Chapitre 2 : TENDANCE DE
LA PAUVRETE ET DE LA POLITIQUE
BUDGETAIRE EN CÔTE D'IVOIRE.
La politique budgétaire est un important instrument de
régulation de l'économie, laissée à la guise des
Etats membres (selon les critères de convergence) de l'Union Economique
Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Elle permet de réguler
l'activité économique, entre autres, de cibler les secteurs
sociaux essentiels afin de réduire le niveau de
pauvreté. La redistribution des richesses
créées par la nation est aussi l'une de ses fonctions. Il nous
revient de faire l'étude de la tendance de la pauvreté dans une
première section et de donner la structure et l'évolution de la
politique budgétaire dans une seconde section.
2.1) TENDANCE DE LA PAUVRETE EN COTE D'IVOIRE
L'objet de cette partie est d'étudier
l'évolution de la pauvreté en Côte d'Ivoire depuis les
années 1980. Plusieurs dimensions de la pauvreté seront
appréhendées de manière à sortir les
déterminants des différentes formes de pauvreté. L'analyse
des tendances observées de la pauvreté sera la
préoccupation première de cette deuxième partie. Ensuite
une revue des différents programmes politiques et gouvernementaux pour
contenir la pauvreté et ses effets sera faite.
2.1.1) Analyse des tendances
observées de la pauvreté
Le concept de pauvreté est large et complexe. Ce
paragraphe définira la pauvreté et donnera les causes et les
manifestations de la pauvreté en Côte d'Ivoire. Il permettra de
découvrir les principaux indicateurs de mesures et déterminants
de la pauvreté, ainsi que l'évolution du ratio de la
pauvreté.
1) définition, causes et manifestations de la
pauvreté
a) Définition de la
pauvreté
La pauvreté revêt trois aspects :
monétaires ou financiers, accessibilité et psychosociologique. La
pauvreté peut être également perçue comme un
sentiment d'insécurité, de précarité, d'exclusion,
de vulnérabilité et d'impuissance, tout comme aussi de
mentalité.
Au plan monétaire et financier, la pauvreté est
l'état d'une personne ou d'une collectivité qui ne dispose pas de
ressources suffisantes pour satisfaire ses besoins primaires et vitaux
Au niveau de l'accessibilité, la pauvreté est
une incapacité ou un manque d'accès de l'individu aux biens et
services sociaux de base.
Au niveau psychosociologique, la pauvreté est un
état d'esprit, un sentiment d'exclusion, de frustration par rapport
à la famille, au clan et à la communauté
Au niveau de la mentalité, la pauvreté est un
état de comportement de l'individu qui a du mal à voir l'autre
progresser ou prospérer et, du coup, a tendance à le
rétrograder.
b) Causes de la pauvreté
A travers les différentes enquêtes menées
de 1985 à 1998 (LSMS 85, EP 92/93, ENV 98) et les études pour la
rédaction du DSRP, il ressort que les causes et déterminants de
la pauvreté en Côte d'Ivoire sont multiples et de plusieurs
ordres : économiques, démographiques, culturels et
sociaux.
c) Manifestations de la pauvreté
· Sur le plan
économique
Elles se manifestent à travers des politiques publiques
inadaptées, des difficultés financières de l'Etat,
l'inefficacité de la dépense publique, l'accumulation
d'arriérés intérieurs, la faiblesse de recouvrement de
l'administration.
En milieu rural, la baisse de l'encadrement, de la
distribution des intrants agricoles (semences, engrais ainsi qu'un
relâchement des investissements sociaux ont ainsi provoqué une
chute de la productivité agricole et une paupérisation dans le
milieu rural. La dégradation des infrastructures de base a
accentué l'enclavement des régions et les disparités
locales ont augmenté les coûts d'accès aux services sociaux
de base. En matière de crédit, la politique reste
inadaptée aux besoins de l'économie.
Les difficultés d'accès aux terres, la
destruction du capital forestier, le vieillissement de la population agricole,
l'exode rural, l'insuffisance de l'organisation du monde paysan, sont des
facteurs qui entravent le développement de l'agriculture. A cela,
s'ajoutent les causes naturelles, telles que les inondations, la
sécheresse, l'érosion des berges, les perturbations climatiques,
etc.
La chute drastique des cours mondiaux des produits de rente et
la détérioration des termes de l'échange érodent
les gains de devises et donc de ressources que pourraient procurer le volume
des exportations.
Le niveau d'investissements qui n'excède pas 15% du
PIB ne permet pas une croissance forte et durable, capable de créer
suffisamment de richesses et de réduire sensiblement la pauvreté.
La diminution de l'Aide Publique au Développement
(0,22% du PNB contre 0,7% d'objectif), l'insuffisance des investissements
directs étrangers vers l'Afrique et le problème d'accès
des produits africains aux marchés mondiaux face aux subventions
agricoles des pays du nord.
La faible capacité technologique des industries locales
à transformer les matières premières en produits
semi-finis ou finis font également partie des causes de la
pauvreté.
· Sur le plan
institutionnel
Les difficultés d'accès aux institutions
juridiques pour les populations sont un frein. Le manque de transparence dans
l'appareil judiciaire et dans la gestion de la chose publique donc la mauvaise
gouvernance qui est un facteur limitant
· Sur le plan démographique et
socioculturel
Le fort taux de croissance démographique (3,3%)
généralement supérieur au taux de croissance
économique est une cause très importante. A cela, s'ajoute la non
maîtrise des mouvements migratoires de la population qui crée une
forte pression sur les infrastructures de base. Un condensé de ces
causes, ajouté au poids de la famille élargie, la pression
communautaire, le taux élevé de dépendance, les
traditions défavorables à la scolarisation des filles,
l'exclusion des femmes dans les droits de succession, la superstition, les
dépenses ostentatoires, constituent un frein à
l'épanouissement individuel et communautaire. La dégradation des
moeurs, la dislocation du tissu social et familial et le
phénomène des enfants de la rue ou dans la rue sont des
éléments aggravant la pauvreté sociale. Ces
conséquences dramatiques sont également les causes manifestes de
la pauvreté.
Quant aux manifestations de la pauvreté, elles se
résument à ce qui suit :
- faim, dénutrition et insécurité
alimentaire ;
- manque de moyens financiers dans la tenue du foyer ;
- oisiveté et exploitation ;
- banditisme et enfants de la rue ou dans la rue ;
- manque de soins de santé ;
- absence d'entraide communautaire ;
- absence de marché dans un périmètre
restreint pour les échanges ;
- analphabétisme ;
- déscolarisation ;
- habitation précaire et environnement
malsain ;
- manque de tenue vestimentaire décente ;
- dénuement de biens matériels ;
- inaccessibilité au crédit ;
- inaccessibilité à l'eau potable et à
l'électricité ;
- absence de latrines et de dépotoirs pour les
ordures ;
- etc.
Les manifestations de la pauvreté, qui suivent, sont
dues à la guerre qui a fait de nombreux ravages. Cette situation de ni
paix ni guerre est encore plus pernicieuse puisqu'elle donne de la profondeur
à la pauvreté. Elles se manifestent par :
- un début de famine (absence des paysans des zones
rurales du fait de la guerre) ;
- un élargissement de la prostitution à des
tranches de femmes jusque là épargnées ;
- une augmentation du taux de prévalence du
VIH/SIDA ;
- une insécurité totale des biens et des
personnes.
Cet ensemble ne peut être apprécié
qu'à travers des indicateurs et des déterminants.
2) Principaux indicateurs de mesure et
déterminants de la pauvreté
Les indicateurs de mesure de la pauvreté sont nombreux.
Une présentation exhaustive des indicateurs pertinents dans un premier
temps sera vue et dans un deuxième temps les déterminants de la
pauvreté seront donnés.
a) Principaux indicateurs de mesure de la
pauvreté
Les Indicateurs de mesures les plus usités
sont :
- les indicateurs FGT (Foster J.,
Greer J., Thorbecke E., 1994) de
pauvreté, indices de pauvreté Px ;
- le coefficient de contribution d'une région à
la pauvreté nationale ;
- l'Indicateur de Développement Humain (IDH) ;
- le taux de croissance économique ;
- l'Indicateur de Pauvreté Humaine (IPH), et
particulièrement l'IPH-1 pour les pays en voie de
développement ;
- le niveau et les sources de revenu des
ménages ;
- le niveau et la structure des dépenses de
consommation des ménages.
Le mode de calcul et la formulation de certains de ces
indicateurs sont spécifiés en annexes.
Une analyse de la pauvreté, à partir des
indicateurs cités plus haut, donne : les appréciations qui
vont suivre.
· Le Seuil de
pauvreté
L'évaluation de la pauvreté s'est fait à
partir d'un seuil de pauvreté relatif déterminé par la
distribution des dépenses en fonction d'une proportion arbitraire et
présélectionnée de la population concernée (PNUD,
INS, 2000). Le seuil de pauvreté utilisé évolue
après chaque nouvelle enquête. Ainsi ce seuil passe
successivement, du seuil de pauvreté relatif de 75 000 FCFA en 1986
à 101 340 FCFA en 1993, à 144 800 FCFA en 1995 et à 162
800 FCFA. Un seuil d'extrême pauvreté de 63 375, 86 760 et 95 700
FCFA respectivement pour chacune des périodes.
· L'Ampleur et étendue de la
pauvreté chez les extrêmes pauvres
L'intérêt du seuil d'extrême
pauvreté est qu'il permet de rendre compte des conditions d'existence
particulièrement difficiles de cette catégorie de la population
(10%) ayant de faibles revenus. Leur revenu annuel par tête,
inférieur au seuil de pauvreté de plus de 40%, ne permet pas une
prise en compte correcte de leurs besoins fondamentaux (alimentation, logement,
éducation des enfants, santé, etc.).
Les ménages d'extrêmes pauvres ont un revenu
annuel par tête de 68 204 FCFA en 1995 et de 75 842 FCFA en 1998,
traduisant un niveau de revenu plus élevé chez l'extrême
pauvre.
En milieu rural, l'étendue de la pauvreté montre
une aggravation tendancielle de la situation des extrêmes pauvres. Elle
se présente comme suit : 21% en 1993, 22% en 1995 et 23% en 1998.
En effet, le seuil de pauvreté est déjà trop bas et se
situe autour de 60% du seuil national. Cette proportion signifie que pour
atteindre le seuil de pauvreté, son revenu doit connaître un
accroissement supérieur ou égal à 40% de son revenu pour
passer à la catégorie de pauvre (cf. tableau en annexe 2).
Quant à leur consommation, elle se présente
selon la structure suivante : le ménage extrêmement pauvre
consacre, en moyenne, plus de 90% de son revenu annuel par tête à
la satisfaction des besoins essentiels. Cette structure est
caractérisée par la part qu'occupent les dépenses
alimentaires dans les dépenses totales (plus de 50%). En 1998, on a
noté les taux respectifs de 54,3% et 58,5% de part de dépenses
alimentaires dans les dépenses totales, pour les ménages urbains
et les ménages ruraux.
La dépense d'éducation des enfants s'est accrue
dans le temps et son poids par rapport à la dépense totale est de
1,0%, 2,5% et 3,5% pour les années 1993, 1995 et 1998, au plan national.
Comparativement à la dépense d'éducation, la part des
dépenses de santé est un peu plus élevée avec 6,2%
en milieu urbain (les tendances de la pauvreté en milieu urbain restent
fragiles), 4,2% en zone rurale 1995 et 4,7% sur le territoire national en
1998.
