date du 15/01/1989 qu'il a été créée au Rwanda une Direction Générale de protection des consommateurs, de la normalisation et de contrôle de prix et de qualité au sein du MINICOM131(*). Cependant, peu après, les années qui ont suivi ont été caractérisées par une diminution progressive des interventions des pouvoirs publics en matière de prix. La direction générale susdite a été supprimée et ainsi devenue la division des requêtes. Actuellement, la division du commerce intérieur est chargée principalement de veiller à l`application de la règlementation en matière de prix. Certes, le MINICOM, organise, de manière irrégulière des contrôles du respect de la réglementation commerciale pour s'assurer entre autre de l'affichage de prix, délivrance de la facture, etc. Or, à l'heure actuelle ou l'économie du Rwanda évolue dans un contexte d'une économie du marché caractérisée par la concurrence à travers les organisations économiques régionales, la solution la plus satisfaisante serait de multiplier le contrôle par les instances étatiques, ce qui justifie la nécessité de rétablir la Direction de la consommation au sein du Ministère de commerce chargée de veiller entre autre à l'effectivité du principe de la liberté de prix. Selon l'article L. 132-1 alinéa 2 du Code français de la consommation, le gouvernement peut, par le décret pris en conseil d'Etat, après avis de la commission des clauses abusives, faire interdire, limiter, réglementer des clauses abusives132(*). Pour T. BOURGOIGNIE, le contrôle administratif des clauses abusives peut se présenter sous la forme d'une soumission obligatoire des conditions générales à un organisme chargé des les approuver133(*). Dans ce sens et selon J GHESTIN I., MARCHESSAUX, le contrôle administratif des clauses abusives permet d'attaquer le mal à la racine134(*). Ce genre de contrôle est indispensable dans le cadre de rendre effective le principe de la liberté des prix au Rwanda. Aux termes de l'article 20 de la loi sur le commerce intérieur, l'encadrement, la coordination et le suivi de l'activité commerciale préconisés par la loi susdite sont assurés par les encadreurs du commerce et d'autres fonctionnaires désignés à cet effet par le Ministre ayant le commerce intérieur dans ses attributions135(*). En pratique, les encadreurs de commerce n'existent pas. Le Ministre du commerce effectue des contrôles lui-même avec les agents de la direction chargée du commerce intérieur. Le manque des moyens aussi bien matériels, humains que juridiques rend cette intervention inefficace. Dans le cadre de renforcer les services du MINICOM, nous proposons la création de la direction de contrôle de prix. Ceci ne veut pas insinuer la mise en cause du libéralisme au profit de l'économie planifiée. C'est plutôt l'idée d'une libéralisation économique accompagnée d'une régulation, car la liberté sans limites ni contrôle aboutit toujours à des abus. Il faut également souligner que l'article 18 de la loi régissant le commerce intérieur prévoit la possibilité de créer des commissions de commercialisation et de prix. Mais, pour le moment, nous n'en connaissons aucune, alors que les problèmes des prix ne cessent de se manifester du jour au lendemain. Il y a lieu de recommander que ces commissions soient créées. L'article 20 de la loi susdite donne également au Ministre du commerce le pouvoir de nommer d'autres fonctionnaires dans le cadre de l'encadrement, la coordination et le suivi de l'activité commerciale. Toutes ces prérogatives lui reviennent et sont exercées de manière discrétionnaire, ce qui rend inefficace la portée de la loi. Hormis, le Ministère de commerce, l'Agence de la Régulation joue un rôle non négligeable dans l'exercice de l'activité commerciale en vue de rendre plus effective l'applicabilité du principe de la liberté des prix. Il importe à présent d'examiner le cadre légal de son intervention en matière de la mise en oeuvre du principe de la liberté de prix. * 129 I., DE BENALCAZAR, La protection des intérêts économiques des consommateurs dans le cadre des produits : Etudes comparée des droits Anglais, français et communautaires, Thèse de Doctorat, Paris I, Université de Panteon-Sorbone, 199, p. 204, inédit. * 130 Idem, p. 205. * 131 Ministère du commerce et de la consommation, rapport annuel, 1989, novembre 1990, p.60, cité par A. NGAGI, op.cit., p. 153. * 132 Code français de la consommation, disponible sur http:// www. Lexinter.net/jp/clauseabusives.htm, consulté le 12/04/2010. * 133 T. BOURGOIGNI, L'aide juridique au consommateur, Bruxelles, Bruylant, 1981, p.197. * 134 J. GHESTIN, et I. MARCHESSAUX op.cit., p. 48. * 135 Aux termes de l'article 19, l'encadrement, la coordination et le suivi de l'activité commerciale doivent assurer la libre compétition entre les opérateurs économiques, la disponibilité des produits sur le marché intérieur, la protection des consommateurs de toutes catégories, la sensibilisation à la gestion de la qualité des produits, l'information, l'éducation de tous les partenaires du commerce, l'organisation des échanges interrégionaux etc. |
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