WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le parquet général de Rouen sous la monarchie de Juillet (1830-1848)

( Télécharger le fichier original )
par Julien Vinuesa
Université de Rouen - Maîtrise d'histoire 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2-2-2 : Les démonstrations d'attachement à l'Église et aux nouveaux cultes.

A-L'Église : cadre privilégié pour les solennités religieuses et civiles.

La religion catholique, religion « professée par la majorité des Français » comme le mentionne l'article 6 de la Charte de 1830199(*), est celle également de la majorité des magistrats au XIXe siècle200(*). Le palais de justice, souvent comparé à un sanctuaire inviolable (voir infra), n'est pourtant pas le seul lieu de culte des magistrats : la cathédrale de Rouen apparaît comme le lieu de toutes les cérémonies, sauf peut-être celle de rentrée au mois de novembre. En effet, rien ne laisse penser que la messe du Saint-Esprit, remise au goût du jour par la Restauration201(*) et donnée à la cathédrale, inaugure toujours, à partir de 1830, l'audience solennelle de rentrée de la Cour de Rouen. Malgré cela, les magistrats du parquet et de la Cour participent à bien d'autres messes dites « rouges »202(*), surnom donné à cause de la robe rouge, véritable tenue de cérémonie, que les magistrats portent lors des grandes solennités. Le parquet général, comme les autres membres de la Cour, se déplacent, du palais de justice à la cathédrale, souvent à pied mais surtout en corps. C'est d'ailleurs là une des pierres d'achoppement qui opposent, en 1833, le procureur général Moyne et son procureur du Roi de Rouen Aroux, ce dernier voulant que l'on convoque aux diverses cérémonies non des corps mais des citoyens (voir infra). Paradoxalement libres de leurs opinions religieuses, les parquetiers, catholiques ou non, pratiquants ou non, sont officiellement sollicités au sein du corps qu'ils représentent, pour participer à des rituels imposés.

Si le procureur Aroux craint la réapparition d'une religion d'État, il est certain que s'organise très rapidement un « culte d'État » qui honore Louis-Philippe et les Trois Glorieuses : le 1er mai, jour de la saint Philippe, est l'occasion d'une fête nationale dédiée à Louis-Philippe. Le 1er mai 1831, le procureur général Thil, les avocats généraux Boucly et Gesbert ainsi que le substitut de Tourville, se rendent à la cathédrale pour entendre « une messe solennelle en musique [...] célébrée à l'occasion de la fête de Sa Majesté et à laquelle a assisté Monseigneur le cardinal Prince de Croÿ, archevêque de Rouen »203(*). Jean-Pierre Chaline prend l'exemple de cette fête pour illustrer le retour, de la part de la magistrature, d'un certain bigotisme intéressé :

« Très vite, opportunisme politique et souci de carrière ramenèrent au pied des autels fonctionnaires et magistrats, libéraux nommés de la veille, lors des messes de la Saint Philippe. «Tel qui ne croit pas un mot des dogmes catholiques n'avait pas moins endossé la robe rouge ou l'habit brodé pour venir faire acte de catholicisme», enrage le Journal de Rouen [numéro des 1er et 2 mai 1831] »204(*).

Le 16 juillet 1831, le procureur général est chargé par le garde des Sceaux d'instituer une nouvelle fête nationale et pour cela de requérir que les audiences et travaux judiciaires soient suspendus pendant les 27, 28 et 29 juillet, « jours où des fêtes seront célébrées, en mémoire des trois journées de 1830 »205(*). Le 27 juillet 1831, le parquet général assiste à un « service funèbre pour le repos de l'âme des citoyens morts dans le sein de l'Église les 27, 28 et 29 juillet 1830 »206(*). Sortant de la cathédrale, les magistrats participent à des célébrations plus civiles cette fois : ils se rendent à l'hôtel de ville où sur la place est élevé « un obélisque funéraire élevé à la mémoire des citoyens morts pour la patrie » et voient défiler la Garde nationale, accompagnée de la troupe de ligne207(*).

Les grands moments de la vie nationale sont très souvent ponctués par des Te Deum à la cathédrale pour les victimes d'attentat208(*) ou les naissances royales comme celle du comte de Paris209(*), ainsi que des services funèbres organisés pour, par exemple, la mort du duc d'Orléans210(*) ou de la soeur du roi, Mme Adélaïde211(*), etc. Pour les obsèques plus courantes des présidents ou conseillers de la Cour, le parquet général envoie généralement un ou plusieurs de ses représentants, mais ne se déplace jamais en corps. Pour les parquetiers, l'assistance à ces cérémonies religieuses ou nationales fait partie intégrante du protocole judiciaire et vouloir se soustraire à ces actes publics (plus qu'« actes de catholicité ») constitue une faute caractérisée, susceptible d'avoir des incidences majeures sur la carrière du magistrat rebelle (voir infra l'affaire Aroux et Tranchard). Quant au retour des cendres de Napoléon en 1840, la manifestation semble plus prompte à établir un consensus national indiscutable.

* 199 Cf. Jacques Godechot, op. cit., p. 247.

* 200 Cf. Jean-Louis Debré, op. cit., p. 117.

* 201 Jean-Pierre Royer, Magistrats en majesté, op. cit., p.45.

* 202 Ibid.

* 203 Délibération du 1er mai 1831, relative à la fête du roi Louis-Philippe, 2U 103.

* 204 Jean-Pierre Chaline, Les bourgeois de Rouen, op. cit., p. 267.

* 205 Délibération du 16 juillet 1831, relative à l'instauration des 27, 28 et 29 juillet, journées de fêtes nationales, 2U 103.

* 206 Délibération du 27 juillet 1831, relative au service funèbre pour les citoyens morts les 27, 28 et 29 juillet 1830, 2U 103.

* 207 Ibid.

* 208 Délibération du 4 août 1835 pour le service funèbre des victimes de l'attentat du 28 juillet 1835, 2U 103.

* 209 Délibération du 26 août 1838 concernant le Te Deum, à l'occasion de la naissance de S.A.R., le comte de Paris, 2U 103.

* 210 Délibération du 25 juillet 1842 concernant le service funèbre pour le repos de l'âme du duc d'Orléans, fils aîné du roi, décédé le 13 juillet 1842, 2U 104.

* 211 Délibération du 5 janvier 1848 relative au service funèbre pour le repos de l'âme de Mme Adélaide, soeur du roi, morte le 30 octobre 1847, 2U 104.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway