SECTION 3. LA SECURITE ALIMENTAIRE
3.1- Sécurité Alimentaire, Approche
Anti-pauvreté :
Pour venir à bout des problèmes de la
pauvreté et de sous-alimentation, de nombreux bailleurs de fonds ont
fourni une assistance humanitaire au moyen de l'aide alimentaire.
Paradoxalement, l'aide alimentaire est parfois dénoncée comme un
aspect de l'arme alimentaire. L'aide alimentaire consiste dans des livraisons
fournies à titre gratuit ou à des conditions particulières
de paiement (prix et devises) aux pays déficitaires (Notes de cours). En
provenance presque exclusivement des Etats-Unis, l'aide alimentaire consiste
dans la fourniture de surplus agricoles, à titre gracieux ou
onéreux, en vertu d'une loi adoptée par le Congrès des
Etats-Unis et connue sous le nom de Public Law 480 et est
administrée par le USAID. Elle comprend trois volets principaux :
1- conformément au titre I, le gouvernement des
Etats-Unis accorde à l'Etat haïtien des prêts à long
terme pour le financement des importations de céréales
alimentaires destinées à être commercialisées sur le
marché local.
2- Aux termes du titre II, l'administration américaine
fait procéder à des distributions gratuites d'excédents
alimentaires par le canal des entreprises bénévoles
américaines implantées dans le pays.
3- Les fonds du titre II constituent des subventions ordinaires,
par opposition à ceux du titre II qui représentent une assistance
d'urgence.
L'aide alimentaire américaine s'est chiffrée
à 42.5 millions de dollars en 1995, soit 21.1 % de l'aide totale
américaine123. En 1995, les denrées alimentaires les
plus importantes étaient le blé bulgur, la farine de blé,
les légumineuses et le riz. Au cours de cette même année,
l'aide alimentaire a atteint selon les estimations 1.3 millions de
bénéficiaires directs124. Les bailleurs de Fonds
choisissent eux-mêmes les canaux de distribution selon des programmes
différents, tels : Santé maternelle et infantile, alimentation
scolaire, vivre contre travail, et assistance générale. Ces types
de programme viennent à partir de contacts justifiés, sur la
dégradation du système alimentaire de la majorité des
haïtiens considérés comme des pauvres. La
sécurité alimentaire des haïtiens se détériore
de jour en jour. Avoir de quoi à se nourrir
123 Kern, p.319
124 Haïti, Lutte contre la Pauvreté, p.37
quotidiennement est un droit humain fondamental. Tout
système de sécurité doit être conçu non
seulement pour atténuer la pauvreté et la faim mais, aussi, il
doit pouvoir assurer la sécurité du revenu. Par exemple, au
Canada, la sécurité alimentaire est envisagée sous deux
optiques globales : la première visant à établir un
système alimentaire durable, la seconde, à éliminer la
pauvreté. Ces deux optiques correspondent aux deux principales
dimensions de la sécurité alimentaire, à savoir :
Production et offre d'une quantité suffisante d'aliments de bonne
qualité et accès aux denrées. Il est intéressant de
faire remarquer qu'au cours de notre enquête, beaucoup de personnes
vivant à Shada ont déjà bénéficié de
l'aide alimentaire que ce soit à travers le Programme Alimentaire
Mondiale (PAM) ou l'USAID, mais ne sont pas satisfaits par le caractère
de courte durée du programme. Selon les donateurs, étant
donné que l'extrême pauvreté continue à
représenter un problème majeur dans le court terme, l'aide
alimentaire la plus effective est ciblée aux familles extrêmement
pauvres et elle est fournie aux fins d'objectifs spécifiques et
réalisables. Il est vraiment difficile de quantifier le résultat
de ces programmes à Shada, et nous estimons que ceci est valable pour
tout le reste du pays. Jusqu'à présent, les pauvres continuent
à se demander chaque jour s'ils auront de quoi à manger
demain.
Les gens, ce qu'ils demandent exactement c'est du travail
à faire afin d'éduquer leurs enfants, de payer leur logement,
bref, ils veulent être membre à part entière de la
société. Ce constat nous amène à paraphraser Elaine
M. Power « Les solutions alimentaires ne règleront pas le
problème de la pauvreté. Sans justice sociale pour les personnes
pauvres de la société, c'est-à-dire, sans la garantie d'un
niveau suffisant de ressources matérielles qui procurera à tous
les citoyens dignité, stabilité et sécurité et
favorisera leur participation entière à la société,
les programme visant à résoudre les problèmes alimentaires
des personnes ne feront que renforcer les solutions individualistes aux
problèmes structurels, peu importe les intentions des concepteurs des
programmes 125 ». « Toutefois, il serait irresponsable, de
notre part, de nier qu'elle sauve des vies humaines. Il est évident que
l'aide d'urgence s'impose en cas de besoin comme un devoir de solidarité
internationale. Mais, si au lieu d'être exceptionnelle pour
répondre à un besoin temporaire, elle devient structurelle, elle
risque de fixer durablement le pays receveur dans sa dépendance
alimentaire126». Les réflexions montrent qu'une aide
alimentaire bien articulée devrait viser une production
agricole plus importante, supposant d'agir sur les techniques de production et
sur les structures sociales de l'agriculture. Si l'on veut effectivement finir
avec la dépendance d'Haïti du point de vue d'aide alimentaire, il
faut conjuguer les efforts à déboucher sur une croissance
économique qui soit pérenne.
Tableau 4.2- Aide Externe Par Secteur En 1990 Et
1996
Secteur
|
Valeur
|
1990
%
|
1996
Valeur %
|
Gestion de l'Economie
|
5329
|
3.84
|
81297
|
19.43
|
Administration du développement
|
3940
|
2.84
|
20220
|
4.83
|
Ressources Naturelles
|
5796
|
4.18
|
2392
|
0.57
|
Ressources humaines
|
16951
|
12.22
|
11293
|
2.85
|
Agriculture, foresterie et pêcheries
|
33687
|
24.29
|
46496
|
11.11
|
Développement régional
|
13488
|
9.73
|
46742
|
11.17
|
Industrie
|
709
|
0.51
|
4710
|
1.13
|
Energie
|
3823
|
2.76
|
26365
|
6.3
|
Commerce de biens et services
|
83
|
0.06
|
1014
|
0.24
|
Transports
|
7316
|
5.28
|
24162
|
5.77
|
Communications
|
1367
|
0.99
|
1606
|
0.38
|
Développement social
|
9301
|
6.71
|
55664
|
13.3
|
Santé
|
18115
|
13.06
|
26182
|
6.26
|
Planification préalable en prévision de
catastrophes
|
0
|
0
|
0
|
0
|
Aide et secours humaines
|
18757
|
13.53
|
69635
|
16.64
|
Total
|
138662
|
100
|
418.408
|
100
|
Source : PNUD
|
|
|
|
|
3.2- APPROCHE DE LA COORDINATION NATIONALE DE LA SECURITE
ALIMENTAIRE
En 1996, on croyait trouver un remède adéquat
pour combattre l'insécurité alimentaire qui fait rage dans le
pays. C'était l'année de la création de la coordination de
la sécurité alimentaire (CNSA). Son but ultime était
d'élaborer et proposer un plan de sécurité alimentaire,
comme l'indique bien son nom, dans le sens de trouver une sorte d'harmonisation
et d'intégration des politiques sectorielles. Selon les conclusions
tirées par cette institution, les principales causes
déterminantes de la situation d'insécurité alimentaire
sont pluridimensionnelles et doivent, de ce fait, impliquer tous les secteurs
de la vie nationale. La stratégie de lutte contre
l'insécurité alimentaire définie par la CNSA s'inscrit
dans le long terme. Le tableau qui succède nous donne une idée
sur les priorités que l'institution s'est fixée, dans le but
d'atteindre ses objectifs.
Tableau 4.3- Orientation d'une stratégie de lutte
contre l'insécurité alimentaire en Haïti
Axes d'interventions
Stabilisation et
relance de
l'économie
|
Objectifs
- Amélioration de
l'accessibilité
économique aux
aliments ;
- Génération d'emplois et de revenus
- Relance de la production nationale et des services
|
Mesures à prendre
- Contrôle de l'inflation
- Rationalisation et ciblage
de l'aide alimentaire
- Mise en place d'activités génératrice
d'emplois
- Appui au secteur informel
- Etablissemment des
conditions favorables à
l'investissement
|
Relance et
diversification de la production vivrière
|
Amélioration de
l'utilisation globale des aliments
|
- Augmentation de la
disponibilité alimentaire
- Accroissement des
rentrées en devises
- Amélioration du niveau de vie des agriculteurs
|
- Corrections des
problèmes de sanitaire, de couverture de santé
et d'éducation
|
- Réforme agro foncière
- Maîtrise de l'eau et
aménagement des bassins
versants
- Appui à la mise en d'un système financier
décentralisé
- Renforcement de la
disponibilité et de
l'accessibilité aux intrants
- Amélioration des
conditions de
commercialisation des
vivres
|
- Contrôles les déficiences nutritionnelles
- Renforcement des services de santé publique milieu
rural
- Déconcentration des
ressources sanitaires
- Prévention des qualités nutritives et de
l'innocuité des aliments consommés
|
Source : CNSA, 1996
|