Du role de la société civile pour une consolidation de la démocratie participative au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Mamadou Hady DEME Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2008 |
SECTION 2 : La section civile face à la corruption politique« Que se passe-t-il lorsque les acteurs politiques ne sont pas soumis aux demandes des acteurs sociaux et ...... leur représentativité ? Ils peuvent, aussi déséquilibrés, basculer du côté de l'Etat et déduire la première condition d'existence de la démocratie, la limitation de son pouvoir »24(*). Ce constat de Alain Touraine s'applique parfaitement aux démocraties africaines où on note une crise de la représentativité mais aussi une insatisfaction des demandes sociales. Paragraphe. 1 : La crise de la représentativitéOn note de plus en plus dans l'espace politique sénégalais une crise de la représentativité démocratique. Cette crise est due à la faiblesse des partis politiques d'opposition et de leur manque d'organisation. Force est de souligner que les partis politiques ne remplissent pas le contrat qui les lie avec les citoyens. Il apparaît nettement aux yeux de l'observateur de la vie politique sénégalaise que le régime en place est le fruit d'une unité de partis ressemblés en 1999 dans la « coalition pour l'alternance » qui a permis avec un programme commun, une stratégie commune et un candidat commun, le ballottage du premier tour des élections de février 2000 puis cette coalition s'est transformée en Front pour l'alternance (FAL) au second tour du scrutin, pour assurer le triomphe de l'alternance, en faisant bloc le 19 mars autour du candidat Abdoulaye Wade. Depuis lors, les masses populaires sont confinées dans un oubli des dirigeants politiques et chefs de partis qui, dans les moments de pré campagne et de campagne électorale, avaient fait la promesse d'une amélioration des conditions de vie sociale des Sénégalais. Ces promesses tournaient autour de la création d'emplois, de subventions aux producteurs dans le monde rural, d'appui aux éleveurs et agriculteurs, de l'accès des femmes au poste de haute responsabilité... Aujourd'hui, force est des constater que les conditions de vie de ces populations qui ont conduit ces dirigeants de partis politiques au pouvoir, se dégradent de plus en plus par l'accentuation de la pauvreté surtout en milieu rural. Ces masses sont tentées de porter peu d'égard à la chose politique au Sénégal et on note un désaveu dans la plupart des discours des Sénégalais. Ce désaveu se manifeste par une attitude des populations à mettre tous les dirigeants et leurs partis dans le « même sac ». Les dirigeants sont alors perçus ici comme des « traîtres » qui ne respectent pas leurs promesses. Le manque d'intérêt des citoyens vis-à-vis de la chose politique porte un coup dur à la démocratie participative. C'est dans ce contexte de divorce entre le citoyen et les partis politiques censés défendre leurs intérêts que doit se jauger l'action des organisations de la société civile en faveur des populations. N'ayant de moyens économiques suffisants pour faire face aux crises, les organisations de la société civile doivent peser de leur poids pour pousser les gouvernants à revoir leurs politiques sociales. La société civile n'ayant pas pour vocation la conquête du pouvoir à l'image des partis politiques doit chercher à redonner espoir à la population désemparée par cette crise de la représentation. Ce rôle prométhéen peut sembler d'emblée difficile du fait de la faiblesse des moyens dont disposent ces organisations. Pour apporter sa partition à ce combat citoyen, la société civile aura ici la vocation d'amener les populations à ne pas placer entièrement leur sort aux dirigeants politiques. Des actions incitant à l'initiative privée doivent être menées pour sortir la population de la paupérisation et consacrer leur indépendance financière vis-à-vis des hommes politiques. Par ces actions, la société civile contribuera à freiner le clientélisme, la corruption et le népotisme dans le champ politique sénégalais. Ces attitudes portent un coup dur à la démocratie car ne conférant par la rationalité du choix de l'électeur. Quelques années après l'avènement de l'alternance, les populations ont senti la faiblesse sur laquelle sont bâti les partis politiques qui devaient prendre en charge leurs revendications. Tout d'abord, on assiste à l'éclatement du FAL (front pour l'alternance) composé de plusieurs partis politiques qui avaient contribué à l'avènement de l'alternance. Du côté de l'opposition le CPC (cadre permanent de concertation des partis de l'opposition) peine à faire bloc contre les tenants du pouvoir. Finalement les populations se retrouvent dans le dilemme et ont toute la difficulté du monde pour savoir « où donner de la tête ». A cela s'ajoute une société civile qui n'est pas toujours ressentie à la base. Dans ce climat politique désordonné, les masses populaires ont besoin de l'unité des dirigeants surtout ceux de l'opposition car à l'heure où nous sommes, les artisans de l'alternance n'ont pas répondu aux attentes portées sur eux en 2000. Les Sénégalais ne veulent plus de politique faite d'irresponsabilité, de gabegie, d'incompétence, de magouilles dans les affaires de l'Etat, de détournement des deniers publics et d'injustice dans toutes les sphères de la vie nationale. Le peuple est encore aujourd'hui plus exigeant, aspire à davantage d'actions communes et concrètes, et formule l'espoir de voir ses préoccupations sociales prises en charge par les tenants du pouvoir. La société civile doit être le porte-étendard de ces préoccupations, et, à travers des campagnes médiatiques, des pétitions et d'autres formes de participations politiques, les porter au niveau des décideurs publics. Par cette démarche participative la société civile aurait participé à la consolidation de l'image de la démocratie dans ce pays, qui après les euphories du début des années 2000 continue encore d'être citée comme exemple de démocratie en Afrique et dans le monde. La crise de la représentativité est accentuée par les nombreuses transhumances notées à la veille de l'alternance. Avec ce phénomène on assiste à la fragilisation de l'opposition. Les transhumants font grossir les rangs du PDS et vont être à l'origine de beaucoup de problèmes internes. « Les nouveaux venus » seront à l'origine des velléités de positionnement à l'intérieur du parti contre les « militants de première heure ». Le parti a connu des déchirures au niveau de toutes les instances et les batailles entre frères libéraux minent le parti. Son secrétaire général, par ailleurs président de la république, s'est plus donné la peine de régler les crises internes de son parti que d'apporter des réponses concrètes aux véritables attentes des populations. La forte transhumance témoigne de la « fin » où de l'inexistence même des idéologies au sein du parti. Par ailleurs, leur mission de socialisation politique reste faible, voire inexistante d'où la nécessaire implication des acteurs de la société civile, pour un changement des mentalités, pour un culture de la démocratie, pour un éveil des consciences et une volonté commune de participation populaire. * 24 Touraine (A), Qu'est-ce que la démocratie. Paris : Fayard, 1994, p.85 |
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