DEUXIEME PARTIE :
ANALYSE ECONOMETRIQUE DE L'IMPACT DU TARIF EXTERIEUR
COMMUN SUR LE COMMERCE INTRA- COMMUNAUTAIRE
Cette deuxième partie constitue la partie principale de
notre étude. Elle comporte deux chapitres : le premier est
consacré à la présentation du modèle tandis que le
deuxième porte sur la présentation et l'analyse des
résultats.
CHAPITRE III :
METHODE DE RECHERCHE
Ce chapitre porte essentiellement sur la présentation
du modèle utilisé. Il comporte deux sections dont l'une porte sur
la spécification du modèle et l'autre décrit les sources
des données qui ont servi à l'analyse.
Section 1: LE MODELE ECONOMETRIQUE
Il existe plusieurs techniques et méthodes
d'évaluation des échanges régionaux (nous pouvons citer le
suivi d'indicateurs macroéconomiques tels que la croissance et
l'inflation, les flux commerciaux et avantages comparatifs
révélés etc.). Parmi celles-ci, le modèle de
gravité est un outil simple et très efficient pour prédire
les volumes de commerce bilatéral. L'application du principe de
gravitation aux volumes commerciaux est sans doute l'une des relations
empiriques les plus stables et les plus robustes en économie (Mucchielli
et Mayer 2005).
1) Fondements théoriques et justifications
empiriques du modèle de gravité
Le modèle de gravité est une appellation
générique de la famille des modèles quantitatifs
développés par l'astronome Stewart en 1940. Il a connu un large
succès empirique depuis les années 60 (Evenett et Keller, 2002).
Cependant, malgré ce succès, le modèle de gravité a
souffert pendant plusieurs années, sur le plan économique, d'une
absence de fondements théoriques. Les multiples formes d'équation
du modèle qui se sont succédées dans la littérature
empirique peuvent s'expliquer par l'absence d'une théorie consensuelle
(Tinbergen, 1962 ; Pöyhönen, 1963 ; Linneman, 1966 ; Aitken, 1973 ;
Sapir, 1981).
Grâce à une récente vague des travaux
théoriques, le modèle de gravité est passé d'un
embarras de pauvreté des fondements théoriques à un
embarras de richesse des origines théoriques. En dépit du fait
que les discussions continuent, il est désormais reconnu que les
fondements théoriques du modèle de gravité sont
justifiés par des considérations microéconomiques
(Timbergen, 1962 ; Linneman, 1966 ; Anderson, 1979), par des théories du
commerce international (Bergstrand, 1985 ; Deardorff, 1995) et enfin par la
nouvelle économie géographique (Stewart, 1940).
Bergstrand (1985) est par exemple parvenu à
dériver les équations gravitationnelles pour les produits
différenciés en s'appuyant implicitement sur les modèles
structurels ricardien, d'Heckscher-Ohlin et de rendements d'échelle
croissants.
Si les applications du modèle de gravité sont
nombreuses en Europe et en Amérique Latine (Balassa et Beuvens, 1988 ;
Wang et Winters, 1992 ; Baldwin, 1993 ; Eichengreen et Bayoumi, 1995), elles
sont en revanche assez rares dans les pays africains. La première
application à notre connaissance du modèle de gravité aux
pays d'Afrique au Sud du Sahara (ASS) est l'oeuvre de Foroutan et Pritchett
(1993). Le but visé par ces deux auteurs était de pouvoir
quantifier les échanges potentiels intra-ASS pour les comparer au niveau
du commerce observé. Ils parviennent à la conclusion que le
niveau des échanges intra-ASS est faible pour des raisons
structurelles.
D'autres, comme Naudet (1993), pensent plutôt que le
faible niveau des échanges découle du fait que les pays de la
région n'exploitent pas totalement leurs potentialités
commerciales. Pour ce dernier, le commerce de l'Afrique de l'Ouest pour ne
prendre que cet exemple pourrait représenter 25% du commerce total d'ici
2020.
Laporte (1996) utilise le même modèle en
intégrant l'ensemble des pays de la CEDEAO pour montrer comment l'UEMOA
pourrait s'affirmer comme un pôle de développement durable en
Afrique de l'Ouest.
Dans le souci de circonscrire les déterminants du
commerce intra-africain, Elbadawi (1997) va aussi utiliser le modèle de
gravité traditionnel en intégrant dans son échantillon
quelques groupements régionaux africains. Il insiste
particulièrement sur l'impact des unions monétaires sur le
courant des échanges régionaux. Son travail se situe dans la
lignée de ceux réalisés par Andrew K. Rose (2000, 2002a).
Ce dernier auteur a montré qu'à des niveaux de
développement comparables, les pays appartenant à une union
monétaire commercialiseraient 3,3 fois plus que celui obtenu par Nitsch
(2002) sur le même échantillon mais corrigé des variations
multiples.
D'autres travaux intéressants ont été
réalisés (Mukherjee et Robinson, 1996 ; Cassim et Hartzenburg,
1997 ; Carrère, 2002). Ils conduisent pour la plupart à des
résultats appréciables confirmant l'avantage du modèle de
gravité par rapport aux autres méthodes.
En effet, celui-ci possède un double avantage : (i) Il
constitue une norme de référence pertinente pour
l'évaluation des effets des AR (en prédisant quel aurait dû
être le commerce bilatéral en leur absence) ; (ii) L'introduction
de variables muettes dans ce modèle permet de quantifier directement les
créations et détournements de trafic suite à la mise en
place d'un accord. Ainsi, il nous est possible d'isoler les
caractéristiques inobservables d'un couple de pays qui peuvent
influencer son commerce bilatéral (comme le partage d'une langue
commune, de liens historiques, etc.). Cet impact était en partie
capté, dans les études précédentes (Frankel (1997),
Eichengreen et Bayoumi (1995) ou encore Foroutan et Pritchett (1993), par les
variables relatives aux AR.
Le modèle de gravité proposé dans le cadre
de ce travail s'inspire de la littérature empirique sur ce sujet.
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