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La participation citoyenne dans l'élaboration de la politique nationale de population

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par Miguel DUMAY
Université d'État d'Haiti Centre en Population et Développement - Diplôme Post-Gradué 2007
  

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Chapitre  I

Politiques publiques et Participation citoyenne comme concept.-

Ce chapitre constitue, dans ce travail d'essai, notre cadre conceptuel et théorique. Il y est abordé les différentes acceptions et théories sur les politiques publiques et la participation citoyenne en tenant compte des dimensions politique, juridique et sociologique de la question.

I-1 Les politiques publiques : Définitions et Théories

Les politiques publiques ont fait l'objet de beaucoup d'études et sont, de ce fait, diversement définies. Certains auteurs dont Jean Claude Thoenig (1985) les considèrent comme un problème, une réalité objective qui s'inscrit dans un contexte social spécifique par rapport à des enjeux, des populations et des structures. Prises dans ce sens, les politiques publiques affectent des individus, des groupes, des organisations ou des classes dans leurs attitudes, leurs intérêts ou leurs situations

D'autres auteurs focalisent leurs définitions sur le processus mis en oeuvre pour fabriquer les politiques publiques. Celles-ci sont, selon Massardier (2003) qui se rapproche de l'expression « policy making » des Anglo-Saxons, le résultat d'une multiplicité d'interactions, d'échanges et de rapports de force tant au moment de leur détermination que dans la conduite de la démarche de mise en oeuvre. Cette définition parait conforme aux objectifs de notre recherche.

Cependant, il ne sera pas inutile de rappeler la définition lapidaire de Dye, cité par Thoenig, qui s'articule autour de l'action ou de l'inaction des décideurs politiques. Pour lui, une politique publique est tout ce que les gouvernements décident de faire ou de ne pas faire. Ce qui signifie q'une politique publique peut être implicite ou explicite.

En ce qui concerne les théories qui traitent la question de politique publique, il ne nous est pas paru nécessaire d'en faire ici une recension. Nous nous référons tout simplement à Massardier (2003) qui parvient à les classer sous le label de trois (3) paradigmes reposant sur trois (3) types de rationalités :

· La rationalité de la puissance publique souveraine, illimitée, instrumentale et descendante, en particulier celle de l'Etat qui est développée par le droit public, la science administrative et le management public). Elle tient compte de l'adéquation des objectifs visés et des moyens disponibles. La politique fonctionne comme une boite noire qui adresse les demandes sociales produites à l'entrée (in put) et fournit des réponses à la sortie (out put).

· La rationalité économique illimitée et instrumentale qui se soumet à la fois aux régulations du marché et de l'Etat. Préconisée par l'économie publique, cette rationalité recherche le meilleur rapport coût/avantage. Ainsi, la société dispose des biens publics selon le mécanisme du marché (offre/demande/prix).

· Les rationalités des acteurs multiples de l'action publique, limitées, incrémentées, polycentriques et négociées développées récemment par la sociologie et science politique se rapprochent du paradigme de l'anarchie organisée, cher aux sociologues des organisations.

C'est donc cette rationalité des acteurs multiples de l'action publique qui va nous servir de fil directeur tout au long de notre recherche sur la place de la participation citoyenne dans la Politique Nationale de Population (SEP, 2002). Une politique qui, dans sa phase d'élaboration, aurait mis en interaction l'Etat et divers autres acteurs de la société haïtienne (SEP, 2000).

I-1-2 Politique de Population.-

Il va sans dire qu'une politique de population est une politique publique et comme telle, elle est diversement définie (Gérard, 1983). Mais dans le cadre de notre travail, nous nous contentons d'utiliser simplement les deux définitions qui suivent.

S'inscrivant dans une perspective de développement, une politique de population est, selon Hubert Gérard (1983), « un ensemble de mesures et de programmes destinés à contribuer à la réalisation des objectifs économiques, sociaux, démographiques et autres objectifs collectifs en intervenant sur les variables démographiques principales telles que la taille, la croissance, la distribution spatiale (nationale et internationale) de la population (...) tout en mettant l'accent sur l'amélioration de la vie des populations du pays ». Cette définition qui montre la transversalité d'une politique de population s'apparente en partie à celle donnée par le Dictionnaire démographique multilingue selon laquelle une politique démographique consiste en un ensemble de principes explicites ou implicites qui guident l'action des pouvoirs publics dans les matières spécifiquement démographiques ou ayant des conséquences démographiques. Une telle politique peut être « populationniste » si elle vise à favoriser l'accroissement de la population ou « malthusianiste » dans le cas contraire.

En consultant la littérature disponible sur la question, nous remarquons que le courant malthusianiste traverse la quasi-totalité des politiques de population des pays y compris celle d'Haïti. Car le malthusianisme ou néo-malthusianisme vise l'adéquation de la population et des ressources disponibles pour éviter toute situation de pauvreté.

I-2 Le régime haïtien dans la Constitution de 1987: L'Etat unitaire décentralisé

La Constitution de 1987 a défini un nouveau mode d'organisation de l'État. L'État haïtien devra cesser d'être oligarchique, prédateur, exclusif et centralisateur pour devenir un État moderne, démocratique, inclusif et décentralisé. Ce qui lui permettra de mieux répondre à sa nouvelle mission. Car l'Etat est, selon F. Houtard (1995), une institution résultant de rapports sociaux, c'est-à-dire de groupes humains en interaction mutuelle pour la poursuite d'objectifs collectifs dans les champs économiques et politiques. Son rôle consiste à créer les conditions et les cadres juridiques nécessaires à la reproduction ou la transformation desdits champs.

Outre la souveraineté nationale dont l'exercice est confié aux pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire (titre V, article 59), la Constitution de 1987 a innové en créant un Etat unitaire décentralisé qui se repose sur trois (3) niveaux de collectivités territoriales : la section communale, la commune et le département (chapitre 1, article 61). Cette décentralisation effective devra permettre de dynamiser la démocratie et de ce fait, faciliter la participation des citoyens aux affaires publiques.

1-3 La participation : Définitions et Théories

La participation a pris, ces derniers temps, une importance beaucoup plus accrue dans les sociétés démocratiques. Des analystes viennent même à montrer la limite de la démocratie représentative et vantent la vertu de la démocratie participative (Bevort, 2002) qui garantit aux citoyens des droits et libertés beaucoup plus étendus.

Cette participation qui est la composante fondamentale de la démocratie se définit, selon GRIDE (2005), comme l'ensemble des normes, des pratiques et des mécanismes qui permettent aux citoyens de contribuer à la vie d'une organisation ou d'exercer une influence sur la marche des affaires d'une communauté.

La Constitution de 1987 s'inscrit dans cette même ligne de pensée quand, dans son préambule 7, elle fait référence à la concertation et la participation de toute la population aux grandes décisions engageant la vie nationale. Elle a aussi pris soin de bien définir la qualité, les droits et devoirs du citoyen notamment la liberté d'opinion, de réunion, d'association et le droit de pétition (titre III, article 16, 28, 29, section E, art. 31, 31-1, 31-2, 31-3).

Mary Pat Mackinnon (2006) explique, dans son document intitulé « les citoyens et l'aspect horizontal des politiques:un ajustement naturel » que la participation active reconnaît la capacité des citoyens d'examiner et de générer de façon autonome des choix en matière de politiques. Ainsi, nous pouvons dire que cette participation devra permettre aux citoyens de mener des actions collectives et de s'impliquer dans les affaires publiques.

I-4 Action collective et affaires publiques

Force est, cependant, de constater qu'il s'avère difficile de porter les citoyens à participer collectivement aux activités d'intérêt public. En ce sens, Marx et les auteurs marxistes (Montoussé et Renouard, 1977) font comprendre que la mobilisation de la classe ouvrière pour la défense de ses intérêts n'est jamais automatique. Elle se trouve entravée, selon Marx, par la violence physique et idéologique exercée par la classe dominante.

Utilisant une approche psychosociologique, Tarde et Lebon (Montoussé et Renouard, 1977) avancent que, dans une foule, les hommes sont irrationnels et, de ce fait, imitent des meneurs ou se laissent manipuler par eux. Alors que pour Mancur Olson (Montoussé et Renouard, 1977) qui se rapproche d'une certaine façon de la pensée des marxistes, les individus rationnels ayant des intérêts communs ne se mobilisent pas automatiquement pour les défendre. Leur désir de se mobiliser se manifeste après qu'Ils se soient rendus compte que le coût de la mobilisation est inférieur au gain escompté. Dans le cas des biens publics, ces individus inaptes à se mobiliser adoptent tout simplement l'attitude du passager clandestin.

Ces considérations permettent de comprendre que la mobilisation de masse, l'action collective n'est pas chose facile. Mais une fois que les individus parviennent à être conscientisés, à avoir une perception claire des problèmes communs à un groupe, une communauté ou une société, ils vont se mobiliser en portant ces questions d'importance majeure sur la place publique aux fins de rechercher, avec d'autres acteurs politiques, des solutions appropriées. Ce faisant, ces problèmes deviennent, selon Vincent Lemieux (1995), des affaires publiques.

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