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L'obligation de loyaute dans le contrat de vente internationale de marchandises

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par Ruben Victor Mbog
Université via domitia Perpignan - master professionnel en droit des affaires 2007
  

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Chapitre 1er : LA PREPARATION A LA RENCONTRE DES VOLONTES

La phase précontractuelle, au delà de la quasi-absence de règlementation est également caractérisée par son aspect informel. Le contrat international ne se conclut normalement pas d'un seul coup. Les parties sont la plupart du temps amenées à entretenir des pourparlers dont il importe de définir la nature juridique (PI) afin d'envisager l'aspect formel de la préparation de la rencontre des volontés (P2).

S1. La phase précontractuelle : la préparation informelle

PI LA LOYAUTE DES POURPARLERS

Pour que les pourparlers remplissent pleinement leur rôle dans la formation du contrat, l'exigence, la seule d'ailleurs est celle de la loyauté dans les discussions. Rompre les pourparlers n'est donc pas en soi constitutif d'une faute, à condition que cette rupture ait été effectuée loyalement. Cette période qui sépare la rencontre des deux parties de la conclusion du contrat est plus ou moins longue suivant le type de marchandises dont la vente est envisagée.

Cette étude de la période précontractuelle des pourparlers n'est pas très récente. C'est à la fin du siècle dernier que sont apparues les premières analyses qui la concernent. En effet, dans les nombreux textes à vocation unificatrice, applicables aux ventes internationales de marchandises, pas plus que les lois nationales, consacrent des dispositions à l'étude des négociations préliminaires à la formation des contrats.

Pour bien comprendre les mécanismes de protection des parties en phase précontractuelle il faut se référer à la doctrine et à la jurisprudence, à l'aune desquelles nous allons étudier les pourparlers dans le processus contractuel de même que les différentes phases dans la formation du contrat.

Le principe général en la matière voudrait que lors de la négociation, chacune des parties se doit de se comporter loyalement. En effet, une partie ne doit pas tromper l'autre elle doit selon amandine assaillit : " Adopter une attitude cohérente avec elle-même afin que l'autre pense adopter une attitude".12(*)

Le devoir de loyauté dans les pourparlers recouvre plusieurs aspects, il impose tout d'abord aux parties une obligation de bonne foi : article 1134 du code civil français qui a sans doute inspiré les rédacteurs d'unidroit et de la convention de vienne l'affirme avec force " Les conventions doivent être exécutées de bonne foi".

Cette obligation, a progressivement été étendue par la jurisprudence qui a instauré un véritable devoir de loyauté lequel s'impose aux parties pendant la conduite de leurs négociations jusqu'à la rupture de celles-ci le cas échéant.

Nous examinerons donc la nature juridique des pourparlers dans une mise en parallèle avec l'obligation de loyauté qui les caractérise (A) avant d'en envisager les sanctions encas de rupture des pourparlers (B).

A - Les pourparlers dans le processus contractuel

Les pourparlers sont comme nous l'avons souligné plus haut, caractérisés par leur

Caractère informel.

Ce caractère découle d'une quasi-absence de règlementation ce qui les a également dépouillé de tout caractère coercitif. Mais est-ce pour autant que les futurs contractants peuvent se livrer à tous les abus ? Pour répondre à cette question il importe de déterminer le contenu de l'obligation de loyauté contractuelle (1) et de la distinguer des notions voisines (2).

Le déclin du formalisme, les exigences de la vie économique contemporaine, quant à l'importance, la complexité des biens objet d'échanges et des mécanismes de leur réalisation, de même que le développement de la publicité et des moyens de communication, ont pour conséquences que la conclusion d'un contrat nécessite une lente progression vers l'accord définitif (Hani Barcha les obligations naissant des pourparlers). Ces différentes phases de la formation d'un contrat comprennent de façon chronologique l'invitation à entrer en pourparlers (a) et les pourparlers proprement dits (b).

1) Les différentes phases dans la formation du contrat

Afin de délimiter l'objet de notre étude, il convient d'entrée de jeu de préciser que le problème de la loyauté des pourparlers ne se pose que dans les contrats qui nécessitent une certaine élaboration. Il est en effet assez aisé de remarquer que le contrat de vente tel que nous le passons tous les jours est plutôt à exécution spontanée, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il s'agit d'une vente internationale. Compte tenu des enjeux économiques, financiers en présence, et des diversités liées aux systèmes juridiques spécifiques des parties à l'opération.

La doctrine reste assez divisée sur la question de la détermination des différentes phases de la formation d'un contrat. Certains à l'instar de Salleiles(la responsabilité précontractuelle rtdc 1907 p ,697) proposent de distinguer trois phases : les négociations préliminaires, l'élaboration de l'offre, et l'émission de l'offre.

Cette première période concerne uniquement la recherche d'un accord de volonté sur les éléments essentiels du contrat. La deuxième est destinée à formuler l'offre de façon définitive. Il est nécessaire de bien marquer quelle est la position de cette seconde phase dans le processus de formation du contrat. Lorsqu'à la suite des transactions, un accord intervient sur les éléments essentiels du contrat, les bases sont établies et chacune des parties prend du recul et réfléchit tout en cherchant selon Mr Hani Barcha (précité) : « quels sont les avantages et inconvénients du contrat, et, ce n'est qu'après cette réflexion qu'elle décidera de l'attitude qu'elle doit adopter. » En troisième phase, la partie qui a établi un projet définitif, l'offre à l'autre il ne manque plus que l'acceptation de cette dernière pour que le contrat soit conclu. Pour des raisons liées à une meilleure lisibilité de notre étude nous avons adopté une subdivision de l'étude de la loyauté des parties dans la phase précontractuelle qui revêt deux aspects :

- un aspect informel à travers les pourparlers qui n'ont pas faut-il le rappeler, fait l'objet d'une réglementation particulière ;

- et un aspect formel au cours duquel l'aspect informel est délaissé au profit d'une contractualisation de plus en plus marquée, et au cours de laquelle nous allons étudier les notions de l'offre et de l'acceptation.

Car faut-il le rappeler l'offre peut valablement être faite verbalement a un contrat mais, cette pratique ne saurait de toute évidence s'appliquer à la pratique commerciale internationale.

Enfin, il convient de remarquer que la période précontractuelle correspond à une modification progressive de la volonté de chacune des parties. Chacune de ces phases correspond respectivement à l'invitation à entrer en pourparlers et aux pourparlers proprement dits.

a) 1ère phase : l'invitation à entrer en pourparlers

Cette phase est marquée comme d'ailleurs tous les stades du contrat par le principe de la liberté contractuelle. Car la partie invitée à entrer en pourparlers par une autre a l'entière liberté de refuser d'emblée. Nous n'étudierons pas cet aspect qui ferme la porte à toute négociation ultérieure, pour supposer qu'il y a entrée en pourparlers. A travers cette prise de contact les parties apprennent à se connaître, et échangent des informations quant à l'opération projetée, informations qui leur permettront de contracter en pleine connaissance de cause, ou de ne pas le faire pour telle ou telle raisons n'ayant pas permis à la partie qui ne désire pas contracter de se forger une opinion assez claire sur le futur contrat et surtout le bénéfice ou les avantages escomptés.

b) 2ème phase : les pourparlers proprement dits

Le terme est assez clair en lui-même, il désigne l'ensemble des discussions qui vont conduire les parties vers la conclusion du contrat. Ils constituent une étape importante à la validité juridique du futur contrat, puisqu'ils ont vocation à remplir certaines obligations du vendeur (renseignement, information, conseil...) aussi, ils concourent à former le consentement de l'acheteur. Le problème que soulèvent les pourparlers est l'absence de leur caractère contractuel et il est important à ce stade de savoir, en cas de défaillance, ou de faute d'un des partenaires, s'ils pourront générer un mécanisme contractuel de sanction ou de réparation

Nous savons qu'au cours des pourparlers, les parties ne sont pas encore des cocontractants, elles ne sont pas non plus l'une vis à vis de l'autre, de simples tiers. Nous définirons leur statut juridique relativement à cette période, de même que les obligations respectives auxquelles elles sont astreintes.

Concrètement en phase de pourparlers, il est à noter qu'aucune législation tant nationale qu'internationale ne règlemente de façon précise cette phase somme toute assez importante de la vie du contrat. Et qui en conditionne fortement la future existence.

3. Etendue de l'obligation de loyauté au contrat

La convention de vienne sur le commerce international des marchandises, à l'instar du code civil français article 1134 Al3 sus-cité, évoque de façon sommaire à son article 7 contenu dans le chapitre consacre aux dispositions générales Al1 "pour l'interprétation de la présente convention il sera tenu compte de son caractère international et de la nécessité de promouvoir l'uniformité de son application, ainsi que d'assurer le respect de la bonne foi dans le commerce international".

Par ailleurs, l'exigence d'une négociation loyale est également posée par les principes d'unidroit13(*) qui à l'instar des autres lois européennes d'unification exigent une obligation de loyauté entre cocontractants .Sous d'autres cieux et plus précisément en Afrique subsaharienne l'uniformisation du droit des affaires a conduit certains pays a adopter le texte OHADA(organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires crée par le traité de saint louis du 19 octobre 1993 a été signé par 16 Etats africains dont 14 relèvent de la zone franc)aussi l'acte uniforme portant droit des contrats a repris judicieusement les principes de bonne foi et de loyauté inspirés par les principes d'unidroit, pour fonder la naissance et surtout l'exécution des contrats. En effet l'article 1/6 du texte sus-évoqué dispose que «  les parties sont tenues de se conformer aux exigences de bonne foi, elles ne peuvent exclure cette obligation ni en limiter la portée »

Lorsque la phase précontractuelle est suivie d'un accord menant à la conclusion du contrat, elle influe sur la formation du contrat pour la détermination de l'existence d'un accord entre les parties et dans le contrôle du consentement, sur l'exécution du contrat, et en particulier de son interprétation.

On se trouve donc de plus en plus face à un dilemme : doit-on faire prévaloir la liberté contractuelle ou la sécurité juridique ? De nombreux indices donnent à penser que la contractualisation est un fait dans la phase de formation du contrat.

En effet, cette dernière est de plus en plus encadrée, mais moins réglementée. Le contrat tend à empiéter sur la phase précontractuelle. Le but de cet empiètement est de permettre d'assurer une meilleure sécurité des négociations.

B - Le lien de parenté consacré entre l'obligation de bonne foi et le devoir de loyauté

La majorité des textes internationaux préconisent dans l'optique d'une recherche de la sécurité juridique, notamment quant à la garantie d'exécution du créancier à l'égard du débiteur de l'obligation (le vendeur) une certaine « éthique » des relations contractuelles, afin de trouver un équilibre entre des intérêts, de préoccupations souvent aux antipodes.

Cette recherche d'équilibre peut passer par le développement de la législation, cependant le législateur n'est pas le seul intervenant possible au contrat de vente. Il y a aussi le juge, nous verrons que le rôle de ce dernier n'est pas des moindres aussi bien dans l'interprétation des contrats, qu'au moment de l'attribution des dommage-intérêts en cas de rupture jugée abusive des pourparlers, en phase précontractuelle.

Afin de mieux cerner l'objectif similaire que poursuivent les deux notions de loyauté et de bonne foi dans la tentative par le législateur d'insuffler « de la justice et de la sécurité » à tout rapport contractuel. Dès lors, on comprend que l'étude d'une notion « éthico-juridique » comme la loyauté contractuelle dans la vente internationale puisse susciter autant d'intérêt.

Nous analyserons tout d'abord la parenté entre la loyauté et la bonne foi que le législateur semble utiliser invariablement (1) afin de distinguer, l'obligation de loyauté des notions voisines concourant toutefois à une exécution loyale et équitable (2).

1) Loyauté et bonne foi exigences communes ou simples synonymes ?

Afin que les parties soient légitimement en droit de bénéficier de la prestation escomptée au moment de la conclusion du contrat, il a paru nécessaire au législateur, suivi dans cet élan protecteur par la jurisprudence et la doctrine, de contractualiser de plus en plus la phase précontractuelle.

Certes, l'obligation de loyauté impose aux contractants certains devoirs à tous les stades du contrat. Mais, il est à noter que la majorité des textes, tant la convention de vienne sur la vente internationale de marchandises, que les principes d'unidroit ne font pas expressément allusion à l'expression LOYAUTE. Or la bonne foi est une disposition fondamentale du code civil qui permet depuis le projet de code civil de l'an VII de retrouver un article selon lequel « les conventions doivent être contractées et exécutées de bonne foi » cet article est d'une certaine façon l'ancêtre de l'article 1134 Al3 du code civil français actuel qui dispose que : « les conventions doivent être exécutées de bonne foi ».

Soutenue par la doctrine de Domat14(*), la bonne foi était considérée lors de l'élaboration du code civil, comme une disposition fondamentale, qui a permis de faire pénétrer la règle morale dans le droit positif.

Depuis, la bonne foi connaît un essor jurisprudentiel tel qu'aujourd'hui, elle revient de façon récurrente, effaçant celle de loyauté mais, toutefois, la faisant peser sur chacun des contractants.

Malgré cette formalisation, la jurisprudence n'emploiera ni la notion de bonne foi, ni celle de loyauté il faudra attendre 1985 pour voir la Cour de Cassation15(*) accueillir un pourvoi fondé sur la notion de l'article 1134 du code civil qui lui-même a inspiré les rédacteurs tant de la convention de vienne que des principes d'unidroit.

En effet, aujourd'hui, traiter de l'obligation de loyauté contractuelle dans le contrat international, suscite un intérêt particulier, car l'on pourrait se poser la question de savoir, comment et quand, est-ce qu'une offre de conclure un contrat de marchandises d'un pays déterminé vers un autre, si l'on tient compte de la diversité tant culturelle que des spécificités juridiques acquiert-elle force obligatoire ?

En nous référant de façon générale au dictionnaire du vocabulaire juridique16(*) la bonne foi est : « l'attitude traduisant, la conviction, ou la volonté de se conformer au droit qui permet à l'intéressé d'échapper aux rigueurs de la loi ».

Par ailleurs, les manifestations de la notion de bonne foi sont tellement variées, qu'elle a des liens intrinsèques avec la notion de loyauté. En effet, il y a un grand flou, qui règne en doctrine sur l'emploi de ces termes d'où l'intérêt de préciser nettement l'usage qui en sera fait .Chez nombre d'auteurs  les mots « loyauté » et « bonne foi » sont employés comme étant synonymes. Parfois certains auteurs tendent à privilégier l'emploi du terme loyauté.

Afin de mieux cerner l'objectif similaire que poursuivent les deux notions de loyauté et de bonne foi dans la tentative par le législateur d'insuffler « de la justice et de la sécurité » à tout rapport contractuel. Dès lors on comprend que l'étude d'une notion « éthico-juridique » comme la loyauté contractuelle dans la vente internationale puisse susciter autant d'intérêt.

Nous envisagerons la parenté entre la loyauté et la bonne foi que le législateur semble utiliser invariablement (1) afin de distinguer, l'obligation de loyauté des notions voisines concourant toutefois à une exécution loyale et équitable (2).

1) Devoir de loyauté et bonne foi

Certes l'obligation de loyauté impose aux contractants certains devoirs à tous les stades du contrat, mais il est à noter que la majorité des textes, tant la convention de vienne dur la vente internationale des marchandises, que les principes d'unidroit ne font allusion de façon expresse qu'à l'expression LOYAUTE. Or la bonne foi est une disposition fondamentale du code civil de l'an VII retrouvée dans un article selon lequel « les conventions doivent être contractées et exécutées de bonne foi ». Cet article est d'une certaine façon l'ancêtre de l'article 1134 al3 du code civil français actuel qui dispose que : « les conventions doivent être exécutées de bonne foi » l'estimant plus précis.17(*)Toutefois, la distinction ne semble pas fondée que sur une exigence de précision et il est bien difficile d'établir un critère fiable permettant de tracer la frontière entre les deux notions. D'après Monsieur Aynés,18(*) la loyauté n'a que de lointains rapports avec la bonne foi, en revanche il admet qu'elle entretient des liens beaucoup plus étroits avec la notion de loyauté. Ainsi, la seule différence entre cette loyauté et la bonne foi tiendrait au fait que le devoir de loyauté déborde selon lui largement des frontières de l'exécution du contrat.

Pourtant, il paraît alors préférable de retenir une position assez généralement adaptée selon laquelle la loyauté est perçue comme une conséquence de la bonne foi, parallèlement à d'autres exigences découlant de la bonne foi. Certes exigeant aussi la loyauté.

Ainsi, il est généralement admis que dès la phase précontractuelle, les négociations doivent être animées par une attitude loyale. Au moment de la conclusion du contrat. L'idée de bonne foi est présente et impose un consentement réel et éclairé qui ne doit pas être vicié de même lors de l'exécution du contrat, l'exigence de loyauté a permis au juge de découvrir une série d'obligations s'imposant aux parties, obligations accompagnant pour mieux permettre d'atteindre son objectif optimum, l'obligation de loyauté. Ce sont pour la plupart des notions voisines.

2) L'obligation de loyauté et les notions voisines

La sécurité juridique est le socle de toute réussite à l'international. Aussi, une relation conventionnelle implique que dès la phase précontractuelle, les parties soient inévitablement loyales l'une envers l'autre. On considère généralement que l'impératif de bonne foi et de loyauté implique de façon spécifique en phase précontractuelle certaines obligations accessoires, qui sont considérées par la jurisprudence comme des notions voisines à l'obligation de loyauté qui s'y arriment afin de pouvoir véritablement lui conférer tout son sens, le devoir de loyauté, aussi qualifié obligation de bonne foi par certains auteurs pour faire référence à plusieurs aspects tels que : l'obligation d'information (a) sans laquelle il ne peut y avoir de consentement éclairé, s'y retrouve également incluses des obligations telles que l'obligation de renseignements, le devoir de conseil qui visent un rééquilibrage du contrat, celles-ci sont régulièrement énoncées par les droits nationaux dans le cadre de lois sur la consommation et ont pour rôle de protéger l'acheteur vulnérable contre le vendeur professionnel.

Se greffe généralement au devoir de loyauté une obligation de diligence, les intérêts des parties mettent tacitement a leur charge une obligation de collaboration active, beaucoup plus perceptible au moment de l'exécution du contrat, enfin, les parties peuvent selon la spécificité de l'opération envisagée être astreintes au respect d'une obligation de confidentialité (b).

a) L'obligation d'information

Chaque partie doit fournir à l'autre, toutes les informations utiles sur l'opération. Cette attitude implique une clarification de la portée des obligations respectives des parties. Elle doit permettre aux futurs contractants de mesurer la portée et la nature de leurs engagements. Si cette obligation s'avère plus exigeante vis-à-vis du vendeur professionnel, c'est parce qu'il représente la plupart du temps une partie ayant une présomption de connaissances techniques ou spécifiques liées à la marchandise vendue.

L'obligation d'information est au coeur du droit commun des contrats, elle n'a de portée réelle que si la spécificité du rapport contractuel est soulignée : le juge civiliste prend en considération l'ignorance du « profane».19(*) L'information doit permettre à ce dernier de contracter en parfaite connaissance de cause. Dans le contrat de vente, la démarche suivie par le juge semble aller plus loin donnant une extension concrète à la notion de loyauté contractuelle par le biais de l'obligation d'information. Sur quoi doit porter l'information ? L'information selon la jurisprudence doit circuler entre les futurs contractants toutes les fois que l'intérêt du contractant l'exige. Elle peut être définie, à partir des situations qui lui sont proches ou opposées. Elle peut ainsi, être approchée à travers la finalité qu'on lui assigne. L'information portera sur l'objet et les conditions d'exécution du contrat. C'est un savoir qui circule, un ensemble de connaissances selon l'expression de la doctrine :

« Le rapport de ce qui pourrait être dit, et ce qui est effectivement dit. Elle devient dans ce cas, la mesure du choix effectué entre les possibles. »

L'information sur l'objet du contrat permet au contractant préalablement à son engagement d'avoir un consentement éclairé. Concrètement la jurisprudence impose à celui des négociateurs qui détient une information, sur un fait pertinent, susceptible d'influencer, le consentement de son partenaire, de la lui transmettre afin que son consentement ne soit pas vicié. Cette obligation existe aussi bien entre particuliers qu'entre professionnels, quand bien même ils seraient de la même spécialité en application d'un principe de nécessaire confiance mutuelle entre cocontractants.20(*)

Plus récemment, la jurisprudence a en sus du devoir d'information, consacré un devoir de conseil qui s'imposera surtout dans les relations entre vendeur professionnel et profane21(*)

C'est le cas notamment en cas de vente de produits présentant un caractère spécifiquement technique ou un risque particulier. Il appartient désormais au débiteur de l'obligation d'information, de s'enquérir des besoins de son partenaire, pour le guider dans ses choix, en lui délivrant des informations ciblées et pertinentes, de nature à éclairer son consentement.

L'évolution générale va dans le sens d'une obligation de renseignements plus lourde traduite par un recours facilité pour celui des contractants qui prétend n'avoir pas été assez renseigné, à la théorie des vices du consentement. C'est ainsi que les règles de droit dépendront des concepts idéologiques : en Allemagne par exemple, l'obligation d'information implique de ne pas rompre les négociations sans motif et de fournir à l'autre partie toutes les informations utiles et nécessaires sur l'opération. Le droit américain d'obédience common law a statué sur la question qu'il n'existait pas d'exigence liée à une quelconque obligation de renseignement dans l'affaire LAIDLAW/ORGAN22(*)

Les principes d'unidroit retiennent quatre causes susceptibles de conduire à l'altération du consentement et par conséquent d'entraîner la nullité du contrat futur l'erreur, le dol, la contrainte, et l'avantage excessif.

A ce sujet, la convention de vienne, dans le souci de procéder à une unification des sources du droit international, par l'adoption d'une neutralité juridique et dans l'optique de concilier les droits des pays civilistes et de common law a également évité d'utiliser des termes trop marqués par les systèmes juridiques, afin de contourner les difficultés. Ces textes font par conséquent allusion à des concepts qui ne peuvent être appliqués qu'à la lumière des usages commerciaux.

Deux vices du consentement, nous intéressent particulièrement relativement à cette obligation d'information le dol mais aussi l'erreur. La contrainte impliquant plus une pression physique ou morale et l'avantage excessif s'apprécieront au moment de l'exécution du contrat par l'assimilation à la lésion qui représente un déséquilibre résultant des prestations d'un contrat synallagmatique.

· L'erreur c'est une appréciation inexacte d'une situation à la suite de laquelle, le consentement a été donné. Elle peut être de fait ou de droit. Or la force23(*) juridique du contrat repose sur l'intégrité de la volonté. Celle-ci doit être consciente et libre. Le consentement des deux parties ne doit souffrir d'aucune machination ce qui serait une entorse au respect du principe de loyauté contractuelle. L'idée sous-jacente est évidente : mieux informé, le cocontractant aurait refusé de contracter ou ne l'aurait fait qu'à des conditions différentes.

C'est d'ailleurs sur le terrain de l'erreur, que s'était placé le juge dans la célèbre affaire dite du « Poussin » : Une vente a été annulé parce que le vendeur ignorait que le tableau qu'il vendait était peut être un poussin, alors que cette possible attribution n'avait pas échappé au spécialiste du Louvre qui avait préempté le tableau acheté à bas prix.

En définitive, on est passé de l'idée selon laquelle, il appartient à chaque contractant de se renseigner par ses propres moyens, sur l'intérêt pour lui du contrat à celle que chacun doit dans une certaine mesure défendre les intérêts de l'autre. L'égoïsme céderait-il la place à l'altruisme ?

Les juristes de common-law sont généralement surpris par une jurisprudence telle que celle du poussin car même si dans les systèmes d'obédience romano-germaniques, l'on est d'accord pour sanctionner les actes caractérisés de déloyauté, beaucoup pensent que cette décision est allée trop loin.24(*)

La cour de cassation française a donc procédé à un rééquilibrage dans ce sens, en estimant qu'un acheteur avait manqué à « l'obligation de bonne foi qui pèse sut tout contractant » en le condamnant à verser à la vendeuse demanderesse, un supplément de prix.25(*)

· Sur le terrain du DOL, il importe de revenir tout d'abord à la position traditionnelle qui remonte au droit romain et, qui consistait à tolérer le « bon » dol. La simple exagération des qualités de la prestation dans le contrat de vente de la chose vendue à condition qu'il n'y ait pas eu manoeuvre ou mise en scène, destinée à avérer les propos. Mais la législation sur la publicité mensongère à fortement influencé les droits nationaux et aujourd'hui le dol est assimilé aux manoeuvres ayant pour objectif de tromper son partenaire afin qu'il donne son consentement. L'article 3 des principes d'unidroit accorde la nullité du contrat à la victime. Lorsque l'autre contractant s'est comporté d'une manière contraire aux exigences de bonne foi en matière commerciale.

Contrairement à la position classique de la jurisprudence qui estimait que la simple réticence, c'est-à-dire, le fait de cacher une information connue de soi, seul et de nature à déprécier sa prestation, n'équivalait pas à un dol, il est fréquent aujourd'hui de juger qu'un simple silence vaut dol.26(*)

L'obligation de loyauté impose également aux négociateurs de respecter une obligation de confidentialité qui peut revêtir plusieurs connotations en fonction de l'opération contractuelle projetée.

b) L'obligation de confidentialité

En fonction de la nature des marchandises vendues, ou de la spécificité des informations concernant tant les procédés de fabrication ou de la multiplicité des postulants à l'opération projetée, les parties pourront être amenées à respecter une obligation de confidentialité. Cette obligation généralement admise façon tacite au contrat, impose à la partie, qui en cours de négociation reçoit une information donnée à titre confidentiel à l'autre partie, de ne pas divulguer cette information. Et de ne pas l'utiliser non plus de façon indue à des fins personnelles.27(*) Cette obligation pèse sur les parties, que le contrat soit conclu ou non. La partie qui y manque pourra être condamnée à une indemnité contenant le cas échéant, le bénéfice qu'elle en aura acquis. Sur quoi porte ce devoir de confidentialité ? Quelle est la position des textes internationaux régissant la vente internationale ? Et quel est le rôle joué dans la détermination de son domaine d'application autant que dans la fixation de la sanction pour laquelle le juge ou l'arbitre détient un pouvoir d'appréciation assez large.

Il est généralement admis que les futurs contractants en préparation de leur accord final de vente échangent des informations, que l'une des parties pourrait soit divulguer à des tiers très souvent des concurrents, ou qu'il pourrait utiliser à ses propres fins.

La confidentialité porte quant à elle sur les informations obtenues en cours de négociations. Il n'est cependant pas évident de déterminer quelles sont les informations susceptibles d'être divulguées et celles dont la divulgation entraînerait une faute et constituerait un acte de mauvaise foi. La convention de Vienne n'y faisant pas expressément allusion les principes européens du droit des contrats et les principes d'unidroit nous éclairerons dans ce sens. En effet, l'article 2.1.15 sus cité en ces termes « qu'il ait ou non conclusion du contrat, la partie qui au cours des négociations reçoit une information donnée a titre confidentiel par l'autre partie est tenue de ne pas la divulguer ni l'utiliser de façon indue a des fins personnelles. » La sanction donne lieu a une indemnité comprenant le cas échéant le bénéfice qu'en aura retiré l'autre partie.

Pour la plupart les orientations jurisprudentielles s'inscrivent dans un objectif plus général de moralisation des affaires. La jurisprudence dominante fait désormais obligation aux négociateurs d'agir de façon transparente afin que chacune des parties contractantes puisse se prononcer en connaissance de cause. Par ailleurs, et comme le font remarquer deux auteurs « aucune solution aux problèmes posés par les accords préparatoires ne peut en tout cas être trouvée dans la cvim dont on l'a signalé le domaine d'application est limité à la formation d'un contrat de vente simple et à son exécution dans les phases les plus élémentaires de celle-ci »28(*)

Le devoir de confidentialité peut faire l'objet d'un avant contrat qui intervient avant l'accord principal dans l'optique de permettre de définir les informations confidentielles, de déterminer le caractère réciproque ou non de l'information, enfin sa durée et les sanctions encourues en cas de violation. Dans certaines hypothèses un écrit sera nécessaire. A contrario les parties peuvent de façon implicite ou explicite vouloir, compte tenu de la spécificité de l'opération projetée vouloir se soumettre à un simple engagement de confidentialité. Il appartiendra au juge le cas échéant de déterminer la portée du préjudice subi par la victime de la violation.

c) Le devoir de conseil et de diligence

En l'absence de dispositions particulières relatives à une obligation ou à un devoir de conseil et de diligence dans la cvim, dans les principes unidroit et encore moins dans les principes européens du droit des contrats, il importe de noter que les parties à une négociation contractuelle se doivent de respecter cette exigence certes d'origine légale (droit interne des Etats) qui a connu ces dernières années un essor important.

Un proverbe chinois dit « lorsqu'on achète des souliers on s'informe du pied ». L'information est à cet égard assez importante pour que les parties sachent à quoi elles s'engagent, ce quelles doivent accomplir comme obligations réciproques. Elle permet de mettre en place une rédaction limpide basée sur la confiance et la collaboration mutuelle, autant l'information à suivre est mise en adéquation d'un besoin et d'une offre elle est souvent employée comme exigence inhérente à la protection des droits des consommateurs sous le vocable «d'obligation de renseignement ». Si ces obligations ne sont pas expressément visées par les conventions applicables en matière internationale, la jurisprudence exige toutefois le respect par le vendeur professionnel de marchandises du devoir de conseil et de diligence qui se matérialise à tous les stades du contrat.

En effet, il est de jurisprudence constante que ce devoir s'impose au vendeur de façon illimitée on peut également considérer que le devoir serait également imposé par les juges là ou la loi n'aurait pas prévu une telle diligence. Pour l'essentiel les devoirs de conseil et de diligence sont des déclinaisons de l'obligation générale d'information.

La doctrine préconise en effet, de considérer l'obligation d'information comme un tout et donc de ne pas opérer de «summa divisio » entre ces différentes composantes que sont l'obligation de renseignement, de conseil, de mise en garde, et de devoir de diligence.

L'on distinguera donc le conseil d'une part la diligence d'autre part.

Lorsque l'on parcourt la plupart des textes applicables à la vente internationale de marchandises, force est de constater que deux obligations essentielles pèsent sur le vendeur : livrer et garantir. Mais préalablement à la livraison qui doit être assortie de garanties, la jurisprudence actuelle protège l'acheteur lésé dans l'utilisation d'une chose nouvellement acquise, par un contrat de vente.

Il pourra donc engager la responsabilité contractuelle de son vendeur, s'il démontre que c'est l'insuffisance d'informations, de conseils, de la part de ce dernier qui est à l'origine de son dommage. Pour s'acquitter de son obligation le vendeur doit communiquer à l'acheteur toutes les informations qui portent sur la chose vendue.

Il s'agit d'aider l'acheteur vulnérable dans son choix. Cette attitude invite les parties à entrer dans une coopération assez intime à laquelle le contexte des négociations ne se prête pas particulièrement compte tenu des intérêts en jeu. Toutefois le vendeur devra guider l'acheteur d'une manière protectrice et paternelle.

Auparavant lors d'une vente, chacun devait trouver son salut que l'acheteur fut curieux et se renseigne selon l'adage du droit anglais « emptor debet esse curiosus » de nos jours quand un acheteur subit un grief à la suite d'une vente et qu'il est démontré que cette lésion est liée à quelque chose qu'il ignorait à propos de la chose vendue c'est sur le vendeur que la responsabilité se reporte. Cette obligation n'est pas propre à la vente mais c'est indiscutablement dans la vente qu'elle a prospérée.

A travers cette notion la jurisprudence n'entend qu'une forme d'obligation de nature contractuelle et c'est en vertu de celle-ci que la responsabilité du vendeur peut être recherchée y compris en amont de la vente c'est-à-dire avant la conclusion du contrat.

Un arrêt récent de la cour de cassation estime que le vendeur professionnel d'un matériel informatique, est tenu d'une obligation de renseignement et de conseil envers un client dépourvu de toute compétence en la matière29(*) de nombreux cas jurisprudentiels ont été rendus dans un sens ou dans un autre.

Il résulte d'une jurisprudence constante que le vendeur est tenu à l'égard de son client d'une obligation de conseil dont le contenu varie selon le niveau de compétence du client, comme il a été jugé en matière informatique.30(*) S'agissant des marchandises et produits complexes le vendeur doit accomplir toutes les diligences nécessaires pour assurer à l'acheteur une utilisation optimum.

* 12 Amandine assaillit in La bonne foi et la loyauté contractuelle master pratique juridiques et judiciaires 2006-2007 Nîmes

* 13 Unidroit ( ... article 2 : 1.1 à 2 : 1.22

* 14 J DOMAT, Les lois civiles dans leur ordre naturel, 1689-1694

* 15 Cass. Civ 1, mars. 1985, B. 1985, N° 102.

* 16 G. Lyon. Caen. « de l'exécution de la notion de bonne foi » RTD CIV 1946, P.76

* 17 Voir Y. Picod Ouv. P. cit N° 6 P.13

* 18 L. Aynés « l'obligation de loyauté » archives de philosophie du droit, 2000, N° 44, P. 198

* 19 Expression empruntée à M. Ph. Le tourneau. In « Bonne foi », Rep civ Dalloz 95, N° 31

* 20 Cass. Com. 4 juillet. 1989 Affaire Publicis

* 21 Cass. Com 1er décembre 1992 et 4 janvier 2005

* 22 Cour suprême des Etats-Unis 1917

* 23 Tahar Daoudi Precité P.121

* 24 Georges Durry in L'obligation précontractuelle d'information : Deux coups d'arrêts salutaires

* 25 Cass, civ 3 mai 2000, Bull, I, N° 131

* 26 Com. 18 février 1997, Bull, IV, N° 61

* 27 Article 2 paragraphe 16 des principes d'unidroit

* 28 Jean Thierry et Chantal Granier La vente internationale, Paris Centre français du commerce extérieur, 1985. P79

* 29 Cass.com.11 juillet 2006 N° 4 17093

* 30 Cass.com.12 Nov 1992

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand