La libéralisation des télécomunications au Sénégal: concurrence, innovation et réglementation( Télécharger le fichier original )par cheikh ahmed tidiane Dieng Université de Nice Sophia Antipolis - Master 2 recherche en économie de l'innovation et dynamique industrielle 2004 |
PARTIE 2 : la libéralisation des télécommunications au Sénégal : une bonne politique pour l'économie sénégalaiseChapitre 1: du monopole à la concurrence dans le secteur des télécommunicationsPressé par les institutions internationales, le Sénégal comme tous les autres pays en développement s'est vu imposé un changement de politique nationale avec un désengagement total de l'Etat d'une ou de la totalité de ses parts dans les entreprises où l'Etat détenait 100% du capital. Le désengagement de l'Etat dans le secteur des télécommunications s'est fait par le changement de statut de l'opérateur public national (section 1) et ensuite l'ouverture du marché à la concurrence pour une amélioration des infrastructures dans ce secteur (section 2) Section1 : la fin du monopole d'Etat : la privatisation de la SONATELIl relève de l'idéologie fondamentale du libéralisme croissant à allier moindre coût, équilibre financier et rentabilité pour la sphère publique. On fait de plus en plus référence à l'entreprise privée. La SONATEL va voir son monopole prendre fin53(*) après une privatisation réussie au niveau du capital (paragraphe 1) et ensuite au niveau de la gestion (paragraphe 2). Paragraphe 1 : la privatisation du capitalDe 1960 à 1985, le secteur des télécommunications aura été marqué par le régime du monopole de l'Etat du Sénégal. Pendant cette période, les télécommunications, du fait de leur caractère premier de mission de service public, entraient dans le domaine réservé du secteur public. Toutefois, suivant en cela un processus précoce qu'avaient initié certains pays du Nord, le Sénégal a commencé dès 1980, à entamer une réflexion visant la réforme de ce secteur déjà en forte croissance. La décision était d'autant plus pertinente qu'à cette époque, le secteur des télécommunications au Sénégal était marqué par la vétusté des installations et des équipements et offrait une piètre qualité de service. Les progrès scientifiques et techniques dans les domaines des télécommunications et de l'informatique ont par la suite entraîné des bouleversements qui ont eu pour causes : - la mondialisation de l'économie, - la libéralisation des marchés, - le développement fulgurant des NTIC, - la recherche d'une compétitivité accrue par les entreprises. Dans cette course accélérée, le Sénégal, n'a pas voulu être en reste. Ainsi, en Juin 1983, furent organisées les «Journées Sénégalaises des Télécommunications» dont les conclusions aboutiront, deux ans plus tard, le 23 Juillet 1985, à la création d'une société anonyme de droit sénégalais, la Société Nationale des Télécommunications (SONATEL), née de la fusion de la Société des Télécommunications internationales du Sénégal (TELESENEGAL) et de la Direction des Télécommunications Intérieures de l'Office des Postes et des Télécommunications (OPT). L'Etat, détenant de par la loi le monopole d'établissement des réseaux de télécommunications et de fourniture des services de télécommunications, a concédé, par une convention, ses droits exclusifs à la SONATEL, opérateur historique des télécommunications au Sénégal. Cette phase est marquée par la volonté de l'Etat sénégalais d'ouvrir le secteur à la privatisation et à la concurrence. Elle a été réglementée par la loi 96-03 du 22 février 1996 portant code des télécommunications. En janvier 1994, le Franc CFA est dévalué ; ce changement de parité va tenir compte de l'option d'ajustement global, de renforcement de la compétitivité du Sénégal en vue d'une participation réussie à l'intégration régionale et des exigences de la mondialisation de l'économie. En 1997, l'Etat concède à la SONATEL, le droit exclusif de fourniture de services de téléphonie fixe, de liaisons spécialisées, de communication de données et d'accès sur l'international jusqu'en juillet 2004. Ainsi, le décret n° 97- 714 du 1ç juillet 1997 autorisant cession d'action de la Sonatel qui a permis au Sénégal d'ouvrir le capital et de lancer un appel d'offre public de vente qui s'est soldé en juillet 1997 par la privatisation de l'opérateur national prenant le statut de la Société Anonyme à capitaux privés majoritaires. C'est ainsi que France Câble Radio (FCR) filiale 100% de France Télécom entra dans le capital de la société54(*) . Les principes de la gestion publique se trouvent rapidement écartés et la conformation par une autonomie financière et l'entrée en bourse de l'action de l'entreprise en demeure les preuves. 1) une autonomie financière Le capital de l'entreprise ayant évolué depuis sa création est passé de 3,500 milliards de franc CFA à 24 milliards en 1991 et à 50 milliards en 1993 jusqu'à moment de sa vente. Le processus de privatisation à été supervisé par la « commission de pilotage et de privatisation de la SONATEL» avec des représentants de plusieurs ministère, l'association des consommateurs, de la société civile et de l'entreprise.
L'assemblée nationale vota l'acte en décidant de répartir le capital comme suit : · Vente d'un bloc stratégique de 33,33% à France Câble Radio pour 65 milliards de franc CFA. · Vente d'actions aux employés de la SONATEL · Vente d'action au public de 17,66% ( au public de la zone de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine :UEMOA) · Le gouvernement détient 34ù et les 5% restant reviendront à un opérateur africain à déterminer. L'évaluation a été effectuée par une banque française en l'occurrence le CCF (crédit commercial France) et France Télécom était en compétition avec un consortium dominé par des suisses de Télia incluant des hommes d'affaires sénégalais en Grande Bretagne Aujourd'hui le capital de la Sonatel se répartie ainsi : Répartition du Capital de la Sonatel · France Télécom : 42,33% · Etat du Sénégal : 27,67% · Institutionnelle et grand public : 20% · Salariés et anciens salariés : 10% Le résultat le plus évident est d'avoir substitué un monopole public national à un monopole public étranger détenu majoritairement par France Télécom et donc par l'Etat français. Nous pouvons nous poser la question au Sénégal de savoir le vrai statut de l'opérateur sénégalais SONATEL du fait que les capitaux privés dans la réalité ne sont pas majoritaires puisque les gouvernements français et sénégalais détiennent aujourd'hui plus de 66% de son capital. Aujourd'hui encore, on peut cogiter sur la nécessité de l'alliance à un partenaire stratégique et sur le choix de France Télécom avec les problèmes que ce dernier connaît. Ne risque t- elle pas d'affecter la santé financière et la crédibilité de la SONATEL ? 2) La cotation à la BRVM55(*) Selon la théorie économique, l'épargne est le moteur de la croissance économique parce qu'elle permet aux agents économiques à déficit de financement et de se satisfaire par l'intermédiaire du système bancaire. Un des rôles du système financier est de satisfaire par la demande d'investissement exprimée par les agents économiques sur les marchés financiers. · Le marché financier en Afrique subsaharien Celui-ci, constitué d'institutions financières bancaires et non bancaires, joue un rôle primordial dans la collecte de l'épargne, facteur de développement économique. La libéralisation financière dans les pays en développement avec l'application des théories de Mac Kinenn et Shaw ont montré leur limite en Afrique subsaharienne durant les années 80, parce qu'il existait une source d'instabilité financière. Les politiques d'ajustement structurels ayant permis la maîtrise des déficits publics et de l'inflation ont connu à l'avènement d'une stabilité macro économique au lendemain de la dévaluation de 50% du franc CFA en 1994. Le système bancaire par épargne, la finance indirecte en général étant incapable de satisfaire la demande d'investissements, conduit le conseil d'administration de l'entreprise à coter le titre en bourse dans le but de financer les projets de la SONATEL, donc par la finance directe. · Le titre en bourse L'entrée en bourse de la SONATEL date d'après l'ouverture de son capital et plus précisément en octobre 1998 et a été la preuve d'une privatisation de la gestion de ses activités. Dés son entrée en bourse, le titre de la SONATEL à 22000 FCFA le titre, a complètement dopé le marché (+ 20% d'augmentation) et a permis une capitalisation du marché dépassant les 1000 milliards de franc CFA. Il s'affiche aujourd'hui parmi les cinq titres les plus actifs des différentes séances de la bourse. Au 6 mars 2002, sa capitalisation boursière globale FCFA 918 421 997 745, représentant 29% de la capitalisation boursière totale, elle est la plus liquide et sa valeur a connu une augmentation de l'ordre de 21% et un pic de FCFA 31000 en Avril 1999. Ces résultats en progression de 187% (de 1996 à 1998) ont permis une politique de dividende généreuse et un investissement massif dynamique et continu permettent d'envisager une croissance à long terme et donc une plus value de l'action. La SONATEL est la seule compagnie africaine de télécommunication cotée à la BRVM et sa capitalisation boursière est la plus importante de cette enceinte. La société est aujourd'hui à juste titre comme une entreprise performante et les sénégalais qui en général n'investissent jamais dans l'actionnariat en bourse ont bien acheté et en masse le titre au moment de sa vente56(*). * 53 « Télécoms la fin du monopole historique au Sénégal » jeune Afrique l'intelligent du 9 au 15 janvier 2005 n° 2295 page 78 * 54 Les télécommunications au Sénégal, PEE (poste d'expansion économique de Dakar) christophe Brun, Mai 2001 * 55 la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières de L'UEMOA à Abidjan. * 56 Etudes : les valeurs sénégalaises en bourse de CGF BOURSE, la société de cotation boursière qui gère l'action de la Sonatel à la BRVM. |
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