Les garanties d'impartialité du juge dans le code de procédure pénale( Télécharger le fichier original )par Christian Engo Assoumou Université Yaoundé II - Soa - D E A 2008 |
II- Les personnes concernéesContrairement au renvoi pour cause de suspicion légitime qui peut être demandé par toutes les parties au procès, seul le Procureur de la République est compétent pour introduire une requête aux fins de renvoi de l'affaire d'une juridiction à une autre pour cause de sûreté publique. Ce choix du législateur n'est pas fantaisiste. En effet, dans un procès, c'est le Ministère Public qui représente les intérêts de la société. Par conséquent si certains événements sont de nature à troubler non seulement l'ordre public mais aussi à empêcher que le tribunal se prononce de façon indépendante et impartiale, il est normal que seul le Procureur de la République ou le Procureur général selon les cas soit l'autorité compétente pour, non seulement constater que l'ordre public est menacé mais aussi de demander le renvoi. Ainsi donc, après avoir introduit la requête auprès de la Cour Suprême, la haute juridiction n'accorde pas le renvoi, il y a lieu de demander si le Ministère Public ne dispose pas d'autres moyens ? En effet, selon l'art 64 CPP, le Procureur général près la Cour d'Appel peut, sur autorisation de la hiérarchie arrêter les poursuites pénales. Au total, contrairement à l'ancienne procédure qui confiait la compétence au Procureur général près la Cour Suprême pour demander le renvoi pour cause de sûreté publique, (art 542 CIC) l'al 2 de l'article 604 CPP dispose que seul "le Ministère Public peut invoquer les nécessités d'ordre public". Cependant, la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime obéit aux mêmes règles que celle pour cause de sûreté publique à la seule différence que l'autorité compétente n'est plus le seul Ministère Public. B- Une compétence partagée dans le renvoi pour cause de suspicion légitimeAprès une énumération succincte de la procédure qui est la même qu'en cas de renvoi pour cause de sûreté publique (I) nous allons présenter les personnes qui ont le droit d'exercer cette procédure particulière ; (II) c'est cet élément (exercice de renvoi) qui, au-delà des motifs permet de distinguer les deux procédures I- La procédure de renvoi pour cause de suspicion légitime43* On sait que, pour envisager le renvoi, il faut au préalable que la juridiction soit saisie. En plus, il ne faut pas que l'on ait engagé les débats au fond ; la requête aux fin de renvoi doit donc être introduite in limine litis. Enfin, il faut un motif sérieux de craindre que les magistrats d'une juridiction ne soient pas en mesure de statuer en toute impartialité161(*). Au-delà de ces éléments relatifs au fond, la procédure est simple : la requête aux fins de renvoi pour cause de suspicion légitime doit être introduite au greffe de la Cour Suprême par la partie qui suspecte la partialité de la juridiction. Par la suite, la requête doit être signifiée à toutes les parties intéressées afin qu'elles puissent déposer un mémoire au greffe de la Cour Suprême162(*). Le législateur ne fait pas mention des conditions relatives au délai dont dispose la haute juridiction pour se prononcer sur le renvoi. L'on peut donc penser que la Cour Suprême devra le faire dans les brefs délais afin d'éviter des lenteurs judiciaires. En France par exemple, la requête doit être signifiée à toutes les parties dans un délai de dix jours pour leur permettre de déposer leur mémoire au greffe de la cour de cassation. La requête aux fins de renvoi d'une juridiction à une autre n'a pas d'effet suspensif. Ce qui suppose que la juridiction saisie va continuer le procès. Mais logiquement, la Cour Suprême doit, par le truchement de son président enjoindre par ordonnance au président de la juridiction saisie de suspendre en l'état l'examen de la procédure afin de permettre que la requête introduite auprès de la Cour Suprême puisse aboutir. (art 604 al3 in fine CPP) Il faut enfin noter que le renvoi ne sera pas accueilli si c'est le requérant qui a volontairement provoqué la situation qui empêche au tribunal de juger de façon indépendante et impartiale. Bien que n'étant pas prévue dans le code de procédure pénale, l'art 543 CIC prévoit que "toute partie intéressée qui aura provoqué volontairement (...) ne sera pas reçue à demander le renvoi en raison des circonstances survenues...". Une fois terminé, l'examen de la requête en chambre de conseil, la Cour Suprême peut adopter deux attitudes, soit ordonner le renvoi de l'affaire devant une autre juridiction de même nature ou rejeter la demande et dans ce cas, la juridiction précédemment saisie continue l'examen de l'affaire. La Cour Suprême peut aussi décider de modifier la composition du tribunal. Il s'agit dans ce cas d'un "renvoi statique" (voir infra). * 161 - HELIE (F), Traité de l'instruction criminelle, 2e ed, Paris Puf, 1993 cité par Damien ROETS P222 * 162 - Art 605 CPP "toute décision statuant sur la demande de renvoi est notifiée à la juridiction concernée et aux parties à la diligence du greffier en chef de la Cour Suprême" |
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