II-CLINIQUE
1-TYPE DE DESCRIPTION : la rage humaine
De façon générale, c'est par la morsure
qu'un chien enragé transmet la maladie à l'homme. Très
rarement, un simple léchage des muqueuses (yeux, bouche) peut
entraîner la maladie. En revanche, les griffades ne sont pas dangereuses
sauf si elles sont en même temps souillées par la salive de
l'animal enragé [8].
La personne mordue ne va pas être malade
immédiatement. Il faudra un certains temps qui dépendra du
nombre, de la gravité et du siège de la morsure ; les morsures au
cou et à la tête sont plus graves et entraîneront la maladie
en moins de 20 jours [6]. Cependant, pour la plupart des morsures, des signes
de la maladie apparaîtront entre le 35ème et le
90ème jour après la morsure [8]. Pour la
symptomatologie de la rage il est important de reconnaître les signes
suivants :
- douleur au niveau de la région mordue ;
- abattement et tristesse caractérisés par
l'angoisse, les hallucinations, et les tremblements généraux. La
moindre excitation (lumière, bruit, toucher) va entraîner des
spasmes douloureux, surtout au niveau du larynx, avec modification de la voix
[1]
- hydrophobie : signe classique de la rage. C'est en relation
avec l'hyperesthésie pharyngo-laryngée, un spasme
pharyngo-laryngée à la déglutition des liquides (eau). Il
entraîne des étouffements par fausse route, s'étend
largement jusqu'à la musculature respiratoire, et tel un réflexe
pavlovien s'installe à la seule vue ou évocation de l'eau [8].
- aérophobie : c'est un spasme faciocervical extensif
déclenché par insufflation d'air derrière l'oreille [8]
- encéphalite proprement dite est plus tardive [8].
A noter que 10% des cas de rage humaine sont purement
paralytiques, sans hydrophobie, sous de paralysies ascendantes évoquant
une poliomyélite ou un syndrome de Guillain Barré [13]. C'est un
piège diagnostique auquel il faut penser.
La maladie n'est pas toujours facile à reconnaître,
surtout si elle se déclare plus de trois mois après une morsure
dont on a plus le souvenir.
Rappelons encore que jusqu'à nos jours tout malades qui
présente les premiers signes de la rage est condamné à la
mort.
2- Diagnostic de la rage humaine [4 ; 5 ;
6;7,24]
2-1- signes cliniques
Les prodromes peuvent être :
- la fièvre ;
- la nausée ;
- la douleur au niveau de la zone mordue ;
- l'insomnie ;
- l'hyperesthésie généralisé : le
sujet ne supporte pas le contact de ses vêtements ; il souffre parfois de
priapisme [5].
Ensuite apparaissent les signes généraux que sont
:
- l'hydrophobie s'expliquant par la présence d'un spasme
pharyngolaryngé à la déglutition ;
- l'aérophobie ;
- l'encéphalite proprement dite qui est tardive.
En effet, chez l'homme, la durée de l'incubation est
variable et dure en moyenne 30 à 45 jours. Il s'agit d'un tableau
d'encéphalite dont on distingue classiquement deux formes : l'une
paralytique et l'autre furieuse. Cependant le diagnostic clinique de la rage
(animale ou humaine) n'est jamais un diagnostic de certitude. Le seul
diagnostic indiscutable est biologique effectué au laboratoire [7].
Tableau II PROGRESSION DE LA MALADIE [7]
Phase
|
symptomatologie
|
incubation
|
Statut viral
|
Statut immunologique
|
Incubation
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asymptomatiques
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60 -365 jours
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Multiplication du virus dans le tissu musculaire
Peu de vibrion
|
0
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Prodromes
|
- fièvre, nausées -anorexie
-douleur au niveau de la morsure
|
2- 10 jours
|
Peu de vibrions dans le SNC et dans le cerveau
|
0
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Neurologique 1 Neurologique 2
|
Spasme pharyngé Hydrophobie Hyperactivité
Anxiété, dépression
Paralysie
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2- 7 jours
|
Titre en vibrion élevé
|
Anticorps dans le sérum et le SNC (LCR)
|
Coma
|
Coma
Arrêt cardiaque Hypotension hypoventilation
|
0 - 14 jours
|
Titre en vibrion élevé
|
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Problématique de la lutte anti-rabique à
Conakry
2-2- Au laboratoire
Tableau III Condition d'expéditions des
prélèvements [5]
· En phase tardive
d'exposition
|
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Prélèvements
|
Durée d'évolution
clinique
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|
Température
d'expédition
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Salive
Urine
Biopsie de la peau
(au niveau de la nuque) Sérum
Liquide céphalorachidien
|
0-8 jours > 8 jours
+ + + + + +
+ + + ??
+ + + + +
+ ++
+ +
|
|
-20°C -20°C -20°C -20°C
-20°C -20°C
|
· En post mortem
|
|
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Biopsie cérébrale (diagnostic de certitude)
|
|
+4°C ou - 20°C
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· Règle
d'expédition
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Expédition avec un récipient agréé
(triple emballage) Classe 6.2 des matières dangereuses, risque 3
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|
Les prélèvements peuvent s'effectuer chez
l'homme comme chez l'animal. Le choix des prélèvements
conditionne la sensibilité du diagnostic ainsi que les techniques de
diagnostic qui seront mises en oeuvre [5].
Chez l'homme, le diagnostic post mortem s'effectue à
partir du cortex, de l'hippocampe et du bulbe rachidien comme chez l'animal. En
revanche, le diagnostic intra vitam porte principalement sur la salive, le
sérum, l'urine et des biopsies cutanées (au niveau de la nuque)
[20].
Deux techniques de prélèvement rapide de biopsie
cérébrale sont applicables à l'homme et à l'animal
: la première par voie occipitale, la seconde par voie retroorbitaire.
Les sensibilités de ces deux techniques sont identiques à celle
de l'ouverture classique de la boite crânienne [23].
a- techniques de routine de diagnostic
biologique
Le diagnostic vise à détecter les composants
viraux ou les anticorps produits en réponse à ces composants
viraux.
Les cibles du diagnostic de la rage sont le virus infectieux,
la nucléocapside virale qui s'accumule dans le cytoplasme des cellules
infectées, les acides nucléiques viraux composés d'acides
ribonucléiques (ARN génomique, ARN anti-génomique et ARN
messagers) [18]. Les techniques de laboratoire
utilisées doivent permettre de donner un résultat dans un
délai bref, compatible avec l'urgence du traitement antirabique, ainsi
qu'avec l'application efficace des mesures de prophylaxies sanitaires et
médicales chez les animaux exposés. Trois types de techniques
sont employées pour le diagnostic de routine : l'immunofluorescence
directe sur empreinte de cerveau qui est la technique de
référence, l'isolement du virus rabique sur cellule en culture
(neuroblastomes murins) et la troisième technique de diagnostic (RREID :
rapid rabies enzym immuno diagnosis) qui est un ELISA sandwich basé sur
l'immuno-capture de la nucléocapside du virus rabique
[13;23].
b- la sérologie
Le titrage des anticorps rabiques permet d'apprécier
le degré de l'immunité chez les sujets en cours de traitement
antirabique ou vaccinés préventivement. Les experts de l'OMS
considèrent qu'un individu vacciné doit présenter un taux
d'anticorps supérieur à 0,5 unité internationale (UI)/ml
[5]. La détection des anticorps n'a en revanche qu'un
intérêt limité dans le diagnostic de la rage. En effet les
anticorps n'apparaissent qu'en phase ultime de l'évolution de la maladie
[20]. Le titrage des anticorps par séro-neutralisation s'effectue sur
culture cellulaire (épreuve rapide de réduction des foyers
fluorescents). Un délai de 24heures est nécessaire pour
l'obtention du résultat. Une technique de titrage des anticorps par
ELISA, moins lourde et plus rapide, est très largement utilisée
en routine [20].
c- Le diagnostic biologique portant sur la
détection des acides nucléique viraux
La technique de transcription inverse suivie de l'amplification
en chaîne par polymérase (RT-PCR)a aussi été
appliquée au diagnostic de la rage [15;20;21 ;22 ].
L'amplification du gène N par PCR présente une
corrélation parfaite avec les techniques usuelles de diagnostique.
Les amorces oligonucléotidiques nécessaires
à cette amplification sont définies dans des zones de la
séquence présentant une forte conservation afin d'obtenir un
spectre d'amplification le plus étendu possible au sein des
lyssavirus.
Cette technique, de part sa grande sensibilité, est
particulièrement adapté au diagnostic intra vitam chez l'homme
à partir d'échantillon de salive, d'urine, de LCR et biopsie de
peau (au niveau de la nuque) [20]
3-Les formes cliniques|
3-1-La rage du chien
En Afrique, au sud du Sahara, la rage du chien se
développe après morsure par un autre chien en
général. La maladie se déclare entre 3 semaines et 3 mois
après la morsure. Cependant, il faut parfois attendre 6 mois avant que
le chien mordu ne soit malade .Il faut donc surveiller de très
près et pendant longtemps un chien qui a été mordu par un
autre [1,30].
Le chien enragé change de comportement :
- il est abattu, épuisé, cherche le calme et
l'obscurité
- il est excité, se précipite sur tout ce qui
bouge et avale tout sorte de déchets. son regard est particulier : ses
yeux sont sans cesse en mouvements, louche parfois
- Très vite, en moins de deux jours, la maladie va
évoluer vers deux formes : - la rage furieuse et la rage paralytique.
· : · La rage furieuse :
l'animal cherche à mordre tout ce qu'il trouve, même son
maître. Il s'enfuit souvent de la maison et attaque les passants qu'il
rencontre. Sa voix est rauque, de la bave coule sans arrêt de sa gueule
entrouverte, il est très maigre, puis les paralysies vont
apparaître et le chien va mourir en 2 à 8 jours [13].
· : · La rage paralytique : la
paralysie va d'abord atteindre les pattes postérieures, puis les pattes
antérieures et la mâchoire. Le chien ne peut plus aboyer
ni mordre .il est donc moins dangereux pour l'homme mais il ne
faut pas quand même le toucher. Le chien va mourir en 2 à 8 jours
[13].
De toute façon, quelle que soit l'évolution de la
maladie, le chien deviendra paralysé et il mourra dans les deux cas
[1].
3-2 La rage du chat
La maladie se déclare en général 15 jours
à 1 mois après une morsure le plus souvent par un chien
enragé. Le chat va rechercher les coins sombres, sous les meubles, en
poussant de petits miaulements.
Si on le dérange il peut devenir très
excité et se jeter sur sa victime qu'il va mordre et griffer. Le
lendemain, l'animal est abattu, sa voie se modifie, les paralysies
apparaissent, il meurt en 3 à 4 jours [1].
3-3 la rage des bovidés
La maladie se déclare en moins de 2 mois après
la morsure par un animal enragé (le plus souvent le chien). L'animal
devient très excité, attaque les autres animaux et même
l'homme. Le mugissement est sourd et prolongé. Il a des
difficultés pour avaler. Les paralysies apparaissent en
commençant par les pattes de derrière. L'animal meurt en 3
à 6 jours [1].
3-4 La rage des équidés
Comme pour les bovidés la rage se déclare
environs 2 mois après une morsure par un animal enragé. Les
signes vont être à peu près les mêmes que pour les
autres mammifères :
- le changement de comportement de l'animal qui devient
excité, agressif avec des mouvements spasmodiques ; entre les
périodes d'excitation l'animal est inquiet, triste.
Puis vont apparaître les paralysies avec perte de
l'équilibre et la chute. La mort survient en 5 à 6 jours [1].
3-5 La rage des autres animaux
D'autres animaux comme le mouton, les chèvres, les
porcs et les singes peuvent aussi avoir la rage et peuvent contaminer si on ne
prend pas des précautions. Ces cas sont très rares, c'est avant
tout le chien qui transmet la rage à l'homme [1].
En résumé, tout animal qui après une morsure
de chien malade ou inconnu, présentant un ou plusieurs des signes
suivant :
- modification du comportement,
- excitation
- paralysies,
doit être considéré comme potentiellement
enragé et l'on doit éviter de s'en approcher[1].
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