L'execution par l' administration des décisions du juge administratif, en droit français et en droit grec.( Télécharger le fichier original )par Antonia HOUHOULIDAKI Université Paris I Sorbonne - DEA de droit public comparé des pays européens 2002 |
A) La validation législative.Si on voulait définir la validation législative, on dirait que cette dernière, « suppose l'intervention d'un acte législatif pris postérieurement à un ou plusieurs actes administratifs, qui, en déclarant valides(ou une formule analogue) ces actes ou certains de leurs effets, a pour objet et pour conséquences d'empêcher le contrôle juridictionnel (ou administratif) de la régularité de ces actes, ou encore si ce contrôle a été déjà effectué, d'en faire disparaître les conséquences ».164(*) Par ailleurs, il faut noter qu'à la différence du droit français, ce mécanisme est vivement critiqué en droit hellénique. En réalité, même si en France, les validations législatives se pratiquent, elles font pourtant l'objet de critiques(1). De plus, il serait intéressant, d'examiner les conséquences d'un tel procédé. (2) 1) Un mécanisme contesté.Comme on a déjà indiqué, les validations législatives sont mal vues en droit hellénique. En effet, ce n'était pas toujours le cas. Jusqu'en 1991, le Conseil d'État admettait la possibilité de validation législative des actes réglementaires, alors que pour les actes administratifs individuels, il était strictement interdit.165(*) Cela s'explique par le fait, que les actes réglementaires, à l'époque, pouvaient être édictés sans autorisation de la part du législateur, ce qui veut dire, que ce dernier se permettait de procéder à leur validation a posteriori, en cas où ils seraient contestés. Cependant, le Conseil d'État, en 1991, a énoncé que ce comportement constituait une violation de la Constitution hellénique, et en particulier de l'article 26 qui consacre le principe de séparation des pouvoirs. Désormais, les validations législatives ne sont admises en droit hellénique, qu'exceptionnellement et sous certaines conditions, qu'on examinera ultérieurement. De son côté, le droit français, paraît plus favorable à l'égard de cette intervention du législateur. Toutefois, la doctrine rappelle que ce mécanisme présente des risques. Selon G.Braibant, « Cette tendance est dangereuse. Les validations législatives portent atteinte aux principes fondamentaux de la séparation des pouvoirs, de la non rétroactivité des actes juridiques et de l'autorité de la chose jugée. Elles amoindrissent le prestige et l'autorité du juge. Elles sont d'autant plus critiquables que trop souvent, le gouvernement n'informe pas le Parlement de façon claire et complète de l'objet, de la portée et des conséquences des validations qu'il lui demande ». 166(*) Par conséquent, s'est posé, plusieurs fois, la question de la constitutionnalité d'un tel procédé. Le Conseil Constitutionnel, a admis la constitutionnalité des validations législatives, sous réserve, néanmoins, du respect de certaines limites.167(*) Cela dit, le législateur est, en France, le seul qui peut libérer l'administration de l'obligation d'exécuter la chose jugée. La validation par le législateur peut être directe ou indirecte. Elle est directe lorsqu'elle affecte des mesures réglementaires ou individuelles, qui ont été prises sur le fondement ou en conséquence de l'acte annulé. C'est le cas, par exemple, lorsque, après l'annulation d'un décret instituant un organisme consultatif, est prononcée la validation des décisions intervenues au vu de ses avis. Au contraire, elle est indirecte, quand le législateur modifie l'état du droit, de façon que l'administration puisse reprendre avec effet rétroactif, des mesures identiques à celles annulées ou entachées d'irrégularité.168(*) De plus, selon le Conseil Constitutionnel, le législateur est habilité à exercer son pouvoir de validation « afin de régler, comme lui seul peut le faire, les situations nées de l'annulation d'un acte administratif ». 169(*) Ainsi, il peut l'exercer « afin de prévenir les difficultés qui peuvent naître de l'annulation » d'un tel acte, et cela, alors même que le juge administratif est saisi d'un recours contre cet acte.170(*) À ce titre, il peut s'agir, soit d'une validation préventive, soit d'une validation a posteriori. Enfin, la validation peut être, soit intégrale, soit partielle. Dans la première hypothèse, elle fait obstacle à toute contestation juridictionnelle des actes validés, alors que dans la deuxième hypothèse, elle s'oppose à ce qu'un recours soit appuyé sur un moyen tiré d'un vice déterminé.171(*) Il peut, également, arriver que la loi valide un acte tout en réservant les droits à réparation des préjudices qu'il a causé.172(*) Notons, par ailleurs, une différence fondamentale. La validation se distingue, nettement, de la ratification, laquelle donne rétroactivement valeur législative aux actes administratifs qui en sont l'objet et leur confère une incontestabilité propre à la loi.173(*) De plus, on pourrait distinguer les validations- moyen de lutte contre le contrôle juridictionnel des actes administratifs et les validations - remèdes à des situations juridiques complexes174(*). Les premières sont la manifestation de la volonté de l'administration de contrecarrer le juge administratif. Elles peuvent être, soit préventives, soit rétroactives. Ces dernières sont les plus choquantes, car elles portent directement atteinte à l'autorité de la chose jugée. La deuxième catégorie vise les validations qui constituent des remèdes à des situations juridiques, découlant de jugements extrêmement difficiles à résoudre, comme c'est le cas du contentieux de la fonction publique. En somme, ce procédé propre au législateur, a fait l'objet de vifs débats, tant en Grèce qu'en France, pour enfin, réussir à être admis, au moins en ce qui concerne le cas français. Il nous paraît, alors, important d'examiner par la suite, les conséquences qui découlent d'un tel procédé. * 164 J.M Auby : Sur une pratique excessive : Les validations législatives, Revue de droit prospectif 1977, p.10. * 165 ÓÅ 1146/1938, 2044/1956, 2509/1971, 42/1971 : concernant les actes réglementaires. ÓÅ 106/1945 : concernant les actes individuels. * 166 G.Braibant, précité, EDCE 1961, p.64. * 167 CC, 22 juillet 1980, 80-119 DC, RDP 1980.1658, comm. Favoreu . * 168 Loi du 3 janvier 1985, art .70, relativement à une obligation des employeurs en matière de cotisation d'accidents de travail * 169 R.Chapus, Droit du contentieux administratif, précité, p.1012. * 170 R.Chapus, précité,p.1012. * 171 Loi du 20 juillet 1992 ( Dispositions diverses relatives à l'éducation nationale), art.12 et 20. * 172 Loi du 11 décembre 1996, validant le contrat de concession de la réalisation du stade de Saint- Denis. * 173 Mise en oeuvre, dans l'arrêt du CE Ass.19 octobre 1962, Canal et autres, précité. * 174 H.Oberdorff, précité, p.469. |
|