Le Roman français et l' Avenir de la littérature francophone, face au Manifeste pour une littérature Monde( Télécharger le fichier original )par Mame Diarra DIOP Université Paris IV La Sorbonne - Master 1 de Lettres Modernes Appliquées 2007 |
I Des nouvelles formes de la littérature contemporaine ou tendances dominantes de celle-ci :Une grande partie des livres étalés sur les rayons des librairies et des grandes surfaces commerciales de Paris comme la Fnac ou Virgin, donnent le là les tendances littéraires dès la rentrée de Septembre. Au détour des allées et diverses sections de littérature, on trouve de plus en plus d'ouvrages dont une brochette appartenant à la catégorie Meilleures Ventes. Le réflexe du consommateur est donc de se diriger vers cette sélection plutôt que vers les oeuvres anciennes ou classiques cachées au fond de rayons poussiéreux. La littérature moderne a subi une véritable mutation dans sa forme et sa cible, d'où une nuance entre une oeuvre reconnue et une oeuvre installée. La deuxième catégorie s'attache aux auteurs des siècles passés, dont les oeuvres sont étudiées dans les programmes scolaires ou universitaires et la première, à des auteurs contemporains dont les livres sont reconnus des pairs et de la critique, mais ne sont pas encore soumis aux études académiques... Dans les années 50, on a parlé du nouveau roman. A l'école, on a lu les chansons de geste, les textes de Molière, de Corneille, les pensées des philosophes, tel Kant, Hegel ou Lacan. Nos professeurs nous ont joyeusement initié à l'essence de la littérature classique, puis contemporaine... Et de belles chronologies nous ont été lues : L'odyssée d' Ulysse du poète Homère, des biographies comme celle de Voltaire, humaniste et homme d'idées, des oeuvres intemporelles comme Anna Karenine de Tolstoï, ou Crime et Châtiment de Dostoïevski, décryptées par les étudiants du monde entier. Toutefois, la grande littérature se limite t-elle à ces grands classiques même si les intellectuels les prennent en référence dans les débats télévisés ou dans les conférences ? Et peut-on se prétendre intellectuel en ne lisant que ce qu'on trouve sur les rayons de la rentrée ? Pour être simple lecteur d'une grande maison d'édition comme Gallimard ou Grasset, il faut une érudition époustouflante, à l'instar de Raymond Queneau6(*) ou de Jean-Marie Laclavetine7(*). Par ailleurs, que sait-on des manuscrits de Tombouctou ou des parchemins de l'antiquité égyptienne ? Quels textes merveilleux enferment les papyrus marqués de savants hiéroglyphes et que nous ne saurions déchiffrer, hormis les initiés et les traducteurs ? Que savons-nous des chefs d'oeuvres de la littérature mondiale à l'heure où plus de six cent livres sont produits et éparpillés dans les libraires de l'hexagone ? Enfin, qu'est-ce qui nous garantit la qualité littéraire de ces oeuvres ? Ayant grandi au Sénégal, mon fond littéraire a été constitué d'oeuvres variées. Des aventures du Club des Cinq8(*) aux Rêveries du promeneur solitaire9(*), le voyage est enivrant... Petite, j'ai aimé lire et ceci lorsqu' Internet ne faisait point partie de ma vie, je rentrais alors de l'école pour lire jusqu'à ce que le sommeil m'emporte. Puis, en grandissant, ma soif de littérature est un peu retombée. D'autres matières plus urgentes l'ont supplanté : l'économie, la géographie, puis la philosophie et l'étude des textes fondateurs jusqu' à ce que la filière littéraire encourt le risque d'une suppression pure et simple aujourd'hui. Pourquoi enfin ? Que s'est-il passé ? Est-ce la faute à Internet ? Aux nouvelles technologies ou à nous mêmes ? Todorov a-t-il raison de dire qu'aujourd'hui, l'univers d'un écrivain est à déplorer ? Pauvre et monotone comme les arbres en automne ? Qu'est-ce qui différencie JK Rowling, auteur fantastique d'Harry Potter10(*) de Christine Angot racontant ses aventures intimes dans Rendez-vous ? Ceci a donc légitimé ce qu'on appelle l'autofiction ou l'art intime de se raconter :
A L'autofiction, phénomène éditorialDe cette tendance littéraire, on pourrait dégager trois courants : 1/ l'autofiction pureChristine Angot défend son statut d'écrivain par rapport à cette forme littéraire et contre les mauvaises langues. Avec Rendez-vous paru chez Flammarion, Christine Angot avait été annoncée comme l'évènement de la rentrée littéraire de 2006 par Les Inrockuptibles11(*), mais son livre a été détrôné par les Bienveillantes, pavé historique de 900 pages sur l' Holocauste de l' américain Jonathan Littel et couronné prix Goncourt. Toutefois, Christine Angot reste la reine de l'autofiction avec cet art fabuleux de mettre en scène sa propre vie. Gare à ceux qui la fréquentent car ils pourraient bien se retrouver transformés en personnages de ses prochains romans. En 2000, Christine avait publié le non moins nombriliste Sujet Angot12(*), s'inscrivant d'emblée dans la tendance autofictive. Dix sept livres au total pour cet auteur plutôt prolixe. Dans un genre plus autobiographique, car l'autofiction semble être une posture revendiquée, il y a le phénomène belge Amélie Nothomb. Depuis la sortie de Hygiène de l'Assassin, aux éditions Albin Michel en 1992, elle réussit tous les ans l'exploit de réunir des lecteurs fidèles au mois d'Août. Et Amélie Nothomb a véritablement du mal à ne pas se mettre en scène dans la plupart de ses romans. On peut citer : Biographie de la faim, paru en 2004, Métaphysique des Tubes en 2000, Grand prix du Roman de l'Académie Française, Le Sabotage amoureux en 1993, où elle déroule son récit à la première personne. Une internaute du forum www.guidelecture.com, écrivait en comparant Angot et Nothomb : « Qu'est ce qui fait que c'est plus agréable de lire Amélie Nothomb que Christine Angot? Avec l'une, on a un détachement et un regard plein d'humour, même sur les choses tragiques, alors que l'autre crie à l'injustice et à l'incompréhension. L'une dit : « Je ne comprends pas ce qui m'arrive », tandis que l'autre revendique son statut d'écrivain et attaque ceux qui osent le remettre en question ! ». Voilà qui résume tout l'engouement qu'il peut exister autour d'Amélie Nothomb et de Christine Angot. Et l'on n'a pas fini d'entendre parler de ces deux auteurs... On peut également citer un troisième auteur : Frédéric Beigbeder ! Il a fait un véritable carton avec 99francs paru chez Grasset en 2000. La narration, bien que déroulée par un personnage Octave Parangon, mêle autofiction et mise en scène. Beigbeder s'inspire de sa propre collaboration avec une agence de pub dont il a été viré. Et 99francs a fait l'objet d'une adaptation cinématographique grâce à son succès populaire. Depuis, l'auteur a rédigé d'autres ouvrages, comme Windows on The World13(*) en 2003, couronné Prix Interallié. Critique littéraire, chroniqueur télé et éditeur chez Flammarion14(*), constituent l'essentiel de ses activités aujourd'hui... Cette année, Frédéric Beigbeder a récidivé avec un nouveau livre au titre plus que douteux : Au secours pardon !
* 6 Romancier, dramaturge, poète, auteur de Zazie dans le Métro, 1959 OEuvres complètes, collection La Pléiade, Gallimard. * 7 Editeur, romancier, lecteur chez Gallimard. * 8 Le club des cinq, Enyd Blyton, Bibliothèque verte, Hachette Livres, 1955 * 9 Les rêveries du promeneur solitaire, Jean Jacques Rousseau, Gallimard. * 10 Harry Potter, tome 1à 6, Gallimard * 11 Magazine français d'arts et de culture. * 12 Sujet Angot, Fayard, 1998. * 13 Roman, Frédéric Beigbeder, Grasset 2003 * 14 Maison d'édition parisienne. |
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