Dans la période de détermination du change
liée surtout aux capitaux, les candidats à l'Union
monétaire en plus d'être attentifs à leurs relations
commerciales, doivent l'être pour leurs relations financières. La
raison en est que la zone monétaire optimale impliquera presque
nécessairement des transferts compensateurs permettant de
rééquilibrer les balances des paiements des nations
concernées. L'intégration financière pour cela devra donc
être suffisante entre les espaces concernés. C'est la conclusion
à laquelle aboutit Ingram (1969) en faisant le lien entre zone
monétaire optimale et intégration financière. Pour lui,
plus l'intégration financière entre les pays candidats est forte,
plus les déficits pourront être financés aisément et
sans variations perturbatrices significatives du change ou des taux
d'intérêt. Le choix des changes flexibles serait légitime
pour ces pays, dans la mesure où les cours de change seraient stables ou
« prédictibles ». Il note par contre que lorsque
l'intégration financière est faible, les autorités auront
intérêt à choisir des changes fixes pour éviter
l'instabilité des cours de change.
I.2.3. La similarité des taux d'inflation
(Fleming)
En 1971, Fleming constate que la similarité des taux
d'inflation sur une certaine période de temps entre différents
pays induit des conditions d'échange stables et par conséquent
réduit le besoin d'ajustement du taux de change. Pour lui, des taux
d'inflation sensiblement différents selon les pays, pourraient
être source de pouvoirs d'achats divergents et entraîner le recours
à l'instrument taux de change pour corriger les écarts.
Contrairement aux critères précédents,
celui-ci suggère non pas un changement microéconomique, mais
plutôt un changement macroéconomique parce que les
différences de taux d'inflation résultent de différents
facteurs comme les disparités dans le développement structurel
entre pays, la diversité d'institutions du marché du travail, les
différences dans les politiques économiques ou la
diversité de préférences sociales comme l'aversion
à l'inflation.
D'autres critères tels que la notion de bien public
qu'est l'espace intégré (Kindleberger, 1986) ; le rôle des
stratégies et des biens finals respectifs des autorités en
présence (Hammada, Canzoneri et Gray, 1980) ; l'identité dans les
préférences de structures qui expliquerait que même sans
structures économiques identiques, les préférences
communes en vues de les construire suffisent à justifier la perspective
d'intégration (Bourguinat, 1973) et enfin la symétrie dans
l'absorption des chocs sont identifiés comme pouvant expliquer la
construction de zones monétaires. Ce listing des nouveaux
critères n'est pas exhaustif du fait que ces critères ne font pas
l'unanimité parmi les économistes. Par exemple, en ce qui
concerne la symétrie dans l'absorption des chocs, Ouédraogo
(2003) estime qu' avec la centralisation des réserves de change, qui
permet de faire face à des difficultés ponctuelles que
rencontreraient certains pays, la convergence économique comme
critère des zones monétaires optimales n'apparaît pas
pertinente. En effet, « placé dans le contexte d'une union
monétaire, la centralisation des devises permet à chacun des
membres de l'Union , le cas échéant d'un choc asymétrique
défavorable, une stabilisation en douceur, réduisant ainsi
l'ampleur des fluctuations qu'engendrerait une politique de « stop and go
» sur les marchés externes » (Ouédraogo, 2003).
I.3. Les insuffisances de la théorie des
ZMO
La théorie des ZMO, si elle offre un tremplin valable
pour apprécier une zone monétaire, n'en constitue cependant pas
un cadre opérationnel pour la construction de zones monétaires.
C'est à ce constat qu'est parvenu Tavlas (1994), pour qui la
théorie des zones
monétaires optimales n'offrait pas un cadre unifiant.
Avec la combinaison des critères de la théorie, les
frontières de la zone monétaire changent radicalement.
En effet, si une région très ouverte peut
favoriser l'intégration monétaire selon McKinnon, cette
région peut connaître une faible mobilité des facteurs de
production, qui selon Mundell n'est pas en faveur de la constitution d'une
union monétaire. De plus, Tavlas note un problème d'inconsistance
dans la théorie traditionnelle qui se traduit par le fait que si un
petit pays « plus ouvert » économiquement, a
intérêt à opter pour une zone monétaire, selon la
théorie de McKinnon ; ce même pays s'il connaît une
production peu différenciée, aura intérêt à
conserver l'instrument de change, selon Kenen.
Ces limites de la théorie renforcent l'option de
certains auteurs comme Ishiyama (1975) qui a suggéré une analyse
coût-bénéfice pour chaque pays du point de vue de son
propre auto-intérêt et bénéfice, avant toute
entreprise d'unification monétaire.