Les garanties d'impartialité du juge dans le code de procédure pénale( Télécharger le fichier original )par Christian Engo Assoumou Université Yaoundé II - Soa - D E A 2008 |
§2 : Le principe du double degré de juridiction29* Si aujourd'hui, l'appel et le pouvoir en cassation sont des synonymes du principe du double degré de juridiction, il convient de se demander si les juges ayant rendu la décision objet de l'appel ou du pouvoir en cassation peuvent valablement statuer dans la même affaire à une instance supérieure. Après avoir montré que la vocation du principe du double degré de juridiction fait obstacle aux juges d'instance de connaître à nouveau de l'affaire à travers l'étude de la consécration du principe (A), nous analyserons les différentes conséquences de ce principe qui, à plusieurs égards peut être regardé comme contribuant à l'élaboration de la décision impartiale (B). A- La consécration du principeLe principe du double degré de juridiction existe lorsque après un premier jugement, un appel peut être interjeté. Ce principe trouve son explication dans la hiérarchie judiciaire. Selon des auteurs116(*) "toute oeuvre humaine peut être entachée d'insuffisances ou d'erreurs, elle peut être injuste ; il est donc nécessaire (...) qu'elle soit examinée une seconde fois par d'autres juges afin que la décision mauvaise rendue par les premiers juges puisse être reformée...". Il se dégage donc que le double degré de juridiction se réalise sous la forme d'un droit subjectif procédural qui est d'ailleurs consacré par les conventions internationales ratifiées par le Cameroun. C'est ainsi que l'art 14-5 du pacte international relatif aux droits civil et politiques (PIDCP) de 1966 consacre implicitement ce droit. En substance, toute personne qui serait déclarée coupable d'une infraction par un tribunal a le droit de saisir une juridiction supérieure117(*). Compte tenu de la fonction et de la nature du double degré de juridiction, il est logique que l'affaire soit examinée par de nouveaux juges qui, par ailleurs sont plus expérimentés que les premiers et de ce fait ont une liberté d'esprit vis-à-vis du dossier à traiter. L'art 22 de l'ordonnance n°72/4 du 26 Août 1972 a explicitement consacré le principe du double degré de juridiction en habilitant la Cour d'Appel à statuer sur les appels interjetés contre les décisions rendues par les juridictions inférieures. La loi, en instaurant le double degré de juridictions et en confiant l'examen des recours aux juges d'un rang hiérarchiquement supérieur a voulu assurer une garantie efficace de la justice. Ce recours serait illusoire si le même magistrat pouvait dans la même affaire, remplir son office devant deux degrés de juridiction. Il s'en suit que la composition de la juridiction de second degré doit être entièrement différente de celle de la juridiction inférieure118(*). Sans consacrer explicitement l'interdiction de l'exercice successif des fonctions de justice répressive, le code de procédure pénale traite séparément le jugement dans le livre III et des voies de recours notamment l'appel (art 436-471 CPP) et le pourvoi en cassation (art 472-534 CPP) de façon séparée. Si après une promotion, un magistrat qui a rendu une décision en instance est appelé à la connaître à nouveau au second degré, il n'aura pas un net recul, une juste distance pour refaire la décision prise précédemment. Dans une telle situation, il doit se déporter c'est-à-dire s'auto récuser ou à défaut, le législateur offre dans une telle hypothèse au justiciable la possibilité de récuser un tel juge,"Tout magistrat du siège peut être récusé (...) s'il a déjà connu de la procédure » (art 591 (c) cpp). Selon un auteur le double degré de juridiction permet d'écarter de la juridiction du second degré l'auteur de la décision au premier degré. Par conséquent, l'incompatibilité de fonction est attachée au principe du double degré de juridiction119(*). Ainsi donc, bien que n'étant pas explicitement consacré par lettre du texte, l'esprit du code de procédure pénale interdit tout cumul afin d'assurer une bonne organisation de la justice ; ce qui produit nécessairement des conséquences indéniables * 116 - SOLUS (H) et PERROT (R), Doit judiciaire privé,introduction aux notions fondamentales, organisation judiciaire. Cité par ROETS, P174 * 117 - ROETS (D), Impartialité et justice pénale, Paris, ed cujas. 1997 P175 * 118 - cet article reste valable puisqu'il n'est contraire ni au code de procédure pénale ni à la loi du 29 décembre 2006 sur l'organisation judiciaire. Cf Rapport du ministère de la justice sur les droits de l'homme au Cameroun en 2005 P141 * 119 - JOSSERAND (S), L'impartialité du magistrat en procédure pénale, Paris LGDJ 1998 P161 |
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