Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA( Télécharger le fichier original )par Francis NGUEGUIM LEKEDJI Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007 |
§ II- LA COMPETENCE DE LA CCJA POUR STATUER SUR LE POURVOI EN CASSATION
Cette compétence est fixée par l'AU.A qui dispose que : « la décision du juge compétent dans l'Etat-partie n'est susceptible que de pourvoi en cassation devant la cour commune de justice et d'arbitrage »210(*). Il n'y a pas lieu de spéculer sur la compétence territoriale étant donné que la CCJA est unique, installée à Abidjan211(*), et qu'elle est compétente sur l'ensemble des seize pays membres de l'OHADA. Quant à la compétence d'attribution, la CCJA assure « l'interprétation et l'application commune (...) des actes uniformes »212(*). En plus, en « cas de cassation, elle évoque et statue sur le fond »213(*). Ces dispositions nous permettent d'apprécier l'étendue des compétences de la CCJA. Par conséquent, toute juridiction suprême nationale saisie d'une question relative à l'application de l'AU.A devra se déclarer incompétente et renvoyer les parties à mieux se pourvoir, c'est-à-dire à saisir la CCJA214(*). Sauf s'il s'agit d'une question pénale. La CCJA est saisi par voie de recours en cassation215(*). Autrement dit, son rôle est d'apprécier, en dernier ressort, s'il y a eu violation de la loi, excès de pouvoir, incompétence, inobservation des formes ou manque de base légale. L'application de ces motifs à la sentence correspond aux diverses causes d'annulation de la sentence fixées par l'article 26 AU.A. La CCJA devra donc statuer sur le pourvoi et, soit rejeter le recours et la sentence acquiert de plein droit validité216(*) et autorité définitive de chose jugée en attendant, si nécessaire, l'apposition de l'exequatur ; soit annuler la sentence, et par conséquent l'exequatur s'il avait été préalablement accordé. En cas d'annulation, la CCJA doit-elle vraiment évoquer et statuer comme le dispose l'article 14 alinéa 5 du Traité ? La question peut prêter à divergences dans la mesure où l'AU.A dispose pour sa part qu'« en cas d'annulation de la sentence arbitrale, il appartient à la partie la plus diligente d'engager, si elle le souhaite, une nouvelle procédure arbitrale, conformément au présent acte uniforme »217(*). A partir de là, et en application de la théorie de la hiérarchie des normes juridiques, on peut dire que le Traité a une prééminence sur l'acte uniforme, et devrait donc s'appliquer. Mais un rapprochement avec le Règlement d'arbitrage de la CCJA nous permet de constater que la possibilité d'évoquer et statuer au fond par la Cour n'est admise qu'en cas de demande expresse des parties, sinon la procédure est reprise à la requête de la partie la plus diligente218(*). Autrement dit, on doit considérer que l'AU.A est, tout comme le Règlement d'arbitrage CCJA, un acte spécial qui déroge à l'acte général qu'est le Traité. Par conséquent, en cas d'annulation, la CCJA ne devrait pas, même à la demande des parties, évoquer puisque cette prérogative ne lui est pas expressément attribuée par l'AU.A219(*). * 210Article25 alinéa 3 AU.A * 211Article 19 Règlement de procédure de la CCJA. * 212Article 14 alinéa 1er Traité OHADA. * 213Article 14 alinéa 5 du Traité. * 214V. Cour suprême du Cameroun, arrêt no 189/CC du 15 mai 2003, aff. Ansary Trading Company s/c Abba Lamine c/ SCB-CL, in www.ohada.com/Ohadata J-05-23. * 215Article 14 al. 3 du Traité OHADA. * 216Article 33 AU.A. * 217Article 29 AU.A. * 218Article 29.5 règlement d'arbitrage CCJA. * 219Contrairement au règlement d'arbitrage de la CCJA. |
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