· L'Ampleur et l'étendue de la
pauvreté chez les ménages pauvres
Le ménage pauvre est celui qui a un revenu annuel par
tête inférieur à 162 800 FCFA. Cet ensemble correspond
à 32,3% de la population totale en 1993, 36,8% en 1995 et 33,6% en
1998.
Le revenu annuel moyen par tête du ménage est
approché à partir des indices de pauvreté Px
(Indicateurs FGT, avec x=1, 2, 3), prenant en compte le paramètre
x d'aversion pour la pauvreté. Ainsi, lorsque :
- á= 0 il s'agit du ratio de pauvreté ou le
nombre de pauvres sur la taille de la population totale ;
- á= 1 il s'agit de l'intensité de la
pauvreté. C'est l'écart moyen par rapport au seuil. P1 mesure le
pourcentage moyen du seuil qu'il faut distribuer aux pauvres pour annuler la
pauvreté ;
- á= 2 il s'agit de la sévérité de
la pauvreté. C'est la moyenne du carré de l'écart moyen
par rapport au seuil. C'est une sorte de mesure de pauvreté qui attribue
plus de poids aux plus pauvres des pauvres.
Le constat de la pauvreté chez les ménages
pauvres est que les conditions de dépenses et de consommation sont plus
difficiles en 1993, qu'en 1995 et 1998 (cf. tableau en annexe 2). En effet, le
revenu annuel du citadin pauvre demeure plus éloigné de la ligne
de pauvreté.
L'étendue de la pauvreté est égale
à 47,4% en milieu urbain, à 50,4% en milieu rural et 49,6% au
plan national. En 1995, l'étendue de la pauvreté est de 28,3%
(23, 7% en ville et 30,0% en milieu rural). Ce ratio de pauvreté prend
de la profondeur en 1998 (25,0% en ville et 33,0% en zone rurale). Des tests
montrent que l'incidence de la pauvreté a toujours été
plus forte dans les autres centres urbains qu'à Abidjan quelques soient
les années. Cette situation ne diffère pas de celle de 1995.
La dépense annuelle par tête du ménage
pauvre en Côte d'Ivoire, estimée en 1998 à 128 472 FCFA,
représente moins de 30,0% de la dépense effectuée par les
non pauvres (cf. tableau en annexe 2). Du côté de la
dépense annuelle par tête, il existe un déséquilibre
entre pauvres et non pauvres. La baisse des niveaux de vie a touché
aussi bien les classes moyennes de ménages que les classes de
ménages les plus pauvres. Au moins à Abidjan, ce sont toutes les
classes de ménages qui ont souffert de la crise entre 1993 et 1995.
Les ménages pauvres consacrent plus de la moitié
de leur revenu par tête à l'alimentation tant en milieu urbain
qu'en milieu rural. Une amélioration du niveau de certaines
dépenses importantes en 1998 est constatée par rapport à
1993 (4,2% contre 1,4% pour l'éducation, 5,5% contre 2,0% pour la
santé et 8,4% contre 6,4%).
Une analyse de la structure de la population pauvre permet de
dire que le sexe du chef de ménage est un élément
discriminant par rapport au statut de pauvreté des membres. En effet,
les ménages dont le chef est une femme comportent moins de pauvres que
ceux sous la responsabilité d'un homme. Ces ménages renferment
moins de 10% des pauvres alors que leur poids dans l'effectif total des
ménages du pays est de 15%. Les ménages dont le chef de
ménage a un niveau d'éducation primaire ont eu en moyenne des
dépenses par tête de 19% à 29% supérieures à
celles d'un ménage dont le chef ne dispose d'aucune formation scolaire.
Le fait d'avoir un niveau scolaire secondaire ou supérieur a eu un
impact encore plus élevé, augmentant les dépenses par
tête de 56% à 80%. Une explication de ce caractère pourrait
être la taille du ménage.
La taille moyenne des ménages pauvres avoisine sept (7)
personnes quelle que soit l'année. En 1998, pour les ménages
pauvres, la taille est de 8,1% et de 9,3% pour les ménages
extrêmes pauvres. Les tailles moyennes, des ménages pauvre et
extrêmement pauvre sont respectivement égales à 1,65% et
1,92% et fois celle du ménage non pauvre.
Le ménage pauvre est généralement
composé en majorité d'enfant (0 à 14 ans). Il expose une
très grande proportion d'enfant à la pauvreté. En 1998,
les enfants représentaient 43,5% de la population totale. La proportion
des enfants (0 à 14 ans) touchée par la pauvreté est de
38,5% ; ce taux montre que les enfants sont plus touchés que les
adultes.
L'analyse du groupe socio-économique (secteur informel
et le secteur moderne) du chef de ménage montre que les ménages
dirigés par un opérateur du secteur informel comportent de plus
en plus de pauvres (28,9% en 1998). Le taux de pauvreté chez les
ménages d'opérateurs du secteur formel, est situé à
12,4% en 1998. Il ressort de ces deux taux que la paupérisation n'est
pas ressentie de la même manière chez ces deux catégories
de chef de ménage.
L'analyse en fonction du type de l'opérateur agricole
laisse apparaître que les ménages des agriculteurs de produits
vivriers sont plus frappés par la pauvreté (49,8%) que ceux des
cultures d'exportation (45,1%) en 1998.
Le type de logement dominant au niveau des ménages
pauvres est la case et la maison en banco en milieu rural et la cour commune en
milieu urbain. En 1998, 6 pauvres sur 10 occupent une case ou une maison en
banco, ce qui dénote d'une amélioration par rapport à 1993
et 1995 où 7 personnes sur 10 occupaient une case ou une maison en
banco. Cette amélioration se répercute à Abidjan, au
niveau des cours communes (45,0% en 1998 contre 65,0% en 1995), tandis qu'un
durcissement s'opère pour les bidonvilles (23,0% en 1998 contre 15,0% en
1995).
L'accessibilité à l'eau potable est un
problème fondamental, si l'eau potable s'entend comme l'eau provenant
soit par un robinet privé, soit par un robinet commun ou par une pompe
publique, alors une plus grande majorité des pauvres y a accès.
Jusqu'à 1998, le point de la situation, en milieu rural, donne : 15
465 pompes à motricité humaine (12 105 pompes en fonctionnement)
et une trentaine de système d'hydraulique villageoise
améliorée. Au plan national, pour l'accessibilité à
l'eau potable, le taux évolue de 37,6% en 1995 à 41,9% en 1998.
En milieu urbain l'eau potable est desservie au travers du robinet par la
Société de Distribution d'Eau de Côte d'Ivoire (SODECI).
L'électricité est le mode d'éclairage par
excellence. Il ressort des études menées que
l'électricité est un facteur discriminant entre pauvre et non
pauvre. En 1998, 32% des ménages pauvres ont l'électricité
contre 19,1% en 1995. Leur connexion sur le réseau se fait soit par
l'acquisition d'un compteur propre, soit par un compteur collectif. Ainsi,
11,7% des ménages pauvres sont sur un compteur collectif qui est un taux
en deçà de celui des non pauvres (23,2%) en 1998.
L'éclairage des ménages à partir de compteur ne leur
appartenant pas traduit des conditions de vie précaire.
Dans le domaine de l'éducation, une amélioration
est constatée. Le taux brute de scolarisation passe au plan national de
34,9% en 1993 à 52,6% en 1998, soit un accroissement de 50,7%. Le taux
net de scolarisation au primaire mesure l'accès à
l'éducation des enfants de 6 à 11 ans. Ce taux est égal
à la proportion d'enfants de 6 à 11 ans effectivement inscrits
à l'école primaire. Le détail des chiffres de 1998 permet
de constater une disparité entre garçons et filles plus
marquée chez les pauvres. La proportion des enfants de 6 à 11
ans, issus de ménages pauvres est de 50,9% pour les garçons et de
41,4% pour les filles. Chez les non pauvres, ces taux sont respectivement de
63,0% et 55,7% pour 1998.
Chez les adultes de 15 ans et plus, c'est le taux
d'analphabétisme qui sert de mesure. Le taux d'analphabétisme
reste élevé bien qu'il y ait une amélioration en 1998par
rapport à 1995. En effet, ce taux est de 54,8% en 1995 et de 50,2% en
1998. L'analyse du taux d'analphabétisme par sexe laisse
apparaître une forte proportion de femmes ne sachant pas lire et
écrire. Le taux est de 57, 7% chez les non pauvres et de 73,6% chez les
pauvres. Alors qu'il est de 47,0% chez les adultes pauvres et chez les non
pauvres en 1998. Le niveau d'analphabétisme est l'un des
déterminants le plus explicatif des conditions d'existence de nombreuses
femmes surtout dans le monde agricole.
L'analyse de la pauvreté en Côte d'Ivoire montre
une légère amélioration des conditions d'existence des
ménages en 1998. Le taux de pauvreté est passé de 36,8%
à 33,6% entre 1995 et 1998. La guerre a fait plus d'un million de
personnes déplacées et réfugiées. Elle a accru la
pauvreté. En effet, la perte par les agriculteurs des revenus
tirés de leurs cultures les plonge dans un état de
précarité. En zone urbaine, le chômage s'est
accentué à cause de la perte d'emplois liée à la
fermeture de certaines entreprises et la baisse de l'activité
économique. 6% de la population sont devenues déplacées de
guerre avec plus de 500 milles enfants qui ont dû arrêter
l'école. Un bon nombre de structures de base (écoles, services
médicaux) ont dû arrêter de fonctionner soit par le
départ des fonctionnaires, soit par l'arrêt de fonctionnement de
l'administration. Pour des besoins de sécurité, de grands espaces
d'habitation autour des camps militaires ont été détruits
faisant près de 20 000 sans logement. Suite à ces causes, la
pauvreté a enregistré un score jamais atteint dans le pays. Il
est aujourd'hui de l'ordre de 44%. Après un recul en 1998, le niveau de
pauvreté s'est creusé à partir de 2000 pour évoluer
à 38,5% en 2002 et atteindre le pic de 2003 (44%).
b) Déterminants de la
pauvreté
La compréhension de la pauvreté à travers
ses déterminants peut fournir des informations capitales pour cibler les
actions visant à soulager les conditions d'existence des ménages
pauvres. Les déterminants de la pauvreté sont les
caractéristiques socio-économiques des ménages. On
retiendra que les principaux déterminants sont ceux qui se
répètent fréquemment dans toutes les régions ou
départements du pays. Ce sont
- la catégorie socio-professionnelle des
individus ;
- la taille des ménages ;
- le niveau d'instruction ;
- le groupe d'âge ;
- le statut matrimonial ;
- le sexe.
Les principales corrélations dégagées
dans l'établissement du profil de la pauvreté sont
multiples :
? plus le niveau d'étude du chef de ménage est
élevé plus la probabilité d'être pauvre est faible.
Les pauvres sont identifiés comme étant des opérateurs
agricoles (leur revenu espéré a tendance à se
réduire), des travailleurs et indépendants du secteur informel
n'ayant pas un niveau d'étude poussé ;
? appartenir au secteur formel (public et privé) expose
moins à la pauvreté, contrairement aux ménages des autres
catégories socio-professionnelles (agriculteurs et opérateurs du
secteur informel) qui ont plus de chance d'être pauvres ;
? la taille du ménage joue un rôle très
important dans la probabilité d'appartenir ou non à la classe des
pauvres. Ainsi, une réduction du train de vie de 8,3% est
constatée en 1995 pour les ménages compris entre 5 et 10
personnes par rapport à ceux compris entre 3 et 5 personnes.
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