CHAPITRE V :
LES MESURES
ALTERNATIVES
SECTION 1.- L'APPORT DES ONG ET LE DEVELOPPEMENTISME
Les ONG jouent un rôle extrêmement important dans
la lutte contre la pauvreté en Haïti. Bien sûr, il y a dans
certains cas où elles n'arrivent pas remplir de façon efficace,
cependant leur contributions ne peuvent pas être ignorées par
quiconque.
A la lumière des précisions données par
le CLED, avant d'aborder ce qu'est ou doit être le rôle des
organisations non gouvernementales (ONG), il convient de différencier
« la réduction » de « l'allégement » de la
pauvreté. Ce dernier se réfère au support qui est
donné à la consommation des individus et de familles pour
suppléer à leurs besoins de base, alors que la réduction a
trait à des programmes dont l'objectif est d'améliorer la
capacité des pauvres à se sortir eux-mêmes de leur
situation.
Les ONG ne sont pas toutes, loin s'en faut, engagées
dans des programmes de réduction de la pauvreté. Il faut
cependant reconnaître qu'il y a une place pour l'allégement dans
notre stratégie, tout comme il y a une place pour l'étayage dans
une construction pendant la période qu'il faut aux colonnes de
béton pour durcir132. Tout le monde ne voit pas de la
même manière le rôle des ONG dans un processus pouvant
amener à éliminer la pauvreté ou encore, selon le CLED, Le
rôle des ONG dans une stratégie de réduction de la
pauvreté est un sujet assez controversé. Cependant certains
consensus ont émergé lors du débat sur la question au
cours de l'Atelier organisé dans le cadre de Forum 2000 :
· Les ONG tant nationales qu'internationales ont rendu
de grands services à la
communauté haïtienne et ceci depuis de nombreuses
années. Il suffit de se rappeler que
l'Hôpital Albert Schweitzer de Deschapelles est
géré par une ONG depuis près de 45 ans.
· Leur rôle s'est accru depuis les années
1970 en réponse aux faiblesses de l'Etat haïtien et à son
incapacité à fournir certains biens publics, en particuliers en
éducation et en santé primaire.
· Dans ce vide laissé par l'Etat se sont
insérées des institutions qui ne remplissent pas toujours la
mission humanitaire à laquelle elles étaient
destinées133.
Depuis les années 1970 les bailleurs d'aide
internationale ont repris les idées sur les méthodes de
développement découvertes par les organisations non
gouvernementales (ONG). Ces associations à but non lucratif, le plus
souvent au départ originaires des pays développés,
étaient désireuses de faire accéder les pays pauvres
à un développement réel, en partant de la base, en
invitant les communautés « villageoises » ou les populations
apparemment non structurées à se regrouper pour travailler
ensemble à des actions des « projets ». Cela a
été l'époque de la floraison des petits projets, ou des
projets intégrés d'envergure régionale eux aussi
menés avec cette nouvelle approche groupale, époque qui dure
encore. De tous temps les pauvres ont été ainsi invités
à se regrouper pour qu'on puisse leur apporter les bienfaits des oeuvres
de charité ou ceux de nouvelles techniques134.
De part sa nature et pour avoir été issues des
mouvements religieux, les ONG ont réintroduit la morale dans le
développement. Les fonds de l'aide doivent parvenir aux
bénéficiaires au lieu d'être détournés
à travers les grands programmes d'Etat, les projets doivent être
conçus en fonction des capacités réelles des
bénéficiaires, ni plus ni moins, au lieu d'être
montés par des bureaux d'études ou des services étatiques
corrupteurs et corruptibles. En outre, les projets devaient être à
la dimension des communautés, pouvoir être gérés par
un expatrié, puis par un homologue local, ou un groupe (plus rarement).
Autogestion, honnêteté, résultats immédiats, petits
projets de durée courte, et renouvelables, tous ces concepts ont
été intégrés dans les techniques de
développement135.
Cependant malgré toutes ces mesures, de l'observation de
plus d'un, certaines ONG ont
même été formée par des individus
malhonnêtes, en vue de détourner ce qui a été
préalablement conçu au bénéfice des pauvres.
Il reste à l'Etat haïtien de mettre des balises
afin d'empêcher la population cible à être toujours des
éternels perdants. En dépit des faits constatés et
mentionnés plus-haut, on peut constater une sorte de grimpement dans la
présence des ONG, en Haïti, jour après jour. « Le
développement communautaire a tellement cru et proliféré,
c'est du fait de la demande inextinguible et sans cesse
différenciée des couches sociales les plus démunies. Ne
perdons pas de vue que ce modèle est une réponse à des
besoins réels. Mais comme le rappelle la devise
133 Ibidem, p. 128
134 Collectif pour l'Etat de droit en Haïti,, p.78
135 Ibid., p.79
d'une grande ONG française, ce que nous pouvons
espérer faire de mieux par le développement communautaire c'est
d'offrir « l'accès au développement »136.
La présence accrue des ONG tant nationales
qu'internationales n'est pas quelque chose ayant lien au hasard. Elle est le
résultat de la faiblesse de l'Etat haïtien a subvenir aux besoin de
la population. Aussi, le rôle important que joue les ONG dans la
prestation des services est né de la nécessité des
différentes crises économiques et politiques et a
été renforcé durant l'embargo. Bien que les ONG aient
pourvu aide et charité, et aient assuré les services sociaux
depuis les années 1950, leur intervention s'est considérablement
accrue au cours des deux dernières décennies. Pendant la crise de
1992-94, les ONG ont fourni 100 millions de dollars américains
d'assistance officielle au développement selon les estimations. Cette
tendance s'est poursuivie, en particulier dans les secteurs de la santé,
de l'éducation, de l'alimentation en eau et de l'assainissement, ainsi
que dans la construction et la réhabilitation de l'infrastructure
à petite échelle137.
Dans de nombreuses zones rurales isolées, le
gouvernement haïtien dispose d'une capacité très
restreinte de prestation de services, et les ONG ont pris la
responsabilité de satisfaire les besoins de la population. Leurs
services sont également importants pour les pauvres des villes.
Dans le domaine de la santé, les ONG assurent environ
50 % des services des soins primaires et curatifs. Dans le domaine de
l'éducation, soit les ONG soit le secteur privé, des institutions
à but lucratif, gèrent près de 80 % de toutes les
écoles primaires et secondaires. Et dans le secteur de l'eau et de
l'assainissement, près que toutes les interventions sont
financées par le biais des organisations non gouvernementales ... Les
ONG en Haïti sont très variables en taille, en structure
administrative et en capacité. La qualité des services varie
considérablement, avec des problèmes de capacité
institutionnelle et en technique, de chevauchement des activités et de
diminution du financement. Toutefois dans l'ensemble, il y a des preuves d'une
masse importante d'organisations de taille grande, moyenne et petite qui
possèdent des bilans supérieurs à la moyenne et qui
pourraient absorber davantage de fonds et les utiliser plus efficacement et
plus effectivement s'ils devaient recevoir assistance technique et formation.
Les écarts et les chevauchements des activités pourraient
être réduits s'ils étaient coordonnés
générales qui jouent un rôle important dans ce domaine. Les
organisations générales pourraient aider les ONG membres en
donnant de meilleures informations aux membres et coordonnant les
activités avec des économies d'échelle telles que la
formation technique et de gestion et la collecte des fonds.... A l'avenir,
l'accroissement de la prestation et de la qualité des services exigera
le renforcement de l'ensemble de la capacité institutionnelle et
technique au sein des secteurs public et des ONG et une intégration plus
poussée de la prestation des services par les ONG dans les
stratégies sectorielles telles que les plans d'éducation et de
santé nationales. En outre, il faut qu'il y ait des relations plus
formelles entre le secteur public, les bailleurs de fonds et les ONG au moyen
d'une collaboration net de modalités contractuelles138.
136 Ibidem, p.99
137 Note de cours d'économie Haïtienne, Haïti,
lutte contre la pauvreté, p.25
138 Ibid., p.25-26
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