CHAPITRE II - LE « BALANCED SCORECARD » : UN
OUTIL DE
PILOTAGE DE LA PERFORMANCE
Encore appelé "tableau de bord
équilibré" ou "tableau de bord prospectif", le Balanced
Scorecard est issu des travaux d'un professeur, Robert S. Kaplan
et d'un consultant, David P.
Norton. Il « est né de la remise en cause
des systèmes d'évaluation des performances
12
exclusivement centrés sur le suivi des
résultats financiers » . Le développement de cet
outil
de contrôle de gestion lui vaut un immense
succès. Initialement conçu pour les entreprises
concurrentielles, le tableau de bord prospectif a conquis
le secteur public. Sa conception
s'inscrit dans une optique de pilotage de la performance.
I- Les enjeux du tableau de bord prospectif
Le Balanced Scorecard n'est pas une nouvelle méthode de
conception des tableaux de bord ; il
propose un nouveau mode de management et de pilotage de
l'entreprise dans le cadre de
l'élaboration et du déploiement de sa
stratégie.
A- Le management par les tableaux de bord
Selon Helfer (2006, p.2-3), les principaux facteurs
d'influence sur le management des
entreprises sont l'extension de la mondialisation et le
développement techno-scientifique ; ces
dernières renforcent la concurrence entre
les entreprises et conduisent à une
hypercompétition. Cet univers de plus en plus
instable et très concurrentiel contraint les
entreprises à développer une culture
stratégique. Celle-ci comporte trois pôles qui constituent
le fondement du management stratégique ; il s'agit
de l'anticipation, de l'action et de la
mobilisation. En effet, percevoir les « signaux
porteurs de sens pour l'avenir...traduire
l'information en décision puis en
action...mobiliser... » (Helfer, 2006, p. 11-12) sont les trois
actes fondamentaux du stratège. Pour les accomplir, le
responsable d'entreprise a besoin d'un
excellent système d'informations. Le Balanced
Scorecard s'inscrit dans cette approche car,
au-delà de sa fonction de mesure de la performance, il
apparaît comme un véritable dispositif
de pilotage de la performance. Trois étapes ont
marqué son développement :
- la phase initiale où il est
présenté comme un instrument de mesure de la performance
amélioré, construit autour de quatre axes
interdépendants ;
- la phase suivante où il devient un élément
central du système de management stratégique ;
ici, l'accent est mis sur les liens de causalité reliant
les différents axes et les indicateurs ainsi
que sur les moyens de déclinaison de la stratégie ;
- la dernière phase où il devient un outil de
management fédérateur : il permet de sélectionner
les objectifs stratégiques de l'organisation et
ainsi de construire avec les différents
12 DORBES H., Le tableau de bord prospectif, une
nouvelle approche du pilotage pour les PME avec le
« balanced scorecard »,
http://www.acting-finances.com/offres/file_inline_src/188/188_P_1743_41.pd, p.
1,
(consultée le 10 septembre 2008).
13 NOBRE T. et Signolet L., Le paradoxe de l'axe
apprentissage organisationnel et croissance dans le balanced
scorecard : Le cas de l'hôpital,
http://www.iae.univ-poitiers.fr/afc07/Programme/PDF/p145.pdf, p. 4
(consulté le
18 septembre 2008)
15
13
responsables d'unité la stratégie de
l'organisation faisant ainsi de la stratégie une oeuvre
collective animant l'intégralité de l'organisation.
La portée du Balanced Scorecard s'est donc élargie
au cours du temps pour investir la sphère
du management stratégique. C'est une méthode qui
doit permettre à une entreprise de passer
de la définition de sa stratégie, au
pilotage de sa mise en oeuvre concrète en passant par la
définition, suivant quatre axes, des objectifs
stratégiques associés, d'un arbre de causes à
14
effets entre ces objectifs, des actions à mettre en place
. Le Balanced Scorecard apporte ainsi
une réponse à l'incapacité des
systèmes classiques de management de faire le lien entre
la
stratégie à long terme de l'organisation et
les actions à court terme. Il y parvient grâce à
l'introduction de quatre nouveaux processus de management :
- clarifier et formuler la vision et la stratégie ;
- communiquer et lier les objectifs stratégiques et les
mesures de performances ;
- planifier, fixer les buts et rendre les initiatives
cohérentes ;
- développer le feedback stratégique et
l'apprentissage, c'est-à-dire tester les hypothèses sur
lesquelles a été construite la stratégie et
opérer les réajustements nécessaires.
La stratégie de l'entreprise élaborée
en cohérence avec sa vision et sa mission est alors
déclinée en axes stratégiques suivant
quatre perspectives interdépendantes auxquelles sont
associés des indicateurs appropriés.
15
14 MARLOT J., Utilisation de la Balanced
Scorecard dans l'évaluation de la compétitivité d'un
centre de
support aux développements de projets nouvelles
technologies,
www.hec.ensmp.fr/prive/theses/theses2003/Marlot.doc, p. 17
(consulté le 18 septembre 2008)
15 SERHANE A., Les tableaux de bord
stratégiques : Du concept à la mise en oeuvre,
www.geocities.com/abdeloihedserhane/tableauxdebord.pdf, p. 6.
(Consulté le 18 septembre 2008)
16
Figure n° 3 : Les quatre axes du Balanced Scorecard
Axe financier : Que faut-il
apporter aux actionnaires ?
s ur te a s on ti Ac s ifs t jec Cible Ob Indic
Axe Clients : Que faut-il
apporter aux clients ?
s ur te a Axe Processus internes : En
quoi exceller pour satisfaire
les clients et les actionnaires ?
VISION ET
STRATEGIE
s on ti Ac s ifs t jec s ur te a s on ti Ac Cible s ifs t jec Ob
Indic Cible
Ob Indic
s ur te a s on ti Ac s ifs t jec Cible Ob Indic
Axe Apprentissage
organisationnel : Pour
réaliser sa vision, comment
l'entreprise doit-elle
apprendre et s'améliorer ?
Source : Giraud (2004, p. 101)
Le Balanced Scorecard se présente ainsi comme
un ensemble d'indicateurs clés de
performance directement reliés à la
stratégie développée par l'entreprise et offrant
à
l'utilisateur l'opportunité de piloter tous les
déterminants de la performance, organisés en
quatre perspectives différentes.
B- l'appropriation du Balanced Scorecard par le
secteur public
A l'origine, le Balanced Scorecard a été
conçu au profit des entreprises, c'est-à-dire pour des
organisations dont l'objectif essentiel est la
réalisation du profit. Dans cette logique, selon
Giraud (2004, p. 102), « la performance
financière est considérée comme le but final,
conditionné par la satisfaction des clients,
elle-même dépendant de la bonne organisation des
processus internes, qui reposent quant à eux sur une
motivation suffisante des acteurs et des
systèmes performants ».
17
Figure n° 4 : La chaîne de causalité au
sein du Balanced Scorecard pour le secteur privé
APPRENTISSAGE
PROCESSUS
INTERNES
SATISFACTION
CLIENTS
PERFORMANCE
FINANCIERE
Source : Giraud (2004, p. 102)
Les indicateurs associés à l'origine à
chacune des dimensions de la performance du Balanced
Scorecard témoignent ainsi de l'utilisation
première à laquelle il était destiné, celle
d'être un
outil au service des entreprises concurrentielles :
- l'axe financier est celui traditionnel des tableaux de
bord de gestion ; on y retrouve, entre
autres, comme indicateurs, le chiffre d'affaires, le
résultat d'exploitation, la marge brute, la
rentabilité financière, la rentabilité
économique, l'amélioration de la productivité ;
- l'axe client intègre des indicateurs comme la
fidélisation, la part du marché, la satisfaction,
la conservation, la rentabilité, l'image de marque ;
- l'axe processus met en relief des indicateurs relatifs
au développement de nouveaux
produits, à la qualité de la connaissance des
processus, à la qualité du suivi et de l'évolution
des processus, à la mesure des
résultats de l'activité de
recherche-développement, au
processus de production ;
- l'axe apprentissage s'intéresse aux méthodes et
systèmes permettant à l'entreprise de réaliser
une capitalisation des expériences ou un
apprentissage permanent ; les indicateurs choisis
doivent refléter la motivation et la
compétence des salariés, la qualité des
procédures et du
système d'information, l'absentéisme, le turn-over
et la satisfaction globale des salariés.
Mais le besoin d'un pilotage de la performance
n'est pas resté qu'uniquement la
préoccupation des gestionnaires des entreprises
concurrentielles ; il a été également ressenti
au niveau des organisations à but non lucratif à
savoir les associations et notamment le secteur
public.
Dans le domaine du contrôle, l'action publique a
été à l'origine préoccupée par la
conformité
juridique des procédures et le suivi des ressources, en
particulier budgétaires ; il s'agissait de
vérifier la conformité des actes
réalisés aux normes établies ou aux règles ;
le suivi des
objectifs poursuivis ou l'adéquation des actions à
ces objectifs ne faisaient pas partie de son
champ. Les critiques de ce mode de contrôle ont
conduit à l'émergence du pilotage par les
résultats ; l'évaluation est ainsi apparue
comme « un instrument de régulation pour des
services publics soustraits à celle du
marché, mais soumis à l'obligation croissante de
18
"rendre des comptes" (accountability) dans un
environnement de plus en plus complexe » .
16
C'est logiquement donc que le Balanced Scorecard fut mis à
contribution. Aujourd'hui, il est
très utilisé dans l'administration des pays
nord-européens, au Canada ou aux Etats-Unis par
près de 60% de l'administration publique.
Le modèle initial du Balanced Scorecard a cependant
subi quelques modifications pour être
adapté aux exigences du secteur public.
Figure n° 5 : Le Balanced Scorecard pour le secteur
public
Mission
17
Axe clients et
parties prenantes
Axe Financier
Stratégie
Axe Apprentissage
organisationnel
Axe Processus internes
Source : Rohm H.
18
Ces changements trouvent leur fondement dans la
différence des buts que poursuivent
respectivement le secteur privé et le secteur
public. En effet, la recherche du profit est la
motivation première des entreprises concurrentielles ;
le secteur public est soumis à la
pression de sa mission qui est de fournir aux citoyens
des services de base essentiels à des
coûts efficients ; son objectif n'est donc pas la
recherche de profit et sa responsabilité
s'analyse en une obligation de rendre compte du fait que
ses prestations de services ou ses
produits satisfont les attentes des citoyens. Cette
caractéristique du secteur public influence la
chaîne de causalité entre les perspectives ;
on observe que l'axe clients et l'axe financier
prennent la place l'un de l'autre ; l'explication est la suivante
: la satisfaction du client dépend
à la fois des contraintes d'ordre financier dans
lesquelles l'organisation publique opère et des
processus orientés satisfaction-client mis en place, la
qualité des processus étant fonction de la
16 CHAUNEY J.-N., L'intérêt du
Balanced Scorecard dans l'évolution des modes de contrôle des
départements
français,
http://www.afc-cca.com/archives/docs_congres/congres2006/ressources/28.pdf, p.
6 (consulté le 29 mai
2008)
17 Indicateurs et tableaux de bord : les tableaux
de bords prospectifs (balanced scorecards), 2 è
section-Fiche 19,
http://pagesperso-orange.fr/claude.rochet/cours/Docs/fiche19.pdf,
p. 179 (consulté le 10 septembre 2008)
18 ROHM H., Performance measurement in action : A
balancing act, Perform, Volume 2, Issue 2,
http://www.balancedscorecard.org/Portals/0/PDF/perform.pdf, p. 3
(consulté le 21 septembre 2008)
19
capacité de l'organisation à se
développer et à accroître l'expertise de son
personnel et
l'efficacité de ses systèmes.
Figure n° 6 : La chaîne de causalité au
sein du Balanced Scorecard pour le secteur public
19
AXE
APPRENTISSAGE
AXE
PROCESSUS
INTERNES
AXE
FINANCIER
AXE CLIENTS
ET PARTIES
PRENANTES
Au niveau de l'hôpital public, l'évolution des
méthodes de mesure de la performance est
comparable à celle du monde des entreprises ; aujourd'hui,
le contrôle budgétaire et ses outils
ne répondent plus aux besoins de pilotage de la
performance des établissements hospitaliers ;
de même, les mesures financières ne
peuvent permettre de savoir si un établissement
hospitalier remplit concrètement sa mission de
service public. Certaines techniques
entrepreneuriales ont donc été adaptées
à ces établissements ; l'analyse stratégique, le projet
21
prospectif est une réponse à cette quête en
raison des fonctions qu'il est appelé à jouer :
- mesurer et guider l'établissement vers ses objectifs
stratégiques ;
- intégrer les différentes fonctions clés du
management ;
- faciliter la communication de la stratégie au sein de
l'établissement et améliorer le dialogue
entre les professionnels de la santé et le personnel
administratif ;
- faciliter l'apprentissage en permettant d'identifier les
problèmes et de prendre les mesures
correctives.
Des difficultés existent, reconnaissent les
concepteurs du tableau de bord prospectif, à le
mettre en oeuvre dans les établissements
hospitaliers car il ne leur est pas aisé de définir
clairement leur stratégie et surtout parce que la
performance financière n'est pas leur raison
d'être ; cependant Kaplan et Norton (2001, p. 23-24
et p. 163-170) citent deux exemples
d'utilisation réussie du Balanced Scorecard dans un
hôpital ; il s'agit de l'hôpital universitaire
pour enfants de Duke à Durham en Caroline du Nord et de
l'hôpital universitaire Montefiore,
dans le Bronx à New York. Preuve donc que c'est
un outil utilisable dans le milieu
hospitalier. Mais, en milieu hospitalier comme pour le
secteur public en général, le modèle
19 Building the Balanced Scorecard in Public
Sector Organizations, http://www.odgroup.com/articles/PSA2.pdf,
p. 3 (consulté le 13 août 2008)
20 NOBRE T., Quels tableaux de bord pour
l'hôpital ?,
http://costkiller.net/methodo/costkiller.gestion-des-couts-
Quels-tableaux-de-bord-de-pilotage-pour-hopital.pdf, p. 2,
(consulté le 29 mai 2008)
21 Ce sont l'anticipation, action, mobilisation ; ces
éléments ont été abordés un peu plus haut.
20
20
d'établissement, la comptabilité par
activités en sont des illustrations. L'utilisation du
Balanced Scorecard s'inscrit également dans
cette volonté des gestionnaires des
établissements hospitaliers de promouvoir un pilotage
effectif de leurs organisations pour
répondre aux nouveaux défis qu'ils rencontrent ;
les hôpitaux sont, en effet, soumis de plus en
plus à des exigences de contraintes
budgétaires et légales, des exigences de qualité
qui les
obligent à adopter les principes de la culture
stratégique ; l'utilisation du tableau de bord
initial du Balanced Scorecard a été adapté
aux spécificités du domaine ; la chaîne de causalité
a donc été modifiée mais la
préoccupation centrale autour de la mission demeure.
Figure n° 7 : La chaîne de causalité au
sein du Balanced Scorecard pour le milieu hospitalier
22
AXE
FINANCIER
AXE
PROCESSUS
INTERNES
AXE
PERSONNEL
AXE PATIENT
L'axe financier perd son importance ici en raison
des subventions accordées aux
établissements hospitaliers pour compenser le fait que le
patient ne paie pas le prix relatif au
coût qu'il génère ; la survie de
l'établissement dépend d'une bonne allocation des ressources
à
sa disposition ; l'axe financier se présente comme une
contrainte et une base de réalisation des
trois autres perspectives ; comme dans toutes les
organisations publiques, la mission du
service public conduit à considérer l'axe client
comme l'aboutissement des efforts réalisés. La
bonne allocation des ressources financières devraient
permettre de développer des processus
internes de qualité à même de rendre le
personnel efficace afin de répondre aux attentes des
patients.
II- La méthodologie de conception du tableau de
bord prospectif
La conception du tableau de bord prospectif est
réalisée suivant une démarche top-down qui
permet l'alignement stratégique des différentes
unités de l'organisation et mobilise ainsi les
acteurs pour une mise en oeuvre efficace grâce au consensus
qu'elle permet de créer en leur
sein. Deux grandes étapes marquent la
conception du tableau de bord prospectif :
l'élaboration de la carte stratégique et la
construction de la carte d'identité des indicateurs.
A- L'élaboration de la carte
stratégique
L'élaboration de la carte stratégique suppose au
préalable la définition du cadre stratégique ;
son objectif est d'apporter la cohérence et la
clarté nécessaires aux différentes actions
qu'entend mener une organisation ; il intègre donc :
- une vision stratégique clairement énoncée
;
- des valeurs bien articulées ;
- une mission, articulée avec mandat ;
- l'objectif poursuivi par l'organisation ;
- la stratégie ainsi que les différents axes
stratégiques.
22 MORARD B., Balanced Scorecard ou !!!!!,
www.aso-organisation.ch/soirdeb6mars/bsc_BMorard.ppt
(consulté le 8 juillet 2008).
21
Tous ces éléments doivent aller ensemble et
se compléter mutuellement ; la mission doit
s'assembler aux valeurs et la vision de
l'organisation doit répondre aux besoins des
bénéficiaires des activités de
l'organisation.
Cossette, après avoir mis en relief la richesse de
la définition du concept, définit la vision
stratégique comme « un produit cognitif
constitué d'un réseau de concepts jugés importants
pour l'avenir de l'entreprise. Elle met en
évidence un système d'« explications » (causes
ou
moyens) et de « conséquences » (effets
ou fins) qui guide les individus concernés dans
23
l'interprétation des événements et dans
les actions à entreprendre » . La vision fait
référence
à un état futur désiré ; c'est
un point de repère que l'organisation se fixe dans l'avenir.
La
définition d'une vision stratégique pour
une organisation est primordiale ; en effet, la
définition d'une vision et sa communication aux
différents acteurs donne une direction et une
orientation à l'action collective ; en outre, son
contenu conditionne la réalisation de l'état
futur désiré par l'organisation. Métais
et Roux-Dufort soulignent d'ailleurs le lien entre
vision et apprentissage organisationnel et indiquent que la
vision est généralement envisagée
comme « un levier fondamental pour le
développement de l'entreprise » car il est un «
facteur
créateur de tension ...créatrice »
qui à son tour constitue un « vecteur du changement
organisationnel » parce que «
susceptible de générer les transformations et l'acquisition
de
nouvelles compétences ».
Les valeurs clés correspondent à la philosophie de
l'organisation c'est-à-dire à ce à quoi elle
croit dans l'exécution de sa mission ; ce sont des
principes fondamentaux qui gouvernent
l'action de l'organisation et ses relations avec les
différents acteurs. Ces valeurs influencent le
choix stratégique de l'organisation. Si par exemple
une des valeurs de l'organisation est
l'implication des bénéficiaires, l'exécution
des activités devra en tenir compte.
Selon Helfer (2006, p. 48), « La
détermination de la mission de l'entreprise consiste à
répondre à la question "pourquoi
existe-t-elle ?" ; c'est sa raison d'être » ; elle doit
être
exprimée sous forme de mandat ; le mandat décrit
les activités de l'organisation, avec qui et
pour qui elle développe ses activités et
comment elle s'y prend d'un point de vue général.
Pour définir la mission d'une organisation, il
convient donc de répondre aux questions
suivantes :
- que fait l'organisation ?
- pour qui travaille-t-elle ?
- pourquoi travaille-t-elle ?
24
23 COSSETTE P., Méthode systématique
d'aide à la formulation de la vision stratégique : Illustration
auprès
d'un propriétaire-dirigeant, Revue de
l'Entrepreneuriat - Vol 2, n°1, 2003, http://asso.nordnet.fr/r-
e/RE0201pc.pdf, p. 5 (consulté le 24 août 2008).
24 METAIS E.et ROUX-DUFORT C., Vision
stratégique et formes d'apprentissage organisationnel : Des
stratégies d'adéquation aux stratégies
d'intention, http://www.strategie-aims.com/montreal/mtais-ro.pdf, p. 1-6
(consulté le 24 août 2008).
22
Au niveau du secteur public, il existe un cadre
légal et règlementaire qui définit la mission
confiée par l'Etat à une organisation publique ;
elle peut ne pas être clairement énoncée mais
être sous-entendue ; il faut alors procéder à
une analyse du cadre institutionnel défini par les
textes réglementaires et législatifs pour la
formuler clairement.
Les objectifs découlent de l'analyse de
l'organisation ; cette analyse permet de déceler les
problèmes qu'elle rencontre et sur lesquels elle
veut agir pour se transformer après avoir
formulé des objectifs ; la notion d'objectif est
fondamentale puisque tout le système de
contrôle est basé sur sa formalisation ; un objectif
est un but précis à atteindre dans un délai
donné. Selon Helfer (2006, p. 50), « un objectif
se définirait par ces quatre composantes :
- un attribut (la dimension) ;
- une échelle de mesure ;
- une norme ;
- un horizon temporel ».
Exemple : Accroître le taux (dimension) de
recouvrement (attribut) de 10% (norme) d'ici
deux ans (horizon temporel)
Helfer (2006, p. 448) définit la stratégie
comme un « ensemble de décisions de long terme
prises par l'entreprise pour atteindre ses objectifs
compte tenu de ses ressources et de ses
environnements » ; la stratégie d'une
organisation est donc les voies et moyens qu'elle
détermine pour atteindre ses objectifs en partant de ses
atouts et de ses difficultés ; ce choix
est fait après une analyse stratégique
approfondie qui en même temps qu'elle permet de
découvrir les problèmes de l'organisation,
révèle ses forces et les faiblesses ainsi que les
menaces qui pèsent sur elle et les
opportunités dont elle peut se saisir. La stratégie tente
de
résoudre les problèmes de l'organisation ; elle
doit donc être en cohérence avec les objectifs
poursuivis par l'organisation.
Le cadre stratégique étant défini, la carte
stratégique peut être élaborée. Selon Fernandez, la
carte stratégique est « un diagramme de
type cause à effet présentant les relations entre les
différents objectifs stratégiques selon
les 4 perspectives (financière, client, processus,
apprentissage et croissance)...Elle permet de
"matérialiser" le passage de l'expression de la
stratégie à la création de valeurs
proprement dite » .
25
25 FERNANDEZ A., Le Balanced Scorecard : les
cartes stratégiques (Strategy map),
http://www.piloter.org/balanced-scorecard/balanced_scorecard-carte_strategique.htm,
(consulté le 23 septembre
2008)
23
Figure n° 8 : Exemple de modèle de carte
stratégique
Axe stratégique
S T N
Objectif stratégique
Objectif stratégique
AXE NT ONNEL I T A VELOPPEME NIS A DE ORG AXE TERNES N I
SSUS PROCE AXE IER FINANC E X A
Objectif stratégique
CLIE
Axe stratégique
Objectif stratégique
Objectif stratégique
Objectif stratégique
Axe stratégique
Objectif stratégique
Objectif stratégique
Objectif stratégique
Objectif stratégique
Axe stratégique
Objectif stratégique
Pour obtenir cette carte stratégique, encore
appelée modèle de performance, il faut partir de
l'objectif que l'organisation a déterminé
à partir de l'analyse de ses problèmes ; de cet
24
objectif, des objectifs stratégiques sont
identifiés suivant chacune des quatre perspectives du
Balanced Scorecard ; pour chacun des objectifs
stratégiques, il est ensuite défini les facteurs
clés de succès appelés variables
d'actions ; ce sont elles qui constituent les déterminants
essentiels de l'atteinte des objectifs stratégiques,
donc de la performance recherchée ; la
relation de cause à effet établie entre
les variables d'action constituent ainsi la carte
stratégique et donc le modèle de performance
de l'organisation. Les variables d'actions
doivent revêtir deux caractéristiques fondamentales
:
- être en nombre limité pour permettre au
gestionnaire de se concentrer sur le petit nombre de
causes qui engendrent les plus d'effets ;
- être maîtrisables car l'action du
gestionnaire doit pouvoir les influencer. La maîtrise des
variables d'actions est conditionnée par la
définition et la mise en oeuvre de plans d'actions
concrètes et cohérentes.
Il convient de souligner que les objectifs
stratégiques concourent à clarifier la stratégie
poursuivie par l'entreprise de façon
équilibrée suivant les quatre perspectives du Balanced
Scorecard et à la communiquer au personnel ; ainsi,
une mobilisation est créée autour de la
stratégie ; ce qui facilite sa mise en oeuvre . Une fois
la carte stratégique élaborée, il est aisé de
mettre en place les indicateurs.
B- La réalisation de la carte
d'identité des indicateurs
La construction de la carte d'identité des indicateurs est
l'étape ultime de la démarche ; cette
phase commence par l'identification des indicateurs les plus
pertinents.
La réflexion sur les objectifs stratégiques
et les variables d'action détermine en amont
l'identification des indicateurs ; les indicateurs du tableau de
bord doivent donc permettre au
gestionnaire de se rendre compte du niveau d'atteinte des
objectifs et du niveau de maîtrise
des variables d'action. Le choix des critères et des
indicateurs pertinents est donc fondamental
pour la fiabilité du tableau de bord. Ellul souligne que,
« le critère est le principe permettant
de porter un jugement, de distinguer ce que l'on cherche
à évaluer. Il doit être explicite, c'est-
à-dire qu'il doit faire apparaître le fait qu'un
processus ou qu'une action soit jugé efficient
ou non. L'indicateur est une information permettant la
mesure périodique d'une réalité par
rapport à un critère prédéfini.
Il est un instrument de mesure »
26
26 ELLUL F., Un tableau de bord : Pourquoi, pour
qui et comment ?, La Lettre du CEDIP - En lignes n° 25 -
avril 2003, p. 3,
http://www.cedip.equipement.gouv.fr/IMG/pdf/fichetechn25_cle73b3ea.pdf,
(consulté le 23
avril 2008)
25
Figure n° 9 : Démarche d'identification des
critères et indicateurs
· objectif stratégique
1
· Variables d'action
2
3
· Choix des critères
· Choix des indicateurs
Fondamentalement, on distingue deux types d'indicateurs :
- les indicateurs de résultat qui portent sur les
objectifs stratégiques définis ; ils mesurent le
résultat final de l'action au travers du
degré de performance atteint ou de réalisation d'un
objectif ; ce sont des indicateurs de performance ;
- les indicateurs de suivi : ils portent sur les
variables d'action ; ce sont des indicateurs
prospectifs qui permettent de mesurer la progression de
l'action, d'anticiper en réagissant
avec des mesures correctrices avant l'aboutissement de
l'action ; ce sont des indicateurs de
pilotage de la performance ;
Un bon indicateur se caractérise par sa pertinence, la
qualité et la précision de sa mesure, sa
faisabilité et sa facilité d'interprétation
et d'utilisation.
Une fois les indicateurs pertinents identifiés, il
convient d'établir la carte d'identité de chacun
d'eux. Pour chaque indicateur, elle comporte les
caractéristiques suivantes :
- sa définition : il s'agit d'indiquer la
compréhension à avoir de l'indicateur ; cette définition
clarifie les éléments entrant en ligne pour saisir
avec précision le sens à donner à l'indicateur ;
- sa source : il s'agit ici d'identifier les sources
d'information et les actions nécessaires pour y
accéder ; il faut se demander si l'information
existe, à quel niveau la trouver, comment
l'obteniir.
- sa formule de calcul : cette formule indique la combinaison
à faire pour obbtenir l'indicateur ;
- sa fréquence de production : il existe une
certaine corrélation entre les niveaux de
responsabilité et les différents horizons de temps
; ainsi, les niveaux opérationnels ont besoin
de disposer de mesures à périodicité plus
fréquente car c'est beaucoup plus à ces niveaux que
se mènent les actions devant agir sur les variables
d'action. Si la mesure est faite à intervalle
de temps trop grand, il ne sera pas possible d'intervenir
à temps pour redresser la barre en cas
de dérive. Il faut connaître la durée
des cycles opérationnels associés à l'indicateur et
le
mesurer à intervalles raisonnables de sorte à
se donner les moyens d'être réactif, sans
consom
mmer pour cela trop de ressources ;
26
- la valeur actuelle : la valeur actuelle est celle qui est
connue au moment de la construction
de l'indicateur ; lorsqu'elle est disponible, elle peut
être insérée dans le tableau de bord pour
constituer une référence.
- la valeur cible : il s'agit ici de la norme que l'organisation
se propose d'atteindre grâce à la
mise en oeuvre de son plan d'actions ; la mesure que
permettra d'obtenir l'indicateur sera
comparée à cette valeur pour déterminer si
l'organisation est performante ou non ou plutôt si
le degré de maîtrise de la variable d'action
est suffisante pour espérer atteindre l'objectif
prédéfini et donc la performance attendue ;
il s'agit donc d'un système de références que
permet de mettre en place les valeurs cibles de tous les
indicateurs.
- le niveau d'alerte : lorsque la mesure obtenue est
comparée à la valeur cible est qu'il est
constaté qu'elle est en deçà de la valeur
cible, il doit être possible de réagir et de mener une
action correctrice ; cette réaction est
déclenchée par le niveau d'alerte. C'est donc une valeur
de l'indicateur qui est jugée susceptible de ne pas
conduire à terme à la performance attendue
et qui nécessite donc un ajustement.
- le responsable de sa production : la personne
chargée de la collecte et du traitement des
données doit être clairement identifiée.
Lorsque les indicateurs sont construits, ils sont mis en forme
pour faciliter leur lecture et leur
interprétation ; différents modes de
présentations existent ; le tableau de bord peut être
présenté sous la forme d'un tableau, d'un graphique
(histogramme ou courbe ...) mais quelque
soit le mode de présentation choisi, il doit être
accompagné :
- d'un titre qui indique ce qu'il représente ;
- d'une légende pour expliquer l'unité ou le
pourcentage dont il s'agit ;
- de l'indication de l'origine des données afin de
permettre à l'utilisateur ou au lecteur de
contrôler les informations utilisées ou
d'approfondir l'analyse.
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CONCLUSION PARTIELLE
Le tableau de bord est un outil de gestion des organisations dont
l'objectif est de fournir des
mesures de la performance dans le cadre du contrôle
de gestion. Son évolution est liée aux
différentes approches qui ont marqué la notion de
performance ; la performance a d'abord été
abordée sous l'angle financier ; mais des
instabilités et des incertitudes sont apparues dans
l'environnement des organisations du fait notamment de
l'extension de la mondialisation et
du développement techno-scientifique ; les besoins
d'anticipation, de mobilisation et d'action
ont conduit à adopter des démarches plus
réactives ; l'aptitude à piloter la performance est
désormais apparue comme un gage de survie
pour les organisations. Le caractère
multidimensionnel de la performance a alors conduit
à l'adoption de nouveaux outils de
mesure dont le Balanced Scorecard ; encore appelé tableau
de bord équilibré, il a l'avantage
de présenter de la performance quatre angles de
mesure en considérant les clients, les
processus internes, le financier et l'apprentissage
organisationnel ; il fournit des indicateurs
financiers et non financiers portant sur les variables
d'action, déterminants de l'atteinte des
objectifs stratégiques et donc de la performance attendue.
Il permet ainsi d'assurer un pilotage
de la performance attendue à partir des actions
correctrices mises en oeuvre au fur et à mesure
que les mesures obtenues de l'application des plans
d'actions définis pour atteindre la
performance attendue alertent sur les insuffisances.
Initialement conçu pour les entreprises concurrentielles,
le Balanced Scorecard a été introduit
au niveau du secteur public en raison des exigences croissantes
de responsabilité et de
compte-rendu qui pèsent sur les organisations
chargées des missions de service public. Ainsi,
la mise en oeuvre du Balanced Scorecard à l'hôpital
public contribue à en améliorer son
management stratégique et sa performance. La conception du
tableau de bord équilibré est
l'aboutissement d'un processus de planification
stratégique et opérationnelle dont il en
constitue le système de mesures d'atteinte des objectifs
stratégiques. La mesure des variables
d'action en fait un système réactif qui permet un
pilotage de la performance. Cette conception
est réalisée suivant une approche top-down qui
assure l'alignement stratégique de toutes les
unités de l'organisation et favorise la mobilisation des
acteurs.
